Temiskaming Shores : la seule usine de raffinerie de cobalt nord-américaine a besoin de 60 M$ pour terminer sa construction
TEMISKAMING SHORES – Le projet d’expansion de la seule usine de raffinerie de cobalt en Amérique du Nord aurait besoin de 60 millions de dollars pour terminer la construction. L’entreprise ontarienne Electra Battery Materials souhaite obtenir du financement auprès des deux paliers gouvernementaux et des acteurs de l’industrie afin de mener à terme le projet qui pourrait engendrer de gros revenus pour la région.
La veille de son assemblée annuelle des actionnaires qui s’est tenue cette semaine, l’entreprise basée à Toronto a fait paraître un communiqué dans lequel on pouvait lire qu’« il reste encore beaucoup à faire pour compléter et mettre en service l’usine d’extraction de solvants et le circuit de cristallisation ».
Depuis juin 2021, Electra rénove et agrandit une raffinerie existante située en périphérie Temiskaming Shores, pour en faire une usine de sulfate de cobalt. Une fois les travaux complétés, la raffinerie aura la capacité de produire 6500 tonnes de sulfates par an et suffisamment de cobalt pour alimenter 1,5 million de véhicules électriques par année.
« Le complexe de raffinerie d’Electra pourrait être le premier en Amérique du Nord à intégrer la production de minéraux critiques, y compris le cobalt et le sulfate de nickel, nécessaire pour la chaîne d’approvisionnement en batteries de véhicules électriques », affirme le président et directeur général (PDG), Trent Mell.
L’entreprise a annoncé qu’il manquerait un montant supplémentaire de 55,7 à 62 millions de dollars américains est nécessaire pour terminer la construction. L’usine pourrait continuer d’ici là son processus de recyclage de batteries, environ une tonne par jour y est produite en ce moment.
Le Montréalais d’origine, explique que le projet ayant commencé au moment de la pandémie de, le contexte n’était pas favorable.
« On a souffert la même pression que tout le monde, l’inflation, ce qui a causé une pause dans notre projet », confie-t-il.
Une somme de 60 millions de dollars américains a déjà été investie dans le projet depuis le début des travaux.
Plus de fonds pour le Sud?
Le ministère des richesses naturelles et des forêts de l’Ontario s’est engagé à fournir 5 millions de dollars via la Société de gestion du Fonds du patrimoine du Nord de l’Ontario, mais la somme reste insuffisante pour terminer le projet selon le chef d’entreprise francophone.
M. Mell indique avoir plus d’espoir en une généreuse contribution fédérale. Ce dernier dit avoir déposé une demande pour du financement dans le cadre du Fonds stratégique pour l’innovation du gouvernement fédéral, mais qu’il est encore trop tôt dans le processus pour savoir la somme qui pourrait en résulter.
Le député provincial de Timiskaming-Cochrane et leader parlementaire de l’opposition officielle, John Vanthof, se dit étonné de ne pas voir plus d’argent posé sur la table par Toronto.
« On a beaucoup entendu que le Nord jouerait un rôle important dans la révolution électrique et cette usine serait qualifiée pour ça », explique-t-il en entrevue avec ONFR.
Il cite l’exemple de l’annonce en avril dernier d’un financement de 500 millions de dollars de la part du gouvernement Ford et de 700 millions de dollars de la part d’Ottawa dans le projet de construction d’une usine de batteries pour véhicules électriques de Volkswagen à St.Thomas, dans le sud-ouest de la province.
« C’est correct, on a voté pour ça, mais on se demande pourquoi le gouvernement ne souhaite pas autant s’impliquer dans l’autre dossier », ajoute-t-il.
Selon le néo-démocrate, il faudrait chercher des fonds ailleurs que dans le gouvernement dans le secteur privé, une piste étudiée par le PDG d’Electra qui a un contrat avec le géant coréen de la fabrication de batteries pour véhicules électriques, LG Energy Solution, pour la production de 1000 tonnes de sulfates de cobalts pour 2024.
« On va tenter de tirer un investissement avec le prochain contrat pour tenter d’avancer nos plans, espère-t-il. Il faut investir dans les entreprises canadiennes, c’est un dossier qui peut durer 100 ans et donc être un bon investissement. »
Des mises à pied
Le manque de financement a eu des conséquences sur le nombre d’employés, de 40 en avril, ils sont maintenant 9 à travailler dans la production de l’usine.
« On a dû couper des postes à la raffinerie jusqu’à ce qu’on puisse reprendre la construction », lance Trent Mell en indiquant qu’il est optimiste sur la possibilité de récupérer les travailleurs concernés par ces compressions. Le président francophone dit être en contact étroit avec des acteurs financiers privés.
« Nous sommes encouragés par les développements récents sur une solution de financement plus large pour terminer la construction et la mise en service de la raffinerie, déclare-t-il. Il y a beaucoup d’argent disponible aux États-Unis. »
John Vanthof est plus pessimiste et pense que l’usine pourrait rapporter à la région, mais son ouverture lui semble de plus en plus lointaine.
« Nous étions tous très impatients à l’idée de l’ouverture de cette usine, mais ça fait plusieurs fois qu’on est déçus », se désole-t-il.
De son côté, le maire de Temiskaming Shores, Jeff Laferriere, dit que les centaines d’employés qui pourraient travailler à l’usine pourront générer des revenus. Bien qu’ils ne soient pas très nombreux, les séjours des contractuels et responsables de l’entreprise contribuent au développement de la ville.
« N’importe quel investissement est un bon investissement que ce soit dans la ville ou aux alentours », avance-t-il.
Concernant l’avancée de l’expansion, l’ingénierie est prête à 99% tandis que l’achat de matériel est à 90 %. Il reste 12 mois de construction pour lesquels 120 employés seront nécessaires.
ONFR a tenté de contacter le ministère des richesses naturelles et des forêts de l’Ontario, une requête sans réponse au moment d’écrire ces lignes.