Un projet de loi pour entériner le Programme de contestation judiciaire

Archives ONFR+

OTTAWA – Le Programme de contestation judiciaire pourrait devenir permanent et être entériné dans la Loi du Patrimoine canadien, selon le projet de loi d’un député libéral.

Le projet de loi C-316, du député libéral de la Colombie-Britannique Ron McKinnon, assurerait que le ministre du Patrimoine canadien « a pour tâche de maintenir le Programme de contestation judiciaire ».

Ce programme est considéré comme très important pour les francophones hors Québec, car il permet de financer des causes touchant les droits des minorités linguistiques. Le Programme de contestation judiciaire (PCJ) a été créé pour offrir un appui financier aux individus et groupes pour qu’ils présentent devant les tribunaux des causes liées à certains droits constitutionnels en matière de langues officielles et de droits de la personne.

Un soutien financier via le PCJ a d’ailleurs été apporté dans la célèbre cause judiciaire de SOS Montfort qui aura permis aux Franco-ontariens de conserver cet hôpital entièrement francophone. C’est aussi via ce programme qu’a été financée la cause Mahé VS Alberta, dont la Cour suprême a reconnu le droit des minorités linguistiques de gérer des conseils scolaires.

Rétabli en 2017 après avoir été supprimé par le gouvernement de Stephen Harper en 2006, le PCJ est géré et administré par l’Université d’Ottawa où les décisions relatives au financement sont prises par deux comités d’experts indépendants. Le programme a souvent été sous le feu des critiques ces dernières années notamment pour son manque de transparence, car les bénéficiaires du PCJ demeurent anonymes. Toutefois, dans son rapport annuel, le PCJ décrit brièvement certaines causes qu’elle finance avec l’accord des bénéficiaires.

L’Université d’Ottawa. Archives ONFR+

Le PCJ « utilisé par des groupes wokes »

Le projet de loi a été débattu en seconde lecture hier à la Chambre des communes. La députée néo-démocrate Heather McPherson a affirmé que sa formation politique appuierait le projet de loi. Le Bloc québécois s’est dit en faveur de pérenniser le PCJ en l’incluant dans la Loi, mais critique « l’opacité de sa gestion, le processus décisionnel dans la détermination des causes et des organismes qui sont financés, a affirmé la députée Andréanne Larouche lors des débats mercredi soir ».

Le Parti conservateur entend s’opposer au projet de loi, dénonçant aussi le manque de transparence du PCJ. La députée Rachael Thomas pointe que les biographies des membres des deux panels indépendants donnent l’impression que « c’est le programme électoral du Parti libéral qui a été collé sous le nom de ces gens ». Selon cette dernière, ce programme est « souvent utilisé par des groupes wokes pour pousser un agenda woke ».

« Ce programme est absolument ridicule. Il manque de transparence, il manque de responsabilité et il manque d’indépendance », a critiqué la députée albertaine.

Des controverses

En 2020, le chef du Bloc québécois Yves-François Blanchet avait critiqué le PCJ, car il avait servi à financer une contestation de la Loi 21 sur la laïcité de l’État. Quelques mois plus tard, il avait demandé à ce qu’on retire la gérance du programme à l’Université d’Ottawa, « disqualifiée parce qu’elle a un biais anti-français, anti-Québec, anti-laïcité ». Il faisait référence aux épisodes du « mot en n » avec la professeure Verushka Lieutenant-Duval, les propos répétés du professeur Amir Attaran, qui avait qualifié le Québec de « raciste » et le premier ministre François Legault de « suprémaciste blanc » et un rapport faisant état de francophobie.

Le chef du Bloc Québécois Yves-François Blanchet a souvent critiqué le PCJ. Archives ONFR+.

Les controverses autour du PCJ inquiétaient la FCFA et son président Jean Johnson qui craignaient qu’elles ne « mettent à risque un programme qui est d’une importance capitale pour les droits linguistiques des communautés francophones et acadiennes ».

Il y a quelques semaines lors de l’étude du projet de Loi C-13, visant à moderniser la Loi sur les langues officielles, le Bloc québécois a tenté d’ajouter des amendements qui auraient obligé dans la majorité des cas, la divulgation des personnes et groupes ainsi que la nature des causes recevant de l’argent de l’organisme. L’amendement appuyé aussi par les conservateurs avait toutefois été défait par les députés libéraux et la néo-démocrate Niki Ashton. Le PCJ est aussi inclus dans le projet de loi C-13, mais seulement pour le volet attaché aux langues officielles.

Le budget de 2023 propose de verser au ministère du Patrimoine canadien un financement de 24,5 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2023-2024 pour le PCJ.