Cour suprême : les conservateurs en faveur de l’exigence d’un banc bilingue

Le chef du Parti conservateur Pierre Poilievre. Crédit image: Stéphane Bédard

OTTAWA – Les élus conservateurs ne se sont pas opposés à un article du projet de Loi C-13 exigeant une Cour suprême du Canada bilingue. Cela représente un léger changement sous le chef Pierre Poilievre par rapport au règne de ses prédécesseurs Stephen Harper et Erin O’Toole.

Au Comité des langues officielles mardi, l’article en question exigeant le bilinguisme des juges n’a pas été débattu, car aucun amendement en ce sens n’a été déposé par aucun parti, ce qui indique qu’il sera dans la refonte de la Loi sur les langues officielles, si une fois adoptée.

Dans sa modernisation de la Loi sur les langues officielles, le gouvernement Trudeau n’oblige pas noir sur blanc le bilinguisme des neuf juges, mais indique qu’il ne sera pas possible pour un juge unilingue anglophone d’entendre une cause en français. La Cour devrait alors siéger à un nombre impair réduit pour les causes dont le ou les juges unilingues ne maîtrisent pas l’une des deux langues officielles. Ce type de pratique à trois, cinq ou sept juges rendrait alors la vie très compliquée pour un futur juge unilingue à la Cour suprême, selon des juristes interrogés par ONFR+.

Écrire noir sur blanc que la maîtrise des deux langues officielles est obligatoire pour chacun des neuf juges pourrait entraîner un conflit constitutionnel, mais l’actuelle mesure rend la nomination d’un juge unilingue quasi impossible, estimait notamment le professeur de droit de l’Université d’Ottawa Benoît Pelletier. L’actuelle mesure dans le projet de loi rendrait alors la nomination d’un juge unilingue quasi impossible, affirmaient des juristes.

Changement sous Pierre Poilievre?

Sous Stephen Harper entre 2006 et 2015, les conservateurs avaient nommé deux juges unilingues (Michael Moldaver et Marshall Rothstein), mais six bilingues ce qui avait souvent soulevé les contestations.

Le gouvernement Trudeau s’est engagé depuis son arrivée au pouvoir à ne nommer que des juges capables d’entendre des causes dans les deux langues officielles au banc de la plus haute cour du pays, dont Michelle O’Bonsawin plus récemment. Les libéraux ont souvent critiqué la position des conservateurs sur ce dossier.

Justin Trudeau avait notamment attaqué la position de l’ancien chef conservateur Erin O’Toole qui n’était pas en faveur d’un bilinguisme obligatoire. En 2019, Andrew Scheer s’était dit en faveur de la connaissance des deux langues officielles pour les neuf juges de la Cour suprême. En 2017, toutefois, le Parti conservateur, excepté pour neuf députés, avait voté contre (en compagnie d’une majorité de députés libéraux) un projet de loi néo-démocrate qui obligeait le bilinguisme des neuf plus hauts juristes du pays.

En entrevue, le député conservateur Joël Godin souligne que ce n’est pas le bilinguisme qui importe, mais bien l’accès à « un service à la justice en français », rejoignant ainsi la position des libéraux dans C-13.

« S’il y a 10 % des tribunaux qui sont traités en français, il devrait y avoir au minimum 10 % de juges francophones. Le bilinguisme n’est pas nécessaire à la Cour suprême si tous les gens ont accès à la justice en anglais ou en français. S’il y a sept juges francophones à la Cour suprême, à ce moment-là, ils travailleront les sept sur les causes francophones », a affirmé le porte-parole en Langues officielles de la troupe de Pierre Poilievre.

Pierre Poilievre ne s’était jamais prononcé publiquement depuis son entrée comme chef conservateur en septembre dernier à savoir s’il était en faveur d’un bilinguisme obligatoire à la Cour suprême.