Vague bleue en Ontario : « le Père Noël est passé chez les conservateurs »
En entrevue avec la politologue Stéphanie Chouinard, au lendemain de la réélection de Doug Ford en tant que premier ministre de l’Ontario, ONFR+ a tenté de décrypter et comprendre les moments forts de cette soirée. Des départs surprises et un nouveau député francophone au pouvoir : Stéphane Sarrazin.
« Quelle victoire! Le père Noël est passé pour les conservateurs », ironise Mme Chouinard. Une vague bleue sur l’Ontario et plus aucun chef de l’opposition en face. Deux chefs qui quittent, c’est assez incroyable ».
La soirée électorale promettait d’être plus mouvementée, loin de l’image d’une campagne calme et ennuyeuse. Voilà un pari réussi.
Des surprises à l’appel
« Le taux de participation, soit 43,5 %, est le plus bas en 50 ans. C’est le plus petit taux de participation dans l’histoire du Canada », indique la politologue.
Voilà une nouvelle peu rassurante pour la machine politique. Selon plusieurs experts, il semblait évident que l’abstention serait marquée aux élections du 2 juin.
L’experte nous explique notamment qu’« on le sentait dans le courant de la campagne, il y avait une certaine apathie, un manque d’intérêt vis-à-vis des élections ».
« Ce qui s’est traduit par un taux d’absentéisme assez inquiétant en fait. Un gouvernement élu avec moins de la moitié des électeurs éligibles, qui se sont déplacés… C’est toujours une mauvaise nouvelle pour la santé de la démocratie. »
Comme le vote conservateur est un groupe d’électeurs plus mobilisés généralement, la victoire de Doug Ford a du sens. « Les taux d’absentéisme, lorsqu’ils sont bas, ont tendance à donner le gouvernement sortant, vainqueur dans une élection. »
Pour la politologue, « c’est peut-être une stratégie voulue par les progressistes conservateurs, une campagne ennuyante, mais une stratégie surprise, qui est de faire une campagne agressive dans les bastions néo-démocrates. »
« Il y a malheureusement un potentiel dommageable à faire une politique comme ça. De faire campagne en espérant désintéresser les citoyens, une démocratie ne peut pas survivre ainsi ».
À présent, le parti possède les deux tiers de la chambre.
La peopolisation du chef au profit des démissions
Doug Ford est une célébrité politique, une personnalité politique. La peopolisation, ou vedettisation ne date pas d’hier, mais, en ce qui concerne la famille Ford et tout ce que la Ford Nation représente, cet avènement aura été favorable à la réélection du premier ministre.
« On traite nos politiciens de plus en plus comme des célébrités et on a de plus en plus de célébrités qui font de la politique », explique la politologue. Moins au Canada, qu’aux États-Unis évidemment », nuance-t-elle.
Pourtant, c’est ce qu’on attend de nos politiciens. Charisme et éloquence sont de rigueur. C’est là où Steven Del Duca semble avoir raté sa performance. Le chef du parti libéral a démissionné de son poste après son revers dans sa circonscription de Vaughan-Woodbrige face à Micheal Tibollo du PPC.
L’autre surprise étant la deuxième démission de la soirée, celle de la cheffe néo-démocrate.
« Pour la démission d’Andrea Horwath, j’ai l’impression que l’électorat sentait qu’elle n’apportait plus rien de nouveau à la table, elle a essayé quatre fois quand même », note Stéphanie Chouinard.
La perte de popularité
Selon une liste non exhaustive, le Nouveau parti démocratique (NPD) compterait, trois députés francophones vainqueurs, à égalité avec les libéraux. Il y aurait maintenant, cinq députés parlant français au pouvoir chez les conservateurs.
Amanda Simard ayant perdu dans Glengarry-Prescott-Russell au profit de Stéphane Sarrazin, le progressiste-conservateur.
« On aura tout de même un francophone au pouvoir, se rassure Mme Chouinard. Il y avait quand même toute une symbolique derrière l’élection d’Amanda Simard. Mais, il faut voir que pour la représentation franco-ontarienne, rien n’est perdu dans Glengarry-Prescott-Russell. »
D’autres surprises du côté du NPD, durant cette soirée comme à Timmins.
« Gilles Bisson, après plus de 30 ans à l’Assemblée législative, qui n’est pas réélue, c’est crève-cœur ».
Et on notera que Bobbi Ann Brady est la première indépendante à être élue en Ontario depuis 1905. Plusieurs candidats dans le passé se sont présentés en indépendant, mais avait fait partie d’un parti politique avant. Pour Bobbi Ann Brady, c’est une première.