Le fédéral va augmenter sa cible en immigration francophone en 2024
OTTAWA – Même s’il n’a jamais atteint celle actuellement en place, le fédéral s’engage à adopter une nouvelle cible en immigration francophone hors Québec dès 2024, a affirmé ce mardi le ministre Sean Fraser.
En 2003, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) a établi une cible de 4,4 % pour l’arrivée de résidents permanents d’expression française hors du Québec. Mais cette cible n’a jamais été atteinte une seule fois en 20 ans et une étude du Commissariat aux langues officielles indique que ça représente un manque de 119 656 francophones au pays.
Le ministre de l’Immigration n’a pas dit quel serait ce nouveau chiffre estimant qu’il doit atteindre l’actuelle cible avant d’en donner un précis.
« Un but sans un plan pour obtenir le but, ce n’est pas une bonne chose. C’est essentiel pour développer une nouvelle cible et une nouvelle stratégie en même temps avec la participation de la communauté francophone », a-t-il dit au cours d’un témoignage quasiment exclusivement en français.
« Ce n’est pas possible d’accueillir un plus grand nombre en général sans de nouveaux arrivants francophones » – Sean Fraser, ministre de l’Immigration
Les organismes de la francophonie canadienne demandent au fédéral d’adopter une cible de 12 % en 2024 pour ensuite augmenter à 20 % en 2036.
« Si je procède sur chaque application dans l’inventaire d’IRCC actuellement, ça ne serait pas possible cette année d’atteindre 20 %. C’est essentiel d’améliorer la qualité de promotion et de recrutement pour démontrer aux candidats francophones qu’il y a une option pour venir au Canada et rester ici. »
Les organisations francophones souhaitent qu’Ottawa adopte ces cibles pour rattraper les 20 dernières années en plus d’inclure une obligation dans le projet de loi C-13 pour recouvrir ce retard. À l’heure actuelle, le projet de loi oblige à se doter d’une politique, d’une cible et d’une stratégie en immigration francophone, mais aucune obligation et contrainte ne vient avec cela. L’actuel gouvernement et les futurs n’auraient alors aucune conséquence à manquer une fois de plus les objectifs établis.
« Avec le projet de loi, ce n’est pas juste une option, c’est essentiel pour augmenter et améliorer le nombre de nouveaux arrivants francophones », défend le ministre Fraser.
Un département pour l’immigration francophone
Les organismes demandent aussi un changement de cap à IRCC pour créer un département dédié uniquement à l’immigration francophone.
Sean Fraser ne ferme pas la porte à une telle mesure, mais veut se donner du temps pour évaluer les outils qu’il a actuellement sous la main. Il cite comme mesure le fait que son département ait augmenté au printemps les points pour les candidats francophones dans le système d’Entrée Express.
« Si je détermine qu’Entrée Express, avec la nouvelle flexibilité, a l’habileté d’accélérer l’arrivée d’un plus grand nombre de francophones, je vais utiliser cet outil. Mais, maintenant, je n’ai pas un portrait complet avec cette voie. S’il y a une autre voie qui me donne à moi et au ministère une plus grande opportunité pour accueillir un plus grand nombre, je vais choisir cet outil », tranche-t-il.
Pour ce dernier, le maintien du poids démographique des francophones hors du Québec est une question de cohésion sociale.
« Si nous voulons protéger la culture française et l’identité francophone, il faut développer une stratégie d’immigration pour les petites et les plus grandes communautés francophones. Ce n’est pas possible d’accueillir un plus grand nombre en général sans de nouveaux arrivants francophones », avance celui qui a annoncé une augmentation des cibles d’immigration générale au pays le mois dernier.
Pour l’opposition officielle, les propos de M. Fraser sont « plein de belles volontés », mais ce n’est pas sécurisant pour assurer un avenir aux francophones du pays.
« L’immigration est un outil économique, mais aussi un levier pour rétablir le poids démographique et il n’y a pas d’outils et d’impact dans cette loi-là (pour l’immigration francophone). La ministre Petitpas Taylor se plaît à dire que c’est un projet de loi qui a du mordant, mais ce sont des dents de lait », image le député conservateur Joël Godin.