Fabien Hébert, président de l'AFO, évoque les dossiers francophones brûlants de la rentrée parlementaire ontarienne. Crédit image: Rudy Chabannes

[ENTREVUE EXPRESS]

QUI?

Fabien Hébert, président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), organisme qui lutte pour les droits des francophones.

LE CONTEXTE :

En ce 25 septembre, Jour des Franco-Ontariens, c’est également la rentrée parlementaire à l’Assemblée législative de l’Ontario. M. Hébert nous rappelle les dossiers francophones brûlants qui seront sur les tablettes de Queen’s Park, avec notamment l’éducation, le postsecondaire et la santé. Il évoque en outre les nouvelles négociations du financement fédéral pour les organismes francophones de l’Ontario.

L’ENJEU :

Le 3 juillet dernier, le gouvernement ontarien a annoncé qu’il ne financerait pas l’Université de Sudbury, un revers difficile pour la communauté francophone qui l’attendait pour desservir le Nord de l’Ontario. L’AFO a par la suite déposé une plainte auprès de l’ombudsman contre le ministère des Collèges et Universités suite au refus de financement de l’Université de Sudbury.

« Peut-on affirmer que l’Université de Sudbury sera le sujet le plus attendu de la rentrée parlementaire côté francophones?

Nous avons été très surpris en début d’été avec cette décision prise par le gouvernement ontarien, car on nous avait toujours laissé entendre dans les discussions que le projet était prometteur et répondait à la demande. La communauté francophone n’a plus confiance en l’Université laurentienne et a besoin d’une institution universitaire indépendante dans le Moyen Nord.

Nous avons un plan B et un plan C, et n’avons pas fini d’être actifs dans le dossier. L’AFO a déjà invité les gens à déposer des plaintes auprès de l’Ombudsman en réponse à ce refus, car on considère qu’il y avait des obligations relatives à la Loi sur les services en français. Pour nous, c’est juste la première étape qui va nous amener à avoir gain de cause.

Sentez-vous qu’il pourrait y avoir un élément déterminant favorable à l’ouverture de cette troisième université entièrement francophone?

Absolument, car même si le gouvernement a fait la sourde oreille cet été, on considère qu’il y a une ouverture possible. En ce Jour des Franco-Ontariens, ce 25 septembre, on va initier des rencontres et des discussions avec des parlementaires. Nous en sommes seulement aux premières étapes de notre plan et empruntons encore la route diplomatique. On veut avoir une meilleure idée de ce qui a motivé leur décision, ce qui nous permettra de faire des contre-propositions avisées.

Quels sont les autres sujets majeurs qui vont occuper les prochains mois sur les dossiers francophones?

La priorité de l’AFO pour la rentrée, c’est la santé. On a déposé des mémoires à Santé Ontario, au ministère de la Santé et au ministère des Soins de longue durée, donc on va continuer en ce sens. Le gouvernement a déjà lancé un processus de révision pour les entités de planification. On a déjà rencontré la firme qui s’occupe de la consultation pour les entités, auprès de laquelle on va déposer un mémoire également.

Parmi nos objectifs : réaligner la lentille francophone en santé. On sent que la santé pour les francophones n’est pas une priorité alors que ça devrait l’être. Elle doit être adaptée culturellement et linguistiquement. C’est ce qu’on veut transmettre comme message. L’étude pour les entités de planification doit être déposée à la mi-novembre, et ça sera un gros sujet pour la communauté. L’AFO a d’ailleurs procédé à une embauche dédiée au dossier santé afin, entre autres, de procéder à un recensement, faire le tour des agences de santé pour parler des défis de l’accès des services de santé en français.

Vous en parliez plus tôt, l’éducation est aussi au centre des défis…

Oui et on s’est également doté d’une nouvelle ressource en éducation postsecondaire qui travaille à temps plein, incluant l’Université de Sudbury, mais pas uniquement. On a besoin de développer des stratégies pour s’assurer que nos jeunes francophones poursuivent leurs études en français au postsecondaire. On sait qu’on perd beaucoup d’étudiants au profit des programmes anglophones lorsqu’ils sortent du secondaire. Il y a un vrai travail à faire auprès des écoles secondaires et des systèmes d’orientation pour donner la bonne information des programmes offerts dans leur langue à des élèves qui souvent n’étaient pas au courant qu’une équivalence en français était accessible.

Vous évoquiez également un gros projet pour les organismes francophones à venir cet automne?

Au niveau fédéral, un Plan d’action aux langues officielles a été annoncé. C’est un financement global et nous négocions la part que touchera l’Ontario. L’Ontario représente 53 % de la communauté francophone hors Québec. 33 % des organismes financés par Patrimoine Canada sont en Ontario et, malgré tout, on ne reçoit que 17 % de l’enveloppe budgétaire fédérale. Certains organismes francophones sont en train de mourir de faim, car ils ne reçoivent pas de financement.

L’Ontario a été délaissé par Patrimoine Canada dans la dernière décennie et les deux derniers plans d’action, qui a investi des sommes énormes dans d’autres provinces. C’est au tour de l’Ontario d’avoir sa part. Les organismes à l’extérieur de l’Ontario reçoivent en moyenne 105 000 $ contre 52 000 en Ontario. C’est un autre gros dossier et les annonces de financements sont prévues pour la fin d’année. »