Le sous-financement des organismes interculturels dénoncé en Ontario

Une vingtaine d'organismes francophones étaient représentés lors de la consultation publique à Sudbury. Crédits image : Diane Quintas.

SUDBURY – Le manque de soutien financier aux organismes gérés par des personnes francophones racisées a été dénoncé par plusieurs acteurs du milieu communautaire qui réclament un meilleur appui pour ces derniers lors des consultations dans le cadre du renouvellement du Plan d’action sur les langues officielles qui ont eu lieu mercredi à Sudbury. Cette rencontre a rassemblé tous les grands acteurs du monde communautaire francophone de la région pour la première fois en présentiel depuis le début de la pandémie.

Une rencontre organisée par le gouvernement fédéral qui doit renouveler son Plan d’action d’ici le 1er avril 2023 et qui aura permis de mettre en lumière des enjeux essentiels à la communauté francophone en milieu minoritaire.

« Il y avait vraiment de bonnes idées, c’est facile avec un groupe de juste critiquer, de dire des choses négatives, mais aujourd’hui aujourd’hui il y avait de bonnes suggestions », déclare pour sa part Marc Serré, député fédéral libéral de Nickel Belt et l’adjoint parlementaire de la ministre des Langues officielles en entrevue.

« Quand on parle de diversité et d’inclusion, il faut donner les moyens à ces organismes-là d’avoir une structure organisationnelle » – Carol Jolin

Mais des critiques il y en a eu, notamment concernant l’appui financier à certains organismes communautaires. Pour Carol Jolin, président de l’Assemblée francophone de l’Ontario (AFO), les organismes représentants des communautés interculturelles francophones sont sous-financés.

Une étude du Centre de leadership et d’évaluation (CLÉ) recommande notamment un financement minimum de 108 000 $ pour chaque organisme communautaire.

Selon Carol Jolin, la priorité devrait être accordée aux organismes issus des communautés racisées. Il rappelle que sur les 88 organismes racialisés en Ontario seuls cinq reçoivent du financement et un seul à hauteur de 35 000 $.

« Quand on parle de diversité et d’inclusion, il faut donner les moyens à ces organismes-là d’avoir une structure organisationnelle pour pouvoir participer à l’écosystème communautaire qui existe en Ontario », clame-t-il avant d’ajouter que ces organismes peinent même à pouvoir recenser la communauté qu’ils desservent.

Carol Jolin, Président de l’Assemblée francophone de l’Ontario. Crédit image : Inès Rebei.

« C’est extrêmement difficile, ces organismes fonctionnent actuellement grâce au bénévolat d’irréductibles qui donnent de leur temps et de leur argent pour faire vivre leurs organisations », se désole-t-il

Il relève aussi une incohérence au niveau du partage du financement du fédéral, dont l’Ontario ne reçoit que 20 % alors que cette province abrite 54 % des francophones hors Québec et un tiers des organismes francophones.

Du « racisme sytémique »

Parmi les organismes concernés se trouve le contact interculturel francophone de Sudbury dont le coordonnateur, Gouled Hassan, a assisté aux consultations.

Selon lui, il existe un véritable décalage entre le financement accordé aux organismes issus de la diversité culturelle et les informations liées au recensement. « D’après les données de Statistique Canada, les communautés culturelles représentent près de 20 % de la population franco-ontarienne alors ce n’est pas normal qu’elles ne reçoivent que 1 % ou moins de financement. »

Celui qui est aussi membre du Conseil de gouvernance de l’Université de Sudbury avance que ces organismes font face à davantage d’obstacles que les organismes communautaires dont le caractère n’est pas culturel.

Il dénonce un financement inférieur à ceux-ci, mais aussi des embûches telles que « la suggestion, beaucoup de supervision, beaucoup d’affaires à prouver qui ne sont pas la norme et qui ne sont pas demandées à d’autres organismes qui ne sont pas issus de ces communautés racisées ».

Il va même jusqu’à parler de « racisme systémique ».

« À cause de la perception qu’ils ont de la communauté, ça fait qu’il y a ces réactions là, qui se passent et c’est ce qu’on appelle le racisme systémique. »

Gouled Hassan, coordonnateur du contact interculturel francophone de Sudbury. Gracieuseté.

Il termine en rappelant que d’ici 10 à 15 ans, la grande majorité de la population sera issue de la minorité raciale et culturelle. « Il est important de donner à cette communauté les outils et l’espace pour leur permettre de prendre la relève, sans ça d’ici 10 ou 15 ans on aura une francophonie qui sera faible et qui ne sera pas capable de défendre ses intérêts. »