Une élue bilingue entend redynamiser le Comité des affaires francophones de Toronto
TORONTO – Alors que le Comité consultatif des affaires francophones de Toronto se remet au travail ce jeudi, après une parenthèse de plus d’un an, sa nouvelle coprésidente Alejandra Bravo compte bien faire davantage pour les Franco-Torontois. Au micro d’ONFR, celle qui est conseillère municipale de Davenport, d’origine chilienne, raconte son lien à la langue française et ses ambitions pour la vie en français dans la Ville Reine.
Reconduit et constitué à la mi-octobre, le Comité consultatif des affaires francophones de Toronto permet de donner une voix des francophones de Toronto au conseil municipal.
« Il y a historiquement une population francophone à Toronto et en Ontario et ça évolue en plus avec de nouveaux arrivants des Caraïbes, de l’Afrique, etc. Je considère qu’il est très important pour moi de tisser des liens directs en tant que francophone », explique M. Bravo, qui souhaitait représenter les francophones à la mairie depuis longtemps.
Arrivée au Canada du Chili avec sa famille une première fois après le coup d’État de 1974, alors âgée de deux ans, elle y retourne plus tard cette fois pour y rester.
« Mes parents ont toujours vu le fait d’être Canadiens comme inhérent au fait de savoir parler français, comme une évidence. Ma mère a appris le français et continue à le faire à 74 ans. Pour moi c’était très important, car l’apprentissage de la langue est le meilleur moyen de comprendre une culture ».
« J’apprenais l’anglais aussi à l’école dès l’âge de quatre ans, mais ma mère me lisait Le Petit Prince le soir par exemple. C’était un projet conjoint entre elle et moi. »
Elle explique que ses trois enfants, qui ont étudié le français, ont suivi le même chemin, les deux aînés vivant d’ailleurs à Montréal.
Pallier l’inactivité passée du comité
« J’ai hâte de commencer. Nous avons fait tous les efforts pour que la première réunion ait lieu avant cette fin d’année afin de pouvoir commencer à travailler dès l’année prochaine », déclare-t-elle.
« Il s’agit lors de la première séance d’apprendre à se connaitre et de comprendre les obligations de chacun en lien avec le comité, d’identifier les enjeux, et de constituer un plan de travail. C’est également l’occasion pour le conseil municipal de mieux connaitre la communauté francophone à travers les membres. »
Concernant une possible réforme du format d’un comité critiqué pour ces deux uniques réunions dans l’année, elle répond : « Le problème est que, par le passé, il n’y avait pas de « raison » en soi de se réunir plus, car pas assez de contenu, pas assez de thèmes identifiés au préalable ».
De poursuivre : « Je veux donner une direction un peu différente et repenser l’orientation du comité. Si on part des faits, du point de vue des membres et des vrais enjeux, on pourra trouver les points concrets sur lesquels se concentrer et travailler en continu durant ces trois années de mandat. »
« Je ne vois d’ailleurs pas d’obstacle au fait de travailler sur nos tâches chacun de notre côté en dehors des réunions pour faire avancer nos objectifs. »
Selon elle, beaucoup des attentes des francophones ont trait aux services qui relèvent du gouvernement provincial. Il convient donc de trouver ce qui peut être amélioré au niveau de la municipalité.
Un agenda plus ambitieux et plus d’implication
Sur des thèmes plus universels aussi comme le logement par exemple, il s’agira de faire connaitre le point de vue des francophones, leur donner l’espace pour pouvoir donner leur opinion.
Quant aux priorités à adresser pour les Franco-Torontois, c’est ce qu’elle souhaite découvrir au contact des membres de la communauté francophone qui siègeront au comité : « Avoir accès à des services essentiels dans la langue est bien sûr très important, mais aussi avoir les moyens pour que les priorités soient bien connues à la municipalité. »
Concernant les communications de la ville en français, la conseillère municipale rappelle la difficulté en termes de ressources et le budget limité dans la mesure où les services sociaux incombent à la municipalité, particularité de l’Ontario, ce qui explique qu’il n’y ait pas la notion de bilinguisme comme ça devrait l’être si c’était d’origine provinciale, ce qui est difficile pour les francophones.
« Quand ces services incombaient à la province, il y avait plus d’obligations linguistiques. C’est quelque chose qu’il faut continuer d’aborder avec le gouvernement, car c’est une perte énorme pour la communauté. Dans un pays bilingue, j’aimerais avoir l’appui de la province pour pouvoir le faire. C’est suffisamment important pour qu’on puisse en parler avec le comité », assure Mme Bravo.
« Des informations devraient être traduites quand elles sont essentielles, mais quand on regarde le déficit de 1,5 million de dollars aux opérations de la ville, ce serait assez difficile sans l’appui de la province. »
À la question de potentielles initiatives communes et jumelages avec la Ville de Montréal, pour renforcer la francophonie, elle évoque la grande affinité entre les deux mairesses Olivia Chow et Valérie Plante qui sont en communication et échangent sur des problématiques communes.
« Les deux villes auraient tout intérêt à avoir des liens plus étroits, car ce sont de grandes villes avec des enjeux similaires. Y parvenir serait pour moi un rêve. C’est tout à fait d’actualité, car la Ville de Toronto évalue actuellement la façon de mettre en place des jumelages. Je poserai personnellement cette question, car l’initiative passe par le Economic and community development committee dont je suis maintenant la présidente, donc ça tombe à pic! »