Le chef libéral Mark Carney sourit en prononçant son discours de victoire lors de l'annonce de la direction du Parti libéral à Ottawa. Crédit image: LA PRESSE CANADIENNE/Adrian Wyld

OTTAWA – Le résultat était prévisible depuis plusieurs semaines et le tout a été officialisé dimanche soir. Mark Carney a été élu chef du Parti libéral du Canada à l’issue d’une course à la chefferie de six semaines, pour élire le remplaçant de Justin Trudeau.

Avec 85,9 % des voix, soit près de 131 000 votes, il bat ainsi l’ex vice-première ministre Chrystia Freeland (2e place avec 8% du vote), l’ex-ministre Karina Gould (3e place avec 3,2% du vote) et l’ex-député Frank Baylis (4e avec 3% du vote). C’est 150 000 libéraux qui ont voté dans le cadre de cette course à la chefferie avec près de 400 000 au total qui s’étaient inscrits pour voter.

Mark Carney deviendra donc prochainement aussi le premier ministre en remplacement de Justin Trudeau.

« Je tiens à vous remercier, chers libéraux, de m’avoir accordé le plus grand honneur qui soit : celui de servir comme votre nouveau chef », a lancé le gagnant dans son discours de victoire à Ottawa devant les sympathisants libéraux.

Alors que l’ancien premier ministre Jean Chrétien, quelques instants auparavant, suggérait dans un discours de taxer toute l’énergie destinée aux États-Unis, l’allocution de victoire de Mark Carney s’est aussi alignée à la réalité tarifaire qui frappe le Canada à l’heure actuelle, et « qui demandera du changement, du grand changement », a-t-il soutenu.

« Mais je sais que les Canadiens et Canadiennes sont prêts. Ils me le disent à travers le pays. Les gens veulent du changement parce qu’ils sont inquiets. Ils s’inquiètent du coût de la vie et de la crise du logement. Ils s’inquiètent pour l’avenir des jeunes. Et ils s’inquiètent de l’avenir du Canada, face aux menaces du président Trump et à un monde plus divisé et dangereux », a-t-il partagé.

« Aux États-Unis, on ne reconnaît pas les différences », a-t-il poursuivi.

« Et il n’y aura jamais de droits à la langue française. La joie de vivre, la culture, et la langue française font partie de notre identité. Il faut les protéger, il faut les promouvoir. On ne les échangera jamais, jamais, pour n’importe quel accord commercial », a avancé le nouveau leader du Parti libéral, dans son discours, qui s’est conclu avec un « Vive le Canada » à la Jean Chrétien.

Qui est Mark Carney?

Âgé de 59 ans et né aux Territoires du Nord-Ouest, il a été un haut fonctionnaire au ministère des Finances au début des années 2000 avant de devenir gouverneur de la Banque du Canada de 2008 à 2013, ayant été aux premières loges de la crise financière de 2008. Suite à son mandat au Canada, il est nommé gouverneur de la Banque d’Angleterre en 2013 jusqu’en 2019.

Il revient par la suite en Amérique du Nord où il conseille notamment Justin Trudeau économiquement, en plus d’occuper divers rôles comme celui de vice-président de Brookfield Asset Management, un important fonds financier canadien, ou encore président du conseil d’administration de Bloomberg.

Avec sa victoire, Mark Carney devient le 11e chef de l’histoire du Parti libéral du Canada. Photo : Andrej Ivanov Stringer Getty Images

Sur place, le député de Nickel Belt dans le Nord de l’Ontario, Marc Serré, se réjouit de cette victoire, lui qui avait mis son soutien derrière Mark Carney soulignant que le bagage économique de ce dernier « sera important » pour la région.

« Dans le Nord de l’Ontario, il y a une abondance de minéraux critiques dont le monde a besoin. Lorsqu’on regarde l’optimisme des gens du Nord de l’Ontario pour l’économie, avoir quelqu’un comme Mark Carney qui a l’expérience pour regarder à des marchés mondiaux, ça va être important pour développer notre économie et garder nos emplois dans le Nord », affirme-t-il en entrevue.

Des élections déclenchées cette semaine?

Quand Justin Trudeau quittera-t-il officiellement son poste de premier ministre pour céder sa place à Mark Carney? L’échéance reste pour le moment incertaine. M. Trudeau a affirmé plus tôt cette semaine qu’il ne comptait pas rester en poste de façon intérimaire, indiquant en anglais qu’il attend avec impatience « une transition vers mon successeur dûment élu dans les prochains jours ou la semaine à venir ».

Les plans de M. Trudeau pourraient s’éclaircir avec le déclenchement d’élections dans les prochains jours. Le Parlement doit en principe reprendre le 24 mars et les partis d’opposition ont déjà signalé leur intention de faire tomber le gouvernement à la première occasion. Or, comme Mark Carney n’a pas de siège au Parlement, des élections anticipées pourraient être déclenchées avant, ce qui amènerait probablement le pays aux urnes entre le milieu et la fin du mois d’avril.

Lors du débat en français dans le cadre de la course à la succession de Justin Trudeau il y a trois semaines, Mark Carney avait soulevé la possibilité de déclencher un scrutin dès la mi-mars.

« Il y aurait des circonstances où l’on pourrait rappeler le Parlement. On va faire la meilleure chose pour le Canada », avait-il affirmé le 24 février dernier après le débat, en réponse aux questions des journalistes.

« Mais, il est plus probable que la meilleure chose pour le Canada est que le gouvernement se dote d’un mandat fort et clair plus tôt pour pouvoir prendre les actions nécessaires pour construire ce pays », soulignait l’ex-banquier.

Selon un sondage de la firme Léger en date du 5 mars, les libéraux sous Mark Carney obtiendraient 33 % des intentions de vote au pays contre 41 % pour les conservateurs de Pierre Poilievre et 12 % pour le NPD. Le 24 février dernier, un premier sondage Léger montrait que le dirigeant du milieu financier pourrait récolter 40 % des voix pour les libéraux contre 38 % pour les conservateurs.