Le rire franco-ontarien aux deux rives

Évelyne Roy-Molgat et Jonathan Dion. Gracieuseté pour les deux images.
Évelyne Roy-Molgat et Jonathan Dion. Gracieuseté pour les deux images.

L’humour franco-ontarien, ça existe! En pleine croissance depuis quelques années, rien n’arrête les nouveaux talents de la scène à la conquête des sourires des deux côtés de la rivière des Outaouais. ONFR+ a discuté de ce renouveau artistique avec Jonathan Dion et Évelyne Roy-Molgat, deux figures de la relève en spectacle samedi 20h au bar Le Troquet à Gatineau.

Jeune humoriste de 26 ans, Jonathan Dion a grandi dans la municipalité bilingue de Clarence Creek dans l’Est ontarien. « J’ai commencé l’humour par l’improvisation en 7e – 8e année. J’en ai fait tout mon secondaire et à l’université. C’est ce qui m’a poussé à faire du stand-up lors des opens mics bilingues », raconte-t-il.

Je viens de l’Ontario, mais je ne parle pas anglais!

Évelyne Roy-Molgat

« Je viens de l’Ontario, mais je ne parle pas anglais! », se présente Évelyne Roy-Molgat, 20 ans, originaire de L’Orignal, un petit village francophone doté d’une marina bordant la rivière des Outaouais.

Jonathan Dion en spectacle. Crédit image : NykProduction

Enfin de l’humour franco en Ontario

Alors que les grandes figures du rire franco-ontarien comme Patrick Groulx ont réalisé leur carrière au Québec, la relève a désormais des opportunités pour se faire valoir dans sa propre province.

« Il y a 4-5 ans, la Station 4 saisons a commencé à ouvrir dans l’Est ontarien et la région de Hammond. C’est là qu’ont été les premières opportunités de faire du stand-up dans notre région », raconte Jonathan Dion. « Maintenant que les gens de la région savent qu’on existe, on fait plus de festivals et d’événements corporatifs. Je suis formateur au concours LOL dans les écoles de l’Ontario qui crée de futurs humoristes un peu partout dans la province. »

Évelyne Roy-Molgat a d’ailleurs commencé l’humour avec le concours LOL alors qu’elle avait 14 ans.

« J’ai tellement aimé que je m’inscrivais chaque année! C’était ma seule opportunité pour faire de l’humour tellement j’étais jeune », se souvient-elle. « D’habitude dans les bars tu joues devant 30 ou peut-être 60 personnes. Au concours tu en as 500-800. C’était mon premier gros show à vie. Ça a bien été, mais en plein numéro j’ai eu un blanc. J’avais le micro dans les mains et sans m’en rendre compte j’ai laissé sortir un ‘shit’ que tout le monde a entendu. »

Évelyne Roy-Molgat aux 100 génies. Crédit image : Vincent Descoteaux

Rire vert rire bleu

Bien que les opportunités soient de plus en plus importantes en Ontario, Jonathan et Évelyne ne se privent pas d’aller se faire valoir en spectacle au Québec.

« Il y a toujours des gens qui sont bien surpris d’apprendre qu’on fait de l’humour en français, qu’on est originaire de l’Ontario et qu’en plus on fait des spectacles d’humour en français en Ontario », lance Jonathan Dion en entrevue avec ONFR+.

Il y a toujours des gens surpris d’apprendre qu’on fait des spectacles d’humour en français en Ontario!

Jonathan Dion

Habitué de causer la surprise, le professionnel du rire explique que l’humour devant le public québécois n’est pas le même que celui face aux Franco-Ontariens. « Il y a beaucoup plus d’humour de référence au Québec qu’on ne peut pas faire en Ontario que ce soit sur des émissions de télé ou la politique. Les histoires comme celles que l’on entend sur la construction à Montréal, on a pas nécessairement ça dans notre coin », explique-t-il.

De son côté, Évelyne Roy-Molgat a déménagé à Montréal à l’âge de 18 ans pour se concentrer pleinement sur sa carrière humoristique, mais la pandémie de COVID-19 lui a fait changer ses plans. Active sur la scène régionale, elle adore jouer devant son public original.

« J’ai joué récemment à Hawkesbury et le public m’aimait dès le moment que j’ai affirmé être Franco-Ontarienne. Les gens connaissent toutes les références humoristiques dont je parle », se réjouit-elle.

Après avoir beaucoup joué dans la métropole québécoise, Évelyne profite bien des opportunités que lui offre l’Ontario français. « À Montréal, le bassin d’humoriste est tellement grand que c’est difficile de faire sa place, mais en Ontario on est tellement pas beaucoup que tout le monde se connaît et c’est plus facile », explique-t-elle.

« Il y a plus de shows d’humour et de demande en particulier dans les écoles francophones où ils veulent des artistes pour parler aux jeunes. Quand quelqu’un a besoin d’une humoriste en Ontario, mon nom sort », renchérit-elle.

 Évelyne Roy-Molgat. Crédit image : Émilie Lapointe

Phoenix de la pandémie

Il va sans dire que la pandémie n’aide en rien les jeunes artistes en début de carrière. Pour Jonathan et Évelyne, les deux années ont été une période de grande remise en question. Tant bien que mal, les deux amuseurs publics se sont adaptés en s’équipant de matériel pour faire des formations ainsi que des spectacles en ligne.

« Quand on en revient plus fort et on continue de faire des spectacles suite à la COVID-19, ça prouve qu’on a vraiment la passion et qu’on est à la bonne place », affirme Jonathan Dion.

Pour sa part, Évelyne Roy-Molgat a une pensée pour son copain, également humoriste, qui l’a épaulé et gardé motivée durant la phase pandémique. Elle a pu en profiter pour écrire bon nombre de nouvelles blagues qu’elle compte bien lancer durant ses 30 minutes samedi.

« J’ai vraiment hâte! C’est un bon challenge pour un humoriste (…)J’aime beaucoup parler au public, mais si dans une soirée je n’ai que 10 minutes, je n’ai pas le temps », lance-t-elle.

Jonathan Dion se prépare pour une demi-heure de nouveaux matériels. Alors qu’il se prépare à de nouveaux spectacles prochainement, dont un à North Bay, cet été, il a hâte de pouvoir les utiliser devant le public.

« Tester des blagues c’est comme se lancer dans un filet sans savoir s’il va tenir. C’est se lancer dans le vide. Il faut l’assumer jusqu’au bout. Si une blague ne fonctionne pas bien, il faut trouver pourquoi et retravailler le processus d’écriture de la joke », explique-t-il.

« C’est sûr que c’est stressant, mais l’improvisation m’a toujours aidé pour rattraper un gag. Il ne faut pas se démoraliser, car ça arrive ces choses-là », lance-t-il en guise de conclusion.

Jonathan Dion. Crédit image : Elou Photographie