Les conservateurs d’accord avec l’utilisation de la clause dérogatoire de façon préventive

Le chef du Parti conservateur Pierre Poilievre. Crédit image: Stéphane Bédard
Le chef du Parti conservateur Pierre Poilievre. Crédit image: Stéphane Bédard

OTTAWA – L’utilisation de la clause dérogatoire par les provinces de manière préventive, comme l’avait fait Doug Ford à l’automne dernier dans un conflit syndical, est un outil qui « fait partie de la Constitution », mais qui « n’est pas un enjeu », selon le Parti conservateur. La formation politique fédérale se dit toutefois en faveur de son utilisation comme elle a été faite par le Québec et l’Ontario.

Hier, les troupes de Pierre Poilievre ont appuyé la motion du Bloc québécois qui affirmait « que la Chambre (des Communes) rappelle au gouvernement qu’il revient au Québec et aux provinces de décider seuls de l’utilisation de la disposition de dérogation ». Elle a toutefois été défaite alors que les libéraux et néo-démocrates ont voté contre.

Questionnés à ce sujet ce matin, les conservateurs ont pointé du doigt le « débat inutile » du Bloc québécois, qui avait utilisé cette motion dans le cadre d’une journée de l’opposition. Le lieutenant du Québec pour les conservateurs, Pierre Paul-Hus, a répondu favorablement lorsqu’on lui a demandé si son parti était en faveur de l’utiliser de façon préventive.

« Notre position est que la clause existe et qu’elle est dans la Constitution. Pour nous, il n’ y a pas d’enjeu », a-t-il brièvement expliqué.

L’effet Doug Ford

Le débat autour de la clause dérogatoire a véritablement jailli à l’automne dernier quand le gouvernement Ford a sorti cet outil pour mettre fin à une grève du personnel scolaire. Face à la colère des syndicats, de tous les horizons, l’Ontario avait finalement reculé en retirant son projet de loi spéciale qui forçait le retour au travail, en utilisant notamment la clause dérogatoire.

Premier ministre de l'Ontario, Doug Ford
Doug Ford, premier ministre de l’Ontario. Archives ONFR+

Dans les jours suivant ce geste de Doug Ford, Justin Trudeau était sorti de ses gonds contre le premier ministre ontarien. Il en avait profité pour écorcher Pierre Poilievre, arguant ne pas avoir entendu « un murmure du soi-disant combattant de la liberté maintenant qu’un gouvernement bloque préventivement les droits et libertés des Canadiens ».

« On a entendu le chef conservateur pendant des mois parler de libertés pour les Canadiens (…). Quand va-t-il condamner l’utilisation de la disposition de dérogation de manière préventive », lui avait-il demandé lors d’une période des questions en novembre dernier.

« Qu’elle soit en amont ou en aval, elle existe. Elle fait partie de la Constitution » – Pierre Paul-Hus

Plus récemment, Justin Trudeau avait affirmé en entrevue avec La Presse que son gouvernement irait voir la Cour suprême pour qu’elle se penche sur la légalité d’invoquer cette clause avant même qu’un débat juridique se fasse comme l’affirmait le ministre de la Justice David Lametti. Ce dernier soulignait que l’utiliser de façon préventive « réduisait le débat politique sur l’enjeu et coupait aussi le contrôle judiciaire ».

« Qu’elle soit en amont ou en aval, elle existe. Je veux dire qu’elle fait partie de la Constitution », a contrecarré M. Paul-Hus mardi matin.

Le gouvernement Trudeau compte intervenir dans le cadre d’une contestation de la Loi 21 au Québec, qui interdit notamment le port de signes religieux par des employés de l’État. Durant la course à la chefferie des conservateurs, Pierre Poilievre se disait contre la Loi 21, mais affirmait ne pas vouloir intervenir dans le cadre d’une contestation judiciaire. M. Paul-Huss a dit que les conservateurs n’allaient « pas nécessairement » appuyer un tel recours devant la plus haute Cour du pays.

Aux côtés de M. Paul-Hus, son collègue Jasraj Singh Hallan a simplement ajouté avoir toujours « parlé contre la Loi 21 dans les premiers mois après mon élection », lui qui est d’origine sikhe et porte le turban. Les deux politiciens ont quitté la pièce après quelques questions des journalistes, visiblement agacés que les questions ne portent pas sur le sujet principal de la conférence, le coût de la vie.