Michael Rousseau, PDG d'Air Canada. Source: aircanada.com

Quatre des 12 membres du conseil d’administration parlent et comprennent le français, mais les réunions des hauts dirigeants du transporteur aérien Air Canada sont en anglais seulement. C’est ce qu’a affirmé le président Michael Rousseau qui a comparu devant les parlementaires à Ottawa pendant près de deux heures, principalement en anglais.

Il s’est toutefois excusé en français en entrée de jeu pour ses propos tenus en novembre après une allocution en anglais seulement devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Il avait alors affirmé qu’il ne voyait pas la nécessité d’apprendre le français malgré le fait qu’il vivait à Montréal depuis 14 ans.

« J’ai fait un commentaire qui était insensible envers la langue française et je le regrette (…) J’ai appris (suite aux événements) que je devais parler français pour participer pleinement à la société québécoise. J’aurais dû commencer à apprendre le français plus tôt dans ma carrière à Air Canada, c’est une erreur de ma part. Je prends des leçons de français depuis », a-t-il dit au Comité des langues officielles.

À part quelques phrases en français au début, le président d’Air Canada s’est adressé seulement en anglais. Il a affirmé que depuis le mois de novembre, il suit des cours de français chaque jour en plus de faire des devoirs en français pour un total de 10 heures par semaine.

Le président d’Air Canada Michael Rousseau lors de sa comparution devant les parlementaires à Ottawa lundi. Capture d’écran : bParlVu.

13 heures de cours en français par employé

Air Canada dit avoir 30 000 employés, dont 40 % sont bilingues alors que 50 % des employés qui offriraient un service direct au client seraient capable de converser dans les deux langues. Ce sont près de 10 000 employés qui auraient eu 130 000 heures de cours de français depuis 2015. Ça constitue 13 heures par employé et 20 000 heures par année au total et les heures pourraient avoir été comptées plus d’une fois, a noté le député conservateur Jacques Gourde.

« C’est une loterie recevoir des cours linguistiques à Air Canada, y’en a pratiquement pas. Je suis estomaquée », s’est insurgé le politicien conservateur.

« Notre performance s’est améliorée au cours des années », a évoqué le président de l’entreprise assujettie à la Loi sur les langues officielles. « Mais on sait qu’on peut faire mieux et en faire plus et c’est notre objectif (…) Notre nombre d’employés bilingues a augmenté ou s’est maintenu au cours des années », a ajouté le PDG d’Air Canada.

Crédit image: Air Canada
Crédit image : Air Canada

Ce dernier avance que la compagnie « engage sur le mérite tout en essayant d’avoir le plus d’employés bilingues ».

« Notre plus grand défi est de trouver des gens à engager à l’extérieur du Québec. On aimerait engager plus d’employés bilingues, mais la disponibilité n’y est pas. »

L’entreprise affirme que dans la majorité des cas, un vol comporte au moins un agent de bord bilingue.

« Pour l’assignation du personnel, on vérifie chaque mois le niveau de conformité pour s’assurer que le système fonctionne bien. Je peux vous assurer que dans tous les vols d’Air Canada… à 99,95 %, l’an passé, le service était disponible dans les deux langues officielles », a dit David Rheault, vice-président du transporteur aérien.

Nombres de plaintes

Le Commissariat aux langues officielles avait reçu près de 2 000 plaintes à la suite du discours de Michael Rousseau en novembre. Le gouvernement a récemment donné, dans son projet de loi C-13, le pouvoir au commissaire de sanctionner jusqu’à 25 000 $ par infraction le transporteur aérien.

« On ne pense pas que donner des amendes à des entreprises privées comme nous va améliorer la situation », a signalé le vice-président David Rheault. « On pense au contraire que le gouvernement pourrait soutenir davantage les entreprises engagées envers le bilinguisme. »

La ministre des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor s’est dite déçue du passage des dirigeants de la société d’État. Elle signale la nécessité des outils donnés au commissaire aux langues officielles dans le projet de loi C-13.

« C’est profondément décevant de voir que, six mois après les propos tenus par Michael Rousseau, Air Canada ne semble toujours pas comprendre les besoins des francophones, à travers le pays (…) La comparution d’Air Canada au Comité des langues officielles démontre clairement pourquoi nos réformes proposées sont si nécessaires », a fait valoir la ministre dans une déclaration.

Ginette Petitpas Taylor, ministre des langues officielles.
Le projet de loi de la modernisation de la Loi sur les langues officielles de Ginette Petitpas Taylor, ministre des langues officielles. Archives ONFR+

Air Canada a souvent été épinglée par le commissaire aux langues officielles par le passé, étant l’entreprise fédérale générant le plus de plaintes.

« Notre indicateur clé est le nombre de plaintes par le nombre d’interactions qu’on a avec chaque client. Ce ratio a baissé. Je comprends la perspective du commissaire qu’il regarde à des chiffres larges, mais nous, on regarde des chiffres relatifs. »

En 2016, l’ancien commissaire Graham Fraser avait même soumis un rapport uniquement consacré aux problèmes chez le géant aéronautique. La compagnie affirme avoir mis dans les dernières semaines diverses mesures en place comme la création d’un département sur les langues officielles.

Cet article à été mis à jour à 19h12.