Bilinguisme obligatoire pour des sous-ministres, mais pas pour Michael Rousseau

Le président d'Air Canada Michael Rousseau lors de sa comparution devant les parlementaires à Ottawa
Le président d'Air Canada Michael Rousseau lors de sa comparution devant les parlementaires à Ottawa lundi. Capture d'écran ParlVu.

OTTAWA- Les partis d’opposition à Ottawa ont voté en faveur de forcer le bilinguisme de sous-ministres fédéraux, mais pas ceux des présidents de sociétés d’État et entreprises assejuties à la Loi sur les langues officielles comme Air Canada.

Au Comité des langues officielles mardi soir, la néo-démocrate Nikki Ashton et le bloquiste Mario Beaulieu ont octroyé la majorité nécessaire à une motion des conservateurs visant à nécessiter la connaissance des deux langues officielles pour les sous-ministres et sous-ministres délégués ou tout poste équivalent. Les cinq députés libéraux sur ce comité ont voté contre qu’une telle mesure soit incluse dans le projet de Loi C-13 de leur gouvernement visant à moderniser la Loi sur les langues officielles.

Ces positions sont choisies par le gouverneur en conseil, soit le cabinet (les ministres) du gouvernement. Si ces personnes ne sont pas bilingues, ils seront tenus de suivre une formation linguistique pour parler et comprendre clairement les deux langues officielles dès l’embauche. Les postes de sous-ministres adjoints, un rang en dessous des sous-ministres délégués, sont déjà obligatoirement bilingues, mais ils ne sont pas nommés par le gouvernement.

« On a constaté dans le passé qu’il y avait des problèmes dans le passé lors de promotions pour ceux qui pratiquaient une des deux langues officielles. Ça vient donner un outil supplémentaire pour que les employés puissent travailler dans la langue de leur choix », a commenté l’auteur de la motion, le conservateur Joël Godin.

Mais quelques instants plus tard, les conservateurs se sont ralliés aux libéraux en votant contre une motion du Bloc québécois qui état appuyé du NPD. Celle-ci visait à obliger à ce que les premiers dirigeants ou hauts administrateurs de sociétés d’État assujetties à la Loi sur les langues officielles aient « la capacité de parler et de comprendre clairement le français ». Il s’agissait ici d’un amendement du gouvernement du Québec mais aussi d’une demande du commissaire aux langues officielles Raymond Théberge.

Cela aurait notamment obligé des instances dans les domaines portuaires et aériens comme Air Canada ou encore le Canadien National (CN) à suivre cette directive, eux qui ont été impliqués dans de récentes controverses au sujet de l’unilinguisme de leurs dirigeants.

Michael Rousseau avait généré un record de plaintes au Commissariat aux langues officielles en affirmant n’avoir pas senti le besoin d’apprendre le français en vivant depuis 14 ans à Montréal. Le CN s’était quant à lui retrouvé sans dirigeants francophones sur son conseil d’administration, en plus d’avoir nommé une unilingue anglophone, Tracy Robinson, comme présidente quelques mois plus tôt.

Le CN s’était retrouvé sous les feux de la rampe au printemps dernier après que son conseil d’administration se soit retrouvé sans aucun francophone. Photo tirée du site Web du CN.

Nikki Ashton avait dit « appuyer à 100 % » une telle motion, qualifiant « de scandaleux, que les hauts dirigeants d’Air Canada et du CN ne parlent pas français ». Le porte-parole conservateur Joël Godin s’est opposé, car la motion « est trop générale… et qu’elle noie le poisson » alors que le député libéral Anthony Housefather à illustrer qu’il serait « absurde » de désormais exiger le bilinguisme de présidents de certaines petites entreprises familiales, considérées comme des sociétés de la Couronne.

Travailler en français dans la fonction publique

Le comité est aussi venu renforcer le droit des fonctionnaires à travailler en français dans les régions désignées bilingues au Canada, soit en Ontario, au Québec et partout au Nouveau-Brunswick. On indique notamment le droit aux employés à « être supervisé dans la langue de leur choix, peu importe l’identification linguistique de leur poste ». De plus, on exige qu’un superviseur ou gestionnaire soit apte à communiquer avec un employé dans la langue de choix de ce dernier.

Cette article adopté forcera dans ces régions, des superviseurs ou des gestionnaires à comprendre et parler le français et l’anglais, a expliqué un fonctionnaire du Conseil du Trésor lors de la séance du comité.

Les élus reprendront les débats autour du projet de Loi C-13 vendredi.

Correction : une précédente version du texte indiquait qu’Air Canada et le CN étaient des sociétés d’État (ou sociétés de la Couronne), ce qui est faux. Elles sont des entreprises privées assujetties à la Loi sur les langues officielles.