Université de Sudbury : l’AFO demande au gouvernement de respecter ses propres lois

Fabien Hébert, président de l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario, attend toujours une rencontre avec la ministre Dunlop. Crédit image: Rudy Chabannes

SUDBURY – Les relations se corsent entre le ministère des Collèges et Universités et l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) qui a déposé une plainte auprès de l’ombudsman contre le gouvernement suite au refus de financement de l’Université de Sudbury.

« Le gouvernement doit respecter ses propres lois », tance Fabien Hébert au micro d’ONFR+, pointant une « décision hâtive sans avoir considéré tous les aspects ». Le président critique le refus du ministère des Collèges et Universités de financer l’Université de Sudbury. Inacceptable, selon lui.

Dans la foulée du couperet ministériel, l’AFO avait sollicité une rencontre en urgence avec le ministère pour trouver une sortie de secours, en vain. Une plainte auprès de l’ombudsman s’est donc imposée d’elle-même en début de semaine dernière.

« On veut démontrer qu’on est sérieux et qu’on ne prend pas ça à la légère », justifie M. Hébert. « On a fait l’analyse de beaucoup de choses, y compris les retombées économiques. C’est clair qu’il y a du positif dans tout le processus associé à octroyer du financement à l’Université de Sudbury. On a fait nos devoirs. Le gouvernement doit faire les siens de façon adéquate. »

À l’encontre de la Loi sur les services en français?

Au cœur de la plainte, l’argument de l’AFO repose sur le fait que le gouvernement tournerait le dos à la Loi sur les services en français (LSF). Désignée partiellement pour offrir des programmes de premier cycle en français, l’institution a en effet une obligation légale à fournir des services dans cette langue, ce qu’elle ne fait plus depuis deux ans, engagée dans une transformation en université par et pour les francophones.

En refusant de financer l’établissement universitaire, le gouvernement aurait donc contrevenu à la loi. « Le gouvernement a fait fit de cette obligation. Quand on prend une décision, on doit s’assurer que toutes les lois sont respectées. Le ministère n’a pas fait mention d’une telle obligation dans son refus », déplore le président de l’AFO, rappelant au passage les autres bénéfices que rapporterait une telle université.

Le Centre de leadership et d’évaluation (CLÉ) estimait dans une précédente étude que l’impact économique global de l’Université de Sudbury s’élèverait à près de 90 millions de dollars pour le Moyen-Nord de l’Ontario en 2028-2029.

Et maintenant? La plainte va poursuivre son chemin au sein du bureau de l’ombudsman. Via son commissaire aux services en français, l’ombudsman doit examiner toute plainte au sujet des services en français fournis par ou au nom d’agences gouvernementales et autres institutions de la législature, incluant les ministères.

Plainte auprès du bureau de l’ombudsman

En dépit de sa désignation, l’Université de Sudbury ne figure toutefois pas dans la liste des organismes surveillés par l’ombudsman sur son site web. Étant donné la confidentialité des plaintes, ce dernier n’a ni confirmé, ni infirmé, ni commenté qu’une telle démarche avait été entreprise.

La plupart des plaintes sont réglées en deux semaines, mais l’ombudsman a le pouvoir de ne pas traiter une plainte si un autre règlement existe. Fabien Hébert croit, à ce titre, que tout n’est pas perdu et qu’il est encore temps pour le gouvernement de rétablir le dialogue.

« On visait l’ouverture des programmes en septembre 2025. On espère encore être capable de respecter cet échéancier. Ça demande une ouverture de la part du gouvernement. On doit s’asseoir et avoir ce dialogue qu’on a pas été capable d’avoir jusque-là. Il y a encore des opportunités de discussion pour voir comment on peut satisfaire les besoins de la communauté. »

Une troisième université risque d’« exacerber ce problème »

De son côté le ministère a plutôt choisi une autre option en s’appuyant sur les deux universités francophones existantes – l’Université de l’Ontario français (UOF) inaugurée en 2021 et Hearst, autonome la même année – ainsi que sur La Cité, l’Université Laurentienne et le Collège Boréal pour compenser l’absence d’offre de programmes de l’Université de Sudbury.

Évitant d’aborder la question de droit sur la LSF, le ministère évoque plutôt, dans un échange de courriel, le faible taux d’inscription dans les universités actuelles pour légitimer sa décision.

« L’UOF et l’Université de Hearst comptent un nombre d’inscriptions d’étudiants canadiens qui est bas, soit respectivement 20 et 66 étudiants », réagit la conseillère principale en communication du ministère, Liz Tuomi. « L’approbation et le financement d’un troisième établissement francophone risquent d’exacerber ce problème », selon elle.

Le premier ministre Doug Ford avait déclaré être à 100 % derrière la communauté lors d’un point presse la semaine dernière, sa ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney, indiquant travailler avec le Collège Boréal et l’Université Laurentienne pour « répondre à la demande dans le Nord ».