
Les confidences de Vanessa Gilles sur la ligue professionnelle féminine de soccer

Ce mercredi 16 avril marque un tournant dans le soccer professionnel féminin au Canada, avec le match d’inauguration de la Super ligue du Nord qui verra s’affronter Vancouver et Calgary à la place BC. Créée notamment à l’initiative de l’ancienne joueuse internationale Diana Matheson, cette ligue professionnelle était indispensable pour l’avenir du sport au pays. Décryptage avec l’internationale canadienne Vanessa Gilles.
« On est la seule équipe dans le top 20 mondial qui n’a pas de ligue professionnelle », rappelle la joueuse franco-ontarienne Vanessa Gilles interrogée sur l’importance de la création de la SLN en entretien avec ONFR.
« Pour nous, en tant que fédération, si on veut continuer à avoir du succès, c’est impératif, c’est nécessaire. Le fait qu’on ait trois médailles aux Jeux olympiques, c’est déjà époustouflant », considère-t-elle.
Des exploits réalisés avec des équipes talentueuses, mais aussi avec des individualités inexploitées, qui n’avaient, jusqu’à aujourd’hui, que trop peu d’opportunités d’évoluer dans le monde professionnel à la sortie de l’université. En dehors de la ligue américaine (NWSL), les joueuses canadiennes, à part l’élite, étaient bien souvent obligées de se concentrer sur une carrière professionnelle dans un autre domaine, souvent celui pour lequel elles avaient étudié au postsecondaire.
« Au terme de ta carrière universitaire, si tu n’as pas un double passeport ou si tu n’es pas déjà titulaire pour l’équipe nationale du Canada – ce qui est très dur à l’âge de 18 à 22 ans, il n’y a que des rares cas de superstars comme Jesse Fleming, Ashley Lawrence ou Kadeisha Buchanan, des joueuses comme ça, qui l’ont fait – c’est quasiment impossible d’avoir une place dans une équipe professionnelle », explique l’internationale canadienne aux 51 sélections.
Donner des opportunités où il n’y en avait pas
Le Canada est passé proche de laisser filer entre les mailles de ses filets l’une des meilleures joueuses à son poste du monde, faute d’opportunités offertes aux joueuses locales. « Si je n’avais pas une double nationalité et un passeport français, je serais en train de travailler au RCMP ou quelque chose comme ça, avec mon major en communal justice. »
Et malgré cette double nationalité qui lui a ouvert les portes de l’Europe, Vanessa Gilles a dû débuter au plus bas de l’échelle sur le Vieux Continent. « Même avec un passeport français, la seule équipe où j’ai pu avoir un contrat – on a regardé partout dans le monde avec mon agent – c’était à Chypre. »
Bien consciente de ce vide à combler au pays, l’ancienne internationale Diane Matheson et ses associés ont donc réussi à mettre sur pied ce projet tant attendu dans le monde du soccer féminin canadien avec cette Super ligue du Nord qui voit le jour trois ans après l’annonce du projet.
Elle est composée pour l’heure de six équipes – Vancouver Rise FC, Calgary Wild FC, AFC Toronto, Halifax Tides FC, Montréal Roses FC et Ottawa Rapid FC – et a reçu l’appui de la légende du soccer féminin canadien Christine Sinclair en tant que conseillère et ambassadrice. Sur le terrain, des joueuses internationales comme Quinn (Vancouver), Desiree Scott (Ottawa), Emma Regan (Toronto) et Samantha Chang (Vancouver) ont rejoint le projet pour le faire grandir.
Inspirer les futures générations
« J’adore ce que font Quinn, Daisy, Emma et compagnie, parce que ce sont des joueuses de grande qualité, mais ce sont aussi des inspiratrices pour les joueuses dans leurs équipes », assure Vanessa Gilles
Et de poursuivre : « Cette ligue va ouvrir les portes à tellement de joueuses, ça va agrandir notre bassin de talent, et ça va inspirer la prochaine génération, ce qui est impératif aussi, surtout quand tu vois la PWHL (hockey) ou la WNBA (basket) avec le Tempo. Ces ligues vont encourager des jeunes à rentrer dans leurs sports. Ça leur montre que c’est une carrière envisageable, que c’est une option à poursuivre à long terme, ce qu’on n’a pas eu avec le foot jusqu’à maintenant. »
Actuellement en France avec l’Olympique lyonnais, Gilles a émis le désir de rester jouer en Europe, où le niveau demeure logiquement bien supérieur à la toute nouvelle ligue canadienne qui va devoir grandir au fil des années pour devenir de plus en plus attractive sportivement et financièrement. Malgré tout, elle ne dit pas non à la possibilité d’y jouer en fin de carrière.
« Dans quelques années, pourquoi pas, je ne fermerai jamais la porte à un retour à la maison. »
L’excitation est palpable dans le monde du soccer au Canada. La ligue part sur de bonnes bases. Vanessa Gilles a même précisé que cette première année est, selon elle, bien plus avancée que la première saison de la NWSL en 2013.
« On ne s’en rende peut-être pas compte, mais la construction, les standards qui sont mis en place, l’investissement des clubs, franchement, c’est incroyable », conclut-elle.