Prime Minister Justin Trudeau walks to a group photo opportunity with his new cabinet following a swearing-in ceremony at Rideau Hall in Ottawa on Wednesday, July 26, 2023. THE CANADIAN PRESS/Adrian Wyld
Justin Trudeau lors de la présentation de son nouveau cabinet à l'été 2023. Crédit image: THE CANADIAN PRESS/Adrian Wyld

OTTAWA – Si des élections fédérales avaient lieu aujourd’hui, les libéraux pourraient perdre l’ensemble de leurs sièges dans les circonscriptions à forte présence francophone en Ontario. Les conservateurs de Pierre Poilievre seraient grandement favoris selon les plus récentes projections de la firme de sondage Léger pour ravir des sièges dans le Nord de l’Ontario et dans la capitale fédérale.

Glengarry–Prescott–Russell (54 % de francophones), Nickel Belt (35 %), Orléans (28 %), Sudbury (16 %), Nipissing—Timiskaming (14 %) passeraient tous du rouge au bleu, selon les projections de Léger. Le site QC125 qui reprend les projections de Léger évalue les chances de victoire par circonscription, basées sur les chiffres nationaux. Dans l’ensemble de ces circonscriptions, les conservateurs seraient projetés gagnant avec 36 à 45 % des intentions de vote, des chiffres qui font dire au site de prédictions électorales que les probabilités de victoires conservatrices sont au-delà de 90 %.

« On n’a pas vu ça souvent dans l’histoire récente, mais ça témoigne de la force de l’équipe Poilievre sur le terrain par rapport au fait que le message sur le coût de la vie résonne », analyse la politologue Stéphanie Chouinard du Collège militaire royal du Canada.

La dernière fois que les conservateurs étaient au pouvoir entre 2006 et 2015 sous Stephen Harper, il a eu des représentants de son parti dans Orléans, Glengarry–Prescott–Russell et Nipissing-Timiskaming.

« Ça fait huit ans qu’on est là, alors c’est sûr qu’il y a toujours de l’usure dans un gouvernement », ne cache pas le député libéral Francis Drouin.

Francis Drouin. Crédit image: Stéphane Bédard.
Élu depuis 2015, le député de Glengarry-Prescott-Russell Francis Drouin compte se représenter à l’élection de 2025. Crédit image : Stéphane Bédard.

L’un de ceux menacés par l’appui grandissant de l’actuelle opposition officielle est le libéral Marc Serré dans Nickel Belt. « C’est inquiétant les sondages, mais il y en a qui sortent chaque jour. On a fait tellement de choses », lance-t-il, citant l’aide apportée durant la pandémie et les récents investissements dans la filière des batteries électriques.

« Mais ce ne sont pas des choses qui se répandent », admet-il comme problématique.

En se basant sur ces projections, les conservateurs pourraient s’emparer des deux comtés dans la région du Grand Sudbury, ce qui n’est jamais arrivé par le passé étant toujours associé aux libéraux et néo-démocrates.

« C’est un peu surprenant dans Nickel Belt, cible Stéphanie Chouinard. Aux trois dernières élections, les conservateurs étaient troisièmes derrière les néo-démocrates. Donc, c’est une mauvaise nouvelle pour le Parti libéral, mais aussi pour les néo-démocrates, qui ne sont pas vus comme l’alternative viable aux libéraux », observe-t-elle.

Le chef conservateur et ses troupes ont effectué des arrêts à Timmins, Sudbury et Kapuskasing au cours des derniers mois, martelant leur message d’abolir la taxe carbone.

« Pourquoi les députés libéraux à Thunder Bay, North Bay, Sudbury, Sault Ste. Marie et d’autres communautés où il fait un froid glacial ne bénéficient pas de la même pause (sur la taxe carbone)? Est-ce parce que leur député libéral local est complètement inutile? » affirmait notamment Pierre Poilievre aux Communes avant les fêtes.

Le nouveau chef du Parti conservateur Pierre Poilievre. Crédit image: Stéphane Bédard
Le chef conservateur Pierre Poilievre donnant un discours après sa victoire à titre de leader du Parti en 2022. Crédit image : Stéphane Bédard

« Les gens sont inquiets de l’abordabilité. Alors quand tu as un Parti conservateur qui passe dans les médias avec des slogans de 3-4 mots, ça passe dans les médias et les réseaux sociaux et en tant que gouvernement, il faut gérer ça », soutient Marc Serré.

Pour son son collègue dans l’Est ontarien, Francis Drouin, Justin Trudeau est toujours le bon capitaine pour le bateau libéral signalant que la campagne prévue en octobre 2025 est encore lointaine.

« En ce moment, c’est comme un match de boxe, ça crie fort et ça jappe fort, mais tant et aussi longtemps que la joute n’a pas eu lieu, ça peut changer », croit le représentant de la seule circonscription à majorité francophone en Ontario.

« Ce n’est pas Pierre Poilievre qui n’a pas présenté de plan en ce moment, outre que dire qu’il va couper une taxe (carbone) et -comme s’il est le Bon Dieu- qui va descendre du ciel pour régler tous les problèmes », attaque-t-il.

Les comtés d’Algoma-Manitoulin-Kapuskasing (23 % francophones) et Ottawa-Vanier (23,5 %) seraient de leur côté impliqués dans une chaude lutte avec les conservateurs. À noter que Algoma-Manitoulin-Kapuskasing sera retiré de la carte électorale lors des prochaines élections. Le comté sera alors redistribué à d’autres circonscriptions du Nord de l’Ontario, qui perd ainsi un représentant au Parlement.

Pour Stéphanie Chouinard, il reste encore beaucoup de temps d’ici la fin de 2025 pour parler « d’une carte parfaite pour les conservateurs ».

« Mais on voit que dans des circonscriptions qui sont généralement largement associées aux libéraux, effectivement, il y aura de chaudes luttes à surveiller. Ça parle à l’urgence que certains et certaines députées doivent sentir de renforcer leur présence sur le terrain dans leur circonscription pour sauver les meubles. »