Hearst inquiet d’un projet de loi pouvant nuire au français dans sa police

Le détachement de la Police provinciale de l'Ontario à Hearst. Archives ONFR+

HEARST – Un projet de loi visant à régionaliser en département la Police provinciale de l’Ontario (PPO) fait craindre à la ville de Hearst un impact négatif sur la présence du français au sein de son corps policier.

En 2019, l’Ontario a adopté la Loi sur les services policiers de l’Ontario (LSPO) et la Loi sur la sécurité et les services policiers communautaires (LSPC) pour remplacer la Loi sur les services policiers créée en 1990. La LSPC exige la création d’une commission de détachement de la PPO ou de plus d’une commission pour chaque détachement de la PPO qui fournit des services de police à une municipalité.

Le projet a pour but de régionaliser certains postes de police pour qu’ils n’aient plus à répondre directement aux villes, par exemple. Ce nouveau plan signifie que quelques municipalités pourraient être assises à la même table, ce qui fait craindre au maire Roger Sigouin que les enjeux francophones de sa ville soient oubliés.

« Quand t’as des issues dans ta communauté que tu veux amenées ça à une table plus grande, je pense que c’est plus dur à débattre de ça ou de tes problèmes ou tes idées », souligne le maire de Hearst en entrevue à ONFR+.

Ce projet ne changerait toutefois rien concernant la présence physique du poste de police ou du nombre de policiers présents dans la communauté francophone. Celui qui est en poste depuis 2002 croit toutefois que les citoyens pourraient en payer le prix.

« Aussitôt que c’est régionalisé tu perds ton autonomie locale et ça, je trouve que c’est dangereux » – Roger Sigouin

« Tous les problèmes de bien des départements qui ont été régionalisés, que ce soit dans les hôpitaux ou les écoles est que aussitôt que c’est régionalisé, tu perds ton autonomie locale et ça, je trouve que c’est dangereux. L’autonomie locale est très importante pour débattre de choses. »

Pour ce dernier, la régionalisation de la police à Hearst n’est pas similaire à la situation d’autres villes.

« C’est tout le temps épeurant quand on parle de régionalisation. Avec une communauté à 90-92 % francophone, on sait que quand on aura des rencontres régionales, ça va être en anglais et non en français. »

Le maire de Hearst, Roger Sigouin. Archives ONFR+

Pour Roger Sigouin, la situation actuelle rappelle une des problématiques avec la PPO à Hearst, soit la présence d’officiers francophones. La possibilité d’avoir un poste complètement bilingue dans la ville du Nord de l’Ontario avait fait son chemin il y a quelques années avant d’être abandonnée.

« Pourquoi ne pas recruter des jeunes de chez nous qui vont rester et qui sont bilingues? », se demande M. Sigouin.

« Ce n’est pas drôle pour l’officier anglophone unilingue qui vient travailler chez nous. Il n’a pas beaucoup d’interactions sociales, car il est unilingue. On pénalise le policier qui vient travailler ici et on pénalise la sécurité au travail au niveau de la police. Quand il y a des appels d’urgence et que ce sont des anglophones qui parlent, ce ne sont pas tous nos gens qui comprennent ou parlent l’anglais. »

La municipalité de Hearst et toutes les autres qui obtiennent leurs services de police de la PPO ont jusqu’au 7 juin pour présenter une proposition de commission de détachement de la PPO à la province. Malgré tout, M. Sigouin se dit sûr que le gouvernement ne déclenchera pas un débat linguistique avec ce projet de loi.

« Je ne pense pas qu’ils veulent aller là, ils vont protéger notre statut francophone comme communauté et j’ai espoir que ça va bien aller. »

Le gouvernement ne s’avance pas pour le français

Au bureau de la solliciteuse générale Sylvia Jones, on indique que toutes les questions en lien avec la langue dans cette loi sont entre les mains de la PPO. Le ministère indique que cette nouvelle mesure comportera trois points centraux :

  • « Considérer tout plan de sécurité et de bien-être communautaire adopté par une municipalité qui reçoit des services de police du détachement
  • Établir des politiques locales, en consultation avec le commandant du détachement, en ce qui concerne le maintien de l’ordre dans la zone de maintien de l’ordre du détachement et
  • S’assurer que les plans d’action locaux préparés par le commandant de détachement répondent aux objectifs et aux priorités déterminés par le conseil. »

Le bureau de Mme Jones ajoute que les nouveaux détachements fourniront « également un lieu aux municipalités et aux Premières nations dans une zone de détachement pour coordonner et collaborer sur des stratégies visant à régler les problèmes communs. »