Services en français : un commissariat sans commissaire
TORONTO – La commissaire aux services en français, Kelly Burke, n’est plus à l’emploi apprend-on dans un communiqué du bureau de l’ombudsman diffusé ce vendredi, sans autre explication. La recherche de son successeur a déjà débuté et n’occasionnera pas d’interruption de service affirme-t-on.
En poste depuis janvier 2020 et autrice de trois rapports annuels pointant les lacunes du gouvernement, cette avocate en droit du travail et ex-enseignante n’avait pas fini son mandat. Elle avait succédé à François Boileau dans une période de trouble, alors que le commissariat indépendant avait été aboli après l’arrivée au pouvoir des progressistes-conservateurs.
« Elle ne fait plus partie du Bureau de l’Ombudsman », indique, laconique, son supérieur hiérarchique Paul Dubé, ombudsman de l’Ontario. « Je tiens à remercier Mme Burke de ses services et je lui souhaite de réussir dans ses futurs projets », a-t-il déclaré, lançant dans la foulée une nouvelle recherche pour trouver son successeur.
C’est l’actuel directeur des opérations de l’Unité des services en français au sein du Bureau de l’ombudsman, Carl Bouchard, qui est chargé d’assurer l’intérim dans l’intervalle, « sans interruption ».
« Notre Bureau reste fermement déterminé à veiller au respect et à l’application des droits des francophones en Ontario ainsi que des obligations du gouvernement et des organismes gouvernementaux conformément à la Loi sur les services en français », a tenu à rassurer M. Dubé, qualifiant les résultats de son propre bureau de « remarquables » dans ce domaine depuis qu’il en a pris le contrôle en mai 2019.
Un millier de plaintes sur les services en français ont été traitées depuis le changement d’administration. Cependant l’unité avait depuis 2019 perdu son indépendance et son caractère de premier recours. Le couperet tombé en 2018 avait soulevé une vague de contestation au sein de la communauté, sous l’appellation de Jeudi noir de l’Ontario français, incluant l’abandon du projet de l’Université de l’Ontario français – finalement relancé en 2020 à la faveur d’un accord fédéral-provincial.
Le retour d’un commissariat intégré à l’ombudsman avait mis un terme à son indépendance obtenue en 2014, sous la gouvernance de François Boileau, son prédécesseur.
« Je ne crois pas que ce départ retardera le dépôt du prochain rapport » – Fabien Hébert
Surpris par cette nouvelle, le président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), Fabien Hébert, a bon espoir que les services ne souffriront pas de ce changement.
« Je ne crois pas que ce départ retardera le dépôt du prochain rapport », estime-t-il au micro d’ONFR+. « On a confiance en M. Dubé et en son bureau pour sélectionner quelqu’un qui aura toutes les compétences requises pour bien remplir les fonctions exigées à ce poste. »
Et d’ajouter : « On a aussi une très bonne relation de travail avec Carl Bouchard. Il sera en mesure de mener à bon port les dossiers laissés derrière Mme Burke jusqu’à l’arrivée du prochain titulaire. »
M. Hébert salue au passage le travail accompli par la commissaire sortante. « Je retiens qu’on a toujours eu avec elle des discussions très ouvertes », relève-t-il.
Du côté de l’opposition, même surprise. Le député néo-démocrate Guy Bourgouin, porte-parole de l’opposition officielle aux affaires francophones, souhaite que le futur commissaire soit recruté « le plus vite possible, car on a besoin que les plaintes qui lui sont adressées soient traitées au mieux ».
Et de pointer le besoin de stabilité à la tête du commissariat : « On a besoin de quelqu’un qui soit là pour longtemps afin de bien connaître les dossiers, les faire avancer et mettre la pression sur le gouvernement », dit-il, assurant qu’il va « garder un œil » sur le processus de recrutement.
L’ancienne sous-ministre adjointe aux Affaires francophones est notamment parvenue durant son mandat à obtenir de ce ministère qu’il produise un rapport annuel sur l’état et les progrès réalisés dans les services gouvernementaux en français.
Elle a aussi conclu l’année dernière à une faute de l’Université Laurentienne, coupable à ses yeux d’avoir enfreint la Loi sur les services en français en supprimant des programmes débouchant sur des diplômes désignés.
Cependant, seulement deux de ses 11 recommandations au total ont été traitées, faisait-elle remarquer en 2022, au moment de divulguer son dernier rapport annuel.
Article mis à jour le dimanche 5 mars à 19 heures.