Politique ontarienne : les dossiers importants à surveiller en 2023 

De nombreux dossiers en cours vont ouvrir l'année 2023. Montage ONFR+

TORONTO – L’économie va être un dossier majeur. En cette période d’incertitude économique, de nombreux experts s’attendent à ce que l’Ontario entre en récession au début de l’année 2023. Outre la finance, le gouvernement de la province est attendu sur un bon nombre de projets tels que les négociations salariales avec la fonction publique, les plans de rattrapages scolaires, les universités, la santé et l’immigration. Il y a du pain sur la planche et des tâches fastidieuses.

L’inflation, installée confortablement depuis plusieurs mois en Ontario et le manque de produits, vont causer un ralentissement économique et des pénuries très ciblées.

Pour Geneviève Tellier, politologue, « l’aspect financier devra être à surveiller de près ».

« Il semble qu’on se dirige vers une récession tout en étant en plein emploi, c’est presque du jamais vu. »

En gros, l’activité économique de la province va subir une baisse. Pour faire simple : c’est une diminution d’activité de la production et de la consommation qui touchera les ménages et les entreprises. La pandémie et l’instabilité géopolitique perturbent les chaînes d’approvisionnement. Tendance amnésique ou non, la pandémie est toujours là.  

Les négociations pour les employés du secteur public devront être scrutées à la loupe. Crédit image : Hôpital Sunnybrook

D’un autre côté et dans ce portrait instable, les négociations de salaires de la fonction publique risquent d’être houleuses. Les employés voudront plus d’argent quand le gouvernement voudra lui sauver ce qui lui reste. Autrement dit, les coûts sont appelés à augmenter sans gains de productivité en échange. Voilà la récession vers laquelle la province arrive doucement, mais sûrement.

Les négociations salariales avec le secteur public

Ce sont plusieurs syndicats qui vont entamer leurs négociations en 2023. Les 780 000 employés du secteur public ont eu la confirmation, au début du mois de décembre, que le projet de loi 124, qui plafonne à 1% les salaires des employés depuis 2019, était inconstitutionnel au regard de la Loi. Il sera donc intéressant de suivre l’avancée de ce dossier et des négociations en cours.

En septembre dernier et en rencontre avec ONFR+, l’avocat en droits constitutionnels et appels, Nicolas Rouleau, avait indiqué que même si le tribunal tranchait sur l’aspect inconstitutionnel de ce projet de loi, « le gouvernement pourrait plaider que cette infraction est justifiée à travers l’article 1 de la Charte sur la liberté d’association qui prévoit qu’on peut faire des écarts raisonnables ».

D’ailleurs, Doug Ford à très rapidement fait savoir, son intention d’aller en appel pour contester cette décision.

« Quelles seront les augmentations de salaire dans le secteur public? », se demande Mme Tellier. « Ce sera un problème pour le gouvernement, les syndicats vont demander plus d’un pour cent. »

Finance : surveiller le budget 2023

Le budget 2023, qui devrait être proposé en avril prochain, pourrait inclure de nouvelles choses, notamment la réduction des taxes de l’essence, mise en place en juillet 2022, puis prolongée jusqu’en décembre 2023. Pour le prochain exercice financier, le gouvernement propose une consultation à l’échelle de la province.

Peter Bethlenfalvy, ministre des Finances, aura la charge de produire le prochain budget provincial. Crédit image : Jackson Ho

Un dossier à ne pas oublier : les lettres de mandat

Pour la politologue et professeure de l’Université d’Ottawa, nous devrions avoir des nouvelles en 2023 des lettres de mandats.  « Cela va pouvoir donner un peu plus d’idées sur les intentions de Ford à ce moment-là. »

Transparence et intégrité face aux contribuables ontariens : voilà ce qui sera attendu dans ce dossier. Le gouvernement Ford se bat depuis 2018 pour garder ses lettres de mandat secrètes. L’impression donnée est qu’il y a quelque chose à cacher dans ses lignes directrices données à ses ministres. En plus des lettres de 2018, s’ajoutent celles de la 43e législature. La Cour suprême, courant 2022, a accepté d’entendre la demande d’appel du gouvernement Ford. La plus haute cour du pays pourrait rendre son verdict en 2023.

Éducation : plusieurs dossiers à suivre

D’abord, le plan de rattrapage du ministre de l’Éducation, dont les premiers effets du tutorat devraient montrer des résultats l’an prochain. Il sera possible après les tests de l’Office de la qualité et de la responsabilité en éducation (OQRE), de quantifier l’amélioration des notes scolaires, notamment en mathématique. L’offre de 250 $ dans la poche des parents pour du tutorat est quant à elle toujours accessible, jusqu’à la fin mars.

Bonnie Lysyk est la vérificatrice générale de l’Ontario. Archives ONFR+

Au début du mois de décembre, la vérificatrice générale de l’Ontario a déposé un rapport dans lequel, elle argue que le ministère des Collèges et Universités est confronté à « un défi en évolution ». La différence entre les collèges et les universités devient floue.

« Certains collèges offrent des programmes menant à l’obtention d’un grade et certaines universités offrent des programmes menant à l’obtention d’un certificat », indique-t-elle.

Pour la vérificatrice générale, « cette situation a créé de la confusion dans la différenciation entre ces deux types d’établissements et pourrait avoir une incidence sur leur capacité de subvenir à leurs besoins à long terme ».

En ce qui concerne le Nord de l’Ontario, 2023 pourrait être enfin l’heureux dénouement du dossier de l’Université de Sudbury.

Enfin, il sera intéressant de surveiller le nombre d’inscriptions à l’Université de l’Ontario français à Toronto, notamment avec le nouveau bac en éducation. Dès janvier 2023, il sera possible, pour 40 étudiants, de s’inscrire à temps partiel, puis à temps plein en septembre.

Le Transfert canadien en matière de santé, en bonne voie

« Le gouvernement canadien est prêt à augmenter les investissements dans les soins de santé à travers le Transfert canadien en matière de santé ». Actuellement, le gouvernement fédéral participe à hauteur de 22 %, tandis que les provinces et territoires prennent part à 78 % des dépenses. Lors d’une réunion entre ministres à Victoria en juillet 2022, les 13 politiciens se sont entendus sur la nécessité future d’un partage égal.

Pour l’instant, les premiers ministres ont demandé à Ottawa de participer à hauteur de 35 %.

Les premiers ministres des provinces et territoires du Canada lors de leur rencontre à Victoria en juillet 2022. Crédit image : Gouvernement de la Colombie-Britannique

Immigration made in Ontario

2023, laissera entrevoir un nouvel accord sur l’immigration entre la province de l’Ontario et le gouvernement fédéral. La province veut plus de pouvoirs dans son immigration en doublant à 18 000 le nombre d’immigrants économiques.

En entrevue avec ONFR+, Monte McNaughton, le ministre du Travail, de l’Immigration, de la Formation et du Développement des compétences, a affirmé le désir du gouvernement de sélectionner plus d’immigrants, selon les besoins économiques. Le ministre est aussi en étroite négociation avec Sean Fraser, le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté au fédéral. Le but de ces pourparlers entre les deux politiciens pourrait mener à un nouvel accord Ontario-Canada. Qui plus est, le fédéral compte augmenter sa cible en immigration d’ici à 2024.

L’Ontario espère plus de pouvoir sur son immigration. Archives ONFR+

« Ford s’est entiché des nouvelles cibles du fédéral », assure Geneviève Tellier.

Les nouveaux chefs de l’opposition à surveiller

Marit Stiles sera la nouvelle cheffe du Nouveau parti démocratique, dès sa confirmation en mars 2023. Francophile timide, selon la députée France Gélinas, Marit Stiles s’est déjà exprimé en septembre dernier, indiquant : « L’objectif, c’est la défaite de Doug Ford. » Voilà qui donne le ton des futures élections provinciales.

La dynamique à Queen’s Park a donc prévu de changer. Au niveau des libéraux, l’attente se fait sentir, « personne ne se bouscule », et ce n’est pas étonnant pour Geneviève Tellier.

« Le Parti libéral ne va pas bien, on ne voit personne de pressenti comme candidat. Même l’ancien ministre des Finances, Charles Sousa se présente au fédéral, plutôt qu’au provincial. »

À croire que même la pénurie de main-d’œuvre frappe le monde politique.