Jean Watters et le pari de l’éducation francophone dans le Nord de l’Ontario

RICHMOND, COLOMBIE-BRITANNIQUE – Premier président du Collège Boréal et ex-recteur de l’Université Laurentienne, Jean Watters est retraité depuis 18 ans et vit maintenant en Colombie-Britannique. Alors que le collège souligne aujourd’hui le 30e anniversaire de son ouverture officielle, il revient sur les défis financiers et politiques de l’époque, mais aussi sur les innovations qui ont permis à Boréal de se distinguer dès ses premières années.

«  Vous avez passé toute une vie en milieu minoritaire. Qu’est-ce qui vous a amené, jeune Québécois de Matane, à quitter si tôt votre région?

Je suis parti à 17 ans pour l’Alberta. J’étais un enfant difficile. J’ai perdu ma mère très jeune et je me suis sauvé de chez moi. Au départ, je voulais faire des études en environnement, mais un professeur m’a convaincu d’aller en éducation. C’est là que j’ai trouvé ma voie.

L’ironie, c’est que le collège m’a remis le diplôme que je n’avais jamais complété en 2000, sous forme honorifique. Finalement, je n’ai jamais regretté. Pour moi, enseigner, c’est une profession noble, avec un impact immense sur les jeunes.

Comment êtes-vous devenu le premier président du Collège Boréal?

À l’époque, j’étais en Alberta et j’ai tout simplement vu une annonce dans le journal. J’ai postulé, passé trois entrevues et j’ai été choisi. Je pense que ma préparation aux entrevues et mon expérience en formation à distance ont beaucoup joué.

Jean Watters signant son contrat en septembre 1994, un an avant l’ouverture officielle du Collège Boréal. Gracieuseté de Jean Watters

Quels souvenirs gardez-vous de l’ouverture officielle du 6 septembre 1995?

Une grande excitation. Tout le monde l’était, parce qu’on avait travaillé pendant près de dix mois pour s’assurer que tous les campus ouvrent en même temps. C’était une vraie fête, avec des activités et des prestations partout. Moi, je me suis promené d’un campus à l’autre, donc je n’ai pas vraiment pu participer. Mais ce qui reste gravé dans ma mémoire, c’est la première pelletée de terre : on craignait tellement que le projet soit annulé quand les conservateurs sont arrivés au pouvoir. Finalement, malgré la peur, le Collège a vu le jour.

Quels ont été les plus grands défis des débuts?

Il fallait rapidement mettre sur pied les centres régionaux, six au total à l’époque, et les connecter grâce à des technologies qui n’existaient pas encore vraiment. Nous avons installé un système avec Bell Canada, ‘Megastream’, pour permettre la vidéoconférence et éviter des frais de communications énormes.

En parallèle, la construction du campus principal de Sudbury a été menée tambour battant. Avec un chargé de projet et une ville qui approuvait rapidement nos permis, nous avons réussi à bâtir l’établissement dans les délais et le budget, ce qui était exceptionnel.

De quoi étiez-vous le plus fier à votre départ de Boréal?

De beaucoup de choses. Nous étions le premier collège en Ontario à avoir une coopérative gérant la cafétéria, la librairie et même le bar étudiant. Nous étions aussi un établissement ‘nouvelle ère technologique’ : pas de tableaux noirs, mais des systèmes de projection. Chaque professeur avait un portable, puis rapidement les étudiants aussi.

Nous étions aussi le seul collège à investir 2 % de son budget en perfectionnement du personnel. En outre, j’avais pris l’engagement que 50 % des cadres soient des femmes, alors qu’à l’époque, elles n’étaient que 14 % dans les postes de direction au Canada. Nous avons atteint cet objectif. Quand je suis parti en 1998, Boréal a été reconnu comme le collège le plus innovateur en Amérique du Nord par l’American Productivity and Quality Review Center.

Jean Watters, à droite, en compagnie de Daniel Giroux, actuel président du Collège Boréal, devant l’amphitéâtre du campus de Sudbury qui porte son nom. Gracieuseté de Jean Watters

Vous vous définissez souvent comme visionnaire. Avez-vous le sentiment que Boréal est resté fidèle à votre vision?

En grande partie, oui. Je me considérais d’abord comme un pédagogue. J’appelais les étudiants des ‘apprenants’, car c’était une philosophie axée sur l’apprentissage plutôt que l’administration. Cette idée a disparu, mais je crois que Boréal a gardé son intégrité : placer l’apprenant au cœur, et favoriser à la fois l’innovation technologique et la relation humaine.

Après Boréal, vous avez accepté le poste de recteur à l’Université Laurentienne. Qu’est ce qui vous a motivé à vous lancer dans cette nouvelle mission?

On m’a recruté, je n’ai pas postulé. C’était pour moi un ajustement assez difficile, et ça l’était aussi pour le personnel, car il est très rare qu’un recteur passe d’un collège à un milieu universitaire. Mais j’ai été bien entouré. Une des choses sur lesquelles j’ai vraiment travaillé pendant les trois années où j’étais là, c’était la mise sur pied de l’École de médecine du Nord de l’Ontario.

Jean Watters, alors recteur de l’Université Laurentienne, remet un doctorat honorifique à l’explorateur Bernard Voyer en 2001. Gracieuseté de Jean Watters

Vous avez aussi œuvré pour la francophonie au sein de l’établissement. Avez-vous rencontré une certaine résistance, déjà à l’époque?

Oui et d’ailleurs, je suis fier de dire que j’étais le 2e recteur francophone de l’histoire de la Laurentienne. Une autre priorité à cette époque était de s’assurer que les francophones et les anglophones soient bien représentés. Nous avons créé une structure où il y avait un vice-recteur aux affaires francophones et un vice-recteur aux affaires anglophones. Malheureusement, ce modèle a disparu par la suite, et l’opposition est venue des francophones eux-mêmes.

Une pétition a été signée à cet égard, et certains m’ont avoué qu’ils avaient subi des pressions de leurs collègues. Finalement, la mesure a été approuvée par le conseil. Malgré toutes ces difficultés, cette période dans le milieu postsecondaire a été extrêmement valorisante. Si je devais tout recommencer, je resterais plus longtemps au Collège Boréal, car c’était la période la plus heureuse de ma carrière.

Vous avez défendu l’idée d’une Université du Nouvel-Ontario, gérée pour, par et avec les francophones. Croyez-vous que l’Université de Sudbury, dont la première rentrée a eu lieu cette semaine, incarne bien cette vision?

Oui, j’espère qu’ils auront les moyens financiers de le faire. Toutefois, ce que j’aurais aimé voir, c’est un consortium des différents établissements francophones, comme l’Université de Toronto, le Collège universitaire de Glendon, l’Université de Sudbury et l’Université de Hearst, travaillant tous ensemble sur un modèle qui existait pendant des années en Alberta. Quand je vois encore de la compétition entre les institutions, je trouve ça dommage. Lorsque l’Université Laurentienne est tombée en faillite, ce sont surtout les programmes francophones qui ont été le plus touchés, et c’est vraiment regrettable.

À gauche, Jean Watters, alors président du Club canadien de Vancouver, en compagnie de l’écrivaine Joy Kogawa et Enzo Guerriero, président de Celebrate Canada, au dîner Ordre du Canada / Journée du drapeau en 2006. Source : Gung HAGGIS Fat Choy

Quel est, selon vous, le plus grand danger auquel le milieu éducatif pourrait être confronté dans les prochaines années?

L’intelligence artificielle (IA) va révolutionner l’éducation et le travail. C’est un outil puissant, mais aussi porteur de dangers. Prenons l’exemple de mon ami, Tony Bates, un des experts mondiaux en technologies d’apprentissage. J’ai demandé à l’IA de rédiger sa biographie, en français. Quand il l’a lue, il a dit que c’était la meilleure description jamais faite de lui. Mais c’est aussi effrayant : nous n’en sommes qu’aux balbutiements.

Jean Watters (complètement à droite) est un des membres fondateurs du Réseau d’enseignement francophone à distance (REFAD). Ici, il remet un certificat d’honneur avec – de gauche à droite – Alain Langlois (Directeur REFAD), Lise Bégin-Langlois (Animatrice colloque), Dany Benoit (Président REFAD) et Jean Watters (Fondateur REFAD) au docteur Tony Bates (Consultant Contact Nord et Ryerson University) en 2020. Source : REFAD

Y a-t-il une rencontre marquante qui vous reste en mémoire?

Oui : Stephen Hawking. Nous avons passé presque une journée ensemble lors d’une visite scientifique. Ce n’était pas simple de communiquer, lui à travers sa machine, moi avec mon accent, mais c’est une rencontre qui m’a profondément marqué.

Après une telle carrière, comment vivez-vous votre retraite depuis 18 ans?

Ma femme et moi avons longtemps partagé notre temps entre la Colombie-Britannique et le Québec. Aujourd’hui, nous vivons à Richmond, près de Vancouver. Nous faisons encore beaucoup de bénévolat, et nous profitons de nos amis. Je passe aussi une heure et demie par jour sur Facebook! (Rires) J’y partage ce que je trouve intéressant, parfois mes opinions politiques, et je suis surpris de voir l’audience conséquente que ça rejoint. Par exemple, je remarquais récemment que 154 000 personnes ont vu ma page dans les 28 derniers jours, c’est pas mal.

Jean Watters en compagnie de son épouse, Renée Popov Watters, qu’il a rencontré en Colombie-Britannique lors d’une rencontre professionnelle il y a 18 ans. Gracieuseté de Jean Watters

1950 : Naissance à Québec (Québec).

1984 : Est nommé directeur de l’éducation permanente du campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta.

1994 : Devient le premier président du Collège Boréal.

1998 : Obtient le poste de recteur francophone de l’Université Laurentienne.

2001 : Reçoît l’Ordre des francophones d’Amérique et est reçu au sein de la Compagnie des Cent-Associés francophones.

2004 : Accède à la direction générale du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique.

Chaque fin de semaine, ONFR rencontre un acteur des enjeux francophones ou politiques en Ontario et au Canada.

La grève imminente dans 24 collèges de l’Ontario

À une semaine d’une grève potentielle dans les 24 collèges publics de l’Ontario, le bras de fer s’intensifie entre le Conseil des employeurs des collèges (CEC) et le Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario (SEFPO). Chacun se rejette la responsabilité de l’impasse.

Une grève est prévue le 11 septembre dans les 24 collèges publics de l’Ontario si aucune entente n’est conclue d’ici là. Les négociations entre le Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario (SEFPO) et le Conseil des employeurs des collèges (CEC) demeurent au point mort.

Dans un communiqué diffusé le 5 septembre, le CEC accuse le syndicat de privilégier la confrontation. « Le SEFPO montre clairement qu’il est plus intéressé par une grève que par la conclusion d’une entente », a déclaré le président du conseil Graham Lloyd, cité dans le communiqué.

Le CEC, qui agit en qualité d’agent négociateur représentant les collèges, affirme avoir offert plus de 140 millions de dollars en salaires et avantages sociaux, ainsi qu’une protection d’emploi, et rappelle avoir proposé une médiation ou un arbitrage, refusés par le syndicat.

Le SEFPO rejette ces accusations et assure que la grève n’est pas une fatalité. « Ce n’est pas nous qui bloquons les négociations. Nous avons demandé d’autres dates après la rencontre du 31 août, mais l’employeur n’a proposé que les 9 et 10 septembre. Nous étions prêts à reprendre plus tôt », affirme Dan Brisson, le président syndical de la section locale 672 du Collège Boréal.

La pomme de discorde réside dans deux revendications syndicales jugées « irréalistes » par le CEC : l’interdiction totale des fusions ou fermetures de collèges pendant la durée de la convention collective et le gel de toute réduction d’effectifs, peu importe les circonstances.

« Ces demandes ont été ajoutées tardivement, après le vote en faveur de la grève », soutient le Conseil.

Le syndicat défend sa démarche : « Nous avons tenté d’en discuter, notamment le 31 août, mais l’employeur a refusé d’en parler. Les syndicats ont le droit d’apporter de nouvelles propositions en cours de négociation, c’est justement ça, négocier. »

Parmi les revendications principales figure la sécurité d’emploi. Selon le SEFPO, plus de 10 000 postes ont été supprimés dans le réseau collégial, avec la suspension de 650 programmes, malgré des profits de 455 millions de dollars. « Au Collège Boréal, les inscriptions sont en hausse, et d’autres établissements rapportent aussi des augmentations. Il y a un décalage entre ce que nous vivons sur le terrain et ce qui est annoncé publiquement », souligne Dan Brisson.

Par ailleurs, le syndicaliste insiste sur le rôle essentiel du personnel de soutien. « Nous sommes les experts dans nos domaines. Les superviseurs encadrent, mais ils ne connaissent pas en détail nos tâches. Nous sommes essentiels et irremplaçables », conclut-il.

Collège Boréal : trois décennies d’innovation et d’expansion francophone en Ontario

SUDBURY – Il y a 30 ans, le Collège Boréal ouvrait officiellement ses portes après de longues luttes pour offrir l’éducation postsecondaire en français dans le Nord ontarien. Depuis, l’institution francophone a progressivement élargi sa mission en devenant un acteur central de l’éducation en Ontario français. Retour sur les moments marquants des 30 dernières années, à travers le regard de ceux qui l’ont façonnée.

C’était le mercredi 6 septembre 1995. Le Collège Boréal accueillait ses premiers étudiants dans plusieurs localités régionales : Hearst, Kapuskasing, Timmins, Elliot Lake, Sudbury, New Liskeard et Sturgeon Falls.

Pour l’occasion, une grande célébration avait lieu durant toute une semaine dans le Nord avec des prestations d’artistes de renom et des activités soulignant aussi le 20e anniversaire du drapeau franco-ontarien.

Le site principal, celui qui est toujours en fonction aujourd’hui, n’a ouvert qu’en octobre 1997, après deux années de construction.

La construction du site principal du Collège Boréal à Sudbury. Gracieuseté du Collège Boréal

Mais la bataille n’était pas gagnée d’avance. Avant l’annonce de la création du Collège Boréal en juillet 1993, les étudiants francophones du Nord de l’Ontario avaient très peu d’options d’études postsecondaires en français, et l’idée même d’un collège francophone suscitait des débats auprès des autorités éducatives.

C’est finalement sous l’impulsion du gouvernement provincial de l’époque que le projet a vu le jour, après plusieurs années de demandes et de pressions de la part des communautés francophones.

« Prendre cette décision était essentiel pour promouvoir l’égalité entre toutes les communautés de la province », se souvient Bob Rae, alors premier ministre ontarien.

Bob Rae a été à la tête du seul gouvernement néo-démocrate de l’histoire ontarienne et fut premier ministre de 1990 à 1995. La Presse Canadienne/John Falstead

« Au début, certains dans la communauté collégiale estimaient que les étudiants francophones pouvaient simplement aller étudier au Québec. J’ai dû rappeler que le français est solidement implanté en Ontario, notamment dans le Nord, et que la communauté a toujours défendu ses droits. »

Des débuts audacieux

Jean Watters, nommé président du Collège dès août 1994, se rappelle des défis particuliers auxquels il a été confronté.

Il a fallu mettre en place rapidement six centres régionaux et les relier avec des technologies encore rares à l’époque. Un système « Megastream » de Bell Canada a permis la vidéoconférence et de réduire les coûts de communication.

« Nous avons été le premier établissement canadien à obtenir ce système, à intégrer l’utilisation des ordinateurs portatifs dans nos programmes et à éliminer les tableaux noirs pour les remplacer par un système de projection intégré », se félicite celui dont le mandat à la tête de l’établissement a duré quatre ans.

Le Collège Boréal s’appelait Collège du Nord jusqu’en juin 1994 lorsque le nom officiel et des éléments de l’identité visuelle ont été dévoilés. Gracieuseté du Collège Boréal

Daniel Giroux, actuel président, abonde dans le même sens : « Dès le début, le collège voulait être innovant, c’est le cœur de sa mission. »

En outre, le Collège Boréal a été la première institution à se doter d’une coopérative étudiante en Ontario et a été reconnu comme le collège le plus innovant en Amérique du Nord par l’American Productivity and Quality Review Center en 1998.

Employabilité, immigration et cours de langue

La fermeture du Collège des Grands-Lacs en 2002 a marqué un tournant. Boréal a alors élargi sa portée pour desservir le Centre-Sud-Ouest de l’Ontario, de Windsor à Toronto.

« Au départ, Boréal était le Collège du Nord », raconte Daniel Giroux, actuel président du Collège Boréal. À l’époque, des programmes et services en français de Cambrian et Northern avaient été transférés au Collège Boréal.

Quelque 1300 « apprenants et apprenantes », comme on les appelait alors, suivaient une quarantaine de programmes, en ligne et en personne, sur les différents sites du Collège.

Daniel Giroux, qui travaille au Collège depuis 2007, a été reconduit à la présidence du Collège Boréal en juin 2025. Photo : Inès Rebei/ONFR

Depuis, l’institution a plus que doublé le nombre de ses programmes postsecondaires et d’apprentissage et a diversifié ses services pour inclure l’emploi, l’immigration et la formation linguistique.

« Il ne s’agit pas seulement de former des étudiants », mais aussi « d’intégration socio-économique »
— Daniel Giroux, président du Collège Boréal

« Il ne s’agit pas seulement de former des étudiants. Quand on parle de tous nos services, on parle vraiment de l’intégration socio-économique de nos étudiants et de nos clients », précise M. Giroux, à la tête de l’établissement depuis 2016.

En 2008, le Collège se distingue en devenant la première institution postsecondaire à être désignée en vertu de la Loi sur les services en français de l’Ontario.

Distillerie et baccalauréats

Un autre moment clé, selon Pierre Riopel et Daniel Giroux, est l’ouverture du campus de Toronto en 2012 et l’annonce d’un nouveau site dans le quartier de la Distillerie en 2018.

L’inauguration officielle a eu lieu en 2023. « On travaillait depuis longtemps pour avoir un campus permanent à la Distillerie. C’est vraiment impressionnant d’avoir ce beau campus à Toronto », souligne M. Giroux.

Le campus devrait déménager dans un emplacement permanent d’ici quelques années, dans la tour Ribbon, toujours au sein du quartier de la Distillerie. Gracieuseté de Collège Boréal

Le président du Collège Boréal Daniel Giroux et la ministre des Affaires francophones Caroline Mulroney coupent le ruban inaugural du nouveau campus de la Distillerie. Photo : Rudy Chabannes/ONFR

Le campus comprend également un centre d’emploi et l’Espace d’innovation, de recherche et d’incubation (EIRI), un incubateur financé par Desjardins pour accompagner les créateurs dans le développement et la réussite de leurs projets. Photo : Rudy Chabannes/ONFR

Après la fermeture du campus de New Liskeard en 2017, l’ouverture de celui de Windsor en 2018 et l’ajout de locaux à l’Université Saint-Paul d’Ottawa en 2019 et à London en 2022, le Collège est aujourd’hui implanté sur 34 sites, dont 8 campus, répartis dans 27 communautés ontariennes.

Pour Pierre Riopel, qui a été président du Collège Boréal de 2013 à 2016, cette vaste présence à travers la province constitue un atout, mais comporte aussi des défis. « Un des défis, c’est de créer ce sens d’appartenance dans chacune de ces régions de l’Ontario », explique-t-il.

L’année 2023 marque un tournant pour le Collège Boréal avec l’annonce par le gouvernement de l’Ontario de son premier baccalauréat autonome en sciences infirmières, un an après un financement conjoint des deux paliers de gouvernement.

En 2023, le Collège Boréal reçevait huit millions de dollars des deux gouvernement pour élaborer de nouveaux baccalauréats en santé. Photo : Inès Rebei/ONFR

Daniel Giroux souligne l’importance de cette évolution  : « Le fait d’offrir des baccalauréats de quatre ans en administration des affaires et en sciences de l’informatique témoigne aussi de la croissance et de la maturité du collège. »

Expansion internationale et partenariats

En 2022, le Collège Boréal poursuit son expansion, cette fois à l’international, avec une première entente pour la délocalisation de ses programmes à l’École canadienne de Tunis.

Par la suite, le Collège annoncera un partenariat avec le Maroc ainsi qu’une collaboration entrepreneuriale avec la Chambre de commerce Québec-Afrique.

Sous la présidence de Pierre Riopel, le Collège a lancé des programmes d’échange avec des établissements en Belgique et la France. Gracieuseté du Collège Boréal

M. Giroux insiste : « Chaque site est crucial. Notre ambition est que Boréal soit reconnu internationalement pour la qualité de sa formation et son impact sur les communautés francophones. »

Ces dernières années, le Collège Boréal a multiplié les partenariats et ententes, notamment avec l’Université de Moncton (Nouveau Brunswick), le Collège Mathieu en Saskatchewan, HEC Montréal au Québec et l’Université Laurentienne en Ontario.

« L’avenir de l’éducation supérieure ne peut se concevoir sans coopération et reconnaissance mutuelle entre institutions, non seulement au Canada, mais aussi à l’international », souligne Bob Rae, ambassadeur et représentant permanent du Canada auprès des Nations Unies à New York depuis 2020.

Le ministre Nolan Quinn (au centre) était présent pour le lancement du partenariat entre l’Université Laurentienne et le Collège Boréal en juillet dernier. Source : Collège Boréal

L’apprentissage pratique comme fil conducteur

Pour des diplômés comme Crépin Foké, le passage au Collège Boréal représente souvent un tournant décisif : « Boréal m’a permis de passer du savoir théorique à la pratique sur le terrain. »

« J’avais pour ambition de devenir ingénieur dans le domaine automobile et je voulais perfectionner mon anglais en Ontario. Des amis m’avaient aussi fortement recommandé le Collège Boréal, c’est ce qui a motivé mon choix », détaille celui qui avait quitté le Cameroun pour Sudbury.

Diplômé en technique de mécanique automobile en 2019, celui-ci s’est lancé dans la création d’une entreprise spécialisée dans l’assainissement et la maintenance industrielle.

« Aujourd’hui, je dirige deux entreprises dans le domaine de la maintenance industrielle et automobile. Sans Boréal, je n’aurais pas acquis ces bases pratiques ni la confiance nécessaire pour poursuivre une maîtrise à Montréal », raconte-t-il, désormais installé dans la métropole québécoise.

Crépin Foké est le lauréat 2025 de la catégorie Entreprise en croissance lors du 3e Gala de Reconnaissance des Entrepreneurs Noirs du Québec pour son entreprise Horizon avenir plus. Photo : Fonds Afro-Entrepreneurs

En deux ans, les demandes d’admission aux programmes postsecondaires de Boréal ont augmenté de plus de 80 %, passant de 2 956 en 2022 à 5 380 en 2024, selon les dernières données du Collège.

« Nous sommes le collège francophone le moins financé de l’Ontario »
— Daniel Giroux

Malgré l’imposition récente de quotas sur le nombre d’étudiants internationaux par le gouvernement fédéral, le Collège ne se dit pas affecté, à l’inverse du Collège La Cité d’Ottawa, et dit constater, au contraire, une hausse du nombre d’étudiants ontariens.

« Boréal est le seul collège ontarien ayant connu auprès de cette population, majoritairement ontarienne, trois années consécutives de hausse, soit une progression des demandes de plus de 50 % depuis 2022 », indique l’établissement, qui se présente comme le numéro un en Ontario.

Comment expliquer un tel engouement? « Ce qui nous distingue, c’est la Garantie Boréal », souligne M. Giroux, au sujet de ce programme qui offre aux diplômés n’ayant pas trouvé d’emploi dans leur domaine après 12 mois, la possibilité de suivre gratuitement une deuxième formation collégiale à temps plein.

Des simulations sont organisées pour former les cohortes en Soins paramédicaux et en Techniques des services policiers. Gracieuseté du Collège Boréal

Le collège francophone « le moins financé de l’Ontario »

Malgré ses réussites, Boréal fait toujours face à d’importantes contraintes financières.

« Nous sommes le collège francophone le moins financé de l’Ontario », souligne l’actuel président. « En 2019, nous avons subi une baisse de 13 % des subventions, alors que le modèle de financement n’a pas évolué depuis des années. C’est un défi permanent pour maintenir la qualité de nos services et l’accès à l’éducation. »

Selon lui, des changements s’imposent : « Le modèle de financement doit évoluer », notamment en tenant compte du gel des frais de scolarité qui pèse toujours sur le postsecondaire ontarien.

Pierre Riopel confirme : « Le financement demeure le principal obstacle pour les institutions francophones. Il est crucial de garantir des ressources suffisantes pour soutenir les communautés et assurer l’excellence des programmes. »

Plus de 24 500 diplômes ont été attribués depuis la création du Collège en 1995. Gracieuseté du Collège Boréal

« S’il n’y a pas d’appui fort des gouvernements, et si cet appui ne se reflète pas dans la culture et les efforts visant à permettre aux gens de travailler et de vivre en français, cela mettra en péril l’avenir de la communauté francophone et de la langue comme langue de travail », estime Bob Rae, qui a également été député fédéral pour le Parti libéral.

Célébrations et perspectives

Le 30e anniversaire du Collège Boréal coïncide presque avec le 50e du drapeau franco-ontarien. Pour l’occasion, plusieurs célébrations sont prévues partout en Ontario.

Entre autres, à Kapuskasing, un volet se tiendra le 13 septembre lors du Business Awards Gala, en partenariat avec la Chambre de commerce du corridor du Nord. À Sudbury, un cocktail précédera le Banquet des Franco-Ontariens le 25 septembre, en collaboration avec l’ACFO du Grand Sudbury et l’AFO.

Du côté de Toronto, une réception aura lieu le 28 octobre en marge du Sommet francophone Finance & Investissement, en partenariat avec le Club Canadien de Toronto.

Pour les trois prochaines décennies, le Collège ambitionne de poursuivre sa croissance et de diversifier ses programmes.

« Nous voulons être reconnus comme la meilleure institution francophone au monde, tout en restant profondément connectés aux besoins des communautés locales et internationales », conclut Daniel Giroux.

Au TIFF, on « influence le regard sur le monde par les auditoires », selon Julie Roy

Julie Roy est la directrice générale et cheffe de la direction de Téléfilm Canada, organisme fédéral qui finance et promeut le cinéma partout au pays.

Du 4 au 14 septembre, 291 films sont en compétition au 50e TIFF. De grosses productions internationales comme Frankenstein de Guillermo Del Toro, mais aussi des affiches canadiennes telles que Seule au front de Mélanie Charbonneau.

Le Canada, qui tente d’accroître son influence et sa place dans l’industrie, part à la rencontre des auditoires et compte nouer des ententes de coproduction.

Qu’est-ce que ce 50e anniversaire du TIFF représente pour vous, personnellement, et pour Téléfilm Canada?

C’est un moment extraordinaire parce que c’est la rencontre avec le public, l’effervescence des équipes, mais aussi un moment qui marque le début de l’automne et de la saison des festivals. Du point de vue de Téléfilm, en tant que partenaires du TIFF, j’aime beaucoup qu’on se rattache à la mission du festival qui veut, à travers les films, influencer le regard sur le monde par les auditoires. Et je trouve que c’est très beau et ça nous rejoint, à Téléfilm qui est soucieux de rejoindre les publics du Canada et ceux du monde entier.

Quel souvenir marquant retenez-vous d’une édition précédente du TIFF en lien avec Téléfilm ou le cinéma canadien?

L’année dernière, il y avait trois longs-métrages du Manitoba en compétition. J’ai eu le plaisir de présenter Rumours, le film de Guy Maddin sur scène avec Roy Dupuis et Cate Blanchett. On voit à quel point nos réalisateurs canadiens peuvent attirer des talents de haut niveau à l’international, et ça fait très plaisir à voir. C’était un moment marquant pour moi.

Quelle va être la présence de tels films cette année? Est-ce que vous pouvez nous en dire plus sur la sélection canadienne de cette année?

Pour son 50e anniversaire, le TIFF a sélectionné une cinquantaine de films canadiens, dont 24 longs-métrages présentés en primeur. C’est une importante et très significative sélection. Pour Téléfilm, ce sont aussi le début des rencontres professionnelles. On espère que des ententes de coproduction vont se décider, que des acheteurs vont acheter des films canadiens. Et Téléfilm participe à des panels chaque année.

Comment se traduit concrètement la présence de Téléfilm pendant les 10 jours du festival?

On a un panel où on explique si votre projet est prêt à être soumis et on nous a octroyé une salle plus grande cette année parce que ce panel est de plus en plus populaire. Ça montre à quel point les gens ont un intérêt à participer à la culture canadienne. Et on offre aussi un panel sur la distribution, un maillon important de la chaîne en cinéma parce qu’on a des voix diverses, nos histoires sont racontées, mais il faut rejoindre nos publics.

Projetons-nous maintenant en 2026. Avec le lancement de The Market l’année prochaine, quels changements majeurs anticipez-vous pour l’industrie canadienne?

L’officialiser vient dire à nos partenaires de la planète, à l’international, qu’il y a un rendez-vous en bonne et due forme à Toronto, au Canada. Ça change les choses parce qu’au niveau de la délégation, ça va inciter des gens à participer de manière plus formelle, plus structurée. Et à Téléfilm, on a l’intention de faire ce qu’on fait à l’étranger, que ce soit à Cannes ou à Berlin : être en charge du pavillon canadien et se faire l’ombrelle de l’ensemble des provinces, pour créer des conversations.

Quel voeu formulez-vous pour les films canadiens?

Évidemment j’ai un parti pris, mais je voudrais que le Canada se retrouve dans les lauréats, à la toute fin, reconnu par le jury. On se souhaite bonne chance!

Le casse-tête des garderies francophones dans l’Est ontarien

OTTAWA – La demande pour des services de garde en français explose dans la capitale fédérale, mais l’offre peine à suivre. Malgré la création de nouvelles places et l’appui de programmes fédéraux et provinciaux, le secteur reste fragilisé par le manque de personnel, les pressions financières et le risque d’assimilation pour les familles francophones.

Selon la Ville d’Ottawa, le nombre actuel de places pour les enfants francophones de 0 à 3 ans ne répond qu’à 52 % de la demande.

« En raison de la baisse des frais, la demande a fortement augmenté et cela fait en sorte qu’il est plus difficile pour les familles de trouver des services de garde », explique Jason Sabourin, directeur des Services à l’enfance de la Ville d’Ottawa.

Les familles inscrivent désormais leurs enfants plus tôt, surtout depuis la mise en place par le gouvernement fédéral en 2021 du régime de garde à 10 $ par jour, explique Jason Sabourin. Résultat : les inscriptions au registre municipal des enfants de 0 à 5 ans ont bondi de 300 % depuis 2019, souligne M. Sabourin.

« La demande a fortement augmenté depuis la mise en place des garderies à 10 $ par jour », explique Jason Sabourin, responsable des Services à l’enfance à la Ville d’Ottawa. Photo : Ville d’Ottawa

Entre 2023 et 2026, la Ville prévoit la création de 125 nouvelles places désignées francophones dans les quartiers mal desservis et défavorisés, afin d’atteindre un objectif de 40 % de places pour les populations autochtones et francophones. La province prévoit également des places francophones dans les nouvelles écoles, ajoute la même source.

Le secteur francophone en difficulté

Pour l’Association francophone à l’éducation des services à l’enfance de l’Ontario (AFÉSEO), l’enjeu dépasse le nombre de places. Le véritable défi reste le recrutement et la rétention du personnel éducateur, relève cette association qui compte 25 garderies francophones.

« Les salaires ne sont pas compétitifs : pour le même travail dans un conseil scolaire, l’écart peut atteindre 10 à 20 $ de l’heure », indique Martine St-Onge, directrice générale de l’AFÉSEO. « Même lorsqu’on recrute et qu’on forme du personnel, beaucoup quittent pour de meilleures conditions ailleurs », déplore Mme St-Onge.

À cela s’ajoutent des conditions de travail exigeantes : horaires prolongés, absence de régime de pension et avantages sociaux limités. Dans plusieurs centres, des places autorisées par permis demeurent inoccupées, faute d’éducatrices.

En région, la situation est encore plus compliquée. « À Embrun, par exemple, nous avons l’espace et l’autorisation pour 13 enfants supplémentaires, mais aucun personnel pour ouvrir ces places », illustre Mme St-Onge. « Le logement est rare et les loyers exorbitants. Pour un salaire de 22 ou 23 $ de l’heure, les éducatrices n’arrivent pas à joindre les deux bouts. »

« Sans services de garde, les familles ne peuvent pas travailler. Or, même le personnel de garde n’arrive pas à vivre dignement de ce métier », rappelle la directrice générale de l’AFÉSEO.

Le recours au recrutement international reste limité : les diplômes obtenus à l’étranger ne sont pas reconnus par l’Ordre des éducatrices et éducateurs de la petite enfance de l’Ontario, ce qui oblige à classer les recrues comme « non formées ».

Le menace de l’assimilation

Au-delà de la question économique, c’est la vitalité du français qui est en jeu. Sans places francophones, les familles doivent se tourner vers l’anglais.

Martine St-Onge, directrice générale de l’AFÉSEO, alerte sur la difficulté à recruter et retenir du personnel éducateur francophone en Ontario. Gracieuseté

« Une fois qu’un enfant passe ses premières années dans un service anglophone, les parents hésitent à l’inscrire dans une école de langue française de peur qu’il échoue. C’est un vecteur d’assimilation », avertit la directrice générale de l’AFÉSEO.

À Ottawa, du côté municipal, certains élus tentent d’agir. La conseillère Stéphanie Plante cherche un nouvel espace en Basse-Ville pour compenser la relocalisation, prévue en 2027, du Centre éducatif Pinocchio sur la rue Somerset Ouest.

Mais la conseillère ne cache pas son inquiétude quant à la difficulté de trouver une place en garderie, et encore plus en français. « Nous constations que des enfants de parents francophones fréquentaient des garderies anglophones ou bilingues qui, dans les faits, fonctionnaient surtout en anglais. Résultat : ils arrivaient à l’école sans être bilingues », explique la conseillère.

Le gouvernement fédéral dit être conscient de ces enjeux. Emploi et Développement social Canada rappelle que « les soins reçus en services de garde peuvent influencer grandement le développement global d’un enfant, y compris ses compétences linguistiques et son identité ».

Les accords bilatéraux conclus en 2021 avec les provinces et territoires incluent ainsi des dispositions visant à protéger les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Ces ententes, prolongées jusqu’en 2031, doivent être renégociées dès mars 2026.

Objectifs nationaux, défis provinciaux

À l’échelle canadienne, les résultats demeurent inégaux. Le Centre canadien de politiques alternatives (CCPA) souligne dans une étude que « la plupart des provinces ont du mal à atteindre les objectifs indiqués dans les ententes ».

Au premier trimestre de 2025, environ 51 800 places avaient été créées en Ontario, alors que la cible fixée pour la fin de 2024-2025 était de 53 567 places. Malgré ce retard, la province se classe parmi les plus avancées, derrière la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick.

Une Sudburoise à la tête du Centre de planification en santé francophone

Natalie Aubin devient la première directrice générale du Centre de planification des services de santé en français de l’Ontario. Elle aura pour mission de piloter cette nouvelle structure provinciale créée pour moderniser et renforcer l’accès aux soins en français.

Nommée par le conseil d’administration du nouveau Centre de planification des services de santé en français de l’Ontario (CPSSF), Natalie Aubin entrera en fonction le 3 novembre 2025. 

Entretemps, la directrice régionale Oureye Seck agira à titre de directrice générale par intérim du Centre du 1er septembre jusqu’au 2 novembre 2025.

Franco-Ontarienne née à Elliot Lake et ayant grandi à Sudbury, Natalie Aubin cumule une expérience d’une vingtaine d’années dans les soins aigus, la santé publique, les services sociaux et l’enseignement postsecondaire, y compris 17 ans dans des rôles de direction.

« J’ai hâte de travailler avec nos partenaires pour construire un système de santé plus inclusif et mieux adapté, pour servir les communautés francophones de l’Ontario dans ces nouvelles fonctions », a déclaré Mme Aubin, citée par un communiqué, soulignant que le Centre représente un pas en avant audacieux pour garantir l’accès équitable à des services de santé de haute qualité en français.

Annoncé par le gouvernement de l’Ontario en juin 2025, le Centre établi à Ottawa a le mandat de moderniser et d’améliorer les services et les résultats en santé pour les francophones de la province.

Il remplace depuis le 1er septembre les six entités de planification des services de santé en français, ce qui permettra « de minimiser les dédoublements et de réduire les fardeaux administratifs », avait expliqué Santé Ontario.

Le Centre a été créé conjointement par l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) et l’Hôpital Montfort, est gouverné par un conseil d’administration indépendant et compte 31 employés répartis dans chacune des six régions de Santé Ontario.

« Natalie Aubin est largement reconnue pour ses habiletés interpersonnelles exceptionnelles, sa grande capacité intellectuelle, son esprit d’innovation et d’entrepreneuriat et sa capacité à rallier la communauté et les partenaires du secteur. Nous sommes enchantés d’avoir recruté un tel talent comme première directrice générale du Centre », a indiqué pour sa part, Lise Bourgeois, présidente du conseil d’administration du Centre de planification des services de santé en français.

Mme Aubin occupe actuellement plusieurs fonctions de direction. Elle est vice-présidente régionale, Action Cancer, pour le Nord-Est de l’Ontario à Santé Ontario, vice-présidente à la responsabilité sociale à Horizon Santé Nord (HSN) et conseillère à l’Institut de recherche de HSN, à Sudbury. À ce titre, elle dirige une équipe de plus de 1000 professionnels et gère un budget de 125 millions de dollars.

Au fil de sa carrière, Natalie Aubin a piloté d’importantes initiatives de transformation dans des domaines variés : santé mentale et toxicomanie, soins en cancérologie, santé maternelle et infantile, santé des Autochtones et services de santé en français.

Le Festival international du film de Toronto célèbre discrètement son 50e anniversaire

TORONTO – Le Festival international du film de Toronto (TIFF) déroule le tapis rouge pour une 50e fois, alors que l’édition 2025 se tient du 4 au 14 septembre. C’est pourtant sans flafla que le plus grand festival de films au Canada traverse l’étape du demi-siècle.

Une programmation assez régulière attend les cinéphiles entre les tapis rouges, les remises de prix, les événements pour l’industrie,  les causeries avec des artisans du cinéma et les présentations de grands films attendus comme de films d’auteur plus marginaux.

La sélection n’en est pas moins impressionnante. En incluant les courts-métrages, les classiques du cinéma restaurés en 4k et toutes les sections de la programmation, ce sont 291 films qui seront présentés. Le film d’ouverture est John Candy : I Like Me réalisé par Colin Hanks et produit par Ryan Reynolds.

John Candy : I Like Me est le film d’ouverture du TIFF 2025. Photo : gracieuseté du TIFF

Ce documentaire en hommage à un grand acteur et humoriste canadien tiendra sa première mondiale à Toronto, au grand bonheur du président-directeur général du TIFF, Cameron Bailey. « Nous adorons le fait que la carrière générale de John ait débuté à Toronto, a-t-il affirmé dans un communiqué. Colin Hanks a fait un film largement divertissant, rempli des plus grandes vedettes d’Hollywood, mais comme John, ce film en est un de cœur. Selon nous, c’est la meilleure façon de commencer la 50e édition du TIFF. »

De nombreuses vedettes canadiennes, américaines et internationales fouleront les tapis rouges de la Ville Reine. On peut penser à Angelina Jolie ou Jodie Foster, qui tiennent la vedette respectivement dans les films des réalisatrices françaises Alice Winocour (Couture) et Rebecca Zlotowski (Vie privée). On pourra aussi apercevoir Keanu Reeves, Matthew McConaughey, Sydney Sweeney, Ryan Reynolds, Natalie Portman, Daniel Craig, Claire Denis, Dustin Hoffman, Scarlett Johansson, et Dwayne The Rock Johnson, pour ne nommer que ceux-là.

Daniel Craig sur le tapis rouge, en 2022. Photo : Spring Morris

Une liste de plus ou moins 730 invités, dont une vingtaine de francophones, est disponible sur le site web du TIFF, permettant aux cinéphiles de vérifier si leur artisan du cinéma préféré s’y trouve.

Le Festival de rue du TIFF célèbre pour sa part ses 10 ans. La fête se passe du 4 au 7 septembre sur la rue King Ouest.

Et les organisateurs réfléchissent déjà à l’an prochain, avec l’arrivée annoncée d’un marché du film officiel. Le gouvernement fédéral a accordé 23 millions de dollars afin de soutenir le TIFF dans ce projet qui attirera des gens de l’industrie cinématographique de partout dans le monde afin de développer des liens d’affaires et de discuter des projets en chantier de chacun.

50 ans de cinéma : le balado

ONFR a lancé le balado TIFF 2025 : 50 ans de cinéma afin de rappeler l’histoire et l’importance du TIFF pour l’industrie du cinéma.

Dans un premier temps, le critique et journaliste Brian D. Johnson se rappelle les débuts du TIFF et ses plus belles années de couverture pour le magazine Macleans. Avant le milieu des années 1980, la relation entre les organisateurs, les vedettes et les médias était plus étroite, selon lui.  « L’esprit rock and roll n’est plus là, mais les grandes lignes du festival du début restent », comme le fait d’être une vitrine pour le cinéma canadien et mondial ou l’idée d’être un événement pour le public d’abord, où le Torontois moyen peut se retrouver.

La réalisatrice québécoise Chloé Robichaud abonde dans le même sens. « Ce que j’apprécie énormément de Toronto, c’est ce contact direct avec le vrai public », composé majoritairement de cinéphiles amateurs.

Chloé Robichaud témoigne de l’influence du TIFF sur ses rêves d’enfant et de son impact sur sa carrière. Elle commente aussi l’importance de la programmation francophone et la place du cinéma québécois. « Ça permet aux films québécois de se faire voir par le reste du Canada. Parfois, j’ai l’impression qu’on est un peu deux planètes, et le TIFF est vraiment un pont entre les deux. »

L’ancienne programmatrice du TIFF et vice-présidente de Cinespace Studio, Magali Simard, dévoile comment les films sont sélectionnés et ce qu’elle pouvait apporter en tant que francophone. « Il y a une très grosse présence de cinéma francophone au Canada. (…)  C’est un peu dur de porter le jugement sur un cinéma que l’on peut connaître, mais qui n’est pas d’une culture que l’on vit. Je pense que ça a fait du bien (d’avoir une francophone à l’interne). »

Elle donne aussi des détails sur les ambitions du futur marché du film, qui amènera des milliers de membres de l’industrie du cinéma mondial à Toronto en 2026.

« Ça existe à Cannes, ça existe à Los Angeles… ça bouche un trou assez important, je pense. On a beaucoup d’espoir pour ce marché-là, qui va capitaliser sur le fait que oui, on peut continuer à montrer des films au public, mais il faut s’assurer que le côté business continue. »

La réalisatrice abénaquise Alanis Obomsawin, extrêmement respectée dans l’industrie du cinéma et au TIFF, vient compléter la liste d’invités du balado. Son film Kanehsatake : 270 ans de résistance a gagné le prix du meilleur film canadien en 1993. Dernièrement, il a été projeté dans le cadre de l’initiative « l’histoire du TIFF en 50 films », qui soulignait le cinquantenaire du festival.

10 films en français à voir au TIFF

En collaboration avec la réalisatrice culturelle pour ONFR et grande habituée du TIFF, Joanne Belluco, voici une sélection d’œuvres à voir. Elles sont francophones, en tout ou en partie.

Mille secrets mille dangers, l’adaptation par Philippe Falardeau du roman d’Alain Farah, fait partie des films québécois attendus au TIFF. Photo : gracieuseté du TIFF
Vie privée (Rebecca Zlotowski)Film policier / France / Première canadienneUn thriller psychologique « sournoisement comique » mettant en vedette Jodie Foster
Bouchra (Orian Barki, Meriem Bennani)Film d’animation / Italie, Maroc, États-Unis / Première mondialeEn anglais, arabe et français. Film d’animation narratif mettant en vedette une coyote queer.
Couture (Alice Winocour)Drame / France, États-Unis / Première mondiale Film bilingue mettant en vedette Angelina Jolie dans le rôle d’une cinéaste américaine qui arrive à la semaine de la mode à Paris.
Chien 51 (Cédric Jimenez)Science-Fiction / France / Première nord-américaineDeux policiers mal assortis enquêtent sur la mort du créateur d’une intelligence artificielle.
Folichonneries (Éric K. Boulianne)Comédie érotique / Québec / Première nord-américaineAprès 16 ans et deux enfants, François (Éric K. Boulianne) et Julie (Catherine Chabot) tentent de ramener du piquant dans leur vie sexuelle.
Mille secrets mille danger (Philippe Falardeau)Drame / Québec / Première mondialeAdaptation du roman à succès d’Alain Farah.
Nouvelle vague (Richard linklater)Comédie / France / Première canadienneLe film raconte la création d’À bout de souffle, le classique de Jean-Luc Godard emblématique de la Nouvelle vague du cinéma français.
Seule au front (Mélanie Charbonneau)Chronique biographique / Québec / Première mondialeInspiré de l’histoire vraie de la capitaine Sandra Perron, première femme officier d’infanterie au Canada, qui a dénoncé le sexisme de l’armée et les traumatismes qu’elle y a subis.
Amour apocalypse (Anne Émond)Comédie romantique / Québec / Première TorontoiseDéjà en salle au Québec et dans certains cinémas canadiens. Histoire d’amour improbable entre un propriétaire de chenil écoanxieux (Patrick Hivon) et la femme du soutien technique de sa lampe de luminothérapie (Piper Perabo)
Sk+te’kmujue’katik (At the Place of Ghosts)Drame surnaturel, mélange des genres / Canada, Belgique / Première mondialeEn français, anglais et Mi’kmaq. Deux frères éloignés depuis des années devront s’unir pour chasser les esprits et les traumas qui les hantent.

Val Thérèse : première rentrée pleine de fébrilité à l’école Notre-Place

SUDBURY – Cris d’enfants, autobus jaunes et cahiers neufs : la rentrée s’anime ce mercredi dans les écoles de langue française du Conseil scolaire du Grand Nord (CSGN) et du Conseil scolaire catholique du Nouvel Ontario (CSC Nouvelon). Pour l’occasion, ONFR s’est rendu à Val Thérèse, où l’école Notre-Place ouvre ses portes pour la première fois.

Après l’Est ontarien la semaine passée et le reste de la province, c’est au tour des 5600 élèves du CSC Nouvelon et aux 2600 élèves du CSGN de faire leur rentrée ce mercredi matin.

À Val Thérèse, devant les portes de la nouvelle école élémentaire du CSC Nouvelon, les enseignants saluent les élèves par des « Bonjour » et des « Bienvenue », tandis que les parents, sourires aux lèvres, immortalisent l’instant en photos.

Cette rentrée a permis à certains enseignants de retrouver d’anciens élèves, désormais réunis sous un même toit. Photo : Inès Rebei/ONFR

Patrick Thibert, parent de deux enfants, est le premier arrivé à l’école située sur la route principale de Val Thérèse : « On vit plein d’émotions, que ce soit les parents, le personnel, la direction ou les élèves. Mais ce qu’on ressent le plus, c’est l’excitation et le bonheur ».

Selon lui, l’école, qui a recueilli près de 400 inscriptions et pourra accueillir jusqu’à 587 élèves, permettra aux enfants de développer de nouvelles compétences et de la résilience. 

« Ils vont devoir apprendre à travailler en équipe parmi un plus grand nombre d’élèves. Ça va leur donner de la confiance et des habiletés importantes pour la vie. »

Selon Patrick Thibert, le projet de la nouvelle école a été au cœur de nombreuses discussions entre parents au cours de la dernière année. Photo : Inès Rebei/ONFR

Une plus grande école

Tina Smith, venue avec son fils, était tout aussi enthousiaste. « On est excité parce que c’est une plus grande école. Il va y avoir plus d’amis ici. C’est nouveau et très beau. En plus, c’est plus proche, ça nous fait gagner du temps le matin », raconte celle qui travaille non loin de l’établissement scolaire.

Selon elle, l’emplacement est un atout : « C’est très bien localisé, pas loin du cœur de notre communauté, et c’est une école très visible. »

Non loin de là, Chelsea Watkins, qui a inscrit ses deux enfants après un passage dans le système public, met de l’avant l’importance du milieu francophone et catholique. 

Tina Smith habite dans la collectivité de Hanmer. Photo : Inès Rebei/ONFR

Elle souligne également l’aspect communautaire et religieux de l’école. « Le Conseil a beaucoup à offrir. Le programme permet à nos enfants d’apprendre sur la foi, les fêtes comme Noël et d’autres traditions, tout en faisant partie d’une communauté francophone. »

« C’est essentiel pour nous de garder la langue française et la religion dans notre famille. Mon conjoint parle français et c’est important que nos enfants soient immergés dans ce milieu dès leur plus jeune âge », ajoute celle dont la fillette faisait sa première rentrée.

Chelsea Watkins, ici accompagnée de son partenaire et de ses deux enfants, dit que sa fillette n’a cessé de parler de la rentrée tout au long de l’été. Photo : Inès Rebei/ONFR

Une école pour rassembler et moderniser

L’école Notre-Place a été conçue pour regrouper trois anciennes écoles : l’École Notre-Dame de Hanmer (200 élèves, maternelle à la 8e année), l’École St-Joseph de Hanmer (100 élèves, maternelle à la 3e année) et l’École Ste-Thérèse de Val Thérèse (120 élèves, 4e à 8e année). 

« On va manquer nos trois autres écoles, mais maintenant on commence un nouveau chapitre et c’est quelque chose de spécial », confie M. Tibert, qui a été impliqué dans plusieurs comités de ces écoles dont l’état de délabrement avait été maintes fois soulevé.

L’école élémentaire Notre-Place dessert les familles de Val Thérèse, Hanmer et Capréol, trois localités où la communauté francophone est bien implantée. Photo : Inès Rebei/ONFR

Le bâtiment comprend également un centre de la petite enfance de 88 places, réparties en cinq salles : une pour 10 nourrissons, deux pour 30 tout-petits, et deux pour 48 enfants d’âge préscolaire. 

Le Conseil scolaire catholique Nouvelon avait reçu plus de 4,2 millions de dollars du gouvernement fédéral et près de 1,4 million de dollars du gouvernement de l’Ontario, en octobre 2024, pour la construction de cette nouvelle garderie.

Des espaces sont aussi prévus pour des programmes destinés aux jeunes mères et leurs enfants, favorisant l’intégration dans le milieu francophone.

Une transition attendue depuis longtemps

Également présent pour accueillir les parents, Tom Michaud, directeur de l’éducation du CSC Nouvelon, souligne que le regroupement des trois écoles répondaient à un besoin réel. 

L’école compte 28 salles de classe et environ 50 à 60 enseignants, incluant le personnel de soutien et l’administration. Photo : Inès Rebei/ONFR

« On est bien heureux avec les 400 élèves déjà inscrits et on s’attend à en accueillir de plus en plus avec les années. Ça fait une belle grande famille », se satisfait-il, ajoutant que la plupart des enseignants viennent des trois anciennes écoles, tandis que certains découvrent pour la première fois leur nouvelle affectation à Notre-Place.

Quant aux bâtiments des anciennes écoles, certains feront l’objet de mises en vente. « Ce sont des démarches que nous menons avec le ministère et les différentes agences responsables afin de gérer ces propriétés de manière responsable », précise celui qui est directeur du CSC depuis janvier dernier.

M. Michaud rappelle que l’idée d’une nouvelle école remonte à plus de dix ans. Des consultations menées en 2013-2014 avaient montré que les trois établissements étaient en besoin majeur de rénovation. 

Tom Michaud, qui a une longue carrière en éducation en Fransaskoisie, est aussi le secrétaire-trésorier du Conseil scolaire catholique du Nouvel-Ontario. Photo : Inès Rebei/ONFR

L’étude de faisabilité avait alors conclu que la construction d’un nouvel édifice serait l’option la plus efficace, tant pour la formation de la relève que pour la gestion responsable des fonds publics.

Le choix du nom de l’école, qui fait référence à l’hymne bien connu des Franco-Ontariens, a impliqué toute la communauté : élèves, membres du personnel, paroissiens et familles ont participé à des sondages et des activités en classe pour proposer et voter sur le nom et la mascotte.

Une cérémonie d’ouverture officielle et de bénédiction de l’école aura lieu en octobre prochain.

L’Ontario et la Nouvelle-Écosse s’allient pour la francophonie

TORONTO – La ministre des Affaires francophones de l’Ontario, Caroline Mulroney, et le ministre des Affaires acadiennes et de la Francophonie de la Nouvelle-Écosse Colton Leblanc ont signé la veille au soir un engagement commun de collaboration pour renforcer les communautés francophones.

Comme précédemment avec la Belgique en septembre 2021, puis avec la France et le Nouveau-Brunswick en avril 2024, la province s’allie avec la Nouvelle-Écosse en vue de renforcer leur coopération autour de la francophonie via une déclaration conjointe.

Ce type d’ententes vise à encourager et à promouvoir les échanges culturels, éducatifs et économiques dans le cadre de leur Francophonie commune, à partager l’information et les meilleures pratiques et à accroitre la coopération dans les domaines de l’enseignement supérieur, de la culture, de la recherche, des médias numériques, de la jeunesse et de la promotion de la langue française.

« L’Ontario et la Nouvelle-Écosse partagent une vision commune d’une francophonie forte et dynamique. À cet égard, nos deux provinces ont signé aujourd’hui une déclaration conjointe réaffirmant leur engagement à collaborer pour renforcer nos communautés francophones », a publié Caroline Mulroney, sur son compte officiel X.

« Cet accord s’inscrit dans la stratégie globale de l’Ontario visant à favoriser l’épanouissement de notre francophonie et à en assurer la pérennité. »

Rencontre et signature virtuelles entre les ministres Caroline Mulroney et Colton Leblanc. Photo : Compte X de Caroline Mulroney

Son homologue néo-écossais a exprimé le fait que : « La Nouvelle-Écosse et l’Ontario partagent un profond engagement envers la langue et la culture françaises (…) Nous franchissons une nouvelle étape pour renforcer notre partenariat. »

« Le français est au cœur de notre avenir commun. Il stimule la croissance économique et l’innovation, enrichit notre culture et facilite l’accès aux services dans les deux langues officielles. Dans l’esprit de la déclaration commune, nous prendrons des mesures concrètes pour soutenir les communautés acadiennes et francophones et pour contribuer à l’épanouissement du français », a conclu celui-ci.

Les ministres Mulroney et Leblanc avaient pu de se rencontrer et échanger à l’occasion du Sommet de la Francophonie de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) en octobre 2024.

C’est d’ailleurs à cette occasion que la Nouvelle-Écosse avait été élue membre observateur de l’OIF.

De son côté, en août 2024, la Nouvelle-Écosse avait également signé un accord avec le Manitoba pour appuyer la préservation et la promotion de la langue française.

Violence scolaire à son paroxysme : une enseignante témoigne

Les trois quarts des enseignants et des travailleurs en éducation ontariens ont été victimes de violence, l’année dernière, selon un rapport. La violence scolaire des élèves aurait explosé de la maternelle au secondaire, selon l’AEFO (Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens) dont les membres ont été équipés de protections en kevlar de la tête aux pieds. Une enseignante francophone témoigne des agressions physiques et verbales répétées qu’elle a subies.

Enseignante depuis 25 ans dans la région d’Ottawa, à la fois en classe régulière et en classe d’éducation spécialisée, Marie-Hélène – un prénom d’emprunt afin de préserver son anonymat – est enseignante suppléante depuis sa récente retraite.

Elle estime avoir été frappée, dans sa carrière, par cinq à six jeunes en tout, de 4 à 8 ans et insultée par une vingtaine d’élèves, de 3 à 13 ans.

« Il y a toujours eu des actes de violence isolés dans les écoles, mais ce qui était exceptionnel a fini par l’être de moins en moins. » Un constat amer pour celle-ci.

En 2017, elle est contrainte de changer d’établissement après un incident. Dans l’un des cas de violence physique, un enfant la frappait sept à huit fois par jour aux jambes, aux mains et au dos, revenant à la maison endolorie par les coups. Un autre jeune lui courait fréquemment après pour la frapper.

« J’étais bouleversée qu’on me dise : ‘Arrête de venir nous voir, tu n’auras pas d’aide’. C’était épouvantable. »
— Marie-Hélène, enseignante francophone

Un jour, après une énième tape à son encontre, et à celle de plusieurs autres élèves, à bout, elle réplique en lui tapant sur la main et s’attire les foudres de sa direction.

Fragilisée psychologiquement, elle est contrainte de prendre un congé de maladie prescrit par son médecin, puis de changer d’école.

« Malgré la détresse quotidienne que je vivais, je n’avais aucun soutien de mes supérieurs, déplore-t-elle. Je demandais pourtant de l’aide à chaque fois. J’étais bouleversée qu’on me dise : ‘Arrête de venir nous voir, tu n’auras pas d’aide’. Je savais que c’était inacceptable d’endurer ça. C’était épouvantable. »

Même engagée ailleurs, elle est de nouveau confrontée à sept élèves violents envers d’autres élèves, mais avec, cette fois, « un soutien et une oreille attentive de la direction ».

« Les établissements sont toutefois démunis quant aux solutions. Quand on doit sortir la classe face à un jeune en crise, ça pénalise les autres élèves dans l’apprentissage. Les formations sont bénéfiques, mais ne règlent pas l’origine du problème. »

Déni des parents et des autorités scolaires, classes surchargées, manque de ressources et non prise en charge des besoins spéciaux individuels… Autant d’ingrédients qui conduisent à banaliser la violence physique et verbale, regrette-elle.

« Pourquoi ne voit-on pas des panneaux dans les écoles ‘Aucun acte de violence ne sera toléré’ ? On voit ça partout ailleurs, dans les transports en commun, par exemple. Pourquoi, nous les enseignants, on devrait tolérer ça ? », questionne-t-elle.

« C’est une belle profession avec des gens engagés qui ont l’éducation des enfants à cœur. Mais il y a malheureusement un épuisement. La plupart des jeunes enseignants ne pratiquent pas plus de cinq ans, car la charge est plus lourde d’année en année. Ce n’est pas juste d’ajouter toujours plus à la charge des enseignants ».

Du matériel de protection « de la tête aux pieds »

Le rapport Au bout du rouleau de l’Université d’Ottawa du printemps 2025 révèle que les trois quarts du personnel enseignant répondant ont vécu de la violence dans la dernière année (71 % ont subi au moins une tentative de recours à la force physique initié par un élève, et 80 % ont subi un ou plusieurs actes, tentatives ou menaces de recours à la force physique), et que la fréquence moyenne des actes violents a plus que doublé entre 2018 et 2023 (de 8,8 à 18,4 incidents).

« On le sait, on l’entend de nos membres. On parle d’injures et de violence physique dès la maternelle jusqu’à la fin du secondaire », confirme en entrevue avec ONFR, Gabrielle Lemieux, la présidente de l’AEFO.

Protections en kevlar : « Toutes les écoles en sont équipées. C’est grave d’en arriver là. »
— Gabrielle Lemieux, présidente de l’AEFO

Des équipements de protection en kevlar ont été mis à disposition des enseignants et des travailleurs en éducation : casquettes en kevlar, protection de tibias, de bras, épaulettes, souliers à câble d’acier, pour se protéger des morsures. « Toutes les écoles en sont équipées. C’est grave d’en arriver là, s’alarme-t-elle. C’est une réponse temporaire et pas une solution durable. »

Et d’enchérir : « On parle aussi de résurgence du mot en ‘n’ envers les enseignants racialisés. C’est plus qu’inquiétant, c’est troublant. »

« Les réseaux sociaux y sont sûrement pour beaucoup. La violence a bon train en ligne : cachés derrière un écran, les jeunes ne voient pas les conséquences morales et humaines. La pandémie a ouvert les vannes du monde digital peu monitoré. »

Soit l’hypothèse d’une perte des nuances et du filtre réalité, avec les barrières imposées par le monde réel et par l’école.

L’AEFO, qui a fait plusieurs demandes vaines d’entretien avec le ministre de l’Éducation, Paul Calandra, juge qu’il manque 1500 $ d’investissement par élève à combler. « On n’a pas injecté les ressources financières pour venir appuyer ces enseignants et livrer efficacement les programmes. »

Sa présidente estime indispensable la formation du personnel à la désescalade, à la gestion des comportements difficiles, de même que l’introduction dans les écoles d’intervenants en apprentissage et de professionnels, psychothérapeutes et travailleurs sociaux, pour adresser les défis des élèves.

Les députés NPD Chandra Pasma, au centre, et Jamie West, à gauche, en conférence de presse sur la violence scolaire. Photo : Capture du Studio média de l’Assemblée législative de l’Ontario

Dès l’automne dernier, du personnel enseignant s’était rendu à Queen’s Park, vêtu de ce fameux matériel de protection, accompagné des députés néo-démocrates Chandra Pasma (Ottawa-Ouest-Nepean) et Jamie West (Sudbury) : « Nous nous sommes joints à six syndicats du secteur de l’éducation pour demander au gouvernement de mettre en œuvre un plan d’urgence. Les élèves et le personnel méritent d’être à l’abri de la violence à l’école ».

Depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement Ford a retiré 6,36 milliards de dollars des salles de classe de nos enfants, dénonce le NPD.

Le député libéral d’Ottawa-Sud, John Fraser, a lui aussi pris position : « La véritable solution serait que le gouvernement réduise la taille des classes, aide des enfants ayant des besoins particuliers et élabore un plan concret pour faire face à la crise de santé mentale croissante à laquelle nos enfants sont confrontés. »

Malgré plusieurs sollicitations, le ministre Calandra n’a pour l’heure pas donné suite à nos demandes d’entrevue.

Avec l’aide à la recherche de Jacques-Normand Sauvé.

Une vague de fierté devant Mon beau drapeau (nouvelle génération)

OTTAWA – À l’occasion du 50e anniversaire du drapeau franco-ontarien cette année, et du 25e anniversaire de la chanson Mon beau drapeau l’an prochain, le compositeur Brian St-Pierre a réuni des milliers de personnes afin de créer une nouvelle version de son hymne au drapeau. En quelques jours, la vidéo Mon beau drapeau (nouvelle génération) cumule plus de 12 000 vues sur Youtube et des centaines de « j’aime », commentaires et partages sur les différentes plateformes. Ces statistiques, très enviables pour l’Ontario français, démontrent un sentiment d’appartenance toujours bien vivant.

En entrevue avec ONFR, le compositeur Brian St-Pierre déborde de fierté. C’est la première fois que Mon beau drapeau bénéficie d’un vidéoclip officiel, et le résultat va au-delà de ses attentes.  

Le compositeur de la chanson originale et chef d’orchestre de cette nouvelle mouture hésite à qualifier son œuvre de We Are The World franco-ontarien, puisque l’intention derrière la chanson est toute autre. C’est pourtant un commentaire qui ressort souvent depuis l’apparition de la nouvelle version sur laquelle s’enchaînent les vedettes francophones de la province.

Une partie des Chansonniers d’Ottawa, lors d’un enregistrement de la nouvelle version de Mon beau drapeau, au Gala Trille Or 2025. Photo : Rachel Crustin/ONFR

C’est la plus illustre de ses anciennes élèves (Brian St-Pierre a mené une carrière d’enseignant en musique) qui prête sa voix à la première phrase, alors que Véronic Dicaire entame : « Ils ont fait souche dans ce pays blanc… » Elle est suivie de Robert Paquette, Damien Robitaille, Céleste Lévis, Stef Paquette, Manon Séguin, Kimya, Yan Leduc et les Rats d’Swompe, Sophie Grenier, JOLY, LeFLOFRANCO, Martine Lafontaine (la chanteuse originale de Mon beau drapeau), YAO, Johanne Lefebvre et les chansonniers d’Ottawa, en plus de Brian St-Pierre lui-même.

On aperçoit également Jean-Pierre Perreault au début et à la fin du vidéoclip. L’auteur des paroles de Mon beau drapeau apparaît en homme solitaire, griffonnant dans son cahier ce qui allait devenir un véritable hymne pour sa communauté.

Un échantillon des nombreux commentaires élogieux en lien avec la nouvelle version de Mon beau drapeau. Photo : Capture d’écran, Youtube Brian St-Pierre

Des ambitions de grandeur

L’objectif de ce vidéoclip était double. Premièrement, réunir des artistes francophones qui réussissent au-delà des frontières de la province, pour stimuler la fierté franco-ontarienne. Ensuite, « Démontrer qu’on est un grand peuple, c’est-à-dire qu’on n’est pas une petite gang. On est une grosse gang. Dans la vidéo, c’est incroyable », se réjouit Brian St-Pierre en pensant aux différents rassemblements où ont eu lieu les tournages.

En plus des artistes énumérés, on retrouve plus de 3000 figurants, la plupart étant des jeunes. C’est Félix Saint-Denis qui a coordonné la présence des caméras dans des endroits comme le Festival franco-ontarien ou le tournoi d’improvisation provincial l’AFOLIE. « 350 adolescents habillés en vert et blanc. C’était hallucinant! » exprime Brian St-Pierre.

L’idée de Mon beau drapeau (nouvelle génération) a germé en février, plus ou moins six mois avant sa sortie officielle. « On a des images… les gens vont penser que ça fait deux ans qu’on filme. Ça n’a pas de bon sens. On ressent une fierté… je suis encore ému ».

Il remercie le Centre franco, qui a offert le plus gros support financier, ainsi que les conseils scolaires francophones, autant publics que catholiques. « S’ils n’avaient pas dit oui, ça ne se serait pas fait. C’est trop immense comme travail. »

Plusieurs autres organismes et entreprises figurent au générique des remerciements.

Le vidéoclip Mon beau drapeau (nouvelle génération) connaît un grand succès, quelques jours après sa sortie.

Comme pour de nombreux projets de Brian St-Pierre, les écoles pourront utiliser la chanson pour des activités en classe. Dans le dossier d’accompagnement, on retrouve entre autres des ateliers de création autour de la chanson et du drapeau et une version karaoké « aux quatre coins de l’Ontario » avec des images de partout en province.

Félix Saint-Denis a élaboré une véritable anthologie de 237 chansons qui parlent de fierté franco-ontarienne, intitulée L’ONTARIE S’ENCHANTE! Chansons et slams qui racontent l’Ontario français.

Brian St-Pierre a créé 25 capsules de huit minutes chacune pour parler de Mon beau drapeau et de différents artistes de la francophonie de la province, dont les 16 qui ont participé au nouveau vidéoclip. La dernière capsule du projet 25 septembre, 25 jours, 25 artistes met l’emphase sur l’hymne franco-ontarien officiel, Notre Place, de Paul Demers et François Dubé, plaçant ainsi les deux œuvres côte à côte et non en compétition.

Légers changements de paroles

L’un des événements où le vidéoclip a été tourné dans les derniers mois est le Gala Trille Or, alors que Brian St-Pierre avait interprété la chanson en duo avec Céleste Lévis. La chanteuse originaire de Timmins avait témoigné de l’importance de Mon beau drapeau dans la construction de sa fierté francophone, dans un endroit où « ce n’était pas cool de parler français. »

Céleste Lévis et Brian St-Pierre chantent Mon beau drapeau au Gala Trille Or 2025. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Des témoignages du genre, Brian St-Pierre en entend souvent. C’est aussi pour cela qu’avec l’accord de Jean-Pierre Perreault, les paroles de l’hymne au drapeau ont été légèrement modifiées afin d’être plus inclusives.

Déjà, il y a quelques années, la phrase « Je suis Franco-Ontarien » a été mise au pluriel : « Nous sommes Franco-Ontariens. » 

En 2025, dans le refrain, l’expression « des Français de l’Ontario » devient « des francos de l’Ontario » afin que tous les francophones puissent s’y identifier.

Une autre phrase porte ce message, comme l’explique Brian St-Pierre. « Il y a des nouveaux arrivants de partout. Fiers d’être venus et d’être restés, ok, on peut dire que c’est vrai pour les francophones de souche française. Mais (les nouveaux arrivants) aussi sont fiers d’être venus, d’être restés et d’être encore là après tant d’années. »

Cette phrase prend un nouveau sens lorsqu’elle est prononcée par YAO. Originaire de la Côte d’Ivoire et arrivé au Canada à 12 ans, il est aujourd’hui l’un des artistes les plus connus de l’Ontario francophone.

Cinq jours de création, 25 ans de fierté

La chanson originale Mon beau drapeau a été créée en cinq jours, suite à une demande du Conseil scolaire de district catholique de l’est ontarien (CSDCEO). C’était en 2001, alors que le drapeau vert et blanc était hissé à Queen’s Park, pour la première fois de façon permanente.

Jean-Pierre Perreault a écrit le texte, Brian St-Pierre a composé la musique et Martine Lafontaine a apposé sa voix.

La chanson devait représenter un lever de drapeau, ce qui explique sa structure en crescendo. La tonalité a été établie afin que « monsieur-madame Tout-le-monde » soit capable de la chanter.

Un caméo de Jean-Pierre Perreault, l’auteur de la chanson, dans le vidéoclip de Mon beau drapeau (nouvelle génération). Photo : Capture d’écran Youtube Brian St-Pierre

Cette semaine de création a été on ne peut plus efficace, alors que la chanson a rapidement été adoptée par tous les conseils scolaires francophones et reconnue à travers la province. « J’en ressens encore aujourd’hui une grande fierté », lance Brian St-Pierre.

Il est le maître d’œuvre de cette nouvelle version, ayant coréalisé le vidéoclip aux côtés de Jean-Michel Ouimet (Klash média). Les arrangements musicaux ont été faits en duo avec Marc-Antoine Joly, qui signe également le mixage et la mastérisation.

Rentrée à l’Université de Sudbury : une « première cohorte névralgique »

Serge Miville est le recteur et vice-chancelier de l’Université de Sudbury.

L’Université de Sudbury accueillera sa première cohorte depuis sa relance ce mardi. Le 7 juillet dernier, le gouvernement Ford a annoncé un financement de 10,8 millions de dollars à l’Université de Sudbury pour son partenariat avec l’Université d’Ottawa.

Serge Miville décrit cette première cohorte comme étant névralgique , car elle permettra d’ajuster l’offre de cours selon la demande.

« D’où viennent principalement les étudiants de cette première cohorte?

On en a qui viennent de Sudbury, mais aussi d’Ottawa, du Nord-Est, du Nord-Ouest. La cohorte est très diversifiée : certains étudiants viennent directement du secondaire, tandis que d’autres ont terminé leurs études secondaires depuis plus d’un an. Cela crée une bonne mixité, avec des profils variés qui reflètent le bassin provincial.

Combien d’étudiants sont inscrits pour cette rentrée et comment ces chiffres se comparent-ils aux prévisions ou aux attentes de l’Université?

Ça risque de fluctuer, ce qui est très normal, mais en ce moment on parle de 20 à 30 étudiants.  Une des choses importantes à noter, c’est que, puisque l’annonce a été faite il y a six semaines, compte tenu du contexte, je pense que les gens devraient être fiers de ce que nous avons accompli. 

Êtes-vous fin prêts pour cette rentrée, surtout au niveau des disciplines nécessitant des ateliers pratiques comme la biochimie ou le biomédical?

Concernant les sciences pures, comme la biomédicale ou la biochimie, il n’y a pas de cours offerts lors du premier semestre. Les programmes seront déployés progressivement selon la demande des étudiants. La première cohorte est très névralgique dans ce sens, car il n’était pas possible de simplement publier l’offre de cours habituelle. Il fallait attendre le retour des étudiants pour s’ajuster en conséquence.

La rentrée en janvier est prévue, mais l’attention est principalement portée sur le premier semestre. Les salles de classe ont été adaptées et mises à niveau pour l’enseignement présentiel. Les préparatifs sont donc terminés pour cette étape, et ceux pour le semestre suivant sont également en cours. On est tous très occupés et fébriles, mais tout est prêt pour accueillir la cohorte.

Avec une capacité de 173 lits, la résidence de l’Université de Sudbury accueille non seulement les étudiants de l’UdeS, mais aussi des jeunes issus d’autres établissements de la région. Photo : Inès Rebei/ONFR

Quelles disciplines attirent le plus vos étudiants justement?

Les sciences de la santé suscitent beaucoup d’intérêt, mais aussi les humanités. On le voit, même dans une petite cohorte, il y a déjà des profils très variés. L’Université de Sudbury se distingue un peu des autres établissements parce que son baccalauréat est structuré autour d’un tronc commun.

Ce tronc commun comprend des cours obligatoires pour tous les étudiants ainsi qu’une mineure en leadership, ce qui signifie que pendant le premier semestre, une grande partie des cours est commune à tous, sans être exclusivement centrée sur le tronc commun. L’objectif est de créer une dynamique multidisciplinaire et d’encourager l’interconnexion entre étudiants de différentes disciplines.

Souhaitez-vous éventuellement obtenir une désignation fédérale pour accueillir des étudiants internationaux?

C’est un processus que l’Université va devoir entamer et qui doit également passer par la province de l’Ontario. En ce moment, toute notre attention est centrée sur cette rentrée et nos opérations. Une prochaine étape, c’est évidemment cette désignation-là comme étant un des projets de l’institution pour le futur.

À quoi ressemble le corps professoral de ce semestre?

On a six chargés de cours qui se partagent l’enseignement. Certains avaient déjà enseigné ici avant la fermeture, d’autres non. C’était important pour nous d’avoir un équilibre entre des visages connus de la communauté universitaire et de nouvelles expertises qui viennent enrichir notre offre.

L’Université de Sudbury était affiliée à l’Université Laurentienne jusqu’à sa crise financière de 2021. Photo : Archives ONFR/Inès Rebei

Vous avez aussi mis en place des bourses pour vos étudiants qui leur permettent de couvrir les droits de scolarité cette année. Pouvez-vous nous en parler?

Oui, tout au long du siècle, on a reçu des dons qui nous permettent d’offrir des bourses à nos étudiants pour alléger les frais de scolarité. Une bonification de bourse est absolument disponible pour ceux qui sont éligibles et qui font des études à plein temps. Quelqu’un qui souhaite étudier à temps partiel est bienvenu, mais n’aurait pas accès à ce système de bourse. Pour une petite université, c’est important, parce qu’on veut vraiment faciliter l’accès aux études.

Cette rentrée est présentée comme une étape importante pour la relance de l’Université. Concrètement, quels indicateurs allez-vous surveiller dans les prochains mois pour savoir si elle est réussie?

Pour moi, ça va être la capacité d’écouter nos étudiants, de recueillir leurs commentaires et de bâtir avec eux. Le signal qu’on veut envoyer, c’est que les étudiants ne sont pas seulement des personnes qui reçoivent une éducation, mais aussi des artisans de cette institution.

Encore une fois, cette première cohorte joue un rôle important car elle co-crée l’expérience universitaire qu’elle souhaite vivre. L’influence des étudiants est importante sur la manière dont l’institution va évoluer au fil des années. L’Université cherche vraiment à être à l’écoute des étudiants : « par et pour » ce n’est pas un slogan, mais une pratique active, afin de mettre en place les ajustements nécessaires selon les besoins et de faire les choses un peu différemment. »

Marie-Eve Sylvestre : ancrer l’Université d’Ottawa dans sa communauté

OTTAWA – Première femme à la tête de l’Université d’Ottawa depuis sa fondation en 1848, Marie-Eve Sylvestre place la francophonie, l’engagement communautaire et l’autochtonisation au cœur de son mandat. Rectrice désignée depuis le 3 juin, elle souhaite conjuguer ambition académique et gestion responsable pour assurer la viabilité et le rayonnement de l’établissement.

« D’où vient votre intérêt pour le droit et comment votre parcours s’incarne-t-il dans l’identité de l’Université d’Ottawa que vous dirigez désormais?

Cela fait déjà plusieurs années, depuis la fin du secondaire et mes débuts collégiaux au Québec, que j’ai développé un intérêt pour le droit. À l’époque, je m’impliquais dans la politique étudiante, dans la représentation des droits et des intérêts des étudiants.

C’est ce goût pour la représentation et la justice sociale qui m’a naturellement amenée vers le droit, nourri aussi par mes préoccupations citoyennes et sociales. Ma famille venait d’un milieu de classe moyenne, et observer ces réalités m’a poussée vers ces enjeux.

En entamant mes études en droit à l’Université de Montréal, puis aux cycles supérieurs, je me suis particulièrement intéressée aux interactions entre le droit et les populations marginalisées, racisées et autochtones. J’y voyais la capacité du droit à provoquer du changement et à contribuer à la réforme de notre société pour plus de justice.

Est-ce ce fil conducteur a animé votre parcours de chercheuse et d’enseignante?

Oui, tout autant que mes interactions avec les étudiants, essentielles à mes yeux. Dès cette époque, j’ai commencé à tisser des partenariats avec la communauté.

Aujourd’hui, au rectorat, ma vision est celle d’une université actrice sociale, ancrée dans son milieu, qui répond aux besoins de formation et de recherche et interagit avec différentes communautés : les francophones, le secteur privé, les gouvernements, les milieux de la santé et de l’éducation. Mon mandat sera placé sous le signe de l’ouverture et du partenariat.

Lors de votre désignation, trois priorités ont été mises de l’avant : la francophonie, les Autochtones et la viabilité financière. Sur la question autochtone, on compte environ 1000 étudiants sur 49 000. Quels sont vos objectifs?

J’étais doyenne de la Faculté de droit avant ma nomination, et j’y ai créé un programme spécifique pour les étudiants autochtones : un certificat en droit autochtone. Ce programme leur donne accès aux études en droit de manière plus accessible, moins étrangère et dans le respect des cultures. J’aimerais promouvoir ce type de modèle à l’échelle de l’université.

L’Université d’Ottawa a déjà annoncé la gratuité pour les nations anichinabées présentes sur le territoire que nous occupons. Mais il faut aller plus loin : diminuer les barrières d’accès aux études postsecondaires, créer un milieu accueillant, transformer nos espaces physiques, mieux comprendre et valoriser les savoirs autochtones, qui sont milléniaux.

En droit, par exemple, les Autochtones concluaient déjà des traités internationaux bien avant l’arrivée des colons européens. L’université a donc un rôle à jouer pour tendre la main aux communautés, répondre à leurs besoins et appuyer la revitalisation des langues.

Et pour ce qui est de la francophonie, disposez-vous de moyens suffisants?

En matière de francophonie, il existe un réel sous-financement provincial. L’Université d’Ottawa offre près de 400 programmes en français, dont environ 60 exclusivement en français. Nous accueillons environ 80 % des étudiants francophones de l’Ontario : nous desservons donc une large part de la communauté.

Cela demande des fonds pour appuyer le développement de ces programmes. Un groupe d’experts qui s’est penché sur la viabilité financière des universités ontariennes a démontré qu’il existait un manque à gagner important, particulièrement en ce qui concerne la mission francophone de l’Université d’Ottawa. Le ministère a d’ailleurs mis sur pied un groupe de travail pour chiffrer ce manque et mieux appuyer les étudiants francophones.

Est-ce que la majorité des étudiants francophones viennent de l’étranger?

Pas nécessairement. Cette année, on observe une hausse importante des inscriptions d’étudiants francophones ontariens et de la communauté d’Ottawa, ce qui est un excellent signe.

En revanche, nous anticipons une baisse du nombre d’étudiants francophones internationaux en raison des délais et restrictions fédérales sur les visas. Aujourd’hui, la majorité de nos francophones proviennent de l’Ontario, du Canada et du Québec.

Justement, ces restrictions sur les permis d’études vont-elles impacter vos ressources?

Le contexte budgétaire reste difficile : restrictions provinciales sur les frais de scolarité, financement stagnant sauf dans quelques secteurs précis, et limites imposées par le fédéral quant au nombre de permis d’études octroyés aux étudiants internationaux. Cela touche tout le secteur universitaire.

Face à cette réalité, nous devons être créatifs : générer de nouveaux revenus, rationaliser nos dépenses, tout en protégeant notre mission fondamentale — l’enseignement, la recherche et le service à la communauté franco-ontarienne.

Lors des réductions de permis d’études, l’impact sur la mission francophone n’a pas toujours été évalué. Une plainte a d’ailleurs été déposée au Commissariat aux langues officielles et nous attendons son rapport. Entre-temps, des ajustements ont été faits, mais des difficultés persistent, notamment avec des taux d’acceptation de visas très variables qui touchent particulièrement les étudiants issus de pays francophones.

Venons-en à la viabilité financière. L’Université était en déficit en 2023. Où en êtes-vous aujourd’hui?

En 2023, l’Université d’Ottawa affichait un déficit opérationnel de 18 millions de dollars. Ce n’est pas soutenable à long terme. Le Bureau des gouverneurs a donc approuvé un plan visant à revenir à l’équilibre budgétaire d’ici deux ans.

Nous faisons les représentations nécessaires auprès des gouvernements, mais nous travaillons aussi à diversifier nos sources de revenu. Mon objectif est clair : conjuguer ambition académique et gestion responsable pour assurer la viabilité et le rayonnement de l’établissement.


2005 : Se joint au corps professoral de l’Université d’Ottawa après des études en droit à l’Université de Montréal et un doctorat (S.J.D.) à Harvard.

2019 : Devient doyenne de la Section de droit civil de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa.

2022 : Reçoit la distinction d’avocate émérite (Ad. E.) du Barreau du Québec.

2025 : Est nommée rectrice et vice-chancelière de l’Université d’Ottawa

Chaque fin de semaine, ONFR rencontre un acteur des enjeux francophones en Ontario et au Canada.

Coup d’œil sur la programmation de La Nouvelle Scène Gilles Desjardins à Ottawa

OTTAWA – Les quatre compagnies de théâtre rattachées à La Nouvelle Scène Gilles Desjardins (LNSGD) ont lancé leur programmation jeudi soir, dans un événement à l’édifice du 333 rue King-Edward. Le thème général est Réimpressions, un titre dont la signification varie selon la mission du Théâtre de la Vieille 17, du Théâtre Catapulte, du Théâtre du Trillium et de Vox Théâtre. ONFR s’est entretenu avec les directeurs et directrices des quatre compagnies.

Chaque année, l’une des compagnies de LNSGD s’occupe de trouver ce qui lie les quatre programmations afin de créer une image de saison commune. C’était le mandat du Théâtre de la Vieille 17 cette année. Sa directrice artistique, Geneviève Pineault, explique la réflexion derrière le thème Réimpressions.

« Il y a cette idée d’événements, de personnes ou de rencontres qui laissent une marque, qui laissent une impression. On est qui l’on est, mais on change au fil des événements et des personnes qui laissent une empreinte sur nous. »

La Vieille 17 : engagé sans être moralisateur

Pour la Vieille 17, la saison commencera en novembre avec Le Volcan, le plus récent texte de la Franco-Ontarienne Marie-Thé Morin. Inspirée par l’éruption du Mont Saint Helens, en 1980, elle en fait une métaphore pour parler de la violence domestique. Après en avoir eu un aperçu aux Feuilles vives de Théâtre Action, Geneviève Pineault s’est empressée de lui faire une place dans sa programmation, ressentant une urgence de présenter cette nouvelle création rapidement.

L’autrice s’est inspirée des acteurs Roch Castonguay et Gabrielle Brunet Poirier pour élaborer le texte, dont elle signe aussi la mise en scène. « C’est vraiment une rencontre de ces trois artistes ensemble », apprécie Geneviève Pineault.

L’affiche de la pièce Le volcan, qui sera présentée du 5 au 8 novembre. Image/graphisme : • Bureau60a

Un autre coup de cœur pour la directrice artistique est Nzinga, une coproduction du Centre de Théâtre d’Aujourd’hui et du Théâtre de La Sentinelle qui sera également présentée au Théâtre français de Toronto et au Théâtre du Nouvel-Ontario https://onfr.tfo.org/les-liens-souterrains-et-humains-du-theatre-du-nouvel-ontario/  (Sudbury) cette saison. Tatiana Zinga Botao y raconte sa propre histoire, alors qu’elle a découvert être la descendante d’une reine congolaise. Geneviève Pineault aime qu’on parle de colonialisme, mais pas de façon pédagogique. « On ne fait pas la leçon. »

C’est un peu le même argument pour La nuit du caribou, un spectacle jeunesse coprésenté par le Théâtre de la Vieille 17 et Vox Théâtre. « C’est une fable écologique. On apprend des choses aux enfants, mais on ne tombe pas dans la morale. »

Geneviève Pineault aime aussi l’idée d’accueillir une compagnie d’une région non urbaine, alors que le Théâtre de la Petite Marée se trouve à Bonaventure, en Gaspésie, au Québec.

Les quatre directeurs artistiques ont présenté leur programmation à venir dans un événement à LNSGD jeudi soir. Photo : page Facebook La Nouvelle Scène Gilles Desjardins

Les créateurs de la région d’Ottawa-Gatineau ne sont pas en reste. Les Voyageurs immobiles et le théâtre Rouge Écarlate ont reçu un appui financier et logistique de la Vieille 17 pour créer Comme des bruissements, qui aborde le sujet de l’activisme environnemental, souvent porté par les femmes. Les artistes préparent une réelle soupe sur scène et le spectacle se termine en moment de discussion avec les spectateurs, une tasse de soupe à la main. « Il y a ce côté d’être ancré dans l’échange, dans ce sentiment de communauté », explique Geneviève Pineault.

Vox : quête d’identité

La compagnie jeunesse Vox Théâtre mise sur la recherche de soi et l’appartenance au groupe pour sa 46e saison.

Outre La nuit du Caribou, elle accueille la pièce Petit pois, qui a déjà fait ses preuves. Créée à la fin des années 1980 par la Belge Agnès Limbo, elle est aujourd’hui reprise par Kleine Compagnie et Presentation House Theatre, en collaboration avec la compagnie Gare centrale, qui a produit la version originale.

Avec humour et délicatesse, la pièce qui nous présente la quête d’un petit pois égaré parle en fait de l’expérience du nouvel arrivant, une « analogie vraiment spéciale » qu’apprécie Pier Rodier.

Vox Théâtre mise aussi sur le premier texte pour enfants de la dramaturge ottavienne Lisa L’Heureux en coproduisant Parmi les monstres avec le Théâtre de Dehors. En mêlant la marionnette et le théâtre d’ombres, la pièce parle de la quête d’identité du jeune Billy, qui devra affronter ses peurs pour mieux se comprendre.

Parmi les monstres sera présentée le 6 décembre à LNSGD. Photo : Théâtre de Dehors

Alors que plusieurs travailleurs des arts déplorent une difficulté de ramener les gens en salle depuis la pandémie, Pier Rodier affirme sentir un regain d’engouement pour le théâtre jeunesse. Il croit que les parents cherchent à passer du temps de qualité avec leurs enfants… et à les éloigner des écrans. « Nos ventes vont très bien », affirme-t-il.

Pour Vox théâtre, l’heureux problème est que les enfants du quartier voient souvent les pièces avec leur école, grâce aux matinées scolaires. Il arrive tout de même à attirer des familles pour les représentations grand public, pour une ou deux représentations par spectacle.

Catapulte : le corps transformé par l’esprit

Le théâtre Catapulte exploite des thèmes assez sombres. La directrice artistique et codirectrice générale, Isabelle Bartkowiak, parle de traumas intergénérationnels, de résilience, de comment la douleur peut devenir lumière et des souvenirs qui restent.

La saison explore « notre corps à travers tous les revirements de la vie, les chamboulements, les obstacles, les révoltes qu’on va vivre. À quel point il se transforme et ce qui peut sortir de beau des blessures. »

Dans Les ensevelies (19 au 22 novembre), le spectateur suit quatre personnages sur une période d’un an, après la disparition d’une jeune fille de leur entourage. Photo : Théâtre Catapulte

Dans Les ensevelies, l’autrice Caroline Bélisle traite de féminicide et de violence faite aux femmes et aux enfants. Le spectacle « traite du sujet sans tomber dans l’analytique, selon Isabelle Bartkowiak. Ça s’écoute un peu comme un thriller. »

Beaucoup plus légère, Pour Maëlle s’adresse à un public de 16 à 35 ans pour parler de transfuge de classe chez les enfants d’immigrants. À la sortie des bars, un jeune homme d’origine libanaise tombe amoureux d’une artiste qui vient d’un milieu totalement différent.

Isabelle Bartkowiak signe elle-même le docu-fiction Bon voyage?, une pièce sur le deuil qui s’adresse aux 10 à 14 ans. « C’est pertinent à aller voir en tant que parent et d’amener ton ado ou ton préado, explique l’autrice. C’est une belle manière de commencer à ouvrir la discussion sur la place qu’ont les gens qui ne sont plus dans nos vies. »

Le gardien des enfants du Théâtre indépendant s’adresse pour sa part à un public averti de 18 ans et plus. La pièce parle d’adultes ayant vécu des agressions sexuelles dans leur enfance, dans un texte dense d’une cinquantaine de minutes, qu’Isabelle Bartkowiak qualifie de poétique.

Le Trillium : à l’avant-garde

Le directeur artistique et général du Théâtre du Trillium, Pierre Antoine Lafon Simard, souhaite recruter des spectacles « en marge de la création contemporaine, qui explorent de nouveaux territoires ».

« Ça ne veut pas nécessairement dire d’aujourd’hui », nuance-t-il en prenant l’exemple de Transfiguration. Cette performance d’Olivier de Sagazan a été créée en 1998 et a pourtant encore été remarquée cette année au Festival off Avignon, en France.

Le Trillium coproduit, avec Chambre noire, La jeune fille suppliciée sur une étagère, qui sera présentée en mars. « On s’enligne sur un très beau projet, qui pourtant parle de la mort, mais qui donne espoir, qui est extrêmement drôle. »

La saison de LNSGD s’étendra du 9 octobre 2025 au 23 mai 2026.

TIFF 2025 : 50 ans de cinéma, le balado

Le Festival international du film de Toronto (TIFF) célèbre ses 50 ans. Pour l’occasion, ONFR s’entretient avec cinéastes, critiques et professionnels de l’industrie, qui nous plongent dans la petite et la grande histoire d’un des plus prestigieux festivals de cinéma au monde, Made in Canada.

Le critique, journaliste et réalisateur Brian D. Johnson, auteur du livre Brave Films Wild Nights : 25 Years of Festival Fever qui retrace les 25 premières années du TIFF, nous plonge dans l’histoire du festival, non sans quelques anecdotes croustillantes. La réalisatrice Québécoise Chloé Robichaud parle du rôle du TIFF dans l’évolution de sa carrière. Magali Simard, ancienne programmatrice pour le TIFF et Vice-présidente de Cinespace Studio, entre dans les détails de l’industrie cinématographique de la ville Reine. Finalement, la réalisatrice de renommée internationale, Alanis Obomsawin, parle de l’impact du TIFF sur le cinéma autochtone canadien.

Droits linguistiques des voyageurs : la Cour suprême se penchera sur la question

Une cause juridique de l’Ottavien Michel Thibodeau ira à la Cour suprême du Canada, lui qui a multiplié les batailles judiciaires contre les aéroports du pays pour des violations de droits linguistiques dans les dernières années.

Jeudi, le plus haut tribunal au pays a accepté d’entendre la demande d’appel de l’Administration de l’aéroport international de St. John’s qui conteste des pénalités financières que lui a ordonné d’octroyer la Cour fédérale. Le Conseil des aéroports du Canada est aussi un intervenant dans cette cause.

En 2022, la cour fédérale avait tranché que l’Aéroport de St. John’s se devait de payer 5 000 $ à Michel Thibodeau, qui poursuivait l’administration aéroportuaire pour violation de ses droits linguistiques. 

L’affaire a débuté en 2018 lorsque Michel Thibodeau a déposé six plaintes auprès du commissaire aux langues officielles (CLO) en vertu de la Loi sur les langues officielles. Il y alléguait que les communications sur les réseaux sociaux, les sites web et certains slogans de l’aéroport n’étaient disponibles qu’en anglais.

Le CLO a donné raison au plaignant qui, appuyé par ces décisions, a poursuivi ensuite l’Aéroport de St. John’s, réclamant des dommages et intérêts.

En 2024, la Cour d’appel fédérale a refusé d’infirmer la décision rendue par la Cour fédérale deux ans plus tôt. La Cour suprême entendra donc l’appel, mais la date d’audience n’est pas encore connue. Comme à chaque fois qu’il accepte d’entendre une cause, le plus haut tribunal au pays ne partage pas les motifs derrière cette décision.

Dans le sommaire du dossier, la Cour suprême soutient que les questions portant sur cette cause sont notamment la bonne définition du terme « voyageurs » dans la Loi sur les langues officielles, si les administrations des aéroports se doivent de communiquer dans les deux langues officielles ou encore si des entités tierces gérant des aéroports sont assujetties à des obligations linguistiques.

De 2016 à 2021, Michel Thibodeau a déposé 410 plaintes visant des autorités aéroportuaires et 158 autres concernant diverses instances fédérales. En février 2024, il avait obtenu gain de cause contre l’Aéroport international Pearson de Toronto, condamné à lui verser 6 500 $ à la suite d’une bataille judiciaire.

Devant les tribunaux fédéraux, l’Ottavien a été accusé par les aéroports canadiens d’avoir « trouvé un moyen de rentabiliser ses droits linguistiques ». Selon eux, les dommages et intérêts qu’il reçoit « ne servent qu’à améliorer sa situation financière », avaient-elles soutenu, dans une décision connexe, mais où Michel Thibodeau poursuivait l’Administration des aéroports régionaux d’Edmonton.

Les Compagnons des francs loisirs souhaitent rassembler le Nipissing en 2025-2026

NORTH BAY – Les Compagnons des francs loisirs (les Compagnons) ont lancé leur saison 2025-2026 mercredi soir. En plus du retour de certaines traditions communautaires, la programmation fait la belle part aux artistes du Nord de l’Ontario, dont plusieurs sont reconnus partout en province et au-delà.

Les Compagnons souhaitent miser sur trois valeurs phares : ouverture, inclusion et désir de rassembler. « Notre engagement reste le même : écouter notre communauté, créer des ponts entre les générations, inviter des artistes de tous horizons », indique le directeur général, Arnaud Claude.

Des activités auront lieu dans toute la région du Nipissing, « de North Bay à Mattawa, en passant par Bonfield, East Ferris, Sturgeon Falls, Field, River Valley, Callander et Lavigne. »

Les spectacles

C’est la vétérane acadienne Édith Butler qui ouvrira la saison régulière de spectacles avec sa tournée Le tour du grand bois, qui compte quelques arrêts en Ontario, dont celui au Capitol Center de North Bay le 2 octobre. Le Fransaskois bien connu Étienne Fletcher sera pour sa part au Club de l’âge d’or de Mattawa le 16 octobre.

En janvier, le duo d’André Varin et Marie-Claude Gagnon, Folklofolie, s’arrêtera à Mattawa, North Bay et Sturgeon Falls.

Dans son art, Patricia Cano mélange les langues et les cultures : français, anglais, espagnol, portugais et cri. Photo : Rachel Crustin/ONFR

La plus grande partie de la programmation est remplie par des artistes franco-ontariens, dont plusieurs du Nord de l’Ontario. On verra entre autres la chanteuse polyglotte Patricia Cano et le cowboy du Nord, Chuck Labelle, légende franco-ontarienne originaire de Mattawa. L’artiste de North Bay Eric Romanica lancera le temps des Fêtes dès le 25 novembre.  Les Chiclettes présenteront aussi leur spectacle de Noël, le 19 décembre.

En mars 2026, on pourra voir Mélissa Ouimet, qui aura du matériel frais à présenter puisqu’elle lance un nouvel album dans les prochaines semaines. Le trio sudburois les Bilinguish Boys (Stef Paquette, Dayv Poulin et Edouard Landry) s’arrêtera à Bonfield en avril.

Les Chiclettes proposent cette année un nouveau spectacle du temps des Fêtes. Photo : Gracieuseté des Compagnons des francs loisirs

En théâtre, la Franco-Sudburoise Caroline Raynault montera sur les planches à Sturgeon Falls et North Bay avec son projet Le téton tardif.

Le 19 juin, ce sera déjà la Saint-Jean-Baptiste à North Bay, avec un spectacle gratuit extérieur signé Gabrielle Goulet.

Divers spectacles et activités culturelles seront également présentés dans les écoles et les garderies de la région tout au long de l’année.

Communauté et traditions

Du côté des activités communautaires, on retrouve la quatrième édition de la Chasse aux citrouilles, des ateliers de théâtre avec la troupe du bord-du-lac, un atelier de cuisine des Fêtes, la fête de la Saint-Jean le 20 juin.

Le traditionnel Carnaval des Compagnons sera de retour pour une 63e édition. Le Star académie local, un concours pour les 5 à 18 ans, en sera à sa 22e édition. Devant le succès de cette activité, les Compagnons l’organisent cette fois sur trois jours « pour que chacun ait sa place… et pour éviter que les petits ne s’endorment avant leur tour ».

Le Carnaval des Compagnons est un classique d’hiver à North Bay. Photo : Page Facebook Compagnons des francs loisirs

Pour les Compagnons, l’engagement communautaire est essentiel. « On veut que les gens participent, créent, échangent », peut-on lire dans le livret de saison.

Lors de la soirée de lancement, les prix Lou Gagné et Roland Rochon ont respectivement été remis au bénévole hyper impliqué en Ontario francophone, Guy Madore, et à la Chambre de commerce de North Bay et du district. Le prix Lou Gagné récompense un individu pour sa contribution « significative et durable » envers la francophonie de la région. Le prix Roland Rochon fait de même pour un organisme.

Le Jour des Franco-Ontariens

Le 25 septembre 2025 marque le 50e anniversaire du drapeau franco-ontarien, un fait qui sera souligné à grands traits dans différentes communautés à travers la province. À North Bay, la journée commencera dès 9 h 30 avec une performance de Hey, Wow! Le groupe sera également en spectacle à 20 h, au Club de l’âge d’or de Sturgeon Falls.

Le crieur public Daniel Richer lancera ensuite la cérémonie du lever du drapeau.

Les Compagnons rappellent que ce devrait être la dernière fois que le drapeau franco-ontarien est hissé de manière temporaire, puisque les démarches sont en cours pour ajouter un mât devant l’hôtel de ville, qui permettra au trille et au lys de flotter de façon permanente.

Les hymnes franco-ontariens Notre place et Mon beau drapeau retentiront, interprétés par leur compositeur respectif, François Dubé et Brian St-Pierre.

Francophonie Ontario Drapeau franco-ontarien
Le drapeau franco-ontarien flottera bientôt de façon permanente devant l’hôtel de ville de North Bay. Photos : archives ONFR

Les Compagnons invitent aussi les visiteurs à prendre part à une croisière spéciale sur le Chief Commanda le 26 septembre. Ce bateau symbole de North Bay fête également ses 50 ans cette année.

En janvier dernier, les Compagnons ont été remarqués à Contact ontarois en remportant le prix Alliance Rideau, à égalité avec le Centre de loisirs culturels de Kapuskasing. L’organisme de North Bay estime que 10 000 personnes ont été rejointes par leurs activités en 2024-2025.

Jacqueline Madogo entre souvenirs olympiques et nouveaux défis

[PARIS 2024, UN AN APRÈS]

Un an après les Jeux olympiques de Paris, ONFR vous propose de revenir sur les souvenirs des athlètes franco-ontariens et surtout sur leur année après les Jeux. Aujourd’hui, c’est au tour de la sprinteuse Jacqueline Madogo de clore la série. La native d’Ottawa revient sur cette expérience unique, sur ce qu’elle en a retiré et sur une saison marquée par des hauts, des bas et l’attente d’une nouvelle grande échéance en septembre.

Quand elle repense à Paris 2024, ce ne sont pas les pistes d’athlétisme qui lui reviennent en mémoire en premier, mais des visages familiers. 

« J’avais ma famille qui était là, mes parents, mes frères et sœurs, mon entraîneur et deux coéquipiers avec qui je m’entraîne au quotidien, Zoé Sherar et Craig Thorne. Vivre ça avec eux, c’était incroyable. »

Sur le plan sportif, l’Ottavienne se remémore avec fierté sa demi-finale sur 200 m où elle a terminé septième en 22 sec 81, à quelques centièmes d’une place en finale, mais c’est surtout l’aventure du relais 4×100 m féminin qui l’a le plus marquée. 

Aux qualifications, avec ses coéquipières Sade McCreath, Marie‑Éloïse Leclair et Audrey Leduc, elles ont établi un record national en  42 sec 50, assurant une place en finale. 

 « Les gens ne nous attendaient pas à ce niveau-là, mais on voulait montrer qu’on appartenait à cette finale », rappelle-t-elle avec fierté.

Le jour suivant, en finale, les Canadiennes ont finalement terminé à la sixième place d’une course très relevée avec un temps de 42 sec 69. Seule petite ombre au tableau de cette semaine olympique mémorable, son absence à la cérémonie d’ouverture et  peu de temps pour profiter des autres sports. 

« On était en stage d’entraînement en Espagne, donc on est arrivé seulement la deuxième semaine. Avec mes courses presque tous les jours, je n’ai pas pu aller voir d’autres compétitions. C’est une petite déception, mais au final, je ne changerais rien. »

Coupure total et retour en fanfare 

Dès la fin des Jeux, Jacqueline Madogo s’est offert une vraie coupure, bien méritée après l’intensité de la compétition.

 « Je suis partie une semaine à Nice avec mes parents. Je n’ai même pas regardé mon téléphone pendant sept jours », raconte-t-elle. 

Une déconnexion totale, rare dans la vie d’une athlète de haut niveau, qui lui a permis de retomber sur terre. « Le lendemain de notre arrivée, j’ai dormi 14 heures d’affilée. J’avais besoin de ce repos après toutes ces émotions accumulées. »

Jacqueline Madogo a délivré un discours lors du gala ImpactON sur les valeurs coopératives. Photo : Rudy Chabannes/ONFR

Le contraste a été saisissant lors de son retour au Canada. À Ottawa, la Franco-Ontarienne a eu droit à un accueil chaleureux. Au départ prévu comme un simple barbecue familial, la fête préparée par ses parents a pris une ampleur inattendue. 

« Il y avait tellement de monde que mes parents ont dû déplacer la fête ailleurs », dit-elle. Amis proches, cousins, cousines, famille élargie, mais aussi voisins et soutiens de longue date : tous voulaient féliciter la sprinteuse pour ses exploits parisiens.

À cela s’est ajoutée une véritable vague médiatique. Sollicitée par la presse écrite, les radios et la télévision, Jacqueline Madogo a multiplié les entrevues et les apparitions publiques. 

« Pendant deux mois, j’avais plein d’entrevues et d’événements à faire. C’était flatteur, mais aussi intense », reconnaît-elle. 

Peu à peu, elle a senti le besoin de tourner la page et de se recentrer sur l’essentiel. « À un moment, il fallait revenir à l’entraînement. J’ai choisi de mettre de côté les apparitions pour retrouver ma routine et préparer la suite. »

De la fracture au record

La reprise n’a pas été simple. En décembre, alors que l’élan des Jeux semblait encore proche, Jacqueline Madogo s’est fracturé le pied à l’entraînement. Une blessure frustrante, qui l’a contrainte à une longue période d’arrêt, sans compétition ni véritable préparation, jusqu’en avril.

« Mentalement, c’était difficile. Quand on est habituée à s’entraîner tous les jours, se retrouver soudainement sur la touche, c’est un vrai choc. Mais ce qui m’a gardée motivée, c’était l’objectif des championnats du monde », explique-t-elle.

Le retour s’est pourtant fait rapidement et de manière spectaculaire. Dès sa reprise, elle a enchaîné les rendez-vous internationaux : les Mondiaux de relais en Chine, puis une compétition aux Bahamas, qui lui ont permis de retrouver ses repères et sa confiance.

« Ce n’était pas évident après plusieurs mois d’arrêt, mais j’ai senti que mon corps répondait bien. »

Les résultats n’ont pas tardé à suivre. Sur 100 m, elle a battu son record personnel, un signal fort après sa blessure. Sur 200 m, sa discipline de prédilection, elle a signé un chrono très proche de son meilleur temps.

« C’était encourageant de voir qu’après tout ce temps perdu, j’étais encore en forme. Ça m’a prouvé que je pouvais rebondir, même après une période compliquée. »

Cap sur les Championnats du monde

Jacqueline Madogo se prépare désormais pour son grand retour sur la scène mondiale. Les Championnats du monde d’athlétisme auront lieu à Tokyo du 13 au 21 septembre prochain.

L’équipe de relais 4×100 mètres canadien avec de gauche à droite : Marie-Éloise Leclair, Audrey Leduc, Sade McCreath et Jacqueline Madogo. Photo : Instagram de Jacqueline Madogo, Kyle Llamas/Athletics Canada.

La Franco-Ontarienne est déjà confirmée pour le relais 4×100 m grâce à la qualification de l’équipe canadienne obtenue via les relais mondiaux 2025. En revanche, sa participation en individuel sur le 200 m dépendra de sa sélection officielle. L’annonce sera faite ce jeudi.

« Je pense être dans une bonne position pour le 200 m, mais il faut attendre ce jeudi pour avoir la liste finale. Je croise les doigts; j’ai tout donné dans mes dernières courses, et j’ai vraiment hâte de savoir. » Puis, elle ajoute avec confiance : « Mon corps se sent bien, je me sens prête. »

Qu’elle soit alignée en individuel ou seulement avec le relais, Jacqueline Madogo abordera les Mondiaux de Tokyo avec la confiance d’une athlète qui a su rebondir après les Jeux et surmonter l’épreuve de la blessure.

En clôturant la série Un an après Paris 2024, son témoignage illustre bien l’esprit des Franco-Ontariens rencontrés : entre souvenirs olympiques, résilience et nouveaux défis, une génération d’athlètes qui regarde déjà vers l’avenir.

Une consultation à grande échelle pour redéfinir l’avenir de la francophonie ontarienne

À la veille d’une assemblée citoyenne, l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) invite la communauté à participer aux états généraux de l’Ontario français. Lancé en mars 2025, ce vaste exercice vise à réfléchir collectivement aux défis et aux priorités de la francophonie ontarienne pour les prochaines décennies.

Pour Peter Hominuk, directeur général de l’AFO, ces états généraux s’inscrivent dans un double contexte : la révision du plan stratégique communautaire, menée tous les cinq ans, et la nécessité de se repositionner après la pandémie.

« Des craques commençaient à apparaître dans nos organismes, dans nos structures. Pendant la pandémie, ces petites craques sont devenues de grosses craques  », explique-t-il.

À ces fragilités institutionnelles s’ajoutent les inquiétudes exprimées par de nombreux Franco-Ontariens : le financement insuffisant de certains organismes, l’épuisement de bénévoles qui assurent encore la survie de services essentiels dans plusieurs régions, mais aussi les effets de l’assimilation et du vieillissement de la population. 

« Dans certaines communautés, nos organismes sont dans la misère. Le même financement de base sert tantôt à des structures solides, tantôt à des groupes qui reposent uniquement sur des bénévoles. Et les gens se demandent : comment va-t-on assurer l’avenir dans ces conditions? »

La conjoncture est aussi marquée par des changements législatifs majeurs : la nouvelle Loi fédérale sur les langues officielles, qui vise à rétablir le poids démographique des communautés francophones, et la Loi provinciale sur les services en français, qui introduit le principe de l’offre active. 

Pour M. Hominuk, ces transformations sont à la fois sources d’inquiétude et de possibilités. 

« La conjoncture des nouvelles lois est une opportunité de repenser comment on fait les choses, souligne-t-il. Les défis sont réels, mais ils peuvent aussi devenir des chances de renouveler nos façons de travailler et de renforcer notre présence. »

Une large consultation de la base

Les états généraux reposent sur une démarche participative. Outre des rencontres régionales et un sondage provincial lancé ce mercredi pour recueillir l’opinion des Franco-Ontariens sur les priorités à retenir, une étape importante aura lieu ce jeudi avec la tenue d’e l’’une assemblée citoyenne.

Cette rencontre doit permettre de présenter en détails le processus et de commencer à dégager des pistes de réflexion collective. 

« On ne commence pas à zéro. On veut que les gens aient eu la chance de mijoter, de comprendre dans quoi ils s’embarquent. Parce que tu ne peux pas rêver l’avenir en une fin de semaine », souligne Peter Hominuk.

Le directeur général de l’AFO, Peter Hominuk, aux côté du président Fabien Hébert. Photo : ONFR/Archives Rudy Chabannes
« On veut sortir avec une vision sur 25 ans »
— Peter Hominuk, directeur général de l’AFO

L’assemblée citoyenne servira donc de point de départ pour identifier les grands thèmes qui nourriront la suite des États généraux : l’avenir de la francophonie ontarienne, les défis démographiques, la modernisation des structures et le partage des ressources.

L’idée est de faire émerger une vision à long terme, qui dépasse le court terme des cycles politiques. « On veut sortir avec une vision peut-être pas sur cinq ou dix ans, mais sur 25 ans », insiste-t-il.

Cette approche vise à inclure toutes les composantes de la francophonie ontarienne : les jeunes, les nouveaux arrivants, les aînés, mais aussi la diversité des réalités urbaines et rurales. Le processus prévoit également la participation de leaders communautaires, d’organismes partenaires et d’acteurs institutionnels, afin de garantir que cette consultation soit véritablement représentative de la communauté dans son ensemble.

Redéfinir l’identité franco-ontarienne

Les états généraux devront aussi répondre à une question fondamentale : qu’est-ce qu’être Franco-Ontarien aujourd’hui? Pour M. Hominuk, cette notion a beaucoup évolué au fil du temps.

« C’était bien clair quand j’étais jeune. Ça l’est beaucoup moins aujourd’hui », reconnaît-il.

Selon lui, l’identité franco-ontarienne ne peut plus se limiter à la langue maternelle ou à l’héritage familial. Elle s’élargit à de nouvelles réalités : des jeunes issus de l’immersion française, des personnes immigrantes qui choisissent le français comme langue d’intégration, ou encore des familles où plusieurs langues cohabitent. 

« Ce n’est pas un club exclusif. On accueille des gens pour qui le français est une troisième ou une quatrième langue, et on leur dit : bienvenue, vous êtes des Franco-Ontariens. »

Dans cette perspective, les états généraux doivent permettre de repenser l’inclusion et de bâtir une vision commune qui reflète la diversité de la communauté telle qu’elle existe aujourd’hui.

 « L’identité franco-ontarienne ne disparaît pas, elle se transforme. Et il faut qu’on ait cette conversation ensemble », explique-t-il.

Une ambition collective appuyée par les partenaires

Au terme de ce processus, l’AFO espère dégager une vision commune à long terme.

« Pour moi, le plus de gens qui participent, qui nous aident à imaginer notre avenir, c’est une réussite. Ensuite, sortir avec un plan qui nous donne une vision claire de ce qu’on peut être comme communauté, ça va être un point très important », explique Peter Hominuk.

Les États généraux visent ainsi à projeter la francophonie ontarienne non pas sur cinq ou dix ans, mais sur un horizon de vingt-cinq ans. Un pari ambitieux, mais jugé nécessaire pour assurer sa vitalité et son rayonnement.

L’AFO insiste toutefois sur la nécessité que ces résultats ne restent pas lettre morte. Le futur plan d’action devra non seulement servir de feuille de route pour les organismes communautaires, mais aussi orienter les politiques publiques.

« Il faut que ce travail mène à des collaborations concrètes avec nos instances publiques : les gouvernements, les institutions, nos partenaires. C’est ensemble qu’on peut transformer la réalité de la francophonie ontarienne », conclut le directeur général.

La rentrée scolaire marquée par des nouveautés suspendues et des programmes-cadres abolis

TORONTO – Élèves, enseignants et conseils scolaires débutent l’année scolaire avec plusieurs changements récents. Une mise à jour des barèmes incluant de nouveaux acquis en littératie financière et sur l’histoire des Noirs sont repoussés à date ultérieure. Par ailleurs, des programmes-cadres liés à l’actualisation linguistique en français (ALF) ainsi que le programme d’appui aux nouveaux arrivants (PANA) sont abolis, dans l’attente d’une alternative plus à même d’encadrer les élèves francophones.

La porte-parole du ministère de l’Éducation, Justine Teplycky, précise que «  le ministre a demandé d’ajuster le calendrier, en suspendant l’introduction du nouveau programme pendant un an, afin d’assurer une approche plus uniforme dans toute la province et de donner aux enseignants plus de temps pour mettre en œuvre le nouveau programme », lit-on dans un courriel.

Ces retards affectent directement le curriculum du niveau secondaire, à savoir les élèves de 10e année, qui seront dorénavant soumis à ces nouveaux tests provinciaux dès septembre 2026. Ces reports incluent également des composantes relatives à l’Holocauste, aux idéologies politiques extrêmes ainsi qu’à l’histoire de l’Holodomor.

Cette mise en sommeil est accueillie plutôt favorablement du côté des enseignants, placés devant la nécessité de compiler adéquatement les ressources pédagogiques. L’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO) voit en effet ce report d’un bon œil, tout en restant prudente. «  Une révision réussie du curriculum passe par un processus transparent, collaboratif, inclusif et réaliste », rappelle sa présidente, Gabrielle Lemieux.

Mais quelle est la conséquence sur l’apprentissage des élèves? Mirela Lonian, qui dirige l’Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques (AFOCSC), affirme qu’il reste « important qu’ils apprennent le vocabulaire économique en français ».

Elle comprend ce report de la part du ministère, mais émet une condition : « préparer de bonnes ressources et les bons cours, sans que ce soit prolongé éternellement, car on a quand même préparé nos écoles, nos communautés scolaires, avant d’apprendre que ça été retardé. Ça a été difficile à gérer de ce point de vue. »

Mirela Lonian, directrice générale de l’Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques (AFOCSC). Photo : Gracieuseté de Mirela Lonian

Concernant les modules d’histoire et l’adaptation des ressources, l’avis des parents d’élèves francophones est proche de celui des enseignants. Paul Baril, le président de Parents partenaires en éducation (PPE), prévient qu’il ne s’agit pas uniquement de traduire ces nouveaux contenus, mais que ces révisions du programme doivent permettre aux élèves de mieux s’y identifier pour mieux apprendre.

« Notre culture est complètement différente. Les acteurs importants en français, les acteurs francophones, les noirs qui ont eu un impact en Ontario français ne sont pas du tout, du tous les mêmes », compare-t-il.

En outre, l’imposition de nouvelles exigences pendant la saison estivale demeure souvent contestée par les acteurs éducatifs. « On a vu par le passé, quand ils ont fait des changements si tard et qu’on a eu le curriculum en juillet, les enseignants étaient tout stressés, puis ça a été très houleux comme modification », se remémore le président.

D’autres programmes-cadres officiellement retirés

D’un autre côté, le programme l’actualisation linguistique en français (ALF) est arrêté dans le but d’harmoniser les requis nécessaires de tous les élèves francophones, qu’ils soient unilingues ou plurilingues.

« C’est une façon de dire que l’égalité est atteinte. Désormais, l’enseignant va enseigner le programme-cadre de français à tout le monde », suppose M. Baril. Celui-ci décrit « qu’il y a des parents qui nous disaient que leur enfant se sentait exclu parce qu’il allait toujours en ALF pendant que les autres faisaient d’autres activités. »

Mirela Lonian explique que désormais il s’agirait, à la place, d’avoir un enseignant de soutien qui enseigne à tous les élèves collectivement. « C’est pour faire preuve d’inclusion, pour éviter qu’un élève risque d’être jugé par ses camarades et de le retirer de la salle de classe. C’est à ce niveau-là qu’on veut enlever le stigma du service à élèves », assure-t-elle.

Paul Baril, président de Parents partenaires en éducation (PPE) en Ontario. Photo : Gracieuseté de Paul Baril

« Comment mieux intégrer des élèves qu’en les intégrant dans des salles de classe avec toute la gamme d’élèves? » abonde M. Baril.

Dans cette même logique, le programme d’appui aux nouveaux arrivants (PANA), qui est également retiré, visait jusqu’ici à encadrer l’inclusion totale des élèves nouveaux arrivants. « C’est clair qu’ils ont besoin d’une intégration à la société ontarienne et de soutien aux services, c’est un choc culturel », convient Mme Lonian. Cette dernière a hâte de voir comment les nouvelles alternatives d’enseignements qui tentent de réduire les écarts seront amenées dans les écoles, notamment au niveau du soutien financier.

Pour le moment, c’est la politique NPP 172 qui fait référence au Policy/Program Memorandum 172 qui va remplacer dès le mois prochain ces deux programmes abolis. Elle vise à repenser une stratégie de soutien pour les élèves francophones plurilingues.

Bien que ces abolitions soient explicites, M. Baril espère bien que l’accompagnement ne disparaitra pas, et que le cadre est voué à se moderniser. Les acteurs de l’éducation sont dans l’attente de rencontres et de consultations régulières entre écoles et gouvernement afin de permettre des suivis et évaluer les changements tout au long de l’année.

« Il s’agit de préparer nos élèves pour la vie », souligne Mme Lonian.

Casselman vote pour garantir aux citoyens une réponse dans la langue officielle de leur choix

CASSELMAN – Le conseil municipal de Casselman a donné le feu vert, ce mardi soir, à une modification réglementaire visant à ce qu’un citoyen obtienne une réponse dans la langue officielle de son choix lorsqu’il s’adresse au conseil. La décision fait suite à un incident survenu au printemps dernier qui avait suscité malaise et incompréhension au sein de la population.

C’est sans débat que les élus de cette ville, où 74 % de la population a le français comme première langue officielle parlée, ont d’adopté lors du conseil municipal de mardi soir une recommandation visant à renforcer l’usage des langues officielles durant le conseil.

Dorénavant, tout citoyen pourra poser ses questions en français ou en anglais, et la réponse lui sera donnée dans la même langue, ou traduite immédiatement si nécessaire, que ce soit durant la période de questions ou lors de présentations devant les élus.

« Nous sommes une municipalité où la francophonie est une valeur très importante et qu’on respecte énormément, mais il ne faut pas oublier que, avec le temps, il y a beaucoup plus d’anglophones, et pour moi il est très important de respecter tout autant ces gens-là », a insisté la conseillère Francine Leblanc en discussion de cette motion qu’elle avait appuyée au printemps.

Le conseiller Sylvain Cléroux a tenu, quant à lui, à féliciter ses collègues : « Le besoin se faisait sentir, et c’est vraiment important de s’assurer que nous traitons les deux langues officielles, particulièrement lors des réunions de conseil. »

Casselman compte environ 3960 habitants selon le recensement de 2021. Photo : Archives ONFR/Benjamin Vachet

Un cadre juridique solide

Cette recommandation est basée sur un avis juridique de Me Ronald Caza, figure bien connue du droit linguistique en Ontario, que l’administration avait mandatée pour un rapport quelques mois plus tôt.

Dans son analyse, l’avocat franco-ontarien confirmait que Casselman disposait du pouvoir légal de modifier son règlement de procédure afin d’y intégrer de nouvelles dispositions linguistiques.

Il a toutefois souligné qu’un tel règlement devrait inclure des dispositions particulières pour les cas où un conseiller ne pourrait pas s’exprimer dans la langue officielle choisie par le citoyen, tout en réitérant que l’objectif légitime demeure de garantir une réponse dans la langue demandée. 

L’avis proposait donc deux scénarios pour répondre aux préoccupations citoyennes :

  • Premier scénario : lorsqu’une question est adressée au conseil dans son ensemble, la réponse doit être donnée immédiatement dans la langue utilisée par le citoyen.
  • Deuxième scénario : lorsqu’une question est posée à un élu ou à un employé qui ne maîtrise pas cette langue, la réponse peut être donnée dans l’autre langue officielle, mais un membre du conseil ou de l’administration doit ensuite en assurer la traduction consécutive.

Cette approche, estimait Me Caza, permet de respecter à la fois les droits linguistiques du public et la liberté d’expression des élus.

L’avocat Ronald Caza a été impliqué dans plusieurs dossiers de la francophonie, comme celui de la cause Montfort. Photo : archives ONFR/Lila Mouch

Abrogation d’un vieux règlement

Dans le même souffle, le conseil a abrogé le réglement linguistique de 1983, qui prévoyait la production de certains documents municipaux dans les deux langues officielles mais qui n’était plus appliqué de façon cohérente. 

L’administration est désormais mandatée pour dresser une liste des documents disponibles en français et en anglais, qui sera intégrée à la politique municipale de communication et de relations publiques

Le vote du conseil enclenche maintenant un travail administratif. La municipalité devra préparer un amendement formel à son règlement de procédure afin d’y intégrer les nouvelles dispositions linguistiques. Celui-ci sera adopté officiellement lors d’une réunion ultérieure.

« Ce n’est pas une question d’imposer quoi que ce soit aux élus, mais de s’assurer que les droits des citoyens soient respectés », a rappelé à ONFR le conseiller Paul Groulx.

Paul Groulx représente le quartier 4 de Casselman depuis 2018. Photo : Gracieuseté de Paul Groulx

La controverse

À l’origine de cette controverse, un incident survenu le 20 mai dernier : lors d’une séance du conseil, une citoyenne s’était exprimée en français et la mairesse Geneviève Lajoie lui avait répondu en anglais, provoquant un malaise palpable dans la salle.

« Toutes les municipalités devraient s’assurer que leurs citoyens soient respectés dans la langue officielle qu’ils choisissent »
— Paul Groulx

Dans les jours suivants, le conseiller Paul Groulx avait déposé une motion visant à garantir qu’à l’avenir, tout citoyen qui s’adresse au conseil obtienne une réponse dans la langue officielle de son choix.

« On sentait une tension dans la salle. Les gens avaient l’impression que rien n’était fait pour les respecter. Plusieurs citoyens sont venus me dire à quel point c’était important », a expliqué M. Groulx.

La mairesse Geneviève Lajoie a soutenu que l’adoption de l’avis de motion pourrait entraîner une contestation judiciaire, estimant qu’il risquait d’enfreindre la Charte canadienne des droits et libertés. Malgré ses réserves, les quatre conseillers municipaux de Casselman ont appuyé la motion, tandis qu’elle a voté contre.

Au-delà de Casselman

Pour Paul Groulx, l’enjeu dépasse largement les frontières de la petite municipalité de Prescott-Russell. 

« Ça ne concerne pas seulement Casselman. Toutes les municipalités devraient s’assurer que leurs citoyens soient respectés dans la langue officielle qu’ils choisissent », a-t-il souligné.

Selon lui, l’adoption de cette motion constitue un geste fort pour la francophonie locale et pour la communauté anglophone également. « C’est une question d’équité et de respect », a-t-il insisté.

Retour au bureau à temps plein pour les fonctionnaires de la Ville d’Ottawa

OTTAWA – L’ensemble des employés de la Ville d’Ottawa devront revenir au bureau à temps plein dès janvier prochain à l’image des fonctionnaires provinciaux, a annoncé la municipalité dans une note adressée à ses employés mardi.

« La présente note de service a pour but d’informer le maire et les membres du Conseil que la Ville d’Ottawa reviendra à la norme de cinq jours au bureau pour tous les employés de la Ville à compter du 1er janvier 2026 », indique la directrice de la municipalité Wendy Stephenson.

Selon cette dernière, ce retour au bureau à temps plein touchera une minorité d’employés municipaux, car « plus de 85 % du personnel de la Ville travaille sur place ou au bureau chaque jour afin de fournir des services aux résidents ». 

« Le retour collectif à une norme de cinq jours au bureau pour tous les employés de la Ville contribuera à renforcer la culture organisationnelle et à bâtir la confiance envers la capacité de la Ville à continuer de fournir un service adapté et fiable aux résidents », soutient-elle dans sa missive aux employés.

Il y a un peu moins de deux semaines, le gouvernement Ford a annoncé que tous ses fonctionnaires devaient revenir au bureau à quatre jours par semaine en octobre et cinq au mois de janvier 2026. À la suite de cette annonce, la Ville de Brampton avait aussi annoncé qu’elle imiterait la directive provinciale.

Lors du congrès de l’Association des municipalités de l’Ontario (AMO) à Ottawa à la mi-août, le premier ministre Doug Ford avait invité les villes à abandonner le mode de travail hybride pour favoriser celui à temps plein.

« La priorité absolue de la Ville est d’offrir un excellent service aux résidents, ce que le personnel s’est efforcé de faire tout au long d’une période de transformation profonde », écrit la directrice de la municipalité

« Le retour à la norme de cinq jours au bureau permet à la Ville de respecter les autres employés du secteur public tout en favorisant le bien-être général et au succès de l’organisation », ajoute Mme Stephenson.

Pour expliquer la décision de son gouvernement, Doug Ford avait affirmé que « les employés sont plus productifs au travail », ajoutant qu’il « était temps » pour les fonctionnaires ontariens de retourner à temps plein en personne.

Jour de rentrée pour les élèves francophones de l’Est ontarien et d’Ottawa

OTTAWA – Ce mardi matin marquait le coup d’envoi de la rentrée scolaire pour quelque 60 000 élèves francophones de la région d’Ottawa et de l’est de l’Ontario de la première à la 12e année. Immersion dans l’ouest d’Ottawa, à l’École élémentaire Des Visionnaires qui a ouvrait ses portes pour la première fois.

« Oui, je suis excité. Pour que je vienne voir mes amies », lance la jeune Aïda avant de faire son entrée en compagnie de sa mère Sarah Elaroussi et sa petite sœur Maria.

« On vient de déménager ici et ça fait vraiment plaisir d’avoir une école tout près, lance la mère de famille. C’était un petit peu loin (avant) pour nous surtout lors de tempêtes, ce n’était vraiment pas évident. »

Cet établissement francophone qui a bénéficié d’un financement provincial de 11 millions de dollars dans le quartier Barrhaven pourra accueillir à sa pleine capacité jusqu’à 475 élèves de la maternelle à la 6e année, en plus de compter sur une garderie.

« C’est la découverte. C’est une nouvelle école, alors la journée porte ouverte. On vient découvrir », affirme de son côté Rait Mohamed, en accompagnant sa petite fille à l’entrée de l’école.

« Ça nous faisait beaucoup de route, ça nous allège surtout pour les enfants. Prendre le bus pendant 40 minutes, ce n’est pas (idéal). Là, on marche quatre à cinq minutes, on ne peut que demander ça », dit Hali Matou, venue déposer sa fille et son garçon devant le nouvel établissement du Conseil des écoles publiques de l’Est de l’Ontario (CEPEO).

En plus du CEPEO, c’était aussi le jour J pour ressortir sac-à-dos et boîtes à lunch pour les élèves du Conseil des écoles catholiques du Centre-Est (CECCE) et du Conseil scolaire de district catholique de l’Est ontarien (CSDCEO). Au CEPEO, près de 19 300 élèves étaient attendus, tandis que ce nombre monte à 30 000 du côté du CECCE et 11 000 au sein du CSDCEO, avec les inscriptions toujours ouvertes à cette période-ci de l’année.

Le ruban inaugural a été coupé ce matin à l’École élémentaire Des Visionnaires, à Ottawa. Photo : ONFR

Cette ouverture représente une 45e école pour le CEPEO, qui entrevoit une croissance de ses effectifs de près de 4 % par rapport à l’an dernier, estime le directeur de l’éducation Christian-Charle Bouchard.

« Il y avait un grand besoin ici (…). Il y a une croissance non seulement au niveau de la population générale, mais aussi des francophones ici dans le Sud (d’Ottawa). Les gens à Barrhaven et Manotick devaient parfois voyager beaucoup plus loin pour avoir accès à une éducation de langue française », soutient M. Bouchard qui s’attend à ce que cette nouvelle école soit au maximum de sa capacité
d’ici quelques années.

Pénurie de personnel

Alors que la province fait face à une crise de personnel dans les écoles francophones, le CEPEO indique avoir réussi dans toutes ses écoles à recruter du personnel et à le mettre en place pour la rentrée.

« Il y a une pénurie partout en Ontario, surtout du côté des francophones, mais maintenant, même au niveau anglophone, qui, eux, vivent la pénurie comme nous. Heureusement, on est un employeur de choix. Les gens veulent venir chez nous », souligne Christian-Charle Bouchard.

Au CECCE, on indique que plusieurs postes ont été pourvus dans les dernières semaines, mais qu’il reste « une quarantaine de postes réguliers et de suppléances à pourvoir à travers nos 60 écoles ».

« Les écoles sont pleinement opérationnelles et tout est en place pour assurer une rentrée réussie », ajoute le conseil scolaire.

La rentrée scolaire à Toronto, dans le Sud et le Nord de l’Ontario débutera, quant à elle, le 3 septembre.

Stress financier : comment les francophones s’en sortent?

L’augmentation des factures d’un côté, un marché du travail compétitif de l’autre : vivez-vous cette double inquiétude? Entre le coût de l’épicerie qui explose et des salaires qui ne suivent pas toujours, plusieurs doivent changer leurs habitudes et même leur alimentation pour joindre les deux bouts. On a demandé aux gens comment ils gèrent cette insécurité financière.

Syla Swords, des émotions olympiques à une saison brillante dans le basket universitaire

Un an après les Jeux olympiques de Paris, ONFR vous propose de revenir sur les souvenirs des athlètes franco-ontariens et surtout sur leur année après les Jeux. Ce jeudi, c’est au tour de la benjamine de l’équipe canadienne de basketball, Syla Swords, originaire de Sudbury, de revenir sur cette expérience unique, sur ce qu’elle en a retiré et sur une saison universitaire prometteuse avec les Wolverines du Michigan.

À seulement 18 ans, Syla Swords est devenue la plus jeune joueuse de l’histoire du Canada à participer aux Jeux olympiques de basketball. Elle a vécu des débuts marquants lors du match d’ouverture face à la France au Stade Pierre-Mauroy de Lille, devant près de 30 000 spectateurs.

« Je crois que ce qui est resté avec moi, c’est l’émotion en entrant dans ce stade. Tout le monde chantait l’hymne français, il y avait le rouge et le bleu partout, mais en même temps je voyais aussi le drapeau canadien et la feuille d’érable. Même en Europe, on se sentait soutenues. C’était vraiment spécial », raconte-t-elle.

Un soutien d’autant plus précieux que sa famille était présente dans les gradins. Son père, Shawn Swords, ancien joueur de l’équipe canadienne aux Jeux de Sydney 2000 et aujourd’hui entraîneur en G League à Long Island, sa mère Shelley Dewar, ancienne joueuse à Laurentienne et sa sœur Savannah, elle aussi basketteuse prometteuse, l’accompagnaient.

« Avoir ma famille là avec moi, ça m’a énormément aidée », souligne-t-elle.

Sportivement, le tournoi a été difficile pour les Canadiennes, éliminées sans victoire en phase de groupes. Malgré son manque d’expérience, la Franco-Ontarienne a néanmoins trouvé du temps de jeu, avec environ 15 minutes par match de moyenne. 

« Jouer pour la sélection nationale et ne pas gagner, c’est toujours une déception. Mais chaque défaite me motive encore plus. On veut toujours faire mieux, pour nous, pour nos coéquipières et pour notre pays », insiste-t-elle.

Nouveaux défis

Avant même de participer aux Jeux à Paris, Syla Swords avait choisi de rejoindre l’université du Michigan. Le passage par le plus haut niveau de compétition international lui a permis d’aborder cette nouvelle étape avec assurance.

« Jouer contre les meilleures joueuses du monde, des All-Stars et des vétérans de la WNBA, m’a beaucoup aidée. Quand je suis arrivée en NCAA, jouer contre des filles de mon âge paraissait presque facile », confie-t-elle.

Le vrai défi se situait ailleurs : « Le nombre de rencontres est incroyable. On joue deux à trois fois par semaine, alors qu’au lycée c’était une fois toutes les deux semaines. Il a fallu s’adapter rapidement au rythme et à la charge de travail. »

Mais au-delà du terrain, le plus dur a été de quitter sa famille. « Je n’habitais plus avec ma mère, mon père, ma sœur. On fait tout ensemble d’habitude, et mon m’a entraînée toute ma vie. Là, je devais tout faire seule : mes repas, l’école, les entraînements et les matchs. C’était difficile, mais ça m’a fait grandir », assure-t-elle.

Première saison remarquable à Michigan

Malgré ce défi, Syla Swords a réussi une première saison remarquable sous le maillot des Wolverines. En 33 matchs, tous comme titulaire, elle a compilé une moyenne de 16,0 points, 6,2 rebonds et 2,5 passes décisives en 32,5 minutes par match.

Ses performances lui ont valu une pluie de distinctions : sélection dans l’équipe d’étoiles des recrues américaines, dans la 2ᵉ équipe d’étoiles de la conférence Big Ten, dans l’équipe d’étoiles des recrues du Big Ten, ainsi qu’une place dans l’équipe d’étoiles du tournoi de la conférence Big Ten.

Déjà considérée comme l’une des grandes promesses du basketball canadien, Swords garde pourtant les pieds sur terre. 

« Je sais qu’on parle de moi comme d’une future star, mais je n’y pense pas trop. Aux États-Unis, je n’ai pas la même notoriété qu’au Canada, donc ça m’aide à rester concentrée. Je suis surtout fière de représenter le Canada, que ce soit avec Michigan ou avec l’équipe nationale », dit-elle.

Le rêve de la WNBA 

Michigan a terminé la saison avec une fiche de 23 victoires pour 11 défaites, atteignant le deuxième tour de la March Madness, le tournoi final de la saison universitaire. Le fait de ne pas avoir réussi à aller plus loin dans le tournoi constitue à la fois une déception pour la Sudburoise, mais aussi une source de motivation.

« Le tournoi de mars est tellement spécial, c’est ce que tout le monde regarde. On a gagné notre premier match, mais perdre le deuxième contre Notre Dame a été dur. Je veux absolument qu’on aille plus loin la saison prochaine. »

Et encore plus loin après l’université? La réponse ne fait aucun doute. 

« Mon rêve, c’est la WNBA. Et ce serait incroyable de jouer au Canada avec le Toronto Tempo. Pas seulement pour moi, mais pour toutes les jeunes filles qui pourraient venir nous voir et s’inspirer. »

Mais la jeune Ontarienne sait aussi que son avenir ne dépend pas uniquement de son choix. 

« Même si ce n’est pas moi qui vais choisir, parce que c’est le repêchage qui détermine l’équipe, j’aimerais vraiment avoir l’occasion de jouer à Toronto. »

En attendant ce moment, Syla Swords va poursuivre son ascension avec les Wolverines du Michigan. Et à chaque trêve, c’est avec la feuille d’érable sur le cœur qu’elle continue de progresser : elle a récemment disputé deux tournois avec l’équipe nationale, au Chili avec la sélection senior puis en Europe avec sa catégorie d’âge. 

« Porter la chemise canadienne reste toujours spécial. Peu importe les victoires ou les défaites, c’est une fierté et une motivation supplémentaire », confie-t-elle.

Un an après avoir découvert l’intensité des Jeux olympiques, elle continue donc de tracer sa voie, entre fierté franco-ontarienne, engagement envers le programme national et rêve de rejoindre un jour l’élite mondiale du basketball.

Les retrouvailles culturelles Afrique-Caraïbes secouent la scène de l’Afro-Carib Fest

La fin de saison estivale dans le Grand Toronto a débouché sur cette grande célébration gratuite et ouverte à tous, qui a accueilli des milliers de participants issus de la diaspora et au-delà.

À mesure que l’ambiance musicale emplissait l’espace aux rythmes d’afrobeats et d’amapiano, la culture était célébrée sous toutes ses coutures, que ce soit à travers de spécialités typiques, d’expositions et de très attendus concerts et spectacles.

Le Thomson Memorial Park de Scarborough s’est transformé en arène de festival pour l’occasion afin d’accueillir le public. Photo : ONFR/Laetitia Dogbe

Les nombreux kiosques sur place proposaient des bijoux et vêtements traditionnels. Photo : ONFR/Laetitia Dogbe

Plats typiques et mets caribéens étaient servis de toute part. Photo : ONFR/Laetitia Dogbe

Environ 50 000 personnes étaient attendues, selon la directrice du festival, Madeline Nwokeji, dans ce festival placé sous le signe des retrouvailles entre deux mondes.

« Le festival tente chaque année de mélanger la diversité de la culture afro : celle d’Afrique et celle des Caraïbes, d’après Thierno Soumare, qui s’occupe de réunir les artistes pour l’événement. Ça nous permet à l’un d’en apprendre sur l’autre, car chacun s’est créé sa propre culture depuis qu’elles ont été séparées. »

Une forte présence francophone

Des artistes se produisant en français étaient au programme, tels que Cloclo Claudel, Leonie, Lionel Kizaba, Amadou Kienou ou encore Okavango African Orchestra.

Du côté des bénévoles présents sur le site, Sandrine Constance était venue prêter main forte durant ces deux jours. Cette étudiante mauricienne installée à Scarborough depuis deux ans affirme que sa participation à l’événement lui offre une forme de reconnaissance.

« Ça m’apporte une joie d’aider. Je me sens utile d’aider l’organisation. »

Sandrine Constance est l’une des bénévoles présentes à l’Afro-Carib Fest cette année. Photo : ONFR/Laetitia Dogbe

Thierno Soumare souligne que « ces bénévoles qui qui aident avec le cœur, juste parce qu’ils ont envie de nous soutenir, ça n’a pas de prix. »

Bien que le français soit présent entre les participants et l’organisation, l’étudiante aimerait que cette communauté soit désormais plus manifeste. « J’aurais aimé avoir plus de personnes comme moi qui parlent le français. »

« Toronto est un mélange de beaucoup de langues et d’ethnies qui font qu’on ne voit pas directement les francophones, mais si tu pars à la rencontre des gens tu verras qu’il y en a beaucoup, surtout dans ce festival », nuance M. Soumare.

Les artistes ont captivé le public avec des spectacles vifs et animés. Photo : ONFR/Laetitia Dogbe

Les nombreux kiosques sur place proposaient des bijoux et vêtements traditionnels. Photo : ONFR/Laetitia Dogbe

Photo : ONFR/Laetitia Dogbe

« On a toujours honoré l’importance de la diversité ainsi que l’importance de la communauté francophone », confie Mme Nwokeji.

Coûts en hausse, financement en baisse

D’après la directrice du festival, les coûts pour organiser ces rendez-vous annuels augmentent, mais le soutien diminue. Thierno Soumare rejoint sa collaboratrice : « On aimerait avoir plus de fonds pour apporter plus de culture. Avoir des ouvertures de financement c’est notre objectif », appuie-t-il.

« J’aimerais vraiment pousser le soutien pour ce genre d’événements, car c’est un bonheur pour tout le monde, et ce festival aussi est un reflet de la diversité culturelle que nous avons ici en Ontario », conclut l’organisateur.


L’agenda ambitieux de Catherine B. Bachand à la tête de la SÉO

OTTAWA – Femme obstinée qui œuvre au nom du développement, Catherine B. Bachand est appelée en renfort au service des minorités franco-ontariennes. La nouvelle directrice générale de la Société économique de l’Ontario (SÉO) était en entrevue avec ONFR pour raconter son parcours, sa vision de l’esprit d’entreprise et la façon de manœuvrer en dépit des tarifs, à un moment effervescent de l’économie ontarienne.

« Comment interprétez-vous la confiance que la SÉO vous accorde pour prendre cette relève?

Je pense qu’on m’a choisie parce qu’on cherchait quelqu’un capable de faire croître l’impact. Je ne suis pas une dirigeante centrée sur l’intendance, mais plutôt une personne orientée vers le développement et la croissance. Ayant commencé ma carrière en politique fédérale à Ottawa, je connais bien les bailleurs de fonds de la SÉO, actifs à tous les niveaux, principalement fédéral et provincial.

J’espère mettre mon expérience en affaires gouvernementales au service de l’impact et de la portée des projets de la SÉO. Mon objectif est d’établir des partenariats gagnant-gagnant avec les entreprises, afin qu’elles propulsent leurs marques tout en soutenant la mission de la SÉO et la communauté francophone en Ontario.

Avec votre parcours national et international, comment comptez-vous désormais soutenir la communauté francophone en Ontario?

Avant de rejoindre la SÉO, j’ai dirigé les relations gouvernementales à la Commission canadienne du tourisme et occupé le poste de directrice générale du bras philanthropique du Cirque du Soleil. J’ai également participé aux Jeux olympiques d’hiver de Vancouver et, comme deuxième employée du comité d’organisation, contribué à mobiliser un milliard de dollars du secteur privé pour les Jeux de 2010.

Je souhaite désormais mettre cette expérience au service de la SÉO et de la communauté francophone, en développant des partenariats avec les communautés francophones et anglophones à l’échelle provinciale et nationale.

Catherine B. Bachand et Daniel Lamarre, président et chef de la direction du Cirque du Soleil au moment de la signature d’une importante entente en 2016. Photo : Gracieuseté de Catherine B. Bachand

Pourquoi avoir pris un tel virage pour servir la francophonie ontarienne minoritaire ?

J’ai passé la majeure partie de ma carrière en milieu minoritaire, donc pour moi ce n’est pas un virage, mais une suite logique. J’ai quitté le Québec en 1998 pour vivre à Ottawa, puis à Vancouver, toujours en milieu minoritaire. Les Jeux olympiques n’auraient pas été les mêmes sans la participation des communautés francophones de la Colombie-Britannique et d’ailleurs au Canada.

On ne voulait pas que le public entende l’accent de la France ou de la Belgique dans les stades. Il importait que nos présentateurs et la voix des Jeux reflètent la francophonie canadienne. Nous avons donc signé des ententes de partenariat avec toutes les provinces et tous les territoires afin que les Jeux représentent la beauté et la richesse de la langue française, ainsi que la diversité des accents régionaux au Canada.

Comment comprenez-vous les principales préoccupations des Franco-Ontariens ces derniers temps?

Nous avons une bonne connaissance de la réalité des régions, mais nous souhaitons pouvoir mieux les desservir. La SÉO possède des bureaux à Ottawa et à Sudbury, collabore avec trois partenaires à Hamilton, et compte des employés basés à London et à Hearst, ainsi que des membres de son conseil d’administration à Kapuskasing.

Nous adaptons également notre approche aux réalités des communautés du Nord grâce à des programmes ciblés pour le recrutement, l’accueil et l’installation des travailleurs francophones. Une équipe spécialisée soutient ce programme, conçu pour relever un double défi : répondre aux besoins en main-d’œuvre des micro et petites entreprises tout en revitalisant les communautés francophones du Nord.

Quelle est votre vision de l’entreprise franco-ontarienne dans le contexte économique actuel?

Je pense que les entreprises ontariennes ne devraient pas négliger la diversité linguistique, un avantage compétitif important. Le contexte économique actuel est particulièrement effervescent et comporte de grands défis, que ce soit les tarifs américains qui touchent les entreprises ontariennes ou la situation économique plus générale en Ontario et au Canada. C’est sur ces enjeux que nous concentrerons nos efforts dans les mois et années à venir.

Comment comptez-vous mieux inclure les personnes sous-représentées dans l’économie ontarienne?

À la SÉO, la majorité de l’équipe est composée de femmes, et je dirais même que nos programmes en entrepreneuriat sont faits par et pour la gent féminine. Certains programmes de la SÉO, bien que destinés à tous, ciblent spécifiquement les défis propres aux femmes entrepreneures. Elles sont une partie importante de notre mission et jouent un rôle clé au sein de la SÉO.

Plus de 350 femmes ont été accompagnées et, en l’espace de trois mois, 90 % d’entre elles ont trouvé un emploi, ce qui illustre bien nos priorités. Nous mettons également en valeur les compétences des nouveaux arrivants et les soutenons afin de faciliter leur intégration.

Catherine B. Bachand au coup d’envoi de la délégation canadienne à l’Exposition universelle d’Osaka 2025 avec Laurie Peters, commissaire générale du Pavillon du Canada. Photo : Gracieuseté de Catherine B. Bachand

Pourquoi abordez-vous cette nomination avec tant d’humilité?

Vous me prêtez beaucoup de mérites, mais la SÉO n’est pas l’affaire d’une seule personne. Mon approche est collaborative : nos objectifs ne peuvent se réaliser qu’ensemble. Je souhaite que les chercheurs d’emploi comme les entreprises nous considèrent comme un partenaire incontournable.

Nous avons devant nous de belles occasions de développement, avec des projets structurants et innovants qui nous permettront d’explorer de nouvelles approches, notamment en employabilité. Notre ambition est de travailler à grande échelle, de façon encore plus intégrée avec l’écosystème entrepreneurial et économique de l’Ontario. Pour moi, la SÉO incarne l’opportunité d’élargir la vision de l’économie. »


1975 : Naissance aux Forges-du-Saint-Maurice, à Trois-Rivières (Québec).

1998 : Entre au Cabinet du ministre fédéral de la Justice et procureur général du Canada.

2000 : Rejoint le Cabinet du premier ministre du Canada.

2004 : Devient cheffe de cabinet des Jeux olympiques et paralympiques d’hiver de 2010 à Vancouver, puis en supervise la transition jusqu’en 2011.

2012 : Est nommée cheffe de la direction de la Fondation du Cirque du Soleil.

2025 : Prend la direction générale de la Société économique de l’Ontario.

Chaque fin de semaine, ONFR rencontre un acteur des enjeux francophones en Ontario et au Canada.

« Plus de francophonie dans la programmation » : une ambition de l’AfroFest Sudbury

Emmanuel Ngoma est le porte-parole francophone, responsable des finances et membre du comité en charge de l’organisation de l’AfroFest Sudbury.

Depuis sa création en 2018, l’AfroFest Sudbury est devenu un rendez-vous annuel incontournable pour la communauté afro-descendante de Sudbury et au-delà, selon Emmanuel Ngoma. La sixième édition de l’événement a lieu ce vendredi et samedi au Parc Bell de Sudbury.

Les organisateurs de cet événement, qui promeut des artistes émergents, l’art, la musique et la gastronomie, affirment vouloir augmenter la portion francophone de la programmation, laquelle est encore modeste.

«  Qu’est-ce qui a motivé la création de l’AfroFest Sudbury?

Le festival a été créé pour partager la culture afro-caribéenne avec l’ensemble de la communauté de Sudbury, car il existait un vide en matière d’activités culturelles de ce type dans la ville. L’idée est de mettre en valeur la musique, la danse, l’art, la gastronomie et les traditions afro-caribéennes, tout en favorisant la participation et la cohésion de la communauté.

Comment le présenteriez-vous à quelqu’un qui ne le connaît pas?

L’AfroFest présente des artistes locaux et internationaux, anglophones et francophones, et expose des œuvres d’art créées par des bénévoles, souvent des jeunes, qui participent à des ateliers tout au long de l’année. De nombreuses œuvres sont mises en valeur pendant le festival et peuvent être utilisées par d’autres événements culturels locaux. Le festival se déroule chaque année au mois d’août, au Parc Bell, et l’entrée est gratuite.

Depuis sa première édition en 2018, le festival s’est enrichi, notamment avec l’ajout d’un défilé de costumes africains en 2022. Photo : Gracieuseté d’AfroFest Sudbury

Comment le festival inclut-il la communauté francophone de Sudbury?

Depuis l’intégration récente de membres francophones au comité, le festival collabore avec différents groupes culturels africains francophones, comme des associations ivoiriennes, congolaises et béninoises, pour améliorer la représentation et rendre l’événement plus inclusif. Tous les documents promotionnels sont désormais en français et en anglais, et le festival souhaite intégrer de plus en plus la francophonie dans sa programmation.

De nombreuses interactions et retours ont permis d’identifier les points à améliorer. La présence franco-africaine sur le site du festival l’année passée était remarquable, à l’image des arrivées d’immigrants dans la ville, et nous espérons que cet impact se poursuivra cette année.

Qui sont les artistes francophones à l’affiche cette année?

Cette année, il y a deux artistes francophones sur les 16 qui se produiront cette année. Bel & Quinn est un duo de sœurs Québécoises d’origine haïtienne qui chante en français, en créole et en anglais, mariant les rythmes haïtiens au jazz et à la soul. Ya Cetidon est un artiste congolais basé à Montréal qui mêle rap, chant et danse en explorant des genres comme le hip-hop, l’afrobeat et le dancehall.

Le festival était, à ses débuts, uniquement anglophone, mais il a accueilli son premier artiste francophone en 2022. Photo : Gracieuseté d’AfroFest Sudbury/Montage ONFR

Qu’est-ce qui distingue l’AfroFest des autres événements culturels africains de Sudbury, comme le Cabaret africain?

Contrairement au Cabaret qui a lieu en hiver dans une salle, l’AfroFest se déroule en été et en plein air. Le festival met l’accent sur la promotion de l’art, de la musique et de la gastronomie en direct, à l’inverse du gala organisé par Afro-Héritage de Sudbury, où les participants sont assis et où l’expérience est davantage centrée sur des présentations ou des discussions culturelles.

À l’AfroFest, la musique est jouée en direct et les œuvres d’art sont exposées sur le site, offrant une expérience immersive et participative pour les visiteurs.

Comment le festival est-il financé malgré l’entrée gratuite?

Le financement provient principalement de subventions, dont celle du programme Héritage de la ville de Sudbury, ainsi que de contributions d’entreprises et de sponsors locaux. L’événement est à but non lucratif, et tout l’argent reçu est réinvesti dans l’organisation.

Près de 2000 personnes se rendent en moyenne au festival. Photo : Gracieuseté d’AfroFest Sudbury

Quels sont les principaux défis liés à l’organisation de l’AfroFest?

Le financement reste le principal défi, surtout avec l’agrandissement de l’événement à deux jours et l’augmentation du nombre d’artistes, incluant la volonté d’inviter un artiste international d’Afrique.
Le recrutement de bénévoles est également un enjeu majeur, car le montage des œuvres d’art, la sécurité et le nettoyage nécessitent beaucoup de main-d’œuvre. La préparation des œuvres mobilise presque toute une année, avec des bénévoles majoritairement jeunes, et nécessite également de trouver des lieux de stockage adaptés. »

Ottawa met fin à certains tarifs de représailles contre les États-Unis

OTTAWA – Le gouvernement fédéral a annoncé ce vendredi qu’il supprimait les tarifs de représailles imposés aux produits américains couverts par l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM). La mesure, présentée par le premier ministre Mark Carney lors d’une conférence de presse sur la Colline du Parlement, doit entrer en vigueur le 1er septembre prochain.

« Les objectifs de notre gouvernement ont toujours été clairs : protéger les travailleurs, renforcer la compétitivité des entreprises canadiennes et bâtir l’économie la plus forte possible », a déclaré M. Carney au lendemain d’une discussion téléphonique avec Donald Trump qu’il avait qualifiée de « productive ».

La mesure annoncée ce vendredi a été présentée comme un geste de réciprocité après la réaffirmation par Washington que les exportations canadiennes conformes à l’ACEUM ne seraient pas assujetties aux nouveaux tarifs américains.

En miroir des décisions américaines, Ottawa a donc choisi de lever les contre-tarifs visant de nombreux produits de consommation, mais de conserver des mesures punitives sur trois secteurs stratégiques qui restent assujettis à des contre-tarifs de 25 % : l’acier, l’aluminium et l’automobile. Ces dossiers continueront de faire l’objet de négociations bilatérales « intensives », a promis M. Carney.

Le premier ministre a aussi annoncé le lancement de consultations dès septembre pour préparer la révision prochaine de l’ACEUM, au printemps 2026, et pour définir les priorités canadiennes dans un contexte mondial marqué par un durcissement généralisé des politiques commerciales.

Parallèlement, Ottawa prévoit une nouvelle stratégie industrielle et commerciale afin de diversifier les exportations, protéger les emplois et stimuler l’investissement dans les secteurs jugés vulnérables aux décisions américaines.

« La meilleure relation commerciale »

Le premier ministre a rappelé que ces tensions s’inscrivaient dans une stratégie plus large des États-Unis, qui ont multiplié les hausses tarifaires sur leurs partenaires commerciaux pour protéger certaines industries stratégiques et attirer davantage d’investissements étrangers. Résultat : le tarif moyen imposé par Washington sur le commerce mondial est passé de 2 % à 16 % en un an.

Malgré ce contexte, M. Carney a affirmé que le Canada disposait toujours du meilleur accès au marché américain : « On a la meilleure relation commerciale avec les États-Unis ».

« Le taux moyen sur nos exportations est de 5,6 %, soit le plus bas parmi tous les partenaires des États-Unis. Plus de 85 % du commerce entre nos deux pays demeure libre de tout tarif », a-t-il insisté en référence à l’ACEUM. 

À noter que les nouveaux tarifs de 35 % imposés par Washington ne concernent que les marchandises non couvertes par l’ACEUM. 

« Durant la première période d’une partie importante de hockey, on joue robuste dans les coins et on jette les gants pour passer un message, ce que nous avons fait. Mais vient ensuite un moment dans la partie, où on tente de contrôler la rondelle et de marquer un but », a déclaré le premier ministre pour expliquer la nouvelle orientation commerciale du Canada qui, selon lui, entre précisément dans cette nouvelle étape du match.

« Nous devons nous adapter à cette nouvelle réalité et préserver l’avantage unique dont nous bénéficions auprès des États-Unis. C’est vital pour nos travailleurs, nos entreprises et nos familles », a conclu M. Carney.

Washington, l’Ontario et Pierre Poilievre réagissent

La Maison-Blanche a réagi favorablement à la levée par le Canada de ses contre-tarifs sur les produits américains, qualifiant cette annonce de « décision attendue de longue date ».

Washington a ajouté « attendre avec impatience de poursuivre les discussions avec le Canada sur les enjeux commerciaux et de sécurité nationale », rapporte l’agence Reuters.

De son côté, le premier ministre ontarien Doug Ford a appelé Ottawa à conclure un accord avec les États-Unis pour soulager les secteurs touchés par les surtaxes, dont l’acier, l’automobile, la foresterie et le cuivre.

« Si le gouvernement fédéral n’y parvient pas, il doit riposter fermement et soutenir les travailleurs et entreprises », a-t-il ajouté dans une publication sur X, en insistant pour que l’acier ontarien soit utilisé dans toutes les infrastructures canadiennes.

Le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, a accusé le gouvernement fédéral de perdre la guerre tarifaire face à la Chine et aux États-Unis.

« Il avait promis une entente avec Donald Trump en juillet, et nous sommes maintenant en septembre sans aucun résultat », a-t-il déclaré au cours d’une conférence de presse plus tard en après-midi.

Toutefois, celui qui vient de retrouver son statut de député assuré que les conservateurs restent ouverts à la collaboration avec les autres partis et a appelé le premier ministre à reprendre ses propositions pour accélérer les projets de mines, de pipelines et de foresterie, dans le but de renforcer l’autosuffisance du Canada.

Pierre Poilievre a tenu un point de presse pour réagir à l’annonce de Mark Carney vendredi après midi. Capture d’écran CPAC

En rappel, les relations commerciales entre Ottawa et Washington s’étaient particulièrement tendues à la fin juillet, lorsque le président américain Donald Trump a décrété une hausse des tarifs à 35 % sur une partie des exportations canadiennes.

Entrée en vigueur dès le 1er août après l’échec des négociations visant un nouvel accord bilatéral, la mesure a marqué un tournant dans le conflit. Washington a justifié cette décision à la fois par la lutte contre le fentanyl et par les surtaxes déjà imposées par Ottawa.

Depuis le début du différend, le Canada avait en effet frappé à trois reprises les produits américains, notamment avec une vague visant environ 60 milliards de dollars de biens de consommation et des mesures supplémentaires contre les véhicules.

Élimination des conseillers scolaires : une idée dénoncée dans le milieu éducatif francophone

Les propos du ministre de l’Éducation Paul Calandra concernant l’idée d’éliminer les postes de conseillers scolaires en Ontario ne passent pas dans le milieu scolaire francophone de la province.

En entrevue avec CBC, le ministre a affirmé qu’il serait prêt à éliminer les postes de conseillers scolaires à condition que cela soit bénéfique pour les enseignants, élèves et parents de la province.

Les conseillers scolaires sont élus pour représenter les parents, les élèves et les contribuables. Ils prennent des décisions concernant les écoles publiques de leur district.

Ces propos font suite au projet de loi 33 qui permettrait au gouvernement de prendre le contrôle des conseils scolaires notamment en nommant un superviseur. Cinq conseils scolaires anglophones, notamment à Ottawa et Toronto, sont présentement sous tutelle du ministère de l’Éducation. Le ministre reproche notamment aux conseils scolaires une mauvaise gestion des dépenses, les accusant par le passé de ne pas avoir concentré entièrement leurs ressources dans les services aux élèves.

« Nous stipulons clairement que les conseils scolaires doivent accorder la priorité aux élèves, et non pas à la politique et à la bureaucratie, et que nous agirons en conséquence lorsqu’ils manqueront à leurs responsabilités », avait déclaré Paul Calandra dans un communiqué lors du dépôt du projet de loi 33.

De l’avis du ministre, la structure actuelle des conseils scolaires est « basée sur un système obsolète et ancien qui doit être modernisé », a-t-il soutenu auprès du radiodiffuseur anglophone.

« Cette éventualité représente une menace sérieuse à la gouvernance locale et à la défense des communautés francophones et catholiques. Les conseillères/conseillers scolaires constituent un lien vital entre les familles, les élèves et les conseils », a indiqué en réponse au représentant du gouvernement Ford, l’Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques (AFOCSC), dans une déclaration sur les réseaux sociaux.

L’AFOCSC qui représente huit conseils scolaires catholiques francophones en Ontario demande au gouvernement « de reconsidérer cette orientation et de s’engager à renforcer, plutôt qu’affaiblir, la démocratie scolaire ».

« L’avenir de la gouvernance scolaire ne peut pas être décidé dans les coulisses ou dans la précipitation », déplore de son côté l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO), via sa présidente Gabrielle Lemieux.

L’AEFO est récemment sortie pour s’opposer au projet de loi 33 du gouvernement Ford, estimant qu’il porte une menace aux droits constitutionnels des Franco-Ontariens. Gabrielle Lemieux exhorte Paul Calandra « à engager des consultations approfondies avec les parties prenantes de l’éducation » tout en exigeant « qu’aucune décision ne vienne affaiblir ou modifier le rôle essentiel des conseils scolaires dans la gouvernance scolaire ».

« Affaiblir nos structures de gouvernance ne garantit en rien l’avenir de l’éducation en français. Au contraire, une telle décision constituerait un sérieux recul pour les droits des francophones en Ontario. Elle ne ferait qu’alimenter l’incertitude et affaiblir des institutions essentielles à la vitalité de nos communautés », soutient la dirigeante de l’AEFO.

Gabrielle Lemieux est présidente de l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens. Gracieuseté de l’AEFO

L’opposition dénonce aussi

À Queen’s Park, l’idée avancée par le ministre Calandra a aussi été repoussée par les partis de l’opposition. La cheffe de l’opposition officielle Marit Stiles a accusé le ministre progressiste-conservateur de « jouer à un jeu dangereux avec l’avenir de nos jeunes ».

« Cela ne contribue en rien à réduire la surpopulation dans les classes, à réparer les écoles délabrées ou à préparer nos enfants à la réussite. Tout cela revient à abandonner l’avenir de vos enfants à des novices du cercle politique. C’est aberrant », a déclaré la cheffe néo-démocrate.

Pour l’élue libérale Lucille Collard, une telle décision reviendrait à « couper les ponts avec les réalités locales et miner les acquis durement gagnés par les francophones en matière de gouvernance scolaire ».

« Les conseillers scolaires ne sont pas des bureaucrates : ce sont des leaders communautaires élus, enracinés dans leur milieu, qui veillent à ce que les décisions reflètent la réalité des élèves et des familles qu’ils servent. Cette proximité est d’autant plus cruciale dans les communautés en situation minoritaire comme les nôtres », soutient la députée d’Ottawa-Vanier, elle-même ancienne conseillère scolaire.

Les liens souterrains et humains du Théâtre du Nouvel-Ontario

SUDBURY – C’est devant une salle comble que le Théâtre du Nouvel-Ontario (TNO) a lancé sa programmation 2025-2026 jeudi soir, à la Place des arts du Grand Sudbury. Collaborations, grandes célébrations franco-ontariennes et projets de longue haleine attendent les spectateurs dès septembre.

Le thème de cette saison est Liens souterrains. En entrevue avec ONFR, la directrice artistique Marie-Pierre Proulx explique les raisons enfouies derrière ce choix : « On parle de liens interpersonnels, humains, dans plusieurs des spectacles. (…) Mais on a aussi des spectacles qui se passent littéralement sous terre. »

La référence la plus évidente est la production maison professionnelle de cette année. Giant Mine est une pièce documentaire de Marie-Ève Fontaine, coproduite par le TNO et le Théâtre français du Centre national des arts. Inspirée d’un passage à Yellowknife, la quête de la dramaturge l’a menée jusqu’à Rouyn-Noranda et Fort McMurray, en passant bien sûr par Sudbury.

Dans une Rencontre d’ONFR, celle qui est nouvellement directrice artistique du Théâtre Cercle Molière de Winnipeg commentait son projet : « Je me sers des verbatims d’entrevues et de mes expériences personnelles avec le lieu pour aborder le sujet des enjeux écologiques liés aux industries d’extraction, mais aussi à notre relation avec le territoire et avec nos objets, pour questionner nos habitudes de consommation. »

Marie-Ève Fontaine travaille depuis plus de quatre ans sur le projet Giant Mine. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Giant Mine, toujours en processus de création, fera partie des pièces en chantier présentées aux Zones théâtrales à Ottawa, en septembre. La version finale s’arrêtera au TNO en mars 2026. Le spectateur visitera d’abord une installation immersive, suivie d’une partie théâtrale avec des dialogues sortis tout droit des verbatims des entrevues faites par Marie-Ève Fontaine.

Liens souterrains est aussi un jeu de mots bilingue. « C’est ce qui nous relie, et c’est aussi l’idée du souterrain dans le sens d’underground. On a des propositions théâtrales qui sont un peu différentes, qui sortent des sentiers battus. »

La pièce in situ Le concierge de Vincent Leblanc-Beaudoin en est un bon exemple. Coproduite par le Théâtre français de Toronto en 2023, elle entraîne une poignée de spectateurs à la fois dans les dédales d’une école secondaire (à Sudbury : le Collège Notre-Dame). Sans paroles, la pièce offre une fenêtre sur la solitude, la classe ouvrière et l’importance du contact humain.

Caroline Raynaud a remporté le prix Audace de Réseau Ontario, remis par Desjardins. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Une autre pièce dont on entend parler depuis quelque temps en Ontario français est Le téton tardif, de Caroline Raynaud. La Sudburoise d’origine française y raconte son rapport à la féminité, les pressions sociales de l’adolescence et de l’âge adulte, le patriarcat et les agressions presque nécessaires pour réussir dans le métier de comédienne, particulièrement dans son pays natal. Tout de même alimentée d’humour, la proposition a gagné le prix Audace de Réseau Ontario et le prix Alliance du ROSEQ à Contact ontarois 2025.

Après avoir participé au Cabaret de la cellule d’écriture et au programme d’écriture dramaturgique du TNO en début de projet, Caroline Raynaud « avait vivement envie de le porter elle-même, raconte Marie-Pierre Proulx. On est un peu comme le grand frère ou la grande sœur du projet. On la soutient du point de vue administratif, mais c’est vraiment elle la productrice principale. »

Lendemain de veille franco-ontarien

Alors que Sudbury soulignera en grand le cinquantième anniversaire du drapeau franco-ontarien le 25 septembre, la nouvelle pièce de Créations In Vivo, Mourir de trop gueuler, sera invitée par le TNO et La Slague à se produire un peu partout en ville.

Elle sera présentée dans une version simplifiée en matinées scolaires dans la semaine précédant le Jour des Franco-Ontariens, puis le jour même lors des célébrations, et s’arrêtera ensuite au Lounge 390, un « bar un peu underground de Sudbury », dans une soirée « festive et sociale » qui inclura également d’autres activités, comme des jeux-questionnaires.

Les diffuseurs franco-ontariens ont eu un avant-goût de la pièce Mourir de trop gueuler aux Présentations éclair de Contact ontarois 2025, mais le texte a été nettement retravaillé depuis. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Selon Marie-Pierre Proulx, cette représentation du 26 septembre fera office « d’after-party  ». À en croire le producteur exécutif artistique de Créations In Vivo, Dillon Orr, elle pourrait aussi faire grincer quelques dents militantes de la première heure.

« Les personnages sont les archétypes des gardiens de la langue française en Ontario. On a les écoles, les institutions culturelles et le gouvernement, explique Dillon Orr à ONFR. On enterre une grenouille, qui est le symbole de la francophonie qui a trop chiâlé. C’est le commentaire qu’on veut faire. On ne peut pas vivre qu’en parlant de nos crises. »

Mourir de trop gueuler a fait partie des présentations éclair de Contact ontarois en janvier 2025, mais le texte, alors un feu roulant de références franco-ontariennes, a été retravaillé depuis. « Je trouvais qu’on était un peu trop dans le party de cuisine en famille, explique Dillon Orr. J’avais vraiment le goût d’inclure un plus grand nombre de spectateurs francophones et francophiles, toutes les personnes qui sont dans nos écoles et fréquentent nos salles. »

Pour lui, les Franco-Ontariens constituent une minorité « avec énormément de privilèges ». Si le spectacle, utilisant le bouffon comme ressort comique, fera nécessairement rire l’assistance, il espère aussi qu’il aura un effet mobilisateur. « Je pense que le spectacle va faire beaucoup plus réfléchir que ce qu’on pensait à la base. »

Les nouveaux spectateurs

Marie-Pierre Proulx croit aussi qu’il faut intéresser les nouveaux arrivants francophones à fréquenter les lieux de diffusion franco-ontariens. C’est le but de la production communautaire multidisciplinaire, Par ici le talent. Cette idée d’abord élaborée dans le cadre de l’initiative Communauté francophone accueillante avec l’agente de liaison culturelle au centre de santé communautaire du Grand Sudbury, Priscilla Mbemba, en est à sa troisième édition.

« Le but premier, c’est de créer des liens entre la communauté d’accueil et les nouveaux arrivants, de permettre aux gens de se découvrir », affirme Marie-Pierre Proulx.

Les résidents de Sudbury peuvent s’inscrire, passer des auditions et recevoir les conseils d’artistes professionnels.

Le TNO avait habitué ses fidèles à des campagnes visuelles très éclatées, mais qui manquaient de clarté au premier coup d’oeil. Cette année, une campagne tout de même colorée met en valeur les images des spectacles. Photo : affiche de Nzinga/Gracieuseté du TNO.

Le TNO s’allie également avec le Centre franco-ontarien de folklore pour présenter un spectacle pendant le festival Les vieux m’ont conté, en octobre. Nzinga est l’histoire autobiographique de Tatiana Zinga Botao et est coproduite par le Théâtre d’aujourd’hui et La Sentinelle, de Montréal. Congolaise ayant grandi en Belgique et vivant maintenant au Québec, Tatiana Zinga Botao, a découvert qu’elle était la descendante d’une reine congolaise.

Une conférence sur l’Afrique précoloniale se tiendra en marge de la représentation, « pour ouvrir nos horizons par rapport à notre perception de l’Afrique. »

Pour le jeune public, la pièce Parole d’eau, de Théâtre Motus et Djarama, se penche sur notre rapport à l’eau potable, qui diffère selon les parties du globe, dans un dialecte entre une Sénégalaise et une Québécoise.

Marie-Pierre Proulx est la directrice artistique du TNO. Photo : Archives ONFR (Stuck)

La pièce 45, de la Taupinière du Théâtre des petites âmes vient compléter la programmation jeunesse. « C’est vraiment un spectacle qui invite à la découverte de tout ce qui entoure dans la nature », commente Marie-Pierre Proulx à propos de ce spectacle élaboré avec des finissants du collège Lionel-Groulx de Sainte-Thérèse (Québec).

En plus des pièces de théâtre, l’heure du conte (à laquelle les enfants peuvent assister pendant que leurs parents sont au spectacle), les surtitres anglophones sur certaines représentations, les causeries du vendredi avec les artistes et les activités de médiation artistique seront de retour.

D’autres projets récurrents devraient être annoncés prochainement, mais le TNO attend encore le financement nécessaire.

Un village francophone pour aînés : le rêve devient réalité

AURORA – Dans la région de York, un foyer de soins de longue durée de 160 lits francophones, la Communauté du Trille blanc, verra bien le jour au 100 Bloomington Ouest. Une première phase dans la construction du village francophone, qui sera pourvu de services, commerces et logements. Dans une entrevue exclusive accordée à ONFR, son président Jean Bouchard partage les détails du financement et des étapes clés. Officialisée ce jeudi, la première pelletée de terre est prévue dès le mois d’octobre prochain. 

« Nous applaudissons un projet porteur d’espoir, un projet structurant qui ouvre la voie à des possibilités concrètes pour notre francophonie », a salué ce jeudi, au cours d’une conférence de presse sur le terrain désormais vendu, la ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney.

À ses côtés, les ministres des Soins de longue durée et de l’Infrastructure, Natalia Kusendova-Bashta et Kinga Surma, ont souligné la ténacité des instigateurs de ce futur lieu de vie.

La Communauté du Trille blanc (CTB) a effectivement fait du chemin en deux ans depuis notre couverture dépeignant l’idée et la vision d’un village francophone multigénérationnel pour aînés avec ses ramifications pour en faire une petite ville autonome : commerces, pharmacie, café et logements.

En particulier quant au comment, où, quand et combien pour faire sortir cet ambitieux projet de terre. 

« En tant que président de la CTB, cette semaine, j’ai payé 15 millions de dollars. C’est le plus gros chèque que j’ai jamais fait de ma vie », plaisantait en avril dernier le président Jean Bouchard, au micro d’ONFR.

Une coquette somme déboursée pour les quelque 40 acres du terrain du 100 Bloomington Ouest, dont 30 qui ne sont pas développables, zonés « protection et héritage », seront transformés en sentiers verts pédestres. Cinq acres seront consacrés à des usages récréatifs sur la parcelle ouest, tandis que les premiers édifices s’étendront sur les 8,69 acres constructibles. 

C’est au cours de la semaine du 17 avril que la signature de l’APS (Agreement of Purchase and Sale), contrat d’achat du terrain, s’est conclue avec infrastructure Ontario.

« Depuis 1947, le terrain appartenait à la province de l’Ontario. C’est donc lui qui reçoit le paiement du terrain. L’investissement total est estimé à 85 millions de dollars », explique M. Bouchard. 

Si le gouvernement n’a pas cédé le terrain pour un dollar symbolique, un souhait initial du président de la CTB, le ministère des Soins de longue durée, dûment impliqué dans la phase 1, financera les 160 lits.

La phase 1 : le foyer de soins de longue durée francophone

C’est la firme d’architecture Montgomery Sisam, dotée de quelques experts francophones, qui a gagné l’appel d’offre. 

« Nous avons d’abord fait plusieurs visites de maisons de soins de longue durée pour s’en inspirer ensemble. Puis, en avril dernier, nous avons assemblé des maquettes et pièces 3D à échelle : un exercice très excitant pour penser la disposition, l’orientation des bâtiments, la taille des chambres, ou encore le lien à l’environnement », relate le président du CTB. 

Le porteur du projet Jean Bouchard entouré des ministres Natalia Kusendova-Bashta (Soins de longue durée), Caroline Mulroney (Affaires francophones), Kinga Surma (Infrastructure) et de la députée d’Aurora Dawn Gallagher Murphy. Photo : YouTube Gouvernement de l’Ontario
« Cela nécessitera 300 employés francophones ou bilingues, à aller chercher et à former »
—  Jean Bouchard, président du CTB

En ce qui concerne les 160 premiers lits de soins de longue durée, les francophones seront prioritaires via l’ouverture d’une liste d’attente. 

« Cela nécessitera 300 employés minimum, obligatoirement francophones ou bilingues, à aller chercher et à former », entrevoit celui-ci. 

Il envisage dans la foulée la construction de deux autres bâtiments, avec un centre de soin divers, dont imagerie, ou encore ostéophathie et chiropratique, ainsi qu’un autre dédié à la formation.

« On aimerait se doter d’un campus collégial avec des cours dans le domaine de la santé évidemment, mais aussi dans le domaine des sciences sociales parce qu’on en a besoin dans ces institutions, avec des logements provisoires à la fois pour les stagiaires et les employés. »

Suite à une analyse financière réalisée par l’organisme, Jean Bouchard certifie que le tout pourrait générer des millions de dollars de revenus annuels. 

Les phases 2 et 3 : extension du village et logements abordables

Pour l’heure confidentielle, une extension subtantielle a déjà été négociée pour l’achat d’un terrain adjacent, comprenant du bâti d’origine, une occasion d’étendre les services en français et d’accueillir des organismes francophones. 

La construction de logements abordables, maisons et résidences, puis de condos, interviendra en phase 3, nous indique Jean Bouchard, avec une opportunité pour des commerces de s’établir. 

« De là, le village va se mettre en place autour avec un café, une pharmacie, des petites boutiques, bien qu’il y ait des ouvertures tout le long du processus. Par exemple, dès le début un lieu de culte ouvrira ainsi qu’une une salle communautaire multi-usage », énumère celui-ci.

Le village francophone Communauté du Trille blanc (CTB), dont l’idée avait germé en 2019, verra bien le jour, avec une premier pelletée de terre en octobre 2025. Photo : gracieuseté de Jean Bouchard

La Communauté Trille blanc, qui est devenue une fondation depuis le mois de novembre, accréditée par Revenu Canada, peut désormais recevoir des dons. 

M. Bouchard considère que, « sans la générosité et la philanthropie, ça n’aurait pas été possible. Parce qu’il s’agissait de montrer au gouvernement que le projet était viable économiquement. On a été capable de payer notre terrain et ce n’est pas rien. Nous devons, nous les francophones, être capables de s’investir oui mais aussi d’investir pour notre réalité culturelle, pour les nôtres. »

L’organisme espère ainsi lever 30 millions de dollars de fonds au cours des trois prochaines années.

« Ce jalon marque un nouveau chapitre emballant pour notre communauté francophone, affirme pour sa part Tom Mrakas, le maire d’Aurora. La Communauté du Trille blanc sera bien plus qu’un foyer de soins de longue durée. Ce sera un carrefour dynamique où les aînés, les familles et les membres de la communauté pourront vivre, se rencontrer et célébrer notre langue et notre culture. »

Avec une première pelletée de terre début octobre, la construction devrait battre son plein dès juin 2026. Entre deux et trois ans seraient nécessaires pour achever la première phase et de 7 à 10 ans pour l’intégralité du village.

La nouvelle vie de Linda Morais, entre professorat et lutte

Un an après les Jeux olympiques de Paris, ONFR vous propose de revenir sur les souvenirs des athlètes franco-ontariens et surtout sur leur année après les Jeux. Ce jeudi, c’est au tour de Linda Morais, lutteuse originaire de Windsor, de revenir sur cette expérience unique, sur ce qu’elle en a retiré et sur une saison marquée par un retour aux sources et une pause dans la compétition de haut niveau.

Pour Linda Morais, il ne fait aucun doute : « ça va être très difficile de battre l’expérience des Jeux olympiques ». Elle évoque encore avec émotion la présence de toute sa famille dans les gradins, un soutien rare dans une carrière où les compétitions internationales l’avaient souvent tenue loin des siens. 

« Juste la sensation, les émotions que j’ai eues pendant le combat, c’était unique », dit-elle.

Bien sûr, la frustration d’un parcours interrompu dès le premier combat reste présente. 

« Ces six minutes ne démontrent pas les quinze années d’entraînement. J’aurais aimé avoir une autre chance de montrer ce que je valais », admet-elle.

Mais elle refuse de laisser cette déception ternir ses souvenirs.

« Tout ce qui s’est passé après, le fait d’avoir pu visiter Paris avec ma famille, je ne voudrais pas le changer. »

Des souvenirs inoubliables hors compétition

Ce séjour olympique a aussi été ponctué de moments inattendus et joyeux. Le lendemain de son combat, elle assiste pour la première fois de sa vie à un concert avec toute sa famille : les Arkells à la Maison du Canada. 

« On en parle encore aujourd’hui, c’était super le fun! » Et puis il y a eu la cérémonie de clôture, avec ce tour de stade devant des gradins pleins : « J’ai levé les yeux et vu toute cette foule… j’ai eu des frissons ». Pour la Franco-Ontarienne, ce sont ces instants « spéciaux » qui résument le mieux ce que représentent les Jeux : des souvenirs qu’on garde « proche du cœur ».

Une reconnaissance nouvelle à Windsor

La lutte reste un sport confidentiel au Canada, mais les Jeux ont offert à la Windsorienne une visibilité inédite, surtout dans sa ville natale.

 « Je marche dans la rue et des personnes me disent : ‘Hey, je t’ai vue aux Olympiques, merci de représenter le pays’. »

Même des connaissances perdues de vue depuis vingt ans l’ont recontactée. Cette reconnaissance locale s’est aussi manifestée dans les écoles où elle a été invitée à parler, avant même son départ pour Paris. Désormais enseignante au secondaire en français, elle croise régulièrement des élèves qui savent qu’ils ont dans leur classe une olympienne.

Retour aux sources

Après Paris, Linda Morais a quitté Montréal pour revenir à Windsor. Elle y a acheté un petit condo, décroché un poste permanent à l’école secondaire de Lassalle comme professeure de sciences et repris en main le programme de lutte. 

Au-delà de sa participation aux Jeux olympiques, Linda Morais retient également son parcours de qualification qui lui avait permis d’adopter un nouvel état d’esprit. Photo : WCL

Mais sur le plan sportif, elle a mis la compétition internationale « entre parenthèses » pour se concentrer sur la réhabilitation de blessures accumulées au fil des années, notamment une hernie discale au cou.

 « Cette année, j’essaie vraiment de me guérir avant de reprendre. »

 Elle continue à s’entraîner et à encadrer de jeunes athlètes, tout en laissant la porte ouverte à un retour.

2026 en réflexion

Si elle décide de replonger dans le haut niveau, Linda Morais sait déjà quel serait son objectif prioritaire : les championnats du monde de 2026. Un rendez-vous qui, pour y parvenir, nécessiterait de replonger dès la prochaine saison dans le rythme exigeant du circuit, en enchaînant compétitions régionales, nationales, puis internationales.

« Il faut toujours recommencer du début à chaque année », rappelle-t-elle, consciente du travail de fond que demande un retour au sommet.

En attendant, la Windsorienne savoure un quotidien plus stable, rythmé par ses cours de sciences, ses entraînements personnels et le suivi de ses jeunes lutteurs. Elle conserve surtout l’état d’esprit qui l’a accompagnée tout au long des qualifications olympiques : celui de la gratitude.

« C’est quelque chose qui m’a libérée, qui a enlevé beaucoup de stress », explique-t-elle, convaincue que cette approche l’aidera dans tous les objectifs qu’elle se fixera, que ce soit sur le tapis ou en dehors.

« Respectez les droits des Franco-Ontariens » : le NPD demande l’abandon du projet de supervision des conseils scolaires

TORONTO – Les députées néo-démocrates Chandra Pasma et France Gélinas ont alerté, mercredi à Queen’s Park, sur le projet de loi 33, qu’elles jugent menaçant pour l’autonomie des conseils scolaires et les droits constitutionnels des Franco-Ontariens.

« De plus en plus de gens viennent nous voir avec des questions. Dans la communauté francophone, les inquiétudes sont grandes », a précisé Mme Gélinas, à l’approche de la rentrée scolaire.

À ses côtés, sa collègue néo-démocrate et élue d’Ottawa-Ouest—Nepean, Chandra Pasma, la présidente de l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO) Gabrielle Lemieux et la présidente de la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO) Marie-Claude Bisson ont aussi exprimé leurs inquiétudes dans la communauté francophone face au projet de loi 33 au cours d’une conférence de presse en français à Queen’s Park.

L’article 23 de la Charte canadienne garantit aux francophones le droit à une éducation en français et à gérer leurs écoles, mais la centralisation des pouvoirs entre les mains du ministre de l’Éducation inquiète.

De gauche à droite, Marie-Claude Bisson, Gabrielle Lemieux, Chandra Pasma et France Gélinas. Capture d’écran/Assemblée législative de l’Ontario

« Comme Franco-Ontarien, on s’est débattu pendant des décennies pour avoir le droit constitutionnel de gérer notre propre système scolaire. Ça ne nous a pas été donné. On a dû travailler longtemps pour l’avoir », a rappelé Mme Gélinas. « Et là, avec le projet de loi 33, le gouvernement a comme trouvé une porte d’arrière pour nous enlever ce droit-là. »

De son côté, Gabrielle Lemieux a regretté l’absence totale de consultation et a ajouté : « Nous restons disponibles à être consultés. On représente quand même 10 000 enseignants et du personnel de soutien dans nos écoles. Il est important qu’on soit consulté pour s’assurer que les projets de loi respectent la réalité des Franco-Ontariens. »

Mainmise du gouvernement

Adopté en première lecture en mai dernier, le projet de loi 33 (Loi de 2025 sur le soutien aux enfants, aux élèves et aux étudiants de l’Ontario) modifie en profondeur la Loi sur l’éducation et d’autres textes législatifs.

Il permet notamment au ministre d’imposer des directives aux conseils scolaires « dans l’intérêt public » et, en cas de désaccord, de prendre le contrôle via un superviseur nommé par le gouvernement.

C’est là que le bât blesse, selon l’opposition et les organismes francophones : le concept d’« intérêt public » n’est pas défini, ce qui ouvre la porte à une large interprétation politique. « Un superviseur non élu pourrait prendre toutes les décisions concernant l’éducation francophone (budgets, programmes, embauches) sans consulter un seul Franco-Ontarien », a dénoncé la députée Chandra Pasma.

L’élue de Nickel Belt conteste, quant à elle, le fait qu’un tel changement donnerait au gouvernement le pouvoir de nommer des superviseurs non imputables à la communauté francophone, mais uniquement au ministère.

« Qu’est-ce que ça veut dire, l’intérêt public? Ça peut être ce que tu veux. Quand c’est un gouvernement conservateur, l’intérêt public ça peut vouloir dire que l’école francophone utilise la même cafétéria ou le même gymnase que l’école anglophone. Ça ouvre la porte à toutes sortes de choses », dit-elle.

Par, pour et avec

Assistant à la conférence en ligne, Andréane Chénier, a souligné la nécessité de précisions autour du cadre du projet de loi : « Le problème est que les pouvoirs ministériels proposés doivent être clairement définis, soumis à un contrôle judiciaire et respecter nos droits linguistiques. »

« Bien que la transparence et une bonne gouvernance soient importantes, il faut s’assurer que le projet de loi ne porte pas atteinte à notre droit à une éducation publique de qualité, par et pour nous », a-t-elle aussi fait savoir celle qui est aussi conseillère scolaire.

Marie-Claude Bisson, de la FESFO, partage le même avis : « Nous sommes préoccupés par le projet de loi, notamment pour ce que cela implique pour nos activités curriculaires et pour le développement de notre identité. »

Le texte oblige aussi les conseils scolaires à soumettre au gouvernement les noms des écoles avant toute désignation ou modification, une mesure que plusieurs perçoivent comme une atteinte à la mémoire locale et à l’identité francophone.

« Une attaque contre les droits démocratiques »

Le NPD et ses alliés francophones appellent le gouvernement à respecter les droits constitutionnels garantis par la Charte canadienne et à renoncer à cette réforme.

« Le projet de loi 33 retire la voix des parents et des communautés en remplaçant des conseillers scolaires élus par des superviseurs nommés par le gouvernement à des fins partisanes », a clamé France Gélinas.

« On veut un retrait du projet de loi, il n’y a aucune façon de respecter nos droits de la Charte. Tu ne peux pas respecter l’article 23 avec le projet de loi 33 », a-t-elle ajouté.

« Nous sommes inquiets du retour de la police dans les écoles et de ce que cela peut signifier pour ceux qui n’ont pas une expérience positive avec la police »
— Marie-Claude Bisson

Celles-ci avertissent que si le gouvernement choisit de ne pas retirer le projet de loi, ils pourraient entreprendre des actions et manifester leur mécontentement.

Le projet de loi 33 a entrouvert la phase de débats en deuxième lecture, mais ceux-ci sont pour l’instant en pause. Les travaux reprendront à Queen’s Park après la mi-septembre.

Police à l’école et admissions postsecondaires

Au-delà des enjeux linguistiques, le projet de loi relance également le débat sur la présence policière dans les écoles. Il obligerait les conseils scolaires à collaborer avec les corps policiers pour implanter des programmes d’agents ressources.

« Nous sommes inquiets du retour de la police dans les écoles et de ce que cela peut signifier pour ceux qui n’ont pas une expérience positive avec la police. Nous tenons à ce que des consultations aient lieu et nous, les jeunes, voulons être consultés », a lancé de son côté Marie-Claude Bisson.

Un peu plus tôt lundi, la Commission ontarienne des droits de la personne (CODP) a fait paraître un mémoire sévère soulignant qu’aucune donnée probante ne démontre l’efficacité de ces programmes, et que leur réintroduction pourrait accentuer les inégalités vécues par les élèves autochtones, noirs, en situation de handicap ou 2SLGBTQ+.

ONFR a finalement reçu une réponse du gouvernement de l’Ontario après publication par courriel.

« Le projet de loi 33 vise à s’assurer que les ressources destinées à soutenir les élèves soient dirigées là où elles ont le plus d’impact : dans la classe. Les mesures proposées pour responsabiliser les conseils scolaires ont pour objectif de tenir tous les conseils sur un pied d’égalité vis-à-vis des parents et des contribuables », a écrit la porte-parole du Ministère de l’Éducation, Justine Teplycky.

« Si des conseillers scolaires gèrent mal leurs ressources au point de compromettre l’éducation des élèves, nous n’hésiterons pas à intervenir », finit-elle.

« Je veux contribuer à stabiliser l’institution », affirme la nouvelle rectrice de l’Université de Hearst

Sophie Dallaire est la nouvelle rectrice de l’Université de Hearst.

Sophie Dallaire prend officiellement ses fonctions ce mercredi, succédant à Aurélie Lacassagne, qui a annoncé son départ le 2 juillet dernier, pour des raisons personnelles et familiales.

Cumulant une expérience de près de 30 ans au sein de l’établissement, la Franco-Ontarienne arrive quelques semaines avant la rentrée et devra relever plusieurs défis, y compris la stabilisation de l’institution.

« Vous aviez déjà occupé le rectorat par intérim. Qu’est-ce qui vous a poussée à revenir, cette fois-ci pour de bon?

C’est une demande du conseil d’administration. On m’a souvent sollicitée à des moments charnières de l’Université. Je ne me destinais pas forcément à ce rôle en fin de carrière, mais on m’a jugée comme la personne de l’heure pour assurer stabilité et confiance. J’ai accepté le défi avec plaisir.

Vous arrivez avec une très longue expérience au sein de l’établissement…

Je suis à l’Université depuis bientôt 30 ans. J’ai été chargée de cours, professeure en administration des affaires, vice-rectrice, rectrice intérimaire, puis directrice générale du groupe Innovanor depuis 2018. Au vice-rectorat, j’ai participé à la transformation de 2014, qui a donné une nouvelle signature pédagogique à l’Université, axée sur l’apprentissage expérientiel et l’ouverture sur le monde, avec l’adoption des cours en mode bloc.

Ensuite, j’ai agi à titre de gestionnaire de transition vers l’autonomie universitaire et contribué au développement de notre premier programme de deuxième cycle en psychothérapie. Tout cela m’a permis de toucher à plusieurs dossiers, qui me préparent bien au rôle de rectrice aujourd’hui.

Quelles seront vos priorités dans les prochains mois?

Je veux d’abord prendre le temps de m’installer, de rencontrer les équipes et nos partenaires. Ma vision générale est que l’Université de Hearst demeure pertinente pour les communautés et pour l’Ontario français.

Il ne faut pas s’attendre à une révolution de ma part, mais plutôt à une série de petits changements en continu pour continuer de s’adapter et de rester à l’écoute. Aussi, je veux contribuer à stabiliser l’institution après une décennie de grandes transformations, préparer la relève et faire en sorte que l’Université de Hearst soit un milieu où il fait bon travailler, mais où il fait bon étudier également. »  

Comment s’annonce la rentrée de cet automne?

Les inscriptions se maintiennent du côté des étudiants canadiens et des transferts collégiaux. Le projet pilote d’immigration francophone a beaucoup aidé pour l’international, en offrant des services d’établissement dans nos communautés et une voie rapide vers la résidence permanente.

Cette année, environ 40 % des étudiants sont Canadiens ou résidents permanents, et 60 % viennent de l’international. Cela faisait longtemps que nous n’avions pas atteint un tel équilibre, et c’est encourageant. La seule inquiétude concerne la grève d’Air Canada, qui retarde l’arrivée de certains étudiants étrangers. Malgré cela, l’équipe demeure confiante.

Le logement étudiant est un enjeu important du campus de Hearst. Où en est-on avec le don potentiel d’un terrain par la municipalité?

Je n’ai pas tous les détails, mais je sais qu’il y a des discussions en cours, à la fois au niveau municipal et avec des investisseurs privés. L’Université suit ces initiatives de près et se positionnera comme partenaire pour trouver des solutions, car c’est un enjeu majeur pour la vie étudiante.

L’Université de Sudbury, l’Université Laurentienne et le Collège Boréal ont récemment annoncé des collaborations. Hearst envisage-t-elle de nouveaux partenariats?

Oui, c’est essentiel. Le milieu postsecondaire francophone en Ontario est en mutation et les jeunes francophones sont moins nombreux dans nos écoles. Dans ce contexte, on n’a pas d’autre choix que de collaborer.

Nous avons déjà des projets conjoints avec Boréal, l’Université Laurentienne, l’Université de Sudbury et d’autres, souvent financés par le ministère (des Collèges et Universités). Je souhaite maintenir ces canaux de communication ouverts et multiplier les collaborations, toujours dans l’intérêt des étudiants et des communautés.

Vous aviez mentionné Innovanor. Pouvez-vous rappeler ce qu’est ce groupe et son rôle?

C’est une entité indépendante, mais au service de l’Université et des communautés. On y retrouve trois centres : le Centre régional de recherche et d’intervention en développement économique et communautaire (CRIDEC), le Centre Labelle, spécialisé en évaluation et intervention psychosociale, et plus récemment un centre d’archives. Ces centres servent de lieux de stage pour nos étudiants et offrent des services directs aux communautés.

Quand j’ai pris la direction, le budget d’Innovanor était de 199 000 $ par année. Aujourd’hui, il atteint 1,7 million de dollars. Nous avons structuré les centres, consolidé leurs missions et renforcé leur pertinence pour nos communautés, tout en augmentant l’offre de services et les stages pour les étudiants. C’est un organisme qui joue un rôle clé dans le lien entre l’Université et son environnement.

Vous êtes installée à Kapuskasing. Devrez-vous déménager à Hearst pour votre nouveau mandat?

Je n’ai pas eu cette discussion avec le conseil, mais je crois au contraire que c’est un avantage d’avoir des membres de la direction répartis sur tout le territoire. Cela reflète la structure multicampus de l’Université. »

Le collège La Cité obtient 1,7 M $ pour l’inclusion des étudiants francophones en situation de handicap

OTTAWA – Le collège La Cité annonce l’obtention d’une contribution de plus de 1,7 million de dollars sur deux ans du gouvernement du Canada.

Ce financement présenté comme « majeur » permettra au HUMAlab, laboratoire de recherche appliquée de La Cité, en partenariat avec l’équipe de La Boussole du Centre d’appui et de prévention (Le CAP), de lancer un projet de recherche appliquée visant à favoriser l’inclusion des étudiants francophones en situation de handicap sur le marché du travail.

« Cette initiative s’inscrit pleinement dans la mission du Collège de faire progresser l’innovation sociale et l’équité en emploi à travers la recherche appliquée. Elle témoigne de notre engagement envers la réussite de toute la communauté collégiale », souligne Lynn Casimiro, présidente-directrice générale de La Cité, dans un communiqué.

Financé par le Programme Compétences pour réussir, le projet se concentre sur la réalité des francophones en situation de handicap et cherche à identifier leurs besoins, notamment par l’adaptation des outils diagnostics. En misant sur des données probantes et une approche collaborative, le HUMAlab espère transformer les pratiques d’accompagnement et sensibiliser les employeurs à l’importance de créer des environnements de travail véritablement inclusifs.

La ministre de l’Emploi et des Familles, Patty Hajdu, rappelle l’importance de soutenir l’employabilité des étudiants francophones en situation de handicap.

« En mettant l’accent sur les expériences vécues, en identifiant les obstacles et en engageant les employeurs, ce projet permet de générer des changements concrets – tant dans la manière dont nous soutenons les individus en situation de handicap que dans la création de milieux de travail plus équitables et inclusifs sur les plans linguistique et social à travers le Canada », affirme-t-elle.

Le projet devrait renforcer les compétences professionnelles des étudiants et favoriser une sensibilisation durable dans les milieux de travail. Des recommandations stratégiques et des outils concrets seront diffusés à grande échelle.

Michael Woods annonce la fin de sa carrière

Un an après les Jeux olympiques de Paris, ONFR vous propose de revenir sur les souvenirs des athlètes franco-ontariens et surtout sur leur année après les Jeux. Ce mardi 19 août, c’est au tour de Michael Woods, pilier du cyclisme canadien. Retour sur l’expérience unique qu’il a vécue à Paris et sur la saison qui l’a menée à annoncer la fin de sa carrière en ce début de semaine.

Dans le dernier billet de blog qu’il a tenu tout au long du Tour de France, Michael Woods a surpris le monde du cyclisme, ce lundi 18 août, en annonçant qu’il raccrocherait le vélo à la fin de la saison. 

« Comme on dit, toutes les bonnes choses ont une fin. J’ai encore de grandes ambitions pour les années à venir, dans d’autres disciplines d’endurance – j’ai des projets épiques, restez à l’affût. Mais pour les raisons mentionnées plus haut, j’ai pris la décision de prendre ma retraite du cyclisme professionnel sur route à la fin de cette saison », a-t-il écrit.

Le coureur cycliste ottavien a partagé la nouvelle sur ses réseaux sociaux et en a profité pour remercier toutes les personnes qui ont contribué à la réussite de sa carrière. Photo : capture d’écran du compte Instagram de Michael Woods

Dans ce texte empreint d’émotion, il confie aussi la raison profonde de ce choix : « Depuis cinq ans, j’évite d’embrasser mes enfants quand je vais les chercher à l’école, de peur de tomber malade avant une course. Je dors souvent dans une autre chambre, séparé de ma famille, pour optimiser mon sommeil. Chaque aspect de ma vie a été analysé et étudié pour maximiser ma capacité à rouler. J’ai adoré cette quête totale, et je n’ai aucun regret. Mais cela ne peut durer éternellement. »

Dernier Tour de France

Tout au long de son ultime Tour de France, Woods a tenu un journal quotidien, partageant les coulisses d’un coureur d’expérience. Il y racontait les espoirs, les déceptions, mais aussi des instants inattendus. Le plus marquant est survenu lors de la dixième étape : en pleine course, pris d’une urgence, il s’est arrêté pour utiliser les toilettes d’un camping-car d’un spectateur. Quelques minutes plus tard, il repartait à la poursuite du peloton, sous les encouragements amusés du public.

L’anecdote, que Woods a lui-même relatée avec humour dans son blog en évoquant son « moment Dumoulin », en référence à un épisode similaire du Néerlandais Tom Dumoulin sur le Giro, a fait le tour des réseaux sociaux. Loin d’en être gêné, le coureur ottavien a choisi d’en rire, offrant un visage humain et sans filtre à son dernier Tour. 

Sportivement, son bilan est mitigé : « Les choses n’ont pas tourné en ma faveur. Les jours où j’étais en forme, la chance n’était pas de mon côté, et lorsque j’avais une vraie opportunité, je n’étais pas assez bon. C’était frustrant, et le manque de courses cette saison, à cause de blessures et de maladies, a pesé lourd. Mais pour la première fois de ma carrière, je suis arrivé à Paris sans blessure ni maladie, et j’ai terminé ce Tour en meilleure condition qu’au départ. »

De Paris 2025 à Paris 2024

Un an plus tôt, Woods disputait la course en ligne des Jeux olympiques de Paris. S’il n’est pas monté sur le podium, il garde un souvenir très fort d’un moment bien particulier. Deux jours avant l’épreuve, il participait à la reconnaissance du circuit dans les rues de la capitale, routes fermées et foule en délire.

« C’était irréel. Nous roulions au cœur de Paris, devant des milliers de personnes qui criaient comme si c’était déjà la course. L’énergie était incroyable. »

Même si le résultat final a été décevant, Michael Woods garde un souvenir inoubliable de Paris 2024. Photo : Candice Ward/COC

Le jour de la course, il est parvenu à s’échapper et à passer en tête dans la première ascension de Montmartre. « Pour un court instant, je me suis senti comme un dieu. Je n’ai jamais connu un tel bruit, une telle ferveur. C’était assourdissant », se remémore-t-il dans un article de son blog. 

Durant l’année qui a suivi, Woody, comme il est surnommé, a enrichi encore un peu plus son palmarès. À l’automne 2024, il a remporté une victoire d’étape sur la Vuelta, sa troisième sur le Tour d’Espagne. 

« C’est ma troisième victoire à la Vuelta et j’en suis vraiment fier. Celle-ci, je vais la savourer », expliquait-il. 

Quelques jours plus tard, il brillait encore à domicile, avec une belle huitième place au Grand Prix cycliste de Montréal : « Je suis fier de cette 8e place. J’étais fort, j’ai tenté plusieurs fois. »

Entre ambitions et réalité

Dans un entretien accordé à Radio Canada en décembre 2024, Woods affirmait encore vouloir repousser sa retraite. Il avait même évoqué les Mondiaux 2026 de Montréal comme point final rêvé.

 « J’ai pris la décision dans les derniers mois de continuer jusqu’en 2026. Les Championnats du monde seront à Montréal, et j’ai pensé que ce serait un endroit idéal pour terminer ma carrière », avait-il déclaré à ce moment-là.

Finalement, la réalité en a décidé autrement.

Woody avait signé une très belle cinquième place aux Jeux olympiques de Tokyo en 2021, l’un des points culminants de sa carrière avec sa victoire d’étape sur le Tour de France en 2023. Photo Mark Blinch/COC

Avec du recul, Michael Woods se dit satisfait de tout ce qu’il a accompli jusqu’à aujourd’hui et que le temps est venu de raccrocher. 

 « J’ai réussi à devenir l’un des meilleurs cyclistes au monde, et c’est une aventure dont je suis diablement fier. »

Une dernière au Canada

Il va quitter le monde du cyclisme canadien en le laissant entre de bonnes mains comme il le confiait en décembre dernier. 

 « J’espère qu’un événement comme les Mondiaux 2026 à Montréal peut inspirer la prochaine génération. Guillaume Boivin et Hugo Houle vont aussi bientôt raccrocher. Mais on a Derek Gee, des coureurs comme Pier-André Côté et Riley Pickrell. C’est vraiment important d’avoir une course comme ça pour donner un but aux plus jeunes et montrer ce sport à son plus haut niveau. »

Même s’il n’ira finalement pas jusqu’aux Championnats du monde de Montréal en 2026, Michael Woods terminera bien sa carrière au Canada. Le vétéran ontarien devrait être au départ des Classiques Laurentiennes, avec le Grand Prix Cycliste de Québec le 12 septembre puis le Grand Prix Cycliste de Montréal le 14 septembre 2025.

Deux ultimes rendez-vous, sur ses terres, pour refermer en beauté un chapitre exceptionnel du cyclisme canadien.

Élection partielle en Alberta : victorieux, Pierre Poilievre sera de retour au Parlement

C’est sans surprise que Pierre Poilievre a réussi à regagner son siège à la Chambre des communes lundi soir en Alberta en récoltant près de 80 % des voix pour remporter l’élection partielle dans Battle River—Crowfoot.

Selon les derniers chiffres d’Élections Canada avec 99,65 % des bulletins de vote dépouillés, Pierre Poilievre a récolté près de 40 500 voix (80,4 %), soit une avance de près de 35 000 voix sur son plus proche poursuivant, Bonnie Critchley, une candidate indépendante.

« Merci beaucoup aux formidables habitants de Battle River—Crowfoot. Si je me tiens devant vous aujourd’hui, c’est par la grâce de Dieu et par votre grande générosité », a lancé d’emblée quelques instants après sa victoire, le leader du Parti conservateur.

Le taux de participation était de 58 % dans ce comté rural de l’Alberta qui comptait sur la présence de plus de 214 candidats inscrits, en majorité des indépendants. Les électeurs de la circonscription albertaine devaient écrire le nom de la personne pour qui ils votaient à la main. Une majorité des 214 candidats faisaient partie du Comité du bulletin de vote le plus long, qui réclame une réforme du mode de scrutin.

Cette élection a été déclenchée par le premier ministre Mark Carney et fait suite à la démission du député Damien Kurek. Ce dernier avait remporté son élection en avril avec près de 82 % des voix, avant de laisser son siège pour Pierre Poilievre.

« Certains pourraient croire que ça a été un fardeau pour moi de quitter la campagne pour une campagne nationale et de me lancer directement dans le porte-à-porte pour parcourir une région de 56 000 kilomètres carrés », a affirmé le nouvel élu albertain dans son discours de victoire un peu après minuit mardi matin.

« Mais ce n’était pas un fardeau du tout, cela a été un privilège. Apprendre à connaître les gens de cette région a été le privilège de ma vie. En fait, j’ai eu beaucoup de plaisir », a reconnu Pierre Poilievre avec un sourire, qui a remercié sa femme Anaida et le député sortant Damien Kurek pour leur appui durant l’élection partielle.

L’absence parlementaire de Pierre Poilievre n’aura été que de courte durée, lui qui pourra faire son retour dès le 15 septembre, à la reprise des travaux à la Chambre des communes.

« À la reprise des travaux parlementaires, on ne se contentera pas de s’opposer à la criminalité, à l’endettement, à l’immigration et au coût de la vie hors de contrôle des libéraux, on va proposer de vraies solutions pour changer les choses », a-t-il soutenu.

Le chef conservateur avait perdu son siège dans Carleton, en banlieue d’Ottawa, qu’il détenait depuis 2004. Les conservateurs sont arrivés en deuxième place à l’échelle nationale en obtenant 41 % des voix lors de l’élection nationale en avril dernier.

Le prochain défi pour Pierre Poilievre sera une révision automatique de son leadership à la fin janvier 2026, lors d’une convention du Parti conservateur à Calgary. Lorsqu’un chef conservateur ne démissionne pas après une défaite électorale, la constitution du parti exige que les membres votent pour savoir si ce chef doit conserver son poste lors de la prochaine convention nationale.

34 millions $ pour l’accès à des services de santé en français en Ontario

OTTAWA — Le gouvernement fédéral a annoncé lundi qu’il allonge une trentaine de millions de dollars pour la formation de professionnels de santé, dans le but d’améliorer l’accessibilité à des services de santé en français en Ontario.

Ce financement est divisé en deux. 33 millions de dollars seront partagés entre l’Université d’Ottawa (25 M $ sur cinq ans), La Cité (6 M $ sur cinq ans), le Collège Boréal (1 M $ sur quatre ans) et le Campus Glendon de l’Université de York (1 M $ sur cinq ans). 

Cet argent servira aux quatre établissements pour notamment augmenter le nombre d’étudiants inscrits dans des programmes de santé comme en sciences infirmières, en soins paramédicaux et en travail social.

En second, le fédéral financera (1 M $ sur quatre ans) un projet portant sur l’identification linguistique des cartes de santé en Ontario. Cette initiative menée par la province vise « à améliorer la qualité de la collecte et de l’analyse des données relatives à la langue officielle préférée des patients dans toute la province », indique par communiqué le ministère de la Santé au fédéral.

L’annonce a été faite dans le cadre du Programme pour les langues officielles en santé. Ce montant permettra notamment d’aider près d’une dizaine de programmes à l’Université d’Ottawa et huit à La Cité.

« L’excellence et la stabilité du système de santé reposent sur la formation de la prochaine génération de professionnels et cet investissement promet de soutenir des soins de qualité pour les patients francophones en milieu minoritaire en Ontario », a indiqué Marie-Ève Sylvestre, la rectrice de l’Université d’Ottawa, dans ce communiqué.

En 2023, dans le cadre de son Plan d’action pour les langues officielles, le gouvernement fédéral avait annoncé un investissement de 206,7 millions de dollars sur cinq ans.

« Lorsqu’il s’agit de soins de santé, la barrière linguistique peut être une question de vie ou de mort. C’est pourquoi le gouvernement du Canada appuie des projets qui amélioreront l’accès aux services de santé pour les membres des communautés francophones et anglophones en situation minoritaire au Canada », a déclaré de son côté la ministre de la Santé, Marjorie Michel.

Crise à Fauquier-Strickland : le budget 2025 proposé entraînerait des hausses de taxes de plusieurs milliers de dollars pour les résidents

FAUQUIER-STRICKLAND – Les citoyens de Fauquier-Strickland pourraient voir leurs taxes grimper de manière historique en 2025. Pour combler un déficit général de 2,6 M $, le conseil municipal examinera ce mardi soir une proposition de budget 2025 prévoyant de prélever 2,79 millions de dollars auprès des résidents.

Concrètement, le prélèvement fiscal municipal total augmenterait de 128 % par rapport à 2024, la portion municipale de l’impôt foncier grimperait de 125 %, et la facture résidentielle totale, incluant les taxes scolaires, atteindrait une hausse moyenne de 117 %.

« Le déficit général de 2024, évalué à 2,66 millions de dollars, devait légalement être intégré au budget de cette année. C’est ce qui explique la majeure partie de cette hausse », résume le rapport d’une vingtaine de pages soumis aux élus par le trésorier adjoint du canton.

Un premier projet de budget prévoyait une explosion de plus de 260 % du compte de taxes, essentiellement pour combler ce déficit. Après révision, seuls les coûts essentiels ont été conservés, soit les salaires, l’entretien courant et les projets déjà amorcés.

Le prélèvement fiscal du canton passerait de 1,2 M $ en 2024 à près de 2,8 M $ en 2025, soit une hausse de 128 %. Montage ONFR

Un 2e scénario possible

En parallèle, les élus auront aussi sous les yeux un scénario alternatif, décrit comme moins viable dans le rapport. Celui-ci limiterait la hausse du prélèvement fiscal à 100 % dès 2025, avant de stabiliser les augmentations à 3 % par année.

Une telle approche aurait permis à 86 % des propriétaires de voir leur facture grimper de moins de 2000 $, avec une hausse moyenne évaluée à 92 % en incluant les taxes scolaires. Mais cette voie laisserait la municipalité avec des réserves beaucoup plus maigres à long terme, soit environ 3,8 millions $ d’ici 2029, à peine 60 % de ce que prévoit le plan de gestion des actifs.

Pour éviter l’effondrement complet de la municipalité, le ministère des Affaires municipales et du Logement avait accordé, en juillet dernier, une aide exceptionnelle de 300 000 $, versée en tranches mensuelles. 

Selon les calculs du service municipal, cela permettrait, dans le meilleur des scénarios, de limiter la hausse de taxes à 80 % pour 2025, suivie d’une progression de 3 % par année.

Cette bouée de sauvetage permet de couvrir les dépenses essentielles et d’assurer la continuité des services, mais elle s’accompagne de conditions strictes y compris l’adoption d’un budget d’ici la fin août et le début du prélèvement des impôts fonciers d’ici la fin du mois de septembre.

La présente ébauche de budget sera présenté et soumis à une acceptation du conseil ce mardi soir lors d’une réunion extraordinaire.

Une population lourdement sollicitée

Selon les projections incluses dans le budget basé sur le premier scénario, environ 70 % des propriétés du canton, soit 277 résidences, verront leur compte de taxes augmenter de moins de 2000 $ en 2025. Mais pour une trentaine de propriétés, la facture grimpera de plus de 3000 $ par année.

« Même avec ce niveau de taxation, le canton entrera en 2026 sans aucune réserve financière, ce qui le rend extrêmement vulnérable face aux imprévus », souligne le document.

En 2025, près de 70 % des résidences de Fauquier-Strickland pourraient voir leur facture grimper de moins de 2000 $, mais 33 propriétés subiraient une hausse de plus de 3000 $. Source : Canton de Fauquier-Strickland

Une pétition circule actuellement parmi les citoyens de Fauquier-Strickland pour s’opposer à l’augmentation initialement proposée de l’impôt foncier, qui dépasserait 20 %.

Celle-ci contient une lettre qui sera envoyée à Rob Flack, ministre des Affaires municipales de l’Ontario, et dans laquelle les résidents soulignent que cette hausse représenterait un fardeau financier insoutenable pour une communauté rurale aux ressources limitées, incluant familles, aînés et propriétaires de petites entreprises.

Selon nos dernières informations, la pétition aurait été signée par 215 personnes sur un objectif fixé de 400 signatures.

Réduire les dépenses au strict minimum

Le budget 2025 limite les dépenses en immobilisations aux seuls projets jugés incontournables.

En tout, 352 000 $ sont prévus pour des travaux de voirie, l’entretien du garage municipal, l’achat d’équipements et la préparation des plans pour la réfection du pont de la rue Tremblay, dont la construction est repoussée à 2026.

Après subventions, les coûts nets en capital s’élèveront à 276 000 $. Une part importante du budget, plus de 322 000 $, sera aussi consacrée aux services d’eau et d’égout, qui dépendent en partie des revenus fonciers.

Une trajectoire serrée pour l’avenir

Au-delà de 2025, le plan budgétaire prévoit une hausse limitée à 3 % par année du prélèvement fiscal, avec l’espoir de dégager d’ici 2029 environ 5,6 millions $ pour financer les immobilisations. Or, selon le Plan de gestion des actifs adopté en 2024, les besoins réels se chiffrent à environ un million $ par année.

« Comme l’avaient souligné les délibérations du budget 2024, un déficit de cette taille compromet sérieusement la capacité du canton à fonctionner normalement », avertit le rapport, qui insiste sur l’urgence de redresser la situation.

Si approuvé, la proposition de budget sera envoyée au gouvernement de l’Ontario qui émettra, ensuite, ses recommandations à la Ville. Le conseil devra ensuite accepter et adopter officiellement le budget.

Loi 21 : l’Ontario et des conseils scolaires francophones interviendront en Cour suprême

OTTAWA — L’Ontario et cinq autres provinces canadiennes interviendront pour protéger l’utilisation de la clause dérogatoire dans le cadre du dossier de contestation de la Loi 21 du Québec devant la Cour suprême du Canada. Des conseils scolaires francophones de la province seront aussi de la partie comme intervenants.

La Cour suprême du Canada (CSC) a autorisé près de 38 intervenants ou groupes d’intervenants, un nombre record pour un seul dossier. Il faut aussi compter à cela 22 autres intervenants ou groupes qui ont le droit de participer parce qu’ils l’ont fait dans des tribunaux inférieurs.

Les provinces, par l’entremise de leur procureur général, soit l’Ontario, le Nouveau-Brunswick, l’Alberta, le Manitoba, la Colombie-Britannique et la Saskatchewan, font partie de la liste. Le gouvernement fédéral, qui avait depuis longtemps signalé son désir d’intervenir devant la plus haute juridiction au pays, y est aussi.

Aucune date d’audience n’a encore été fixée pour la cause, mais la Cour suprême a approuvé à la mi-juillet cette liste d’intervenants. La presque quarantaine d’intervenants ont jusqu’au 17 septembre pour déposer un mémoire et pourront présenter des plaidoiries orales lors du procès. 

Le bureau du Procureur général de l’Ontario, Doug Downey, a refusé de répondre à nos questions lorsque nous avons demandé la raison derrière l’intervention de la province dans ce dossier. Mais dans une motion de requête visant à obtenir le statut d’intervenant qui a été déposée en juillet dernier, l’Ontario et les cinq autres provinces veulent être entendus sur la base que les pouvoirs des provinces à invoquer la clause dérogatoire « pourraient être profondément affectés ». 

Comme il s’agit d’une simple motion visant à pouvoir être entendue lors de l’audience, les avocats des provinces ne rentrent pas dans le fond de leur argumentation. Mais ces derniers soulignent que la souveraineté législative des provinces « pourrait être directement mise en cause par tout résultat ».

Le gouvernement de Doug Ford a utilisé la clause dérogatoire à deux reprises depuis son arrivée au pouvoir. Photo : Rudy Chabannes/ONFR

Les provinces signalent aussi qu’une « majorité » des intervenants qui seront entendus par le plus haut tribunal au pays sont d’avis que « de nouvelles conditions et exigences sont nécessaires » concernant l’utilisation de la clause dérogatoire.

« Des plaidoiries écrites et orales approfondies de la part des procureurs généraux des provinces sont nécessaires pour garantir que la Cour reçoive un équilibre des points de vue sur les questions importantes soulevées », écrivent-ils à l’unisson.

Depuis son arrivée au pouvoir en 2018, le premier ministre Doug Ford a utilisé la clause dérogatoire à deux reprises pour déroger de la Charte canadienne des droits et libertés.

En 2021, il avait notamment utilisé la disposition pour la première fois, afin de contrer la Loi sur la protection des élections. Puis en 2022, il avait fait adopter un projet de loi avec la clause dérogatoire pour empêcher une grève dans les écoles de la province. Dans ce dernier cas, le gouvernement avait finalement fait marche arrière en retirant cette loi.

De longues audiences en vue

Cette cause oppose le gouvernement du Québec à la Commission scolaire English-Montréal, le Conseil national des musulmans canadiens (CNMC) et l’Association canadienne des libertés civiles (ACLC). Ces derniers contestent la Loi sur la laïcité de l’État, qui interdit le port de signes religieux pour les employés de l’État comme les policiers et les professeurs. L’utilisation de la clause dérogatoire par le gouvernement du Québec dans le cadre de cette Loi est aussi contestée. 

En 2021, la Cour supérieure du Québec avait maintenu la validité de la Loi 21, mais tranché que celle-ci ne pouvait s’appliquer aux commissions scolaires anglophones dans la province. En 2024, la Cour d’appel du Québec a de nouveau maintenu sa légalité et rejeté l’argument de la Cour supérieure comme quoi les commissions scolaires anglophones pouvaient en être exemptées. 

Les contestataires de la législation du gouvernement de François Legault, adoptée en 2019, ont alors porté la décision en appel devant le plus haut tribunal au pays. La Cour suprême a accepté en janvier d’entendre la cause.

Ces nombreuses interventions pourraient forcer la tenue d’audiences sur trois jours, une situation exceptionnelle, avait souligné le juge en chef Richard Wagner en juin lors d’une conférence de presse. La CSC ne prend qu’une journée maximum pour une audience normalement.

Des écoles franco-ontariennes interviendront

L’Association des conseils scolaires des écoles publiques de l’Ontario (ACÉPO), qui représente quatre conseils scolaires et 153 écoles francophones dans la province, a aussi obtenu le statut d’intervenant dans le cadre de cette cause judiciaire. L’ACÉPO et la Commission nationale des parents francophones sont les deux seuls intervenants éducatifs francophones en milieu minoritaire qui présenteront leurs arguments.

Contacté par ONFR, l’ACÉPO a refusé de répondre à nos questions sur la raison ayant poussé l’association franco-ontarienne à se joindre à la cause juridique.

La Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick et le Commissariat aux langues officielles apparaîtront aussi devant les magistrats de la Cour suprême, selon la liste dévoilée par la CSC. Le commissaire aux langues officielles avait déjà démontré son intention à intervenir en janvier dernier, car cette « loi a indéniablement des effets sur les écoles de la minorité au Québec ».

Parmi les autres participants ontariens dans cette cause, on note la Fédération des Associations du Barreau de l’Ontario et la Commission ontarienne des droits de la personne.

Volleyball de plage : un carton plein à Montréal pour Brandie Wilkerson et Melissa Humaña-Paredes

MONTRÉAL – Les Canadiennes ont conservé leur titre de championnes à Montréal, acquis en 2023, en battant en finale les Allemandes Svenja Müller et Cinja Tillmann, actuelles numéro deux mondiales. Avant cela, elles avaient pris leur revanche sur la finale des Jeux olympiques en éliminant les Brésiliennes Ana Patrícia Ramos et Duda Lisboa, championnes olympiques en titre, plus tôt ce dimanche, sous la pluie.

En finale du Beach Pro Tour Montréal, Brandie Wilkerson et Melissa Humaña-Paredes ont magnifiquement assuré leur titre, ce dimanche en fin d’après-midi. 

Le premier set a été maîtrisé de bout en bout (21-15). Le deuxième fut âprement disputé : les Canadiennes, longtemps menées (jusqu’à 10-4), ont inversé la tendance pour mener 20-18. Les Allemandes Müller et Tillmann ont résisté en sauvant deux balles de match, mais la victoire est finalement intervenue sur le quatrième contre du match de Wilkerson, déclenchant l’euphorie à Montréal.

Brandie Wilkerson a réalisé un tournoi de très haut niveau, renforçant son statut de meilleure contreuse au monde. Photo : Volleyball World 

« C’est un grand moment pour nous, et de pouvoir le partager avec nos familles et nos amis ici au Canada, c’est formidable. La victoire dans ce tournoi, c’est vraiment quelque chose dont je vais me rappeler pour toujours », a confié Brandie Wilkerson, en français, au micro de Radio-Canada.

Melissa Humaña-Paredes a ajouté : « Gagner ce tournoi une deuxième fois, c’est même encore mieux que la première. C’est de mieux en mieux. Après les Jeux olympiques, ce tournoi était le retour à la maison dont nous avions besoin. Nous voulions retrouver nos fans canadiens et la manière dont le tournoi s’est passé est vraiment comme un rêve devenu réalité. »

Sur l’opposition allemande, Wilkerson a poursuivi : « On devait s’attendre à ça, elles sont une très forte équipe. C’est une finale, tout pouvait arriver. On est restées proches l’une de l’autre, concentrées sur notre objectif. Je crois qu’on avait besoin d’un petit plus par rapport à notre adversaire et ce petit plus, c’était cette foule qui nous a aidées. »

Revanche sous la pluie contre les championnes olympiques

Plus tôt dans la journée, sous une pluie battante, le duo canadien a pris sa revanche face aux reines du podium olympique, Ana Patrícia Ramos et Eduarda « Duda » Lisboa. Portées par la ferveur du public, elles ont écrasé le premier set (21-11), avant de s’imposer dans une deuxième manche plus serrée 22-20, dans un scénario miroir de la finale.

La joie après la revanche de Paris 2024 face à la paire brésilienne. Photo : Volleyball World 

Pour assurer la victoire, les Canadiennes ont livré une performance défensive de haut niveau, dont elles ont le secret. Leur arrière-garde a été solide, avec 13 réceptions défensives spectaculaires (digs) signées Melissa Humaña-Paredes, meilleure joueuse du tournoi dans cet exercice.

Brandie Wilkerson, la meilleur contreuse au monde, a de son côté ajouté cet atout défensif supplémentaire en réalisant 3 contres, en plus de la dissuasion qu’elle apporte sur chaque action adverse. Mais c’est surtout en attaque que Wilkerson s’est surpassée. Avec sa main gauche, elle a été chirurgicale, alternant frappes puissantes et placements précis pour totaliser 21 points marqués et seulement une erreur.

Parcours sans faille jusqu’à la victoire

Avant cela, Wilkerson et Humaña-Paredes avaient dominé la phase de groupe (groupe D), remportant tous leurs matchs. Le jeudi, les Ontariennes avaient parfaitement lancé leur tournoi en s’imposant face à la paire néerlandaise Mila Konink et Raïsa Schoon en deux sets, avec un premier parfaitement maîtrisé : 21‑12, 23‑21.

Le vendredi après-midi, elles avaient enchaîné avec un match tendu contre les Allemandes Svenja Müller et Cinja Tillmann, qu’elles ont finalement emporté en trois sets : 21‑19, 18‑21, 15‑13. Ce duel serré avait mis en lumière leur résilience et leur capacité à renverser la situation.

Le soir même, elles avaient dû réutiliser les mêmes ingrédients pour décrocher la première place du groupe D et une qualification directe pour les quarts de finale, ce qui leur avait permis de n’avoir qu’un match à disputer le samedi. Brandie et Mélissa ont triomphé à nouveau 2‑1, cette fois face aux Brésiliennes Carole Soldberg Salgado et Rebecca Silva (21-17, 13-21,15-13) dans ce qui, au final, a constitué leur rencontre la plus difficile de tout le tournoi. 

Brandie Wilkerson en réception dans la rencontre de quart de finale. Photo : Volleyball World 

Les Canadiennes n’ont ensuite plus perdu une seule manche en phase finale. En quart, elles ont battu les Brésiliennes Thamela Coradello et Victoria Lopes, numéros un mondiales, en deux sets (21-10, 21-19), consolidant leur montée vers l’or et envoyant un signal fort au reste du plateau.

« On avait entouré cette date. On a utilisé le début de saison pour faire des réglages, pour progressivement polir notre jeu. On voulait vraiment arriver à notre meilleur niveau pour gagner ce tournoi à la maison, pour ce public. Nous sommes vraiment très fières de ce que nous avons accompli et nous repartons confiantes pour la suite de la saison », a expliqué Humaña-Paredes.

Un avenir assuré pour le tournoi à Montréal

Cette victoire résonne encore plus fort dans un contexte inédit : le tournoi de Beach Pro Tour Montréal a été renouvelé pour quatre années supplémentaires, garantissant à la métropole québécoise de rester une étape incontournable du circuit mondial jusqu’en 2029. 

La foule a de nouveau répondu présente pour l’événement à Montréal avec une finale à guichets fermés. Photo :  Volleyball World 

Montréal s’affirme ainsi comme un haut lieu du volleyball de plage international et du sport canadien en général, dix jours après la victoire de Vicky Mboko au tennis, lors de l’Omnium Banque Nationale.

Fierté dans la capitale : tenter d’unir le village

OTTAWA – La semaine de la Fierté dans la capitale a débuté le 16 août sous le thème Un village à nous. Les événements communautaires, spectacles et panels de discussion s’enchaîneront jusqu’au 24 août, jour de défilé. Cette année, tout le monde semble vouloir y marcher, mais des divisions subsistent.

Le drapeau de la fierté sera hissé à l’hôtel de ville d’Ottawa lundi en matinée, marquant le début plus officiel de la semaine de la Fierté. Mais la première fin de semaine était déjà bien remplie, avec entre autres le traditionnel pique-nique familial, dimanche, dans le parc Hintonburg.

Samedi soir, c’était Le retour en fierté de Fringe, qui offrait gratuitement une nouvelle représentation de trois spectacles s’étant démarqués au festival Fringe d’Ottawa, en juin. Parmi eux, la Franco-Ontarienne Sophie Twardus a pu remonter sur scène au Théâtre de la Cour des arts, avec ∉ {0,1} Trop paresseuse pour faire un coming out donc j’ai créé une pièce de théâtre, dans laquelle elle explique sa non-binarité par le biais d’exemples comiques, comme le manque de définition claire de ce qu’est un sandwich.

Sophie Twardus dans ∉ {0,1} Trop paresseuse pour faire un coming out donc j’ai créé une pièce de théâtre, lors de la soirée Le retour en fierté de Fringe. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Outre le défilé du 24 août, le plus gros événement aura lieu jeudi soir, selon le porte-parole francophone de Fierté dans la capitale, David Breault. En entrevue avec ONFR, il explique que le gala de la Fierté se tiendra au Centre national des arts, avec le concours de drag qui couronnera M. , Mme et Mx Fierté dans la capitale (drag king, drag queen et drag non-binaire) 2025.

Puis, de vendredi à dimanche, le Festival de la Fierté se déroulera sur la rue Bank, fermée à la circulation automobile entre les rues Slater et Gladstone. « Il va y avoir des artisans, des vendeurs, différents groupes communautaires et notre estrade habituelle à Slater. Il va y avoir une tonne de programmation avec différents artistes locaux », anticipe David Breault.

La scène principale accueillera différents artistes à l’angle des rues Bank et Slater, de vendredi à dimanche. Photo (2024) : Rachel Crustin/ONFR

Le porte-parole conseille de consulter le Guide de la fierté ainsi que le site web Fierté dans la capitale pour se retrouver parmi les activités proposées. En plus des événements principaux, de nombreuses activités communautaires sont répertoriées.

Les célébrations se dérouleront dans un contexte de situation économique précaire pour Fierté dans la capitale, qui a perdu « facilement 30 % de ses commanditaires ». David Breault nomme différentes raisons, comme le climat actuel envers les personnes LGBTQ+ en Amérique du Nord ou une situation économique plus difficile. Il ne s’en cache pas non plus : « on a perdu des commanditaires à cause de la déclaration que l’on a faite l’an passé. »

Relents de controverse

L’an dernier, Fierté dans la capitale avait émis un énoncé en appui au peuple palestinien. Le communiqué dénonçait la montée de la haine antisémite et islamophobe, et annonçait que l’organisme allait prendre certaines mesures, comme « reconnaître le génocide » ou aligner ses partenariats sur des listes du mouvement BDS, pour boycott, divestment, sanctions, qui proposent de boycotter les entreprises entretenant des liens avec Israël.

Plusieurs organisations avaient alors retiré leur participation au défilé, comme l’administration de la Ville d’Ottawa et son maire Mark Sutcliffe, la Fédération juive d’Ottawa (FJO), le Centre hospitalier pour enfants de l’Est de l’Ontario (CHEO) et l’hôpital d’Ottawa.

En réponse au boycott, de nombreux participants de 2024 avaient défilé avec des symboles palestiniens et des slogans comme « No pride in genocide« . Photo : Rachel Crustin/ONFR

Cette année, l’organisation s’est faite discrète sur ce sujet. « On n’a pas réitéré, parce que notre position n’a pas changé. On continue de faire du travail à l’interne, justifie David Breault. Une déclaration sans actions est symbolique. »

De son côté, la FJO s’est réjouie que la déclaration ne soit plus en ligne. « Nous reconnaissons que l’organisation a eu plusieurs rencontres avec des personnes queers et alliées, leaders de notre communauté juive, et a fait plusieurs pas pour rebâtir la confiance » (traduction libre), a indiqué l’organisme en réponse à un internaute sur sa page Facebook, confirmant que la FJO serait de retour au défilé cette année.

Le 29 juillet, Mark Sutcliffe a également annoncé sur ses réseaux sociaux qu’il allait participer aux célébrations. « J’apprécie le travail précieux accompli par Fierté dans la capitale pour remettre l’accent sur la célébration de la communauté 2SLGBTQQIA+ d’Ottawa et l’esprit dynamique et inclusif du Village », a-t-il écrit en référence au thème de 2025.

Le regroupement Queers for Palestine (QFP), section Ottawa, a aussi annoncé avoir eu des discussions avec Fierté dans la capitale. Sur Instagram, QFP invite ses partisans à participer en grand nombre au défilé pour se faire entendre, et affirme que « Fierté dans la capitale s’est engagée verbalement à faire de réels pas vers des mesures BDS à l’automne. Ils devront être tenus responsables tout au long du processus – et ils refusent toujours de réaffirmer leur déclaration de solidarité. » (traduction libre)

QFP note que Fierté dans la capitale s’est notamment engagé à tenir une séance de consultation publique sur le thème du mouvement BDS, ce que David Breault a confirmé à ONFR.

Fierté dans la capitale encourage les différents groupes à s’exprimer, mais souhaite pour sa part se concentrer sur le bon déroulement de son événement.

« Notre objectif principal est d’organiser un festival réussi. On veut créer un festival où tout le monde se sent inclus, se sent invité et se sent en sécurité. Il y a des choses qu’il faut faire, et des fois, ça veut dire que ça nous limite sur le côté militantisme », résume David Breault.

Il croit qu’il est également possible de « prendre position sur des enjeux qui ont un impact sur la communauté 2SLBGTQ ici au Canada et à l’étranger. Selon moi, on est capables de faire les deux. On n’est pas toujours capable de le faire de façon parfaite, évidemment. »

Des enjeux semblables ailleurs

Des débats semblables ont eu lieu à Toronto et à Montréal. Dans la métropole québécoise, on a vu émerger un regroupement parallèle à Fierté Montréal, la Fierté indomptable, composée de gens qui se dissociaient de l’événement principal en raison de ses « intérêts corporatifs » et de son manque d’actions face à la situation humanitaire dans la bande de Gaza.

Selon David Breault, la situation reste différente à Ottawa. « Notre ville est un peu moins grande qu’à Montréal et Toronto. En général, le festival de la Fierté ici met plus l’accent sur les activités communautaires. »

Défilé de Fierté dans la capitale, en 2024. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Environ 160 groupes se sont inscrits pour marcher au défilé de Fierté dans la capitale de dimanche prochain. Le trajet a été modifié cette année. Il débutera encore devant l’hôtel de ville d’Ottawa, à midi, mais se dirigera vers la rue Wellington, pour passer devant le Parlement du Canada.

P’tit Belliveau, représenter sans revendiquer

L’artiste néo-écossais Jonah Richard Guimond, alias P’tit Belliveau, sera de passage en Ontario en septembre, avec des arrêts à Ottawa le 25, à Kingston le 26 et à Toronto le 27. En cette Fête nationale de l’Acadie, rencontre avec un auteur-compositeur-interprète qui fait de la musique pour le plaisir, sans compromis.

« Vous êtes né en Ontario. Quel lien conservez-vous avec la province?

Je n’ai pas beaucoup de liens, autres que familiaux. Je suis né à Fort Frances. Ma famille vit sur la réserve ojibwée Couchiching, tout près. Mes parents se sont séparés avant même que j’aie formé des souvenirs. Ma mère vient de la Nouvelle-Écosse, où j’ai presque toujours vécu.

Pourquoi c’est important pour vous de chanter en acadjonne et de faire rayonner la culture de la Nouvelle-Écosse?

Je ne dirais pas que c’est important en particulier, je ne vais pas mentir. Je chante comme ça parce que c’est comme ça que je parle. C’est correct si les gens veulent changer leur accent pour chanter, mais moi je n’ai pas cette habileté-là de toute façon. Et si je pouvais, je ne pense pas que j’en aurais envie. Je conte des histoires sur la vie d’ici. Ce serait bizarre si je chantais autrement.

P’tit Belliveau sera en tournée en Ontario en septembre : le 25 au 27 Club d’Ottawa, le 26 au Broom Factory de Kingston et le 27 au Lee’s Palace de Toronto. Photo : Sacha Cohen

Une étude suggère que les jeunes de la Baie Sainte-Marie, où vous avez grandi, utilisent davantage de formes de français traditionnelles que leurs grands-parents. Qu’est-ce qui explique ce phénomène, selon vous?

Je suis sur la ligne entre les milléniaux et la génération Z. Chez les Z, je sens qu’il y a un vouloir de rattraper certaines traditions. Mais une génération, c’est vraiment juste une collection lousse d’individus. Autant il y a des gens qui vont se réapproprier de vieilles manières de parler, autant il y en a qui vont décider de vivre en anglais.

Pour ceux qui choisissent de vivre en français, c’est peut-être ce qu’ils trouvent beau, la différence dans notre français. Alors, s’ils sont capables de le rendre encore plus différent, c’est quasiment une bonne affaire.

Moi, je suis un peu neutre. Je parle comme le monde autour de moi. C’est sûr que si un vieux mot ou une vieille tournure de phrase peut remplacer un terme en anglais, je vais le privilégier. En même temps, il faut que ça soit naturel. Et des fois, la chose la plus naturelle, c’est un terme en anglais.

En coulisses aux Francos de Montréal. Photo : Gracieuseté de Maison Pingouin

Je suis beaucoup moins intéressé par le sens exact de chaque mot que par la phonétique. Les vieux mots, si on les réutilise, c’est qu’on les aime. Ce n’est pas plus compliqué que ça.

Vous avez été la tête d’affiche de la soirée d’ouverture du Congrès mondial acadien (CMA), qui se déroulait dans votre région l’an dernier. Comment avez-vous vécu ce moment?

C’était awesome. Si c’était arrivé cinq ans plus tôt, je n’aurais pas été tête d’affiche. Et cinq ans plus tard, je pourrais être mort, qui sait? Vous voyez ce que je veux dire, le fait que ça se soit passé chez nous à ce moment était vraiment de la chance. C’était awesome de jouer avec les différents invités, comme Johnny Comeau ou Waylon Thibodeaux.

Waylon Thibodeaux, surnommé le Rockin Fiddler de Louisiane, faisait partie des invités de P’tit Belliveau au Congrès mondial acadien 2024. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Quand on fait de grands spectacles, 99 % du temps, c’est pour le Québec. En tournée, on gagne des données sur qui sont les Québécois et on essaie de leur livrer des produits qu’ils vont aimer. Mais en Acadie, on a déjà toutes les données.

Alors, c’était le fun de produire quelque chose pour les gens de chez nous et pour les touristes acadiens de partout.

Lors du CMA, le ministre québécois de la Langue française, Jean-François Roberge, vous a remis le prix Acadie-Québec, pour souligner les liens que vous bâtissez entre les communautés. Qu’est-ce que ça signifiait pour vous?

Pour être 100 % honnête, c’était bizarre. Son bureau produit des publicités pour dire qu’on ne devrait pas mélanger le français et l’anglais, so

Les liens que je fais avec le Québec sont dans la vraie vie, avec du vrai monde. Je ne veux pas être méchant, mais ça m’a fait sentir comme s’ils (les gens qui attribuent le prix) ne savaient pas qui j’étais. Sur papier, tout de mon projet est contre leur mission.

Dans les prix et nominations que vous avez reçus dans votre carrière, lequel est le plus significatif?

Je ne veux pas sonner ingrat, mais en général, je pense zéro aux prix. Il y a toujours un moment de reconnaissance, mais le lendemain, j’ai oublié. Ce n’est pas comme ça qu’on détermine qui est le meilleur.

Ça me touche beaucoup plus quand des gens me disent que ma musique les a aidés à traverser un deuil, ou quand quelqu’un dit qu’on a l’air d’avoir du fun, ou fait un commentaire précis sur quelque chose qui est important pour moi.

Qui sont vos influences musicales?

Ça va dans tous les sens. J’aime beaucoup Johnny Cash, T-Pain, beaucoup de musique japonaise des années 80 comme Hiroshi Satoh, une tonne de rap comme MF DOOM, Gwen Stefani… au final, toute la musique populaire, de tous les styles. Il y a beaucoup de stuff weird, aussi. J’aime la musique en général.

Le succès de Radio Radio, avec des membres néo-écossais comme Jacobus, a aussi influencé P’tit Belliveau à croire qu’une carrière en musique était possible. Photo au Congrès mondial acadien : Rachel Crustin/ONFR

Vous avez été révélé au Québec comme finaliste aux Francouvertes 2019. Comment allait votre carrière en Acadie à ce moment?

Les Francouvertes, c’était le deuxième spectacle qu’on a joué en tant que band, ever. Je n’avais vraiment pas de carrière nulle part. Je travaillais dans la construction et je sortais des mini albums en ligne, j’essayais tranquillement de créer un buzz avec l’idée d’un jour former un groupe.

Ça a été une extrêmement belle vitrine pour nous. Ça reste un projet solo au niveau des albums, mais depuis ce temps-là, j’ai le band live pour les spectacles.

On n’avait aucune idée d’à quoi nous attendre. On était moins surpris de la réponse de la foule, mais on a été surpris de se retrouver dans le top du palmarès.

En fait, il n’y a rien qu’on a fait jusqu’à maintenant qui est normal, mais pour nous, c’est normal.

Vous ennuyez-vous de la vie plus anonyme?

Non. Je ne suis pas si connu que ça. Il faudrait que ma carrière monte pas mal plus pour que ce soit un problème. Ma job est awesome. Si le coût à payer, c’est d’être parfois reconnu à Montréal, je le prends facilement.

Il y a des aspects de la construction que j’aime, mais c’est un travail difficile sur le corps et peu payant. Il n’y a pas beaucoup d’aspects qui me manquent.

Qu’est-ce qui est important quand vous préparez un spectacle?

Plus que tout, c’est de s’assurer que ce soit au maximum divertissant pour le public. Peu importe ce qui arrive dans notre vie cette journée-là, il faut tout donner. On respecte beaucoup le fait que les gens paient pour être là et on veut s’assurer que ça vaut la peine. On essaie de réfléchir à tous les détails, tout en restant authentiques.

L’ambiance est électrisante dans les spectacles de P’tit Belliveau. Photo : gracieuseté de Maison Pingouin

En 2020, vous avez sorti votre premier album au moment où tout s’est arrêté pour la pandémie. Comment avez-vous vécu cette période?

Au début, c’était brutal. J’étais à Montréal, en train de faire ma tournée promo. À mi-chemin, tout a été annulé et je suis retourné chez moi. C’était censé être notre première vraie année à commencer notre carrière.

On a vécu une déception, mais avec du recul, ça nous a aidés. J’ai souvent reçu le commentaire que les gens ont beaucoup aimé l’album justement parce que c’était une période glauque et qu’ils voulaient de la musique qui les emmenait ailleurs.

Quand on a eu le droit de jouer à nouveau, on jouait sur des scènes beaucoup plus grandes que ce à quoi on aurait eu accès autrement. On ne saura jamais ce qui serait arrivé dans une autre réalité.

Pourquoi avoir quitté votre maison de disques?

Je ne peux pas répondre en détail, mais je voulais quitter. Ce que j’aime d’être indépendant, c’est d’avoir le contrôle sur la manière dont on échange avec les diffuseurs, avec le public… ça fait en sorte que l’échelle de nos plans doit être réduite, mais c’est beaucoup plus rapide entre le moment où on a une idée et le moment où on la met en place.

P’tit Belliveau en spectacle au Festival du voyageur de Winnipeg, au Manitoba, en février 2025. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Mon projet est ‘bizarre’ dans plein de sens. Les enjeux sont uniques par rapport aux projets québécois. Je crois que ça nécessite de nouvelles stratégies qui sortent de la recette habituelle.

Quelles sont les qualités qui vous permettent de réussir comme artiste indépendant?

C’est beaucoup moins compliqué aujourd’hui, alors que n’importe qui peut mettre de la musique en ligne.  Quand on parle d’indépendance, ça veut juste dire que je n’ai pas de maison de disques. J’ai aussi choisi d’être mon propre booker, mais ce n’est pas forcément dans la définition.

Une maison de disques va te prêter de l’argent pour que tu produises ton album, et que tu les rembourses avec les redevances. Ils vont aussi aider avec la mise en marché. C’est dans leur intérêt, car si ça fonctionne, ils feront aussi plus d’argent.

Dans mon cas, mes albums ne coûtent pas cher à produire, car j’en fais beaucoup moi-même. J’ai enregistré tout mon dernier disque chez moi. J’ai juste payé pour le mixage et le mastering et pour quelques musiciens ici et là.

Pour les gens qui n’aiment pas le marketing, c’est probablement mieux de juste rester avec une maison de disques. Mais si tu es intéressé, probablement que tu vas faire une meilleure job toi-même, car tu vas être passionné.

On retrouve le symbole de la grenouille sur votre album et dans vos costumes. Qu’est-ce que ça représente?

Ça ne représente rien du tout. J’aime juste les grenouilles (rires). C’est zéro à propos des French frogs ou whatever. C’est une insulte d’une autre génération. Si un Anglais m’avait appelé comme ça, ça m’aurait juste fait rire. It doesn’t even feel like an insult.

Souvent, les gens vont chercher des messages dans ce que je fais. Ils vont aussi penser que je fais des choses de façon ironique. Mais la grande majorité de ce que je fais est vraiment premier degré. Ça me fait rire de voir à quel point les gens souhaiteraient qu’il y ait quelque chose de plus.

Même les fans ont adopté le symbole de la grenouille. Photo de gauche : aux Francos de Montréal, gracieuseté de Maison Pingouin. Photo de droite : au Congrès mondial acadien, Rachel Crustin/ONFR

Ça ne veut pas dire que je ne fais rien de profond, mais quand c’est profond, c’est évident. Quand ça a l’air d’être n’importe quoi, c’est parce que c’est n’importe quoi.

Votre plus récente pièce, Simulation Freestyle, s’inspire du jeu Les Sims. Parlez-nous de cette collaboration avec Hubert Lenoir?

Hubert est extrêmement détaillé. Il considère toutes les options, il regarde dans tous les sens. Je suis l’inverse. Je vais avec mon premier réflexe. Beaucoup de cette chanson, c’était surtout : Hubert a des idées, on s’en parle, on peaufine. Mais mes parties se sont finies super vite.

En travaillant avec Hubert, j’ai vraiment compris pourquoi ses albums sont si bons. Il investit un nombre incroyable d’heures dans son art. Il est très soucieux des détails. C’était le fun de travailler avec quelqu’un qui travaille différemment.

À l’opposé, Fouki est un exemple d’artiste qui a une approche très semblable à la mienne.

Vous aviez déjà collaboré avec Fouki par le passé, mais la chanson Comfy a connu un immense succès. Qu’est-ce que ça a changé?

Je ne suis pas certain. Les gens qui viennent voir nos spectacles ne sont pas nécessairement ceux qui écoutent la radio commerciale. Ce qui paye aujourd’hui dans l’industrie de la musique, ce sont les ventes de billets.

P’tit Belliveau (à gauche) et Fouki (à droite) dans le vidéoclip de la chanson Comfy. Photo : gracieuseté de Maison Pingouin

Je ne crois pas qu’une grande rotation comme ça a eu un effet direct sur nos ventes. Ça ne veut pas dire que ce n’est pas la première étape d’une séquence d’événements qui va me mener vers quelque chose d’autre. C’est impossible de quantifier ces choses-là. C’est comme essayer de calculer exactement pourquoi une plante survit ou meurt. On peut dire que c’est trop ou pas assez de soleil, mais il y a un milliard d’autres variables.

Quel est votre spectacle le plus marquant jusqu’à présent?

Ce qui me vient à l’esprit de façon évidente, c’est le MTelus, à Montréal. C’est une grosse étape d’être capable de remplir cette salle. En plus, c’est moi qui ai booké ça, c’est nous qui produisions le spectacle de façon indépendante. C’était une preuve qu’on n’avait pas besoin du système.

Être tête d’affiche aux Francos (festival aussi connu sous l’ancienne appellation Francofolies) de Montréal était aussi très marquant. Je ne peux pas encore croire qu’ils nous aient donné cet espace. J’ai beaucoup tanné les programmateurs!

Il y avait même de la pyrotechnie au spectacle des Francos, en juin 2025. Photo : Gracieuseté de Maison Pingouin

Mais c’est aussi marquant quand on joue devant 150 personnes dans une petite ville. Un spectacle qui se passe bien, c’est le strict minimum. Sinon, c’est qu’il y a un problème et que c’est de notre faute. Je suis vraiment dur sur moi-même si le spectacle n’est pas à la hauteur de mes attentes.

Sur quoi travaillez-vous présentement?

J’écris et je produis mon prochain album. J’espère qu’il sera prêt pour 2026. J’ai encore du temps, mais j’ai aussi encore beaucoup de travail à faire. C’est impossible de dire à quel point je vais être productif. L’inspiration, ce n’est pas fiable.

Que signifie le 15 août pour vous?

On ne fête pas la Saint-Jean-Baptiste, ici, et la fête du Canada ne m’intéresse pas. Ma journée nationale, c’est le 15 août. C’est notre journée pour qu’ils n’oublient pas qu’on est toujours là. On fait du tronne, ça veut dire faire beaucoup de bruit. C’est notre journée pour faire du tronne. »

Même s’il fait de la musique sans militantisme, P’tit Belliveau représente une nouvelle génération d’artistes acadiens qui rayonnent dans toute la francophonie canadienne. Photo : Gracieuseté de Maison Pingouin

1995 : Naissance à Fort Frances, en Ontario. Il grandira plutôt à la Baie-Sainte-Marie, en Nouvelle-Écosse.

2019 : Finaliste aux Francouvertes, sa carrière est officiellement lancée.

2020 : Sortie de son premier album, intitulé Greatest Hits Vol.1. Il se retrouvera sur la longue liste du Prix de Musique Polaris, tout comme Un homme et son piano, en 2022.

2024 : Il est l’une des têtes d’affiche du Congrès mondial acadien, dans le Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse, et reçoit le prix Acadie-Québec du gouvernement du Québec.

2025 : Il est l’une des têtes d’affiche des Francos de Montréal

Up Here : quand des artistes franco‑canadiens métamorphosent Sudbury

SUDBURY – La 11ᵉ édition du festival Up Here est de retour jusqu’à dimanche avec une vitrine pour les arts visuels et la musique, mettant en lumière autant la création locale que les artistes de la francophonie canadienne. Pour certains de ces artistes venus de loin, ce rendez-vous annuel est une occasion de créer des liens avec la ville du nickel.

Depuis sa création en 2015, Up Here transforme Sudbury avec ses centaines de murales tout en proposant une programmation combinant concerts intérieurs et spectacles en plein air.

Cette année, une murale du festival Up Here est réalisée par une artiste francophone, ajoutant une dimension supplémentaire à l’événement. Pour Kezna Dalz, artiste montréalaise d’origine haïtienne, il s’agit de sa première participation au festival.

Élevée en parlant trois langues, elle découvre la ville avec curiosité : « Je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre avant d’arriver. Il n’y a pas beaucoup de personnes qui parlent français ici, mais c’est intéressant de voir comment la francophonie existe dans cette région. »

Kezna Dalz dit ne pas avoir trop souffert de la chaleur depuis qu’elle a commencé sa fresque. Photo : Inès Rebei/ONFR

Son projet artistique s’inspire de l’adaptation et de la résilience. Elle décrit sa création : « Je voulais faire un peu comme un charmeur de serpent, mais avec des flammes pour montrer comment accepter le chaos et s’acclimater. C’est une œuvre qui reflète un peu ce qu’on vit dans le monde, mais aussi de façon introspective. »

Travaillant avec deux assistants, elle prévoit de finaliser son installation au cours du week-end, tout en découvrant les autres œuvres du festival et en échangeant avec d’autres artistes présents.

« Le but c’est de faire redécouvrir les murales sous un nouveau jour »
— Alex Pham

Celle-ci apprécie déjà sa première expérience en terre sudburoise : « C’est agréable de se retrouver ici et de rencontrer des artistes avec qui j’avais déjà collaboré. »

En complément des peintures murales, le festival propose un projet appelé « Power-Up », en partenariat avec Greater Sudbury Utilities (GSU), qui consiste à faire peindre des boîtes électriques par des artistes dans différents quartiers de la ville.

Sur les six boîtes que compte le projet, deux artistes francophones vont en peindre dans le sud de la ville : Sam Barry et Emily Audette.

Le projet « Power Up » existe depuis 2016 à Up Here. Gracieuseté de Up Here

Donner un second souffle aux murales

Cette année marque le retour de MAPPLIGHTS, un collectif montréalais spécialisé en mapping vidéo et médias immersifs.

Leur intervention consistera à illuminer et animer la murale Heart of Gold de Ben Johnston, offrant aux spectateurs une projection vidéo sur les façades des bâtiments. « Le but c’est de faire redécouvrir les murales sous un nouveau jour », lance Alex Pham, responsable du projet.

Alors que leurs interventions étaient plutôt contemplatives et décoratives l’an dernier, le collectif prévoit cette fois de collaborer avec des musiciens. « Il va y avoir des duos d’artistes entre nous, le mapping et un artiste ou un musicien », précise-t-elle soulignant que le thème 2025, « Réfraction », inspire à la fois les visuels et la sélection musicale.

La murale animée lors de la 10e édition. Gracieuseté d’Alex Pham

L’objectif est de proposer une expérience audio et visuelle immersive, où les projections et la bande sonore interagissent pour donner un nouvel angle sur l’œuvre originale.

L’année dernière, le collectif a été surpris par la réaction des spectateurs face à leur projection sur la murale « You Are Beautiful », qui rend hommage à la ville et à son histoire : « On a eu des personnes émues aux larmes qui nous ont dit : ‘ Oui, Sudbury, is beautiful’ »

Alex Pham, à gauche, et Cedy ont créé leur entreprise il y a quatre ans. Gracieuseté d’Alex Pham

La Française d’origine estime que certaines parties de la ville, parfois perçues comme industrielles ou désertiques, prennent une dimension nouvelle lorsqu’elles sont intégrées à ces installations visuelles.

« Cela montre que le projet dépasse le simple aspect visuel et touche les habitants. Sudbury a beaucoup de défis, mais aussi une richesse culturelle que le festival met en valeur. »

La francophonie musicale en vitrine

Cette année, Up Here propose une programmation musicale francophone étoffée, avec plus d’une douzaine d’artistes sur une cinquantaine à l’affiche.

Le point d’orgue francophone est la prestation de Elisapie, auteure-compositrice-interprète et activiste inuk, le dimanche 17 août à 19 h au Knox Hall.

Sa musique, inspirée de son village natal de Salluit, au Nunavik, conjugue influences traditionnelles et sonorités indie folk contemporaines montréalaises, tout en faisant résonner la culture inuit de manière moderne et accessible.

Elisapie était au festival international de jazz de Montréal en juillet dernier. Source : Elisapie/Facebook

Marie Davidson se produira dans la même salle, mais samedi à minuit, où elle présente son nouvel album City of Clowns, mêlant techno, pop expérimentale et spoken word.

L’artiste arrive dans le cadre de sa tournée après avoir collaboré avec le groupe de musique électronique français, Justice.

Connor Lafortune, artiste anichinabé queer de la scène locale de Sudbury, se produira le samedi 16 août à 13 h à la scène Radio-Canada, Refettorio, et le dimanche 17 août à 17 h à la Townehouse Tavern.

Son travail combine poésie, musique et perlage pour transformer la douleur en beauté et célébrer la résistance, rendant hommage à la culture anichinabé.

Parmi les autres artistes francophones :

  • Allô Fantôme (vendredi 15 août, 22 h 30, Knox Hall, Lower Hall), avec un style piano rock et pop introspectif.
  • Akeem Oh (vendredi 15 août, 21 h 15, Knox Hall et samedi 16 août, 17 h, Townehouse Tavern), offrant une indie-pop douce et cinématographique.
  • N NAO (samedi 16 août, 15 h, scène Radio-Canada, Refettorio), avec une approche écoféministe et romantique.
  • Octopoulpe (dimanche 17 août, 22 h 30, Townehouse Tavern), explorant punk, math-rock et expérimentation sonore.
  • Aubes (Alexis Langevin-Tétrault et Guillaume Côté, samedi 16 août, 20 h, Place des Arts, La Grande Salle), performance audiovisuelle immersive.
  • Sarah Pagé, harpiste expérimentale, transforme son instrument en écosystème sonore et présente son premier album Dose Curves, mêlant technologies sur mesure et inspirations historiques.
  • Fauxcils (samedi 16 août, 22 h 45, Knox Hall, Lower Hall), duo synth-pop de Jenn Herd et Dunstan Topp, mêlant synthés, paillettes et céramique dans un style alliant surréalisme et énergie dansante.
  • Emilio Portal (samedi 16 août, 13 h, scène Radio-Canada, Refettorio et dimanche 17 août, 17 h, Townehouse Tavern), artiste multidisciplinaire explorant le son et la lumière pour déconstruire les perspectives coloniales.
  • Mèr (vendredi 15 août, 17 h, Townehouse Tavern et samedi 16 août, 14 h, scène Radio-Canada, Refettorio), duo alt-pop bilingue mêlant harmonies cinématiques et poésie.

Franco-Ontarien en Acadie : un parcours d’adoption identitaire

La migration francophone des Ontariens attirés vers le Canada atlantique joue un rôle clé pour la survie du français dans ce coin de pays, comme à l’Île-du-Prince-Édouard où la langue ne cesse de plonger depuis 50 ans. Pour cette journée de la Fête nationale de l’Acadie, ONFR est allé à la rencontre de trois d’entre eux, installés en pays acadien. Un beau moment pour déceler l’identité acadienne sous toutes ses coutures et son dialogue fraternel avec l’Ontario.

« Vous savez, on est des gens qui n’ont pas de pays ni frontières, mais on a une langue qui nous rassemble, et pourquoi pas avec les francophones d’ailleurs », déclare amicalement Yvon Godin, président de l’Association francophone des municipalités du Nouveau‑Brunswick (AFMNB).

Ce mois-ci marque trois ans que Véronique Prud’homme a fait le grand saut en déménageant à Moncton. « J’avais toujours l’intention de retourner à Ottawa, mais mes études de droit se sont passées tellement vite et je n’étais pas prête à partir », explique la jeune diplômée née à Timmins.

Depuis son arrivée à Moncton il y a 3 ans, Véronique Prud’homme se sent comme une Acadienne adoptée. Photo : Gracieuseté de Véronique Prud’homme

Cette stagiaire en droit se sentait aventureuse de découvrir les provinces maritimes, dit-elle. Aujourd’hui, elle s’y engage à intervenir concrètement face au manque d’avocats francophones dans le coin. « Le droit d’être servi en français ou en anglais c’est l’une de mes valeurs les plus importantes dans mon domaine du droit criminel », exprime la future juriste.

Étant donné que la défense fervente des droits linguistiques continue d’être une voie médiane entre citoyens parlant le français, d’autres empruntent la même route. « J’ai toujours senti une affinité avec les Acadiens parce que je sais qu’on est tout d’abord des francophones minoritaires », aborde l’auteur-compositeur Michel Lalonde.

Cet adepte de la musique folklorique canadienne doit beaucoup à la région, car c’est là qu’il a formé son groupe de rock, Garolou, il y a 50 ans. C’est avec les nombreux allers-retours entre la Saskatchewan et l’Île-du-Prince-Édouard que le chanteur a pris la décision il y a cinq ans de faire de Charlottetown sa résidence permanente.

Originaire d’un petit village sur la frontière Ontario-Québec, Michel Lalonde a vécu en Acadie dans les années 70 avant et s’y installer définitivement en 2019. Photo : Gracieuseté de Michel Lalonde

Mais dans un contexte acadien, ce sentiment d’être une minorité soulève des points de vue mitigés. « C’est sûr que le français va toujours être une minorité au Canada, mais ici, en Acadie, je dirais que non », nuance Véronique Prud’homme. « Ici, c’est presque garanti que tout monde va parler en français. Je sais que si je parle français dans un magasin ou un restaurant, ils vont me comprendre », compare-t-elle.

Il n’empêche pas que ce sentiment d’adoption est largement partagé entre ces immigrés interprovinciaux. « Je commence à apprendre le chiac et j’ai aussi goûté récemment à une poutine râpée – un mets exclusivement acadien – donc à force de faire ces choses-là, je me sens un peu une Acadienne adoptée », réaffirme-t-elle.

L’identité acadienne en marche

Lorsque Martin Théberge, président Société Nationale de l’Acadie (SNA), tente de définir l’identité acadienne, il explique que « c’est très compliqué. »

Lui-même fier de pouvoir allier ses racines québécoises à sa posture de président de la SNA, il souligne que l’appartenance à cette nation peut devenir une « identité de destin choisi ».

« L’artiste franco-ontarien et l’artiste néo-brunswickois acadien ont beaucoup à jouer en commun parce qu’il a une compréhension beaucoup plus profonde que ce qu’on peut comprendre en regardant la télé, par exemple », précise-t-il.

« L’identité acadienne est très émotive et individuelle. »
— Martin Théberge

Ayant passé la majorité de sa vie à Ottawa et maintenant résidant à Terre-Neuve, Jean-Luc Matte illustre bien la complexité de l’identité acadienne. « Ma mère est demi-Acadienne et demi-Terre-Neuvienne, puis mon père est Québécois. »

Bien que Terre-Neuve ne peut historiquement prétendre à son appartenance à cette région, les nombreux francophones qui y résident et ses petits villages Acadiens l’ont amenée au début des années 1990 à rejoindre la SNA ainsi que le territoire officiel de l’Acadie du Canada atlantique.

« Ça me donne de la fierté d’être un francophone ici à Terre-Neuve », note le jeune homme.

Même si Jean-Luc Matte a vécu plus longtemps à Ottawa qu’à Terre-Neuve, il affirme son côté acadien grâce à sa famille. Photo : Gracieuseté de Jean-Luc Matte

De plus, son métier de guide-interprète à Parcs Canada l’a rendu savant quant à l’histoire des peuples acadiens. « Je trouve que l’histoire française de la côte de Terre-Neuve où j’habite, on n’en parle pas beaucoup », s’inquiète-t-il.

C’est pourquoi il compte offrir son savoir aux touristes qui passeront à l’occasion de la Fête du 15 août. « Je suis excité de jouer des chansons acadiennes, parce que je joue aussi de la guitare. Puis moi, ça me donne beaucoup de fierté d’être capable d’offrir ça en français », avance-t-il.

Naît-on Acadien ou le devient-on?

Selon Yvon Godin, la migration interprovinciale a tout pour plaire aux Acadiens. « C’est important et plus facile pour la reconnaissance des acquis, c’est-à-dire que si on a un médecin de l’Ontario qui vient au Nouveau-Brunswick, ça ne prend pas longtemps pour obtenir son permis de pratiquer », explique l’ancien maire.

La SNA a même créé un passeport acadien pourtant dépourvu d’une valeur légale, mais qui constitue une ressource fondamentale pour les Acadiens de naissance comme pour ceux d’adoption. M. Godin raconte l’avoir offert à un ami qui peinait à retracer ses origines acadiennes. « Je pense que c’est le plus beau cadeau que j’ai pu lui faire », se rappelle-t-il.

Le passeport acadien synthétise l’Acadie d’un point de vue historique et contemporain ainsi que ses grands symboles. Photo : Gracieuseté de Martin Théberge

Il n’est pas rare que l’énergie remarquée des Acadiens lorsqu’il s’agit de faire valoir leur présence, comme lors des grands tintamarres, soit convoitée par les autres populations francophones minoritaires. Par ailleurs, la culture franco-ontarienne, émanant traditionnellement de la migration de Québécois vers l’Ontario, à la différence des Acadiens qui représentent une autre colonie française du 16e siècle, force la comparaison identitaire.

Mais Yvon Godin croit que « l’Ontario n’a rien à envier au Nouveau-Brunswick, c’est juste notre forte concentration qui fait qu’on est reconnu comme une province bilingue ».

Véronique Prud’homme s’accorde avec ce dernier en soulignant la lutte de ses confrères ontariens. « Les Acadiens sont très fiers de leur identité et ici on la reconnaît beaucoup plus. Mais dans le Sud de l’Ontario, même à Sudbury, eux aussi font des efforts pas mal importants », remarque-t-elle.

Reconnaissance rime avec financement

La fête nationale est l’un des symboles les plus importants choisis par les Acadiens. Depuis quelques années, la communauté réclame incessamment le financement permanent des festivités, mais le gouvernement fédéral ne semble pas s’engager sur la requête, déplore la SNA.

« Ce qu’on ne sait pas, c’est qu’est-ce qu’il arrivera par la suite? On n’a toujours pas de confirmation. On a fait une mission politique au printemps pour revendiquer une reconnaissance du peuple acadien au Canada, en commençant par un financement permanent », martèle Martin Théberge.

Le sentiment d’appartenance à l’Acadie demeure une variable propre à chacun, toutefois les nombreuses similitudes entre francophones tendent à créer une solidarité naturelle. « Il y en a qui se demandent : est-ce que j’ai été déporté, moi? Est-ce que j’ai vécu le Grand Dérangement et toutes ces choses-là? Mais moi je pense que c’est dans le cœur, c’est dans l’âme », rassure M. Godin.

« Si tu le veux, tu peux revendiquer une identité acadienne sans aucun problème » rejoint M. Théberge.

Retour au bureau cinq jours par semaine pour les fonctionnaires ontariens dès 2026

Le gouvernement Ford a annoncé que les travailleurs de la fonction publique ontarienne devront retourner au bureau cinq jours par semaine à compter du mois de janvier 2026.

À l’heure actuelle, les fonctionnaires du gouvernement ontarien sont obligés d’être au bureau au moins trois jours par semaine, mais cela passera à quatre jours dès le 20 octobre prochain. Ensuite, les fonctionnaires passeront à cinq jours en présentiel dès le 5 janvier 2026, a annoncé la présidente du Conseil du Trésor, Caroline Mulroney, dans un communiqué jeudi matin.

« À compter du 5 janvier 2026, la fonction publique de l’Ontario et ses organismes provinciaux, conseils et organismes publics rattachés à la commission retourneront au bureau à temps plein », a-t-elle soutenu dans un communiqué de presse.

Selon Caroline Mulroney, le retour à temps plein pour les employés du service public « reflète la situation actuelle de la main-d’œuvre dans la province et renforce notre engagement à représenter les citoyens et les entreprises que nous servons partout en Ontario ». Plus de la moitié des employés de la fonction publique de l’Ontario sont déjà tenus d’être présents au bureau à temps plein, rappelle la présidente du Conseil du Trésor.

Des employés plus productifs en personne, croit Ford

En conférence de presse jeudi, Doug Ford a soutenu que « c’est le temps » pour la fonction publique ontarienne de retourner en personne à temps plein.

« C’est aussi simple que ça, a-t-il affirmé, lorsque questionné à ce sujet lors d’une annonce à Pickering. Toutes les entreprises avec lesquelles je discute disent que tout le monde doit retourner au travail. »

Caroline Mulroney en compagnie du premier ministre ontarien, Doug Ford. Source : Compte X de Fordnation

Le premier ministre a encensé la fonction publique ontarienne comme « la meilleure au Canada » tout en ne cachant pas qu’il croit que « les employés sont plus productifs au travail ».

« Comment encadrer quelqu’un par téléphone? C’est impossible. Il faut le regarder en personne », a commenté Doug Ford.

« Nous avons hâte de retrouver tout le monde et je suis très reconnaissant du travail qu’ils (les fonctionnaires) accomplissent », a-t-il ajouté.

À Sturgeon Falls, là où Franco-Ontariens et Québécois se donnent rendez-vous au camping

STURGEON FALLS – Dans la région de Sturgeon Falls, un camping attire chaque été une clientèle majoritairement francophone, venue autant de l’Ontario que du Québec. ONFR a rencontré ceux qui privilégient le tourisme de plein air dans cette région francophone du Nord-Est ontarien.

Dès l’entrée au camping, il n’est pas rare d’entendre les accents québécois et ontariens se mêler aux sons de la nature.

Arrivée hier soir sur le site avec son compagnon, Martine Audet s’est rapidement bien installée au camping KOA de Sturgeon Falls.

« On s’est dit, ce n’est pas loin de chez nous, on va découvrir l’Ontario, ça va faire différent », confie-t-elle, confortablement assise sur une chaise pliante à l’ombre d’un pin devant sa roulotte.

Éric Labrecque et Martine Audet sont arrivés bien équipés pour leur court séjour à Sturgeon Falls. Photo : Inès Rebei/ONFR

Le couple a parcouru plusieurs centaines de kilomètres avec leur petit compagnon à quatre pattes pour venir profiter quelques jours du camping KOA, sur le bord de la rivière Sturgeon, qu’ils découvrent cette année. À peine arrivés, ils sont séduits et ont décidé de prolonger leur séjour.

« On entend parler français partout, ce qui n’est pas toujours évident ailleurs en Ontario », continue cette coiffeuse de profession qui avoue ne pas savoir parler anglais.

« Ce qui nous a charmés, c’est l’accueil chaleureux et la proximité avec des endroits qu’on voulait visiter, comme Sudbury ou Verner, mais aussi le fait que beaucoup de campeurs parlent français », ajoute à ses côtés Éric Labrecque, qui partage le séjour avec elle.

Francophones majoritaires

Stéphanie Demers, copropriétaire du camping avec son époux, raconte que la clientèle francophone est au cœur de leurs préoccupations.

« Quand un campeur arrive et qu’il entend quelqu’un parler français, ça crée une connexion instantanée. Ça facilite les échanges et ça donne un sentiment de bien-être. »

Elle précise que ce lien avec la francophonie locale et régionale à Sturgeon Falls, où 57 % de cette communauté de la municipalité de Nipissing Ouest a le français comme première langue officielle parlée, est un atout majeur pour attirer les visiteurs.

Stéphanie Demers est présente plusieurs fois par semaine. Photo : Inès Rebei/ONFR

« Plusieurs familles choisissent ce camping parce qu’elles savent qu’elles trouveront ici une communauté francophone, que ce soit dans les services offerts ou simplement dans les échanges entre campeurs. »

Mme Demers précise qu’environ 60 % des campeurs francophones qui fréquentent le site viennent du Québec et quatre des six employés du camping sont bilingues.

Le camping cherche à renforcer cet ancrage culturel, malgré le fait qu’il fait partie d’une chaîne américaine. « On travaille à rendre nos affiches bilingues, même si ce n’est pas encore officiel », souligne Mme Demers.

Privilégier le local

La fréquentation du camping a augmenté ces dernières années, surtout à cause des incertitudes liées aux frontières et à la pandémie. Le camping vient tout juste de voir quitter plusieurs groupes de la France, de la Suisse, de l’Allemagne et même de la Russie.

« Plusieurs nous ont dit qu’ils avaient prévu d’aller aux États-Unis, mais qu’ils sont finalement restés ici », explique Stéphanie Demers.

Le site dispose d’une plage pour les baigneurs du camping. Photo : Inès Rebei/ONFR

« J’avais pensé partir en Floride, comme beaucoup de gens, mais ça a changé, avance Martine Audet. Maintenant, je préfère rester près de mes partenaires de camping, dont un ami de Montréal. C’est vraiment mon style de vacances », ajoute-t-elle.

Le jour de notre visite, en milieu de semaine, le camping affichait presque complet. « Lors des gros week-ends, on accueille jusqu’à 450 personnes, parfois un peu plus avec des espaces improvisés », finit-elle.

La pêche ontarienne

À quelques mètres de la plage, d’autres visiteurs du Québec, eux aussi arrivés la veille, se détendent après avoir fait le ménage dans leur roulotte.

« On aime la paix ici, c’est parfait pour se détendre après une année de travail », lance Étienne Tanguay qui profite d’une boisson fraîche tout en écoutant de la musique.

Venu avec son frère et son épouse, celui-ci explique pourquoi il a choisi de venir en Ontario pour ses vacances : « On voyage n’importe où où il y a du poisson. Que ce soit pour le saumon dans le sud de l’Ontario ou la truite dans le Nord, on s’adapte aux saisons. On est surtout venus pour le doré. »

Le camping est une activité appréciée à Sturgeon Falls, où près de cinq sites offrent des options pour stationner des roulottes. Photo : Inès Rebei/ONFR

Pour celui qui est venu de Rouyn-Noranda, la région offre un accès facile à la nature : « Les routes sont vraiment belles comparées au Québec, et l’accueil y est plus chaleureux. »

« Ici, on n’a pas de tarifs pour mettre le bateau à l’eau, alors qu’au Québec, ça peut coûter jusqu’à 400 dollars », explique-t-il, ajoutant que les horaires pour utiliser les rampes de mise à l’eau sont aussi plus souples.

Déjà tombés sous le charme du site, les Tanguay ont donné rendez-vous à des membres de leur famille pour les rejoindre avant la fin de leur séjour au camping.

Un emploi de choix pour les jeunes

Au-delà d’un simple lieu de villégiature, le camping est aussi un espace d’emploi pour plusieurs jeunes francophones de la région.

Hayden Couroux, qui vient tout juste de fêter ses 18 ans, y travaille depuis ses 14 ans. « Ça m’a aidé beaucoup dans la vie », raconte-t-il. Son travail ne se limite pas à servir des clients, il apprend à résoudre des problèmes concrets, comme des coupures d’électricité et à développer des compétences en service à la clientèle.

Hayden Couroux aimerait que le site puisse être ouvert pour les quatre saisons. Photo : Inès Rebei/ONFR

Pour lui, ce premier travail offre une expérience précieuse dans un contexte où la pénurie d’emploi est criante pour les jeunes canadiens.

Malgré une chaleur éprouvante, le diplômé de l’École secondaire Franco-Cité s’affaire sur le site à bord de sa voiturette, un sourire constant aux lèvres, saluant chaleureusement chaque passant.

Bien qu’il ait prévu de suivre un programme en ligne du Collège Georgian en vente de commerce cet automne, son rêve ultime reste de faire carrière au sein de cette chaîne de campings présente un peu partout au Canada.

 « KOA, ce n’est pas juste un travail, c’est une école de vie. »

Plusieurs aires de jeux pour enfants sont disponibles sur l’ensemble du camp. Photo : Inès Rebei/ONFR

Esprit de communauté

Ce jour-là, on peut aussi entendre les cris joyeux des enfants revenant d’une balade en tracteur autour du camping tandis qu’une « bonne fête » est chantée avec entrain.

Une activité communautaire impliquant des jeunes de 0 à 6 ans se tient en matinée avec une vingtaine de parents francophones de la région.

Lucie Bureau, praticienne de la petite enfance et responsable de l’activité, décrit : « On y va facilite des groupes de jeu et des sorties en plein air, comme la randonnée en tracteur ou la cuisson de chiens chauds sur le feu. »

Ce programme municipal, soutenu par des services sociaux locaux, a pour but de rapprocher les familles, de renforcer le tissu social et de leur offrir des loisirs accessibles sans qu’elles aient à se déplacer loin.

Lucie Bureau souhaitait offrir aux familles francophones une expérience conviviale rappelant le camping, sans avoir à sortir de la communauté. Photo : Inès Rebei/ONFR

« C’est la première fois qu’on organise ici, mais les retours sont très positifs », souligne Mme Bureau alors que l’activité touche à sa fin.

Alors que l’heure du check-in approche, de nouvelles roulottes font lentement leur entrée sur le site, ajoutant peu à peu à l’animation déjà présente dans le camping.

Université de Hearst : Sophie Dallaire nommée rectrice

L’Université de Hearst a annoncé, ce mercredi, la nomination de Sophie Dallaire au poste de rectrice, à compter du 20 août prochain.

Cette nomination est l’aboutissement d’un processus interne de consultation mené par le conseil d’administration, à la suite de l’annonce, le 16 juillet dernier, du départ de la rectrice actuelle, Aurélie Lacassagne, pour des raisons personnelles et familiales.

Figure bien connue de l’institution, Mme Dallaire a occupé plusieurs fonctions stratégiques au fil des années, dont celles de rectrice par intérim, vice-rectrice, professeure en administration des affaires, gestionnaire du dossier Consortium national de formation en santé (CNFS), responsable de la transition vers l’indépendance de l’Université, ainsi que directrice du campus de Kapuskasing.

Son parcours témoigne, selon l’établissement, d’un engagement constant envers la mission de l’Université et d’une capacité à mobiliser les équipes autour d’une vision commune. Reconnue pour son approche « humaine, collaborative et orientée vers l’action », elle devra poursuivre l’élan amorcé ces dernières années.

« Je me réjouis de la confiance dont témoigne le Conseil d’administration de l’Université de Hearst à l’égard de mon leadership », a-t-elle indiqué.

« Le postsecondaire en Ontario, et plus particulièrement en Ontario français, est en pleine mutation. C’est avec une certaine fébrilité, mais surtout beaucoup d’humilité, que je m’engage à contribuer pleinement au projet UdeH. »

Mme Dallaire souligne qu’elle pourra « compter sur une équipe forte et engagée » pour relever les défis à venir.

De son côté, la présidente du conseil d’administration, Julie Béchard, rappelle que « Sophie Dallaire incarne les valeurs et la vision de notre université ».

« Sa bienveillance envers notre institution et son dévouement envers les communautés du Nord inspirent la confiance et l’admiration », ajoute-t-elle.

Selon Mme Béchard, le conseil d’administration est « certain qu’elle saura orienter et faire progresser notre institution avec leadership et humanité ».

À Sudbury, ces jeunes de partout au Canada viennent pour apprendre le français

SUDBURY – Depuis maintenant trois semaines, une cinquantaine d’adolescents âgés de 13 à 15 ans de partout au pays participent au programme Explore au Collège Boréal de Sudbury. ONFR est allé à la rencontre des participants de ce camp d’été unique, qui allie cours de français le matin et activités ludiques l’après-midi pour encourager la pratique orale et la motivation à parler en français.

« Le but ce n’est pas seulement de leur enseigner le français, c’est surtout de les motiver à parler français », résume Renée Hallée, gestionnaire de la formation continue au Collège Boréal.

Le programme Explore est une initiative fédérale d’immersion linguistique qui permet aux Canadiens de perfectionner leur français ou anglais tout en découvrant différentes régions du pays, notamment par le biais de camps d’immersion estivaux offerts dans différentes provinces, dont celui du Collège Boréal à Sudbury.

Celui-ci s’adresse à des jeunes de tous niveaux, du débutant à des élèves déjà avancés. « Nous avons actuellement deux groupes intermédiaires et un groupe de débutants », explique Karine, enseignante au programme et forte de vingt ans d’expérience.

Après avoir mangé, les jeunes peuvent aller déposer leurs affaires dans la résidence du campus où ils demeurent pendant leur séjour. Photo : Inès Rebei/ONFR

Après un test d’évaluation en début de session, les jeunes sont regroupés par niveau pour que les cours soient adaptés et efficaces. 

« On reforme les groupes pour qu’ils soient homogènes, sinon les élèves risquent de ne pas progresser ou de perdre leur motivation », ajoute-t-elle, précisant que cette organisation assure un enseignement personnalisé où chaque jeune peut progresser à son rythme.

Immersion active et le plaisir

Le matin, les élèves assistent à des cours intensifs de français axés sur la grammaire, la conjugaison et le vocabulaire.  L’après-midi, place aux activités qui favorisent l’usage pratique du français dans des contextes variés : ateliers, jeux, sorties et moments de détente. 

Renée Hallée insiste sur la nature flexible et conviviale du camp : « Ce n’est pas rigide. Les jeunes participent à des activités organisées, mais s’ils ne veulent pas, on respecte leur choix. Nos moniteurs sont là pour assurer la sécurité et encourager la participation, sans jamais forcer personne. »

Les moniteurs jouent un rôle central dans le succès du programme. « Ils doivent s’assurer que le groupe reste homogène, qu’il n’y ait pas d’accident, et surtout motiver les jeunes à parler français », explique Mme Hallée, ajoutant que pour certains jeunes, cela représente un défi, mais l’encadrement bienveillant les aide à persévérer.

Brayden Bertrand fera sa rentrée en septembre prochain au Collège Boréal. Photo : Inès Rebei/ONFR

Brayden Bertrand, jeune moniteur de 18 ans, est particulièrement fier de son rôle. « Je promeus le français auprès des élèves qui parlent surtout anglais. Je leur apprends des mots, je les encourage à s’exprimer en français et je surveille les activités », dit-il avec enthousiasme.

Il constate de réels progrès chez les jeunes. « Au début, plusieurs ne parlaient que très peu français. À la fin, ils s’expriment beaucoup plus. C’est encourageant de voir leur évolution. »

Brayden Bertrand souligne aussi l’importance de créer des liens personnels : « Je connais déjà presque tous leurs noms, ça m’aide à mieux les guider dans les activités et à instaurer un climat de confiance. »

Approfondir ses connaissances

Parmi les participants, plusieurs viennent de loin pour profiter de cette immersion, souvent sous l’impulsion de leurs parents.

« C’est différent de l’école, on apprend en s’amusant, et le paysage est très joli, ça change de chez moi »
— Monique

Ryhanna, 14 ans, d’Edmonton en Alberta, est en classe intermédiaire. « J’ai fait de l’immersion française depuis la maternelle. Ici, on revoit surtout des notions déjà apprises à l’école, mais c’est intéressant de les approfondir », explique-t-elle.

Celle dont le père est francophone avoue toutefois ne pas beaucoup parler français en dehors des cours, mais apprécie l’expérience, bien qu’elle souhaiterait avoir plus de temps pour visiter la ville.

Comme plusieurs jeunes à qui ONFR a parlé, la jeune adolescente confie que Sudbury n’était pas son premier choix, s’étant inscrite tard au programme et ayant été placée dans cette ville faute de disponibilités ailleurs.

Karaoké, séances de films, sport : l’emploi du temps des jeunes est optimisé au maximum durant ces trois semaines de cours intensifs en français. Photo : Inès Rebei/ONFR

Monique, une débutante de 14 ans, originaire du Sud de l’Ontario, apprécie le côté ludique du camp. « C’est différent de l’école, on apprend en s’amusant, et le paysage est très joli, ça change de chez moi, c’est agréable », confie-t-elle.

Elle voit l’apprentissage du français comme un atout : « Ça ouvre plus d’opportunités pour le futur et permet de communiquer avec différentes personnes. »

Comme à la maison

Hayden, 15 ans, vient de Burnaby en Colombie-Britannique et suit aussi le niveau intermédiaire. « La première semaine, on a revu des notions que je connaissais déjà, mais la deuxième semaine, j’ai appris des temps verbaux que je n’avais jamais vus. C’est vraiment enrichissant », raconte-t-il.

Le jeune homme explique avoir choisi de faire le programme à Sudbury en partie parce qu’il savait qu’il aurait davantage de chances d’être accepté dans une région moins densément peuplée, mais aussi pour se sentir un peu comme chez lui.

« Sudbury, c’est une petite ville, et en Colombie-Britannique, on est toujours entourés de montagnes, de lacs, de rivières, de beaucoup de nature, et il y a aussi beaucoup de nature ici, donc ça me rappelle un peu la maison. »

« L’objectif, c’est que les jeunes repartent avec une meilleure maîtrise du français, mais aussi avec des souvenirs positifs qui les encourageront à continuer à pratiquer »
— Renée Hallée

Il souligne aussi l’importance des nouvelles amitiés qu’il a faites au camp et qu’il compte entretenir plus tard via les réseaux sociaux.

De son côté, Xavier, 14 ans, du Nunavut, a une histoire particulière avec la langue de Molière. Ayant parlé français à l’âge de deux ans, il l’a perdu après un déménagement dans le Nord canadien, où l’anglais et l’inuktitut dominent.

« Quand j’étais petit, je parlais français, mais après avoir déménagé dans le Nord, j’ai perdu un peu la langue. Mes grands-parents vivent près de Sudbury, alors je suis venu ici pour les retrouver aussi. »

Une première expérience en enseignement

Ibrahima Seck, professeur de français originaire du Sénégal, partage sa première expérience au programme. « J’ai un groupe intermédiaire très enthousiaste, avec des jeunes qui ont vraiment envie d’apprendre. Je m’adapte à leurs besoins, tout en suivant le programme national. » 

Économiste de formation et aujourd’hui technicien agricole à Noëlville, il a déjà animé des activités éducatives dans son pays natal, mais c’est au Canada qu’il a commencé à enseigner à un groupe intermédiaire.

Ibrahima Seck apprécie retrouver le plaisir d’enseigner qu’il avait délaissé après son arrivée au Canada en 2022. Photo : Inès Rebei/ONFR

« Pour construire mes cours, je m’appuie sur un support fourni, mais je reste libre de l’adapter selon les besoins des élèves. Le programme n’est pas spécifiquement conçu pour Sudbury, mais s’adresse plutôt à l’ensemble du Canada. Il couvre donc plusieurs aspects, comme la conjugaison, la grammaire, l’orthographe, ainsi que des leçons portant sur les différentes provinces. »

L’homme de 37 ans souligne aussi l’importance d’avoir une bonne maîtrise du français pour enseigner dans ce contexte, et se dit très satisfait des progrès observés chez ses élèves.

Pour Renée Hallée, la réussite du programme repose aussi sur une organisation rigoureuse. « Je gère l’équipe, l’embauche des professeurs et moniteurs, et je veille à la qualité et à la sécurité du camp 24 heures sur 24. On a toujours une personne responsable disponible, même en cas d’urgence. »

« L’objectif, c’est que les jeunes repartent avec une meilleure maîtrise du français, mais aussi avec des souvenirs positifs qui les encourageront à continuer à pratiquer », conclut la Franco-Ontarienne.

Alors que la session actuelle se poursuit jusqu’à ce vendredi, les organisateurs espèrent voir ces jeunes devenir, grâce à Explore, de véritables ambassadeurs de la francophonie canadienne.

Pancarte d’Orléans sans accent : l’erreur corrigée

OTTAWA – Un panneau à l’entrée de la ville d’Orléans initialement dépourvu d’accent aigu sur le « e », a été remplacé par la bonne version après que des citoyens aient signalé l’erreur. La revendication d’un accent aigu dans le nom de cette ville en banlieue d’Ottawa a été l’objet d’une bataille pendant près d’une décennie.

Les automobilistes roulant le long de la Route 174 Est ont pu apercevoir ces derniers jours l’absence du « é » dans Orléans, nom qui a été officiellement changé ainsi en 1994. Lundi après-midi, la pancarte a été remplacée et le mot Orléans cette fois correctement écrit.

Interpellé par une citoyenne avant le changement, le conseiller à la Ville d’Ottawa pour Orléans-Est-Cumberland, Matthew Luloff, a indiqué qu’il s’agissait d’une toute nouvelle pancarte installée par l’équipe de la phase 2 de l’extension du train léger, « malheureusement sans le bon accent ».

« On m’a assuré que la pancarte sera corrigée très bientôt et que le directeur général des Transports (de la Ville d’Ottawa) en comprend toute l’importance », avait alors indiqué le conseiller dimanche dans un message sur Facebook, précisant que le directeur était un francophone, qui habitait Orléans.

« Pour moi, cet accent n’est pas seulement une question d’orthographe, c’est une marque de respect pour notre patrimoine commun, et je prends cela très au sérieux. Il y a plusieurs années, il y a eu, à juste titre, un effort pour l’ajouter », ajoutait-il dans son message dimanche soir.

Bataille dès les années 1980

En 1980, face à l’utilisation du mot Orléans par les citoyens, le débat avait fait rage dans les rangs des politiciens municipaux, poussant les municipalités de Cumberland et Gloucester a effectué le changement. Quelques années plus tard, en 1994, la Commission de toponymie de l’Ontario avait à son tour rectifié le tir, elle qui avait toutefois refusé de le faire quelques années plus tôt.

Cette bataille est d’ailleurs mentionnée par Paul Demers dans Notre Place, l’hymne officiel des Franco-Ontariens. La mention « pour mettre les accents là où il le faut » en référence à ce combat des Franco-Ontariens fait partie du refrain de l’hymne réalisé par l’auteur-compositeur, qui a notamment vécu à Orléans.

Rôles et privilèges d’un métier particulier : conservatrice au Musée des beaux-arts du Canada

OTTAWA – Sonia Del Re est conservatrice principale du service des dessins et estampes du Musée des beaux-arts du Canada (MBAC). ONFR est allé à sa rencontre pour comprendre en quoi consiste son travail, aux tâches variées, mais hyperspécialisées.

Il est difficile d’expliquer à un non-initié ce que fait concrètement un conservateur, puisque la mission varie grandement selon l’institution et la collection de laquelle on est responsable. En plus des musées, il est aussi possible de travailler pour des galeries commerciales, des maisons aux enchères, de grandes entreprises (collections corporatives) ou même des individus. D’entrée de jeu, Sonia Del Re nous explique que l’entrevue ne pourra porter que sur sa propre expérience.

Néanmoins, elle résume : « Le conservateur ou la conservatrice de musée est responsable du soin physique et intellectuel d’une collection, et de diffuser la collection, que ce soit par des expositions, des publications, etc. Il ou elle a également la tâche d’enrichir la collection, soit en faisant des achats ou en recevant des dons. »

Sonia Del Re est la conservatrice principale du service des dessins et estampes du Musée des beaux-arts du Canada (MBAC). Photo : Rachel Crustin/ONFR

Dans son cas, elle s’occupe d’œuvres sur papier, un matériau « à la fois vulnérable et très résilient » qui doit être manipulé avec le plus grand soin. Cette énorme collection nationale compte environ 30 000 œuvres, couvrant cinq siècles d’histoire et grosso modo tous les continents. La grande différence avec ses collègues en art contemporain, c’est que Sonia Del Re ne peut pas s’entretenir avec les artistes, tous décédés.

Il lui arrive tout de même d’en découvrir qu’elle ne connaissait pas encore. Le meilleur indice pour déterminer la qualité de dessins ou d’estampes est leur état de conservation. « Si une œuvre d’art a survécu jusqu’aujourd’hui, ce n’est pas un accident. »

« C’est un défi d’avoir à s’occuper d’une collection qui représente cinq siècles d’histoire et tous les continents, mais en même temps, c’est hyper stimulant. »
— Sonia Del Re

Il s’agit d’un travail souvent solitaire, de recherche dans des archives, dont la « plus grande bibliothèque d’Histoire de l’art au pays », qui se situe au MBAC et constitue son outil de recherche principal.

La conservatrice crée aussi son propre savoir en publiant les résultats de ses recherches, par exemple dans les catalogues d’exposition, « ce qui reste d’une exposition pour la postérité. » Ces derniers se retrouvent surtout dans des bibliothèques muséales ou universitaires, mais sont aussi vendus à la boutique du musée.

Des aptitudes essentielles

Pour l’institution, la stabilité d’emploi est un atout majeur. En poste depuis 2004, Sonia Del Re possède un niveau de connaissance inégalé de la collection, de la bibliothèque et de ses propres recherches.

« La mémoire institutionnelle, c’est hyper important. (…) Il faut connaître non seulement l’histoire qui nous précède, mais aussi notre propre histoire, car on s’y réfère assez souvent. »

Sonia Del Re détient une maîtrise en muséologie à l’Université de Montréal, ainsi qu’un doctorat en Histoire de l’art à l’Université McGill, également dans la métropole québécoise.

Sonia Del Re analyse des oeuvres de femmes artistes qu’elle souhaite acquérir pour le MBAC. Photo : Rachel Crustin/ONFR

La passion et la mémoire font partie des qualités essentielles. « J’ai une capacité à me remémorer des dates, des noms, des lieux, des événements, etc. »

Il faut être rat de bibliothèque, et un peu détective, pour s’occuper d’une telle collection d’art ancien. « Quand on recherche des artistes qui sont décédés il y a des centaines d’années (…) on n’a pas leurs écrits, on n’a pas leurs pensées, on ne peut pas leur parler. Il faut vraiment aimer beaucoup la recherche. »

Le français, une langue majeure

Les quatre langues principales de l’Histoire de l’art sont le français, l’anglais, l’italien et l’allemand. Née à Montréal de parents italiens, Sonia Del Re en maîtrisait déjà trois, ce qui était d’ailleurs une exigence pour compléter son doctorat.

« Ça enrichit mon travail parce que tout ce que je fais, je le fais dans les deux, même trois langues. »

Être francophone constitue donc un atout pour effectuer des recherches approfondies ou pour aller à la rencontre du public canadien. Sonia Del Re raconte que lorsque ses expositions sont montées à travers le Canada, des francophones viennent la remercier.

« Comme le français est l’une des quatre langues principales de l’Histoire de l’art, c’est naturel pour moi de travailler dans cette langue. »
— Sonia Del Re

La conservatrice donne en exemple son exposition Feuille à feuille, présentement installée au Audain Art Museum de Whistler, en Colombie-Britannique.  « C’est une institution où normalement, les textes sont uniquement en anglais. Mais comme c’est une exposition du MBAC (…) ils doivent s’adapter au modèle du MBAC. »

L’agente principale, Relations publiques et médiatiques au MBAC Josée-Britanie Mallet, qui assiste à l’entrevue, rappelle que tout est bilingue dans l’institution : accueil, catalogues d’exposition, visites guidées, etc. Elle invite le public francophone à s’approprier davantage le musée de tous les Canadiens. « Les francophones gagnent à connaître le musée. Ils ne viennent pas suffisamment en grand nombre », déplore-t-elle.

Au quotidien

En étant responsable de quelques 30 000 œuvres, Sonia Del Re peut imaginer des expositions « sur pratiquement n’importe quel sujet. »

Entre la recherche, l’écriture, la réception d’œuvres et l’élaboration d’expositions, les temps morts sont rares.

« Ce n’est pas un endroit où l’on sauve des vies, et pourtant on travaille souvent dans l’urgence. »
— Sonia Del Re

Pour enrichir la collection, la conservatrice collabore avec des collectionneurs privés. Les dons peuvent être « mutuellement bénéfiques », c’est-à-dire qu’ils offrent au collectionneur une visibilité plus importante, et qu’ils enrichissent la collection nationale. « C’est aussi le grand privilège de travailler dans un musée fédéral, c’est qu’on a une mission nationale et que le métier qu’on fait et les collections qu’on gère, c’est pour les Canadiens. »

Sonia Del Re au laboratoire du MBAC avec sa collègue Ainsley Walton, restauratrice principale, Dessins et estampes. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Il est aussi possible d’acheter des œuvres en assistant à des foires d’art, souvent à Paris, Londres ou New York. Le MBAC dispose d’un budget de huit millions de dollars par année pour l’ensemble de ses collections. Ce montant peut paraître impressionnant, mais n’a pas bougé depuis trois décennies, alors que les prix du marché ont passablement augmenté.

Néanmoins, cela signifie que « peu importe la réalité économique, le musée continue de s’enrichir et d’enrichir la collection canadienne », explique Sonia Del Re.

La place des femmes dans l’Histoire de l’art

Son projet actuel : bâtir une collection d’œuvres faites par des femmes avant 1800. « Ce sont des artistes qui sont assez difficiles à repérer, qui ont été peu collectionnées par les institutions jusqu’à maintenant. Ce qui signifie par contre qu’il y a encore des œuvres sur le marché. »

Si ces œuvres sont particulièrement prisées par les grands musées de nos jours, leur quantité est nettement moindre par rapport aux œuvres anciennes produites par des hommes. Occupées à prendre soin des enfants, les femmes ne sont pas nombreuses à avoir pu faire carrière dans les arts.

« Il n’y aura jamais de parité, énonce la conservatrice. C’est un fait historique, on ne peut pas y remédier. »

Le Musée des beaux-arts du Canada abrite plus de 87 000 oeuvres d’art, dont quelques 30 000 sont sous la responsabilité de la conservatrice Sonia Del Re. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Pour ce qui est des conservatrices de musée, Sonia Del Re est fière de diriger une collection qui a presque toujours été menée par des femmes.

« J’ai le privilège d’occuper le poste le plus important dans mon domaine au pays. »
— Sonia Del Re

La première à avoir occupé ce poste est l’Anglaise Kathleen M. Fenwick, devenue il y a une centaine d’années la première femme conservatrice de musée au Canada. Elle est restée à la tête de la collection pendant 40 ans.

À cette époque, l’emploi était encore plus prestigieux, considéré comme le deuxième poste en importance au MBAC. Le musée a grandi depuis, mais Sonia Del Re porte encore le titre de responsable du service des dessins et estampes avec fierté, et ce, depuis plus de 20 ans.

Brandie Wilkerson vise la revanche à Montréal

[PARIS 2024, UN AN APRÈS]

Un an après les Jeux olympiques de Paris, ONFR vous propose de revenir sur les souvenirs des athlètes franco-ontariens et surtout sur leur année après les Jeux. Ce samedi, c’est au tour de Brandie Wilkerson, volleyeuse de plage, seule médaillée franco-ontarienne à Paris, de revenir sur cette expérience historique et sur l’année qui a suivi, tout pile un an après la médaille d’argent remportée aux Jeux.

À Paris, Brandie Wilkerson et sa partenaire Melissa Humaña-Paredes ont écrit une page de l’histoire du sport canadien en décrochant l’argent, première médaille olympique du pays en volley de plage féminin. Leur parcours s’est achevé en finale contre les Brésiliennes Ana Patrícia et Duda, numéro un au monde, après un combat en trois manches (26-24, 12-21, 15-10).

« Je suis fière de ce qu’on a accompli, c’était notre objectif : créer un chemin pour les générations futures, pour faire grandir le volley de plage au Canada et inspirer les jeunes, surtout en Ontario, là d’où je viens. Il y a plein de petites filles qui m’ont envoyé des messages incroyablement touchants après les Jeux », confie la Torontoise. 

Brandie Wilkerson et Melissa Humana-Paredes ont atteint leur objectif de podium à Paris. Photo : Leah Hennel/COC

Si l’expérience a laissé un souvenir fort, elle a aussi apporté un nouveau regard sur son jeu. 

« J’ai appris de nouvelles choses : j’ai progressé dans mon jeu de passe et j’ai peaufiné mon service, mais surtout, j’ai gagné en confiance et en calme dans les moments intenses. J’ai toujours aimé la pression, mais maintenant je sais exactement comment l’utiliser. »

Changement d’encadrement

Dans la foulée des Jeux, le duo a changé d’entraîneur : Ricardo de Freitas, qui avait déjà travaillé avec Wilkerson par le passé, a pris la relève de Marcio Sicoli. Un départ qui n’était pas forcément prévu.

« Il avait besoin d’une pause, après avoir tout donné pendant quatre ans. Finalement, ça a été un mal pour un bien : nouvelle énergie, nouvel environnement. On s’entraîne plus souvent au Brésil, ça nous force à voir les choses différemment. »

Cette nouvelle approche s’est traduite par des ajustements tactiques : un jeu plus rapide, une utilisation accrue de l’espace au filet, et un travail intensif sur le service et l’attaque.

 « Notre priorité cette saison, c’est l’attaque. Trouver des façons de faire des points plus rapidement, d’être plus imprévisibles », confie l’une des meilleures contreuses au monde.

Le changement d’entraîneur a instauré une nouvelle philosophie d’attaque, plus rapide. Photo : Mark Blinch/COC

Dès le mois de septembre, la saison a repris sur un rythme soutenu. Le duo a enchaîné avec le circuit américain AVP Pro League, encore en pleine structuration, après sa première édition en 2024. 

« C’est une plateforme qui nous permet d’expérimenter, de travailler notre communication et notre dynamique d’équipe. Cette année, c’était beaucoup mieux organisé que l’an passé. »

En tête sur le circuit américain

Le duo canadien avait connu une première saison solide sur le tour AVP, mais la franchise Palm Beach Passion qu’elles représentent n’avait pas été performante au classement général, notamment du fait que celui-ci prend en compte les résultats des duos féminin et masculin qui composent l’équipe. 

« L’an dernier, on n’était pas vraiment une équipe compétitive, car notre duo masculin perdait tous ses matchs. Cette année, on est beaucoup plus solides collectivement. »

La saison 2025 est bien plus prolifique avec une paire Phil Dalhausser et Trevor Crabb qui occupent la première place du classement masculin (6 victoires, 2 défaites) et les Canadiennes deuxièmes du tableau féminin (6 victoires, 2 défaites). Palm Beach Passion se classe première du tour avec une fiche de 12 victoires et 4 défaites. 

« C’est motivant de faire partie d’une équipe où chacun contribue. L’an dernier, on devait porter tout le poids des points, cette année, on se tire tous vers le haut, et ça change vraiment l’énergie », se réjouit-elle.

Prochaine étape Montréal

En plus d’évoluer sur le circuit américain, Brandie Wilkerson et Melissa Humaña-Paredes participent également à une compétition mondiale, le tour Beach Pro. Si les résultats ne sont pas encore au niveau des espérances sur les premières étapes, les Canadiennes comptent bien jouer les premiers rôles lors du prochain événement, qui aura lieu du 13 au 17 août à la maison à Montréal. 

Brandie Wilkerson et sa coéquipière n’ont pas affronté les Brésiliennes depuis le 9 août 2024 à Paris. Photo : Kevin Light/ COC

Le duo canadien est le tenant du titre de l’étape canadienne du tour mondial. En 2023, elles avaient décroché la médaille d’or à l’Elite 16 de Montréal, s’imposant en finale face au duo américain Betsi Flint-Julia Scoles (21‑15, 16‑21, 15‑13). C’était à l’époque leur deuxième victoire sur le tour Beach Pro, alors que la paire s’était formée depuis moins d’un an. Une performance marquante devant le public canadien.

« La dernière fois qu’on a jouée à Montréal et qu’on a gagnée, il y avait une énergie incroyable autour du sport. Toutes les équipes étaient heureuses d’être là. Je suis tellement enthousiaste d’y retourner cette année. C’est une opportunité très spéciale. Je ressens vraiment l’amour et le soutien au Canada. »

L’occasion est belle de remporter la première étape de la saison,mais surtout de retrouver le duo brésilien Ana Patrícia et Duda pour la première fois depuis Paris 2024.

« J’ai vu qu’elles seront là et, honnêtement, je suis vraiment excitée. Je suis prête pour ce défi. »

Moonbeam dit non au glyphosate sur son territoire

MOONBEAM – Lors de sa séance ordinaire jeudi soir, le conseil municipal de Moonbeam a adopté une motion visant à demander l’arrêt de l’épandage aérien de glyphosate sur son territoire. La municipalité exprime aussi son soutien à une initiative visant à s’opposer aux pouvoirs dits « maires forts » accordés par la province.

La motion a été adoptée rapidement et sans débat, avec le soutien de trois membres du conseil sur cinq, soit le minimum requis pour son adoption, et ce malgré l’absence d’une conseillère. Avec ce vote, la petite municipalité du nord-est de l’Ontario devient l’une des premières en Ontario à s’opposer publiquement à l’épandage aérien de glyphosate sur son territoire.

À l’origine de cette initiative, le maire Luc Léonard évoque un lien personnel entre les pesticides et des problèmes de santé dans sa famille.

« Ma femme a été sévèrement intolérante au lactose, un phénomène possiblement lié aux produits chimiques comme le glyphosate qui détruisent les enzymes nécessaires à la digestion », explique-t-il.

Le glyphosate est un herbicide inventé et commercialisé à partir des années 1970. Malgré son classement comme cancérogène probable, les épandages continuent afin de favoriser la monoculture des résineux, au détriment de la végétation feuillue, selon l’élu franco-ontarien.

De manière générale, le ministère des Richesses naturelles et des Forêts octroie des permis à des entreprises privées pour que celles-ci puissent utiliser l’herbicide sur les terres provinciales, une pratique effectuée dans l’industrie forestière.

L’épandage aérien de glyphosate peut affecter des zones bien au-delà de la cible à cause de la dérive des produits chimiques transportés par le vent. Gracieuseté de Stop Spray Ontario

« En tuant toute la végétation, les abeilles n’ont plus rien à polliniser. À un moment donné, il faut arrêter de s’empoisonner », dénonce le maire de cette ville dont 71 % des quelque 1150 habitants ont le français comme première langue officielle parlée.

Le 17 juillet dernier, la Ville avait reçu une lettre officielle annonçant la reprise des épandages dans la forêt Gordon Cosson, sur les terres de la Couronne.

« Cette année, et maintenant que je suis maire, j’ai officiellement posé la question : pourquoi continue-t-on à empoisonner nos ruisseaux et nos sols? », confie celui qui a accédé à la mairie le 3 octobre 2024 après le départ surprise de l’ex-maire Éric Côté.

Un soutien nécessaires des autres municipalités

Pour qu’elle ait un impact concret, la motion doit recueillir le soutien d’au moins 223 des 444 municipalités de l’Ontario. Une telle mobilisation exercerait une pression politique significative sur le ministère des Richesses naturelles et des Forêts ainsi que sur le gouvernement provincial, selon la Ville.

Résidente de Moonbeam et membre du groupe Stop the Spray Ontario, Jennifer Lynn Cutting alerte aussi sur les effets néfastes du glyphosate.

Jennifer Lynn Cutting et son époux vivent sur une ferme biologique de 140 acres à Moonbeam. Gracieuseté de Jennifer Lynn Cutting

« C’est un possible cancérogène qui tue la biodiversité, cause l’érosion des sols, et nuit à la faune et à la flore », explique-t-elle en soulignant, aussi, l’impact sur les activités traditionnelles des Premières Nations, la chasse et la pêche.

La jeune femme rapporte des incidents sur sa propriété, notamment des difficultés respiratoires chez ses poules après un épandage proche de chez elle.

Elle décrit la forêt comme devenue silencieuse, signe d’une faune perturbée ou disparue. « Où vont les animaux quand leur nourriture disparaît? », s’interroge-t-elle en entrevue.

Jennifer Lynn Cutting dit ne pas comprendre la résistance de l’Ontario à mettre fin à la pratique. Gracieuseté de Jennifer Lynn Cutting

Une mobilisation en marche

Stop the Spray Ontario, fondé en 2021, organise des événements et diffuse de l’information pour faire cesser ces pratiques dans la province.

Par ailleurs, Greenpeace Canada a lancé une pétition demandant l’interdiction de l’épandage aérien de glyphosate en Ontario, rappelant que cette pratique est interdite au Québec depuis 2021.

« Si la prospérité exige qu’on s’empoisonne, alors la science nous a trahis »
— Luc Léonard

Pour le moment, 33 703 personnes ont signé la pétition, il en manque 6297 pour atteindre l’objectif établi de 40 000.

La direction des Premières Nations de l’Ontario réclame l’abolition des herbicides à base de glyphosate sur leurs territoires traditionnels, dénonçant un usage jugé disproportionné dans le Nord de la province. Une résolution a été adoptée en ce sens au sein de l’Assemblée des chefs de l’Ontario le 31 juillet dernier, tandis que la Première Nation Serpent River a également tenu une réunion d’urgence jeudi soir pour discuter de cette question.

Jennifer Lynn Cutting espère que ce mouvement portera ses fruits : « Il s’agit de protéger la santé et l’environnement pour les générations futures. »

Le maire Luc Léonard conclut : « Si la prospérité exige qu’on s’empoisonne, alors la science nous a trahis. »

Conscient que le sujet est tabou, le maire de Moonbeam, Luc Léonard, espère voir un large soutien des municipalités voisines. Gracieuseté de la ville de Moonbeam

ONFR a tenté de joindre le ministère des Richesses naturelles et des Forêts (MRNF) pour obtenir une réaction, mais sans succès au moment de la publication.

Pas plus de pouvoirs pour le maire

Jeudi soir, le conseil municipal de Moonbeam a également adopté une résolution exprimant son opposition aux pouvoirs élargis récemment conférés aux maires par le gouvernement de l’Ontario.

Selon les élus, ces nouvelles prérogatives, qui permettent notamment aux maires de prendre des décisions unilatérales en matière de budget, de planification stratégique et de nomination de cadres, compromettent les principes démocratiques fondamentaux et affaiblissent le rôle des conseillers municipaux.

Le conseil a réaffirmé l’importance d’une gouvernance municipale collaborative, où le pouvoir est partagé entre le maire et le conseil élu, rappelant que la ville du Nord « a depuis longtemps une tradition de gouvernance collaborative et transparente ».

La résolution demande également au gouvernement de l’Ontario de rétablir l’autorité pleine et entière des conseils municipaux et d’engager un dialogue avec les municipalités avant d’entreprendre toute réforme future en matière de gouvernance.

Une contestation légale envisagée

Cette décision s’inscrit dans un mouvement plus large de contestation regroupant plusieurs municipalités de la province qui réclament l’abolition ou le retrait volontaire de ces pouvoirs.

Plus de 126 municipalités ont déjà exprimé leur opposition, et ce nombre pourrait dépasser 200 avec l’élargissement attendu de ce cadre législatif à l’automne 2025. Plusieurs municipalités, dont Seguin, Parry Sound et Fort Frances, ont publiquement rejeté l’instauration des pouvoirs élargis des « maires forts ».

Le groupe Coalition Ontarienne pour l’Intégrité des Élues et Élus (acronyme VOICE en anglais), invite d’ailleurs les municipalités ontariennes à discuter de la possibilité d’un recours judiciaire collectif pour contester les pouvoirs élargis des maires, si les négociations avec la province échouent.

Tennis : Victoria Mboko sur le toit du Canada! 

MONTRÉAL – La jeune Ontarienne d’origine congolaise Victoria Mboko a réalisé l’exploit de remporter l’Omnium Banque Nationale de Montréal en venant à bout de Naomi Osaka en trois manches (1-6, 6-4, 6-1) ce jeudi soir. Après avoir débuté le tournoi en tant que 85e joueuse mondiale, elle passe à la 24e place avec cette victoire.

Après un premier set perdu 6-1, la jeune joueuse de 18 ans a fait étalage de sa force mentale et de sa capacité de réaction pour battre Naomi Osaka, quadruple vainqueur de tournois du Grand Chelem qui jouait son meilleur tennis depuis son retour sur les courts. Elle devient la troisième Canadienne à mériter ce titre depuis 1968, après Faye Urban et Bianca Andreescu.

Avant même la finale, le parcours de Mboko relevait déjà de l’exploit. En route vers le titre, elle a écarté trois anciennes championnes majeures : Sofia Kenin, Coco Gauff et Elena Rybakina, un fait inédit pour une Canadienne dans un WTA 1000. Elle est aussi devenue la deuxième plus jeune joueuse de l’ère Open à battre quatre championnes d’un tournoi de Grand Chelem dans un même tournoi, après Serena Williams en 1999. Ajoutons à cela qu’elle s’impose ici en tant que bénéficiaire d’une invitation (wild card) lors de futurs tournois, un scénario rarissime à ce niveau.

« Je ne pensais pas que j’allais gagner ce tournoi comme ça, je ne sais pas quoi dire à part `Oh mon Dieu´. Naomi est une très bonne joueuse, j’étais un peu nerveuse avant ce match, mais finalement c’était incroyable », a-t-elle déclaré en français après la rencontre sur TVA Sports. Quelques jours plus tôt, elle avait d’ailleurs révélé que la Japonaise était l’une de ses idoles de jeunesse.

Comme la veille face à Elena Rybakina, la première manche est compliquée pour Victoria Mboko. Très offensive, Naomi Osaka domine les débats. La Canadienne n’est en mesure de remporter que deux petits jeux s’inclinant 6-2 dans une première manche à sens unique.

Un mental à toutes épreuves

La jeune joueuse de 18 ans montre sa force mentale et sa capacité de réaction, dès le début de la seconde, remportant le premier jeu sur le service de son adversaire. Sur cette deuxième manche, aucune des deux joueuses n‘est en mesure de marquer sur son propre service sur les cinq premiers jeux. L’Ontarienne mène 3-2 et en étant la première à concrétiser sur son service, elle prend un avantage de 4-2.

Naomi Osaka semble complètement perdre pied. Elle concède le jeu suivant sans marquer le moindre point (5-2). Mboko n’en profite pas, multipliant les doubles fautes au service. Osaka reste en vie en revenant à 5-3. La Japonaise sort provisoirement de sa mauvaise passe en dominant largement le jeu suivant grâce à un service dominant (5-4). Mboko a tout de même la possibilité de servir de nouveau pour le set. Cette fois, elle ne laisse pas passer sa chance et revient à un set partout au terme d’un dernier jeu maîtrisé (6-4). 

Tout commence à merveille pour la Canadienne dans la dernière manche, avec Osaka qui perd le premier jeu, de nouveau sur son propre service, sans marquer le moindre point. Malheureusement, Mboko montre de nouveau des failles sur son service avec plusieurs doubles fautes, qui offrent le deuxième jeu à son adversaire (1-1). Ce début de troisième set ressemble comme deux gouttes d’eau au second, avec un troisième break en trois jeux et Mboko qui reste devant (2-1).

Le jeu suivant est acharné et dure près de 10 minutes. Les deux joueuses s’échangent les égalités, 6 au total dont 4 balles de bris pour Osaka. C’est au final la joueuse locale qui a le dernier mot, sur un fantastique amorti, qui lui donne un avantage de 3-1!  On a assisté au tournant du match.

Dans la foulée, Mboko remporte de nouveau le jeu sur le service de son adversaire pour se mettre dans une position idéale pour remporter le match. 4-1 puis 5-1 en remportant sa mise en jeu, elle ne laisse pas la moindre chance à son adversaire et s’impose 6-1 pour remporter le match et le tournoi.

Un nouveau statut

Cette victoire revêt une dimension encore plus impressionnante lorsqu’on sait que Victoria Mboko jouait avec une gêne au poignet suite à une chute en demi-finale, la veille. Elle avait passé une Imagerie par résonance magnétique (IRM) de contrôle le matin même. L’examen n’ayant révélé aucune lésion, elle a décidé de jouer, masquant la douleur derrière un calme exemplaire.

Avec ce titre, Vicky, comme elle est surnommée, remporte son premier trophée WTA et confirme son entrée fracassante parmi l’élite mondiale. Son ascension est fulgurante : elle est passée de la 333ᵉ place en début d’année 2025 à la 24ᵉ aujourd’hui ce qui en fait déjà l’un des visages les plus prometteurs du tennis féminin, non seulement canadien, mais aussi mondial.

À deux semaines de l’US Open qui débutera le 25 août, elle se présente désormais comme une concurrente redoutable pour n’importe quelle joueuse du circuit. Mais, le plus dur est encore devant elle. Finie la surprise, elle va devoir assumer désormais un statut et sera très attendue par ses adversaires.

Jeux d’été de l’Ontario à Sudbury : immersion dans la passion sportive d’aînés francophones

SUDBURY – C’est la deuxième et dernière journée des 30e Jeux d’été de l’Ontario 55+, à Sudbury. Des participants francophones venus de toute la province s’affrontent dans une dizaine de disciplines sportives. ONFR a rencontré quelques-uns de ces athlètes passionnés, venus partager leur attachement au sport et à cet événement unique.

Le soleil chauffe déjà fort sur les terrains extérieurs du Collège Boréal. Malgré la chaleur, les athlètes séniors dans la mi-cinquantaine en montant s’activent à la balle lente, un sport où la patience et la précision priment. Parmi eux, Guy Gaudreault, 58 ans, de London, est concentré sur chaque lancer.

Le softball a été un sport olympique officiel de 1996 à 2008, avant d’être retiré du programme, puis réintégré pour les Jeux de Tokyo en 2021. Photo : Inès Rebei/ONFR

« Il fait chaud, mais on reste bien hydratés et on prend des pauses dès qu’on en a besoin », explique celui qui avait fréquenté les bancs de l’Université Laurentienne au début des années 90.

Avec des températures frôlant les 30 degrés, les organisateurs n’ont pas lésiné sur les moyens pour assurer la sécurité des aînés, installant des stations médicales sur tous les lieux de compétition et déployant au total près de 230 bénévoles.

Du curling au golf, en passant par le pickleball ou le bowling, les épreuves s’étalaient aux quatre coins de Sudbury, pour ce grand rassemblement intergénérationnel qui n’avait pas été accueilli dans la ville depuis 2010.

Guy Gaudreault est originaire de Sault Ste. Marie mais vit à London depuis près de 20 ans. Photo : Inès Rebei/ONFR

M. Gaudreault pratique la balle lente au niveau récréatif dans cette compétition où s’affrontent également des professionnels : « La balle lente, c’est comme le baseball, sauf qu’on lance plus lentement, ça demande beaucoup de précision »

« J’ai commencé à 55 ans, parce que j’aime le sport en général. J’avais joué quand j’étais jeune, mais pas en équipe. Ici, c’est très amical, on prend ça au sérieux, mais ce n’est pas trop compétitif », raconte celui qui en est à sa troisième participation aux Jeux.

Briser l’isolement des aînés

À l’intérieur, du côté du golf du Club Timberwolf de Garson, Noël Gaudette, 80 ans, est bénévole pour la première fois aux Jeux. « J’ai choisi d’être à l’intérieur parce que je ne supporte pas la chaleur », confie-t-il assis devant une vue imprenable sur les parcours.

Seul bénévole francophone sur le site, M. Gaudette gère les feuilles de score et l’affichage des résultats. « J’aime bien voir l’ambiance, rencontrer les joueurs, même si je suis un peu gêné pour parler, mais c’est important ici de créer du lien entre tout le monde. »

Noël Gaudette a participé aux championnats juniors de l’Ontario ainsi qu’aux compétitions nationales. Photo : Inès Rebei/ONFR

Le retraité insiste sur l’importance de ces rassemblements pour les aînés : « Les seniors ne se voient pas souvent. Ces Jeux, c’est un moment où ils peuvent jouer, discuter, rire, et ça fait du bien à tout le monde. Ici, on est comme une grande famille. »

Suzanne et Guy Lemay, venus de Cornwall, sont du même avis. Les retraités de la fonction publique fédérale ont roulé plus de sept heures de route pour partager leur passion pour le pickleball, un sport qui gagne en popularité chez les personnes âgées.

« Ce qu’on aime, c’est la variété. On joue avec des joueurs qu’on ne connaît pas, on fait des circuits, ça permet de rencontrer des centaines de personnes », relate Mme Lemay depuis le Centre athlétique de Cambrian.

Les Lemay ont découvert le pickleball il y a trois ans, après avoir longtemps pratiqué le tennis. Photo : Inès Rebei/ONFR

Le couple qui participe cette année dans la catégorie 4.0 – un niveau élevé – aime aussi le côté social des Jeux. « On a hâte à la soirée à Science Nord, c’est un bel événement qui rassemble tout le monde », nous racontait M. Lemay mercredi matin.

Néanmoins, l’événement, concentré sur deux jours intenses de compétitions, ne laisse que peu de temps pour se détendre ou faire du tourisme. « Trois jours, c’est court. Si ça durait une semaine, on pourrait vraiment en profiter plus », regrette de son côté Suzanne Lemay.

Le couple Lemay s’entraîne cinq fois par semaine à Cornwall. Photo : Inès Rebei/ONFR

Le fun avant la compétition

Au salon de quilles Plaza Bowl, Paul Bélanger, originaire de Timmins, salue l’esprit sportif de l’événement. Comme tous les autres participants, celui-ci a été rigoureusement sélectionné après une qualification dans des épreuves à Timmins.

« Il faut gagner plusieurs fois, sinon tout le monde pourrait venir sans limites », conte celui qui est venu avec une petite délégation de Timmins.

Paul Bélanger a déjà visité Sudbury plusieurs fois. Photo : Inès Rebei/ONFR

Septuagénaire et entraîneur de bowling depuis plus de quarante ans, il en est à sa cinquième participation aux Jeux.

« On n’a pas fait un gros score pour le moment », raconte-t-il juste avant de faire un coup de quille qui rapportera de précieux points à son équipe. « Mais on est là pour s’amuser. Oui, on veut gagner, bien sûr, mais ce n’est pas le but premier. C’est de se retrouver entre passionnés. »

Les compétitions culmineront ce jeudi avec la cérémonie de remise des médailles d’or, d’argent et de bronze, où les athlètes seront honorés comme aux Jeux olympiques.

Une petite délégation de Timmins venue jouer au bowling. Photo : Inès Rebei/ONFR

Encourager plus de femmes

Changement de décor dans la salle plus intimiste et sombre du Rhythm’N’Cues où Carole Giroux s’active autour de la table de billard, un sport qu’elle a pu retrouver récemment après sa retraite.

Ce que la femme de 62 ans aime dans les Jeux, c’est l’ambiance, la camaraderie. « C’est un bel événement. Les gens sont tous super chill, relax. On veut tous juste jaser, se faire des amis. »

Mais en compétition, les femmes sont encore largement sous-représentées. « Cette année, on est juste trois femmes à jouer, contre onze hommes. Il y a pourtant plein de femmes qui jouent au billard, mais c’est encore nouveau pour plusieurs. J’espère qu’on sera plus nombreuses l’an prochain », confie la retraitée de l’Université de Sudbury.

Elle évoque aussi une autre participante, venue seule de l’Est ontarien, qui hésitait à faire le déplacement.

« Elle m’a dit qu’elle avait peur d’être toute seule dans son coin. Je lui ai répondu que j’allais rester avec elle, qu’on allait passer la journée ensemble. C’est ça aussi, les Jeux. C’est de ne pas laisser les gens seuls. »

Pierre Lamarche : « Vicky Mboko n’a jamais peur »

[ENTREVUE EXPRESS]

QUI :

Pierre Lamarche est une figure incontournable du tennis canadien et le tout premier entraîneur de Victoria Mboko. Fondateur de l’Académie ACE Tennis, il a encadré la jeune prodige dès l’âge de 4 ans à Burlington et a accompagné les débuts de son développement dans le tennis.

LE CONTEXTE :

À 18 ans, Victoria Mboko est la nouvelle sensation du sport canadien. Qualifiée pour la finale du tournoi de Montréal, l’Ontarienne aux racines francophones a renversé Elena Rybakina, ancienne championne de Wimbledon, après avoir perdu le premier set 6-1. Grâce à sa combativité et son sang-froid, elle s’est imposée 1-6, 7-5, 7-6(4) et  est devenue la première Canadienne à battre trois anciennes championnes de Grand Chelem dans un même tournoi WTA 1000.

L’ENJEU 

Elle en affronte une quatrième en finale ce jeudi, Naomi Osaka, actuellement classée 49e mondiale. Une victoire permettrait à Mboko d’entrer directement dans le tableau principal de l’US Open et pourrait même la propulser aux portes du top 25 mondial. À quelques heures d’aborder ce match, ONFR a recueilli la réaction de son tout premier mentor. Pierre Lamarche partage son émotion, son admiration et surtout son regard d’entraîneur avisé sur cette jeune étoile montante.

 « Quelle est votre réaction générale à ce parcours exceptionnel de Victoria Mboko à Montréal? 

C’est tout simplement une histoire incroyable. Pas juste une belle histoire à Montréal ou au Canada, mais une histoire internationale. Et pour moi, c’est très émouvant, car je connais Vicky depuis qu’elle a 4 ans. Ça fait maintenant 14 ans que je connais sa famille. Ils sont venus du Congo, sont passés par la Caroline du Nord, puis se sont installés dans la région de Toronto.

C’est là que j’ai rencontré sa mère, qui m’a demandé conseil pour ses enfants. Ce n’était pas encore Vicky à l’époque, mais ses trois aînés, qui ont tous joué au niveau national. Quand Vicky a commencé à jouer, on a tout de suite vu quelque chose de spécial chez elle. C’est une famille exceptionnelle, soudée, et qui a toujours cru en ses enfants.

Pourquoi selon vous explose-t-elle maintenant, à seulement 18 ans? 

En réalité, ce n’est pas une surprise. Il y a environ trois ans, elle avait déjà prouvé qu’elle avait le talent pour jouer à un très haut niveau. Elle avait remporté un tournoi en Saskatchewan, ce qui marquait vraiment le début de sa carrière.

Mais ensuite, elle a été freinée par une blessure qui a duré presque deux ans. Ce sont deux années qui ont ralenti son développement. Depuis le début de cette année, elle retrouve sa pleine forme et enchaîne les résultats. À partir de Miami en mars, elle a été très impressionnante sur le circuit mineur, et maintenant, elle confirme tout ce qu’on savait déjà.

Pierre Lamarche avec Vicky Mboko à ses débuts, ici en compagnie d’une autre jeune joueuse de l’Académie ACE Tennis. Photo : gracieuseté de Pierre Lamarche

Qu’est-ce qui, très tôt, vous a fait croire en son potentiel? 

Ce qui m’a marqué chez Vicky, c’est son mental. C’est, selon moi, la qualité numéro un chez un joueur ou une joueuse de haut niveau. Elle n’a jamais eu peur. Quelqu’un m’avait demandé un jour si elle allait être nerveuse face à Coco Gauff. J’ai répondu : « Vicky n’est pas une joueuse nerveuse. »

Elle montre très peu d’émotions, sauf quand elle perd. Et même enfant, elle détestait perdre. Même contre sa sœur, de dix ans son aînée, elle ne supportait pas la défaite. C’est cette détermination, cette combativité, qui la distingue.

Parfois, en pratique, elle ne jouait pas aussi bien qu’en match. Elle se transcende en compétition. Elle adore la pression. Elle l’utilise pour se surpasser.

Comment analysez-vous sa victoire en demi-finale?

Encore une fois, tout est dans le mental. Elle perd le premier set 6-1. À son âge, après un tel parcours, on pourrait imaginer qu’elle lâche un peu, qu’elle soit fatiguée. Mais non. Elle revient dans le deuxième set, très combative, et gagne.

Dans le troisième, elle est menée d’un bris, puis dans le tie-break final, elle est encore derrière à 4-3. À quatre reprises dans ce match, elle aurait pu flancher. Et à chaque fois, elle a répondu présente. C’est remarquable.

Quel regard portez vous sur sa collaboration actuelle avec Nathalie Tauziat?

C’est une pièce très importante du puzzle. Même quand on parle de moi comme de son premier entraîneur, je rappelle toujours que c’est un travail d’équipe. Il y a eu tellement de personnes qui l’ont aidée au fil des années.

Aujourd’hui, c’est Tennis Canada qui a jumelé Vicky avec Nathalie, et ça porte ses fruits. Nathalie lui apporte énormément. Son expérience, sa lecture du jeu, sa rigueur. Et je sais qu’il y a aussi d’autres entraîneurs qui gravitent autour d’elle actuellement. C’est une collaboration de haut niveau, et ça l’aide à passer un nouveau cap.

Pierre Lamarche demeure très proche de la famille de Vicky Mboko qui vit à Burlington depuis 14 ans. Photo : gracieuseté de Pierre Lamarche

Quelles seront, selon vous, les clés pour battre Naomi Osaka?

Vicky va devoir jouer à sa manière. Elle a une puissance remarquable, tant au service que dans son coup droit. Son revers est toujours très solide, et elle a beaucoup progressé dans ses déplacements.

Avec son équipe et Nathalie Tauziat, elle va sûrement avoir un plan de match bien précis. Mais ce qui me rend optimiste, c’est sa maturité. Quand je l’écoute parler avec les journalistes, je suis impressionné. Elle a 18 ans, mais elle dégage déjà une vraie assurance. Et ça, combiné à son niveau de jeu, ça peut faire la différence.

Immigration francophone : la région d’Ottawa attire, mais les défis persistent

OTTAWA – De plus en plus de nouveaux arrivants francophones choisissent de s’établir dans la capitale fédérale. Mais logement, emploi, reconnaissance des compétences et santé mentale freinent encore leur intégration.

En 2024, plus de 205 000 nouveaux résidents permanents ont été admis en Ontario. Près d’un sur dix était francophone, un chiffre record selon Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC).

Dans ce contexte, la région d’Ottawa s’impose de plus en plus comme une destination privilégiée. Sébastien Martin, directeur principal des Services d’emplois et des nouveaux arrivants au YMCA Ottawa, en témoigne.

« Ottawa est une ville prédestinée pour les nouveaux arrivants francophones : c’est bilingue, Gatineau, côté québécois, est juste de l’autre côté, et l’est de la ville — de Vanier jusqu’à Orléans, Rockland, Limoges — est extrêmement francophone. »

Sébastien Martin, directeur principal des Services d’emploi et des nouveaux arrivants au YMCA Ottawa, constate une hausse record de la clientèle francophone. Crédit image : Gracieuseté

Mehdi Dridi, 38 ans, fonctionnaire fédéral et entrepreneur arrivé il y a trois ans, observe la même tendance. Selon lui, Ottawa est devenue le point de chute « par défaut » des francophones.

« Montréal est aujourd’hui saturée, tant sur le plan économique que pour la qualité de vie. De l’autre côté, Toronto est devenue de plus en plus inaccessible, en raison d’un coût de la vie exorbitant et de son caractère profondément anglophone », affirme-t-il.

Cette dynamique se reflète dans les données du YMCA Ottawa. Cet organisme  dispose de trois sites à Ottawa —rue Merivale, au centre-ville et à Orléans (ouvert en décembre 2024)— où sont offerts des services liés au logement, à l’emploi et à l’apprentissage linguistique.

« Il y a cinq ans, nous recevions environ 400 à 500 francophones par année, soit 15 % de notre volume. Aujourd’hui, ils représentent près de 50 % », explique M. Martin. « Depuis le 1er avril, nous avons accueilli 1778 francophones uniquement pour nos services d’emplois, et nous sommes en bonne voie de dépasser les 5000 cette année », détaille-t-il.

Ottawa, une ville vraiment bilingue?

Pour répondre à la demande, l’organisme a recruté massivement du personnel bilingue : « Désormais, la moitié de mon équipe parle français », indique ce responsable du YMCA. Mais même si Ottawa est officiellement bilingue, la maîtrise de l’anglais reste cruciale. 

« Si quelqu’un parle seulement français avec un faible niveau d’anglais, il est plus limité dans ses options », rappelle M. Martin.

M. Dridi confirme : « La francophonie reste timide : le marché est dominé par l’anglais et la ville n’a pas encore développé la dynamique économique et culturelle pour attirer massivement l’immigration francophone. »

Les défis du logement et de l’emploi 

Pour Alexander Alfred, coordonnateur au Centre des services communautaires Vanier, les priorités des nouveaux arrivants sont claires : « Tous les clients qu’on rencontre ont toujours deux préoccupations : trouver un emploi et un logement. » 

Alexandre Alfred, coordonnateur au Centre des services communautaires Vanier, aide les nouveaux arrivants à surmonter leurs défis. Photo : Gracieuseté

Mais le marché du travail s’est durci, poursuit-il : « On leur demande souvent une expérience canadienne… mais pour l’avoir, il faut d’abord être engagé. »

Mehdi Dridi dénonce un paradoxe, ce qu’il appelle un « mythe protectionniste ». « Le gouvernement te choisit sur la base de tes qualifications, et le marché du travail te rejette sur la même base », déplore-t-il.

Au Centre Vanier, les nouveaux arrivants sont orientés vers un service d’emploi où des conseillers les aident à adapter leur CV au marché canadien et à envisager des secteurs connexes si leur métier est réglementé. Le programme Experica, par exemple, offre une première expérience locale, même non rémunérée.

Le YMCA mise lui sur la promotion des métiers spécialisés : électricien, plombier, cuisinier, charpentier, mécanicien, coiffeur, ébéniste, maçon etc.

« Il existe environ 150 secteurs qui ne nécessitent pas de diplôme universitaire », assure M. Martin, ajoutant qu’avec la pénurie de logements et la retraite des baby-boomers, plus de 400 000 postes devraient s’ouvrir, avec des salaires de 25 à 30 $ de l’heure après seulement quelques semaines de formation.

Détresse psychologique et résilience

Au cours de leur établissement, beaucoup de nouveaux arrivants vivent seuls, en logement temporaire, et voient leurs économies fondre. L’isolement, l’hiver, le manque de travail et la pression liée au logement aggravent la situation. « On leur dit que leur métier est en demande, mais une fois ici, ils découvrent qu’ils ne peuvent pas pratiquer », souligne Alexander Alfred.

Pour Pamela Yengayenge, directrice d’Innoviang Entrepreneuriat féminin, la détresse psychologique est un défi croissant : « Ce n’était pas aussi prononcé il y a cinq ans, mais l’inflation, le stress migratoire, l’absence de statut et la précarité rendent l’intégration plus difficile. » Elle note aussi des obstacles spécifiques aux femmes : « Elles sacrifient souvent leur carrière pour s’occuper des enfants. »

Pamela Yengayenge, directrice générale d’Innoviang Entrepreneuriat féminin, met en lumière la résilience des nouveaux arrivants. Photo : Gracieuseté

Arrivée en 2019, Pamela s’est intégrée grâce à un programme pour immigrants francophones à La Cité. « Ce cercle m’a permis de sortir de ma bulle et de tisser des liens », confie-t-elle, insistant sur la « résilience silencieuse » de ceux qui quittent tout pour repartir à zéro.

Un manque d’information

Pamela Yengayenge et Alexander Alfred soulignent que de nombreuses ressources existent, mais restent méconnues.

« Il ne faut pas se contenter des conseils de la famille ou de la communauté. L’immigration change vite. Il faut aller chercher l’information à jour auprès des bons organismes », insiste M. Alfred.

M. Dridi plaide lui pour un organe centralisant et formalisant les expériences des immigrants : « Le choix du moment pour arriver est crucial : le marché du travail et la réalité économique peuvent changer rapidement. Une telle plateforme pourrait guider tous les statuts : résidents permanents, étudiants, travailleurs temporaires. »

Mehdi Dridi, installé à Ottawa depuis trois ans, observe les réalités de l’intégration des nouveaux arrivants francophones. Photo : Gracieuseté

Il critique aussi un manque de planification à la fois du côté des nouveaux arrivants qui ne prennent pas la peine de bien s’informer en amont et en aval, mais surtout du côté du gouvernement.

« Le Canada s’est fixé des objectifs ambitieux en immigration sans vérifier si son infrastructure sociale pouvait suivre. Résultat : un décalage entre le marketing pour attirer les immigrants qualifiés et la réalité sur le terrain », fait-il observer. Selon lui, cette situation a alimenté des tensions. « Lors de la dernière campagne électorale, on a entendu des propos de protectionnisme et de rejet de la politique d’immigration, parfois teintés de conservatisme », ajoute ce Tunisien d’origine.

L’intégration des nouveaux arrivants se heurte ainsi à des obstacles structurels dans un contexte où plusieurs organismes liés à Immigration Canada ont subi des coupes allant jusqu’à 15 %, touchant particulièrement le Programme d’aide à la réinstallation, destiné aux réfugiés, rappelle Sébastien Martin.

Jessica Gaudreault entre paradoxe olympique, retour en force et pause forcée

[PARIS 2024, UN AN APRÈS]

Un an après les Jeux olympiques de Paris, ONFR vous propose de revenir sur les souvenirs des athlètes franco‑ontariens et surtout sur leur année après les Jeux. Ce mercredi, c’est au tour de Jessica Gaudreault, gardienne de but de l’équipe canadienne féminine de water‑polo, de revenir sur cette expérience unique et sur l’année qui a suivi sa deuxième participation olympique.

Pour la gardienne franco-ontarienne, les Jeux olympiques de Paris 2024 restent un souvenir mêlé de fierté et de frustration. Si elle garde en mémoire le soutien de sa famille avec une vingtaine de proches venus l’encourager sur place, elle regrette la tournure sportive d’un tournoi qui a vu le Canada terminer en huitième place.

« Contre l’Italie et la Grèce, on perd les matchs dans les toutes dernières minutes. Parfois, je me dis qu’avec un peu plus de concentration, on aurait pu changer le scénario. On était compétitives jusqu’au dernier quart… »

Mais c’est surtout le paradoxe émotionnel de la fin de tournoi qui l’a marquée.

 « Tu perds en quarts de finale, donc tu sais que tu ne peux plus viser une médaille. Tu es encore là une semaine entière, tu continues à t’entraîner, tu joues encore deux matchs… mais sans objectif clair. C’est long. »

Cette situation crée un étrange flottement mental. « Tu as envie de décrocher, de souffler, de profiter un peu du village olympique, mais tu est toujours en compète. Tu veux donner ton maximum, par respect pour l’équipe et pour toi-même, mais ton cœur n’y est plus autant. » 

En compétition pendant les deux semaines, l’Ottavienne confit ne pas avoir pu profiter pleinement des à-côtés des Jeux. Photo : Darren Calabrese/COC

Une réalité d’autant plus difficile qu’elle contraste avec l’ambiance des Jeux : « T’es aux JO, tout le monde est heureux d’être là, mais toi, tu viens de perdre ton objectif principal. T’es là, sans être vraiment là. C’est dur à expliquer. »

Retour en Espagne

Dès la page olympique tournée, Jessica Gaudreault a retrouvé le monde professionnel en Espagne. Elle avait déjà signé son retour avant même les Jeux avec le Club Natació Terrassa, situé à une trentaine de kilomètres de Barcelone, dans la région la plus dense du water-polo mondial.

« On a bien joué en championnat, dans la meilleure ligue au monde. On a fini troisième, juste derrière les deux meilleures équipes d’Europe. » 

Cette performance n’est pas anodine : en Liga Premaat, pas moins de huit clubs féminins de haut niveau sont localisés dans Barcelone et ses environs, créant une concentration d’élite unique au monde. Parmi eux, le CN Sabadell, ogre du water-polo européen, multiple champion d’Espagne et huit fois vainqueur de la Ligue des champions sur les dix dernières années.

En championnat, Terrassa a réussi à se hisser sur le podium derrière Sabadell et Sant Andreu, confirmant sa montée en puissance. « C’était une vraie satisfaction. On avait un groupe jeune, mais très soudé, avec une belle progression tout au long de la saison. »

En revanche, la Ligue des Champions s’est révélée plus compliquée. « Notre groupe était relevé, avec Sabadell dedans justement, et d’autres équipes très expérimentées. Notre effectif manquait encore un peu de vécu à ce niveau. »

Blessure de fatigue

Ce que la native d’Ottawa n’avait pas anticipé, c’est la douleur qui allait l’accompagner pendant toute la seconde moitié de saison. 

« J’ai développé une blessure d’usure en décembre. J’ai continué à jouer jusqu’en mai, mais avec énormément de douleurs. Ce n’était pas le bon environnement pour guérir, j’étais encore dans un mode compétition après Paris. Je n’ai jamais vraiment eu de vraie coupure. »

Jessica Gaudreault vise désormais Los Angeles 2028 où elle garderait les buts canadiens pour la troisième fois aux Jeux olympiques. Photo : Darren Calabrese/COC

La douleur provenait d’une blessure à la hanche, un problème fréquent chez les gardiennes de water-polo en raison des mouvements explosifs et répétitifs qu’impose leur position. 

« C’est assez typique pour nous, on pousse constamment dans l’eau avec la même rotation, les mêmes appuis. Mon corps me disait clairement qu’il avait besoin de repos. »

Rééducation et avenir à définir

Depuis le printemps, place à la récupération. Jessica a décidé de ralentir pour se soigner et se préparer correctement en vue de la suite. Elle a tout de même retrouvé l’équipe canadienne cet été pour un camp d’entraînement, dans un groupe largement renouvelé. « Il y a un nouveau sélectionneur, une nouvelle dynamique, très peu de filles des Jeux. C’est un nouveau chapitre. »

Le Canada n’a pas pu participer aux Championnats du monde 2025, faute de qualification après les tours continentaux, une première dans l’histoire récente de l’équipe. Le camp de trois semaines à Montréal a néanmoins permis de travailler avec ce groupe jeune, sous la direction de la nouvelle sélectionneuse Kyriaki Liosi, ancienne médaillée olympique grecque. L’équipe vise désormais les mondiaux 2027, qui serviront aussi de tremplin pour se qualifier aux Jeux de Los Angeles 2028.

« Je suis concentrée sur ma santé. Peut-être un retour en Espagne en janvier, mais rien n’est signé. Si je veux prolonger jusqu’à Los Angeles 2028, il faut que je prenne soin de moi maintenant. »

Crise à Fauquier-Strickland : « Je ne démissionnerai pas », dit la mairesse visée par une pétition

FAUQUIER-STRICKLAND – Un nouveau chapitre s’ouvre dans la crise politique qui secoue Fauquier-Strickland. Des résidents ont lancé une pétition en ligne et sur papier réclamant la démission de la mairesse Madeleine Tremblay, mais celle-ci répond qu’elle a l’intention ferme de finir son mandat.

Intitulée « Request for Leadership Resignation », la pétition circule à la fois en ligne et en version papier. Elle compte dix signataires sur la plateforme Change.org au moment d’écrire ses lignes alors que la version papier aurait déjà recueilli environ soixante-dix signatures.

La pétition revient d’abord sur les graves difficultés financières que traverse Fauquier-Strickland, notamment l’annonce d’un déficit opérationnel de 2,5 millions de dollars, la menace d’une interruption complète des services municipaux dès le 1er août, ainsi que des propositions de hausses de taxes foncières allant jusqu’à 300 %.

Le texte dénonce aussi un manque de transparence, l’absence d’un plan concret, ainsi que la stagnation administrative de la municipalité.

S’adressant directement à la mairesse Madeleine Tremblay, en poste depuis 19 années, on peut y lire : « Compte tenu de ces circonstances, nous vous prions respectueusement de quitter votre poste de mairesse. Nous croyons qu’un nouveau leadership est nécessaire pour rétablir la confiance du public, répondre aux besoins urgents de notre municipalité et guider Fauquier-Strickland vers un avenir plus durable et financièrement responsable. »

Une affiche appelant à la démission de Madeleine Tremblay est aussi visible dans la municipalité près de l’avenue qui porte le même nom que la mairesse. Contactée par ONFR, Madeleine Tremblay confirme avoir pris connaissance de cette affiche.

Interrogée sur les appels à la démission qui circulent publiquement, Mme Tremblay affirme n’avoir aucune intention de quitter son poste. « J’ai toujours dit que je ne démissionnerai pas et que je vais rester jusqu’à la fin de mon mandat en 2026. On ne lâche pas quand les temps sont durs, j’ai un bon système de soutien autour de moi. Passer au travers, c’est plus difficile que de lâcher, mais c’est ça qu’il faut faire », a-t-elle indiqué.

Les appels à la démission se multiplient

« On demande qu’elle se retire, qu’elle quitte son poste », explique Tammy Daigle, résidente de longue date de Fauquier-Strickland et instigatrice de la pétition. « Il y a eu beaucoup de mensonges, un manque de transparence, et plusieurs choses ont été cachées à la population », affirme-t-elle.

Installée dans la municipalité depuis plus de 30 ans, Mme Daigle indique qu’elle n’a commencé à découvrir l’ampleur des tensions municipales que récemment. « Même moi, ça fait juste quatre mois que je commence à savoir ce qui se passe réellement », dit-elle.

Depuis l’émergence publique de la crise à l’hôtel de ville, des appels à la démission de la mairesse circulent régulièrement sur les réseaux sociaux.

Certains citoyens expriment ouvertement leur frustration dans des publications et commentaires, réclamant un changement de direction politique à la tête de la municipalité. Ces appels, d’abord isolés, se sont multipliés au fil des dernières semaines, au rythme des tensions observées au sein du conseil.

Les tensions se sont d’ailleurs fait sentir jusque dans la salle du conseil. Lors de la réunion régulière du conseil municipal tenue mardi soir à Fauquier-Strickland, un citoyen a vivement interpellé la mairesse Madeleine Tremblay.

Peter Konopelky a critiqué la gestion financière de la municipalité, rappelant que Mme Tremblay avait reconnu en 2014 avoir des difficultés à comprendre les finances de la communauté. Il a souligné qu’à l’époque, la mairesse avait affirmé avoir recruté un conseiller pour l’aider à mieux gérer la situation.

« Je trouve difficile à croire que, malgré votre implication politique depuis le début des années 2000, vous ne soyez toujours pas en mesure de gérer les finances municipales, même avec l’aide d’un conseiller financier », a-t-il déclaré.

M. Konopelky a aussi dénoncé le manque de place accordée à la participation citoyenne lors des décisions importantes. « Nous, les contribuables de cette communauté, vous demandons de démissionner et de laisser la place à quelqu’un qui comprend mieux comment diriger une municipalité », a-t-il conclu sous les applaudissements d’une grande partie de l’assistance.

Une procédure juridiquement complexe

Si certains citoyens espèrent un changement immédiat, les possibilités légales de démettre une élue municipale sont très limitées. Un rapport administratif commandé par la municipalité en réponse à une demande citoyenne rappelle que ni le conseil municipal ni les résidents ne peuvent voter pour forcer la démission de la mairesse.

Selon la Loi de 2001 sur les municipalités, la destitution d’un élu n’est possible que dans des cas bien définis :

  • une condamnation pour pratiques électorales corrompues;
  • une violation de la Loi sur les conflits d’intérêts municipaux;
  • ou une absence non autorisée de plus de trois mois consécutifs.

En l’absence de telles circonstances, une élection anticipée ne peut être convoquée. Le mandat actuel des membres du conseil se poursuit jusqu’en novembre 2026.

Des pistes pour l’avenir

Lors de la réunion régulière du conseil municipal tenue mardi soir, les élus se sont penchés sur plusieurs propositions citoyennes visant à améliorer la situation financière de la municipalité. Parmi celles-ci figuraient des suggestions pour revoir la structure administrative, prioriser les services essentiels, ou encore relancer certains projets de développement jugés porteurs.

La conseillère Priscilla Marcoux a plaidé pour une plus grande pression sur les paliers supérieurs de gouvernement, notamment pour obtenir des fonds sans contrepartie locale. « On a déjà dû abandonner des projets faute de pouvoir payer la part exigée », a-t-il déploré.

Elle a aussi suggéré d’emboîter le pas à la municipalité de Tweed, qui a récemment écrit au premier ministre Doug Ford pour réclamer plus de soutien aux communautés rurales, et a suggéré de préparer une lettre semblable et de solliciter l’appui d’autres municipalités.

L’idée de mettre sur pied un comité de citoyens ou de travail pour suivre la situation financière a également été évoquée. Ce comité pourrait avoir pour mandat d’examiner les finances municipales, de proposer des solutions et de faire le lien entre la population et le conseil.

Un autre moment fort de la rencontre a été la prise de parole d’une citoyenne qui a réclamé l’ouverture d’une enquête interne afin de faire toute la lumière sur la gestion financière des dernières années. « On a le droit de savoir, on a le droit de demander des comptes, et on a le droit d’engager un avocat pour enquêter », a-t-elle affirmé, appuyée par plusieurs personnes présentes dans la salle.

Cette demande faisait écho à celle de la conseillère Priscilla Marcoux, qui dit réclamer depuis 2020 la tenue d’une telle enquête, en vain jusqu’à maintenant. Des réserves ont été exprimées concernant le coût potentiel d’une enquête interne, souvent évalué à plusieurs dizaines de milliers de dollars pour le recours à un cabinet externe ou un expert indépendant.

Il a aussi été mentionné que le gouvernement provincial pourrait offrir une aide financière par le biais de programmes destinés à soutenir les petites municipalités en difficulté, ce qui pourrait alléger la charge financière pour la communauté. L’ensemble du conseil a convenu que cette question pourrait être abordée lors de la prochaine réunion, avec une proposition claire de motion.

Danny Demyanenko entre désillusion collective, renaissance personnelle et nouveau défi

[PARIS 2024, UN AN APRÈS]

Un an après les Jeux olympiques de Paris, ONFR vous propose de revenir sur les souvenirs des athlètes franco‑ontariens et surtout sur leur année après les Jeux. Ce mardi, c’est au tour de Danny Demyanenko, membre de l’équipe canadienne masculine de volleyball, de revenir sur cette expérience marquante et sur une année post olympique exceptionnelle, entre paternité, succès en Italie et nouveau défi en Pologne.

Un an après les Jeux olympiques de Paris 2024, Danny Demyanenko garde en tête l’image d’un tournoi à double lecture, entre désillusion collective et victoire personnelle en coulisses. Avec trois défaites en autant de matchs, l’équipe canadienne masculine de volleyball n’a pas atteint ses objectifs. « Oui, ce n’était pas l’histoire qu’on voulait écrire en termes de victoires. »

À titre personnel, pourtant, ces Jeux auront été une épreuve à surmonter.

« J’ai eu des blessures avant la sélection, avant l’été, et pour la sélection c’était compliqué. Donc j’ai dû retrouver mon niveau et au final, j’ai réussi. Pour moi, c’était une histoire d’un peu de courage, d’un peu de poursuite, d’avoir de la force quand il y a des trucs qui ne vont pas. »

Sur le plan collectif, l’équipe, en grande partie composée de néophytes olympiques, a vécu un baptême du feu. « Il faut être en pleine force et là, on n’était pas en pleine force, mais je pense qu’on avait des bons matchs. […] Les JO, il n’y a pas de chance de lâcher un petit bout à ton adversaire. »

La cérémonie d’ouverture sur la Seine fait partie de ses souvenirs marquant des Jeux. Photo : gracieuseté de Danny Demyanenko

Mais derrière la frustration sportive se cache une expérience humaine marquante. Le village olympique, les rencontres avec d’autres athlètes canadiens et internationaux, la cérémonie d’ouverture sur la Seine : « des moments uniques », selon lui. Et surtout, une émotion personnelle forte : l’annonce de la naissance prochaine de sa fille, qui verra le jour en décembre. 

« C’était le moment parfait pour le dire. Un rêve dans un rêve. »

Une saison italienne aboutie

La page olympique à peine tournée, le Torontois a découvert le quotidien d’un petit village italien de 3 300 habitants, Grottazzolina, où il s’est engagé dès juin 2024. Malgré un début de saison compliqué en Superlega, sa formation a terminé 10e sur 12, un bon résultat pour une équipe promue et qui a assuré son maintien en première division.

« On a commencé sans victoire, c’était vraiment dur mentalement, se souvient-il. Mais on n’a jamais lâché. Petit à petit, on a commencé à accrocher des sets, puis à prendre des points, parfois contre des grosses équipes. À la fin de la saison, on était capables de rivaliser avec presque tout le monde. C’était une belle progression, et tout le monde au club était fier de ce qu’on avait accompli. »

Mais ce que Danny Demyanenko retient avant tout, c’est sa meilleure saison professionnelle à titre personnel : il termine meilleur central du championnat italien, une performance saluée dans l’un des meilleurs championnats du monde. 

« J’ai été constant, performant, et j’ai trouvé beaucoup de plaisir à jouer. »

Nouveau pays, nouvelle ville, nouvelles couleurs et surtout un nouveau membre dans sa famille, l’après JO a été riche en événements pour Danny Demyanenko. Photo : gracieuseté de Danny Demyanenko

En parallèle, sa vie a basculé avec la naissance de sa fille en décembre. « C’était une période très particulière, très formatrice. On était loin de nos familles, dans un pays qu’on ne connaissait pas, sans repères, sans soutien quotidien. On a tout vécu à deux, ma femme et moi. Mais en même temps, il y avait énormément d’amour, de joie, et ça m’a porté toute l’année. C’était difficile parfois, bien sûr, mais je n’aurais rien changé à cette expérience. Devenir père, dans ce contexte-là, ça donne une force différente. »

Retour prévu avec la sélection nationale

Depuis les Jeux, Demyanenko n’a pas rejoué avec l’équipe canadienne. Mais le choix a été personnel et assumé. 

« Ça faisait des années que j’enchaînais sans repos. Il fallait que je prenne un moment pour souffler, me recentrer physiquement et surtout être présent pour ma famille. »

Il a cependant déjà échangé avec Dan Lewis, le nouveau sélectionneur, et prévoit un retour avec la sélection l’été prochain.

« Je garde ça en tête. Ce n’est qu’une parenthèse. »

Depuis son absence, l’équipe canadienne a poursuivi sa reconstruction. Elle a pris part à la Ligue des nations 2025 sans parvenir à sortir de la phase préliminaire, malgré quelques performances encourageantes face à des équipes du top 10 mondial. 

Danny Demyanenko envisage de revenir en sélection nationale très prochainement. Photo : Volleyball World

Le groupe rajeuni, en transition post-olympique, peine encore à retrouver la stabilité et l’efficacité de ses meilleures années. Le retour de cadres comme Demyanenko pourrait justement renforcer l’expérience au centre du filet, en vue des qualifications pour les prochains grands rendez-vous internationaux.

Nouveau défi dans le froid

Pour la saison 2025-2026, le volleyeur de 31 ans a choisi de relever un défi de taille : rejoindre l’équipe historique polonaise de Resovia, engagée en Ligue des Champions. 

« C’est une opportunité que je ne pouvais pas refuser. Un club prestigieux, ambitieux, avec un groupe très relevé. » Il évoque une signature rapide, et une grande hâte de débuter.

Ce transfert marquera aussi une première… inattendue : retrouver la neige après huit ans passés entre le sud de la France (Toulouse et Montpellier) et l’Italie. « Ça va piquer », rigole-t-il. Mais le central canadien est prêt à affronter l’hiver polonais, avec le sourire d’un père comblé, et l’appétit d’un athlète qui n’a pas dit son dernier mot.

L’avenir de la Fondation franco-ontarienne est menacé

OTTAWA — La survie de la Fondation franco-ontarienne est incertaine, celle-ci se trouvant dans une situation « à risque au niveau financier et juridique », signale un audit-comptable indépendant. La Fondation doit notamment 400 000 $ à ses donateurs, un montant qu’elle pourrait être incapable de rembourser, même si elle assure le contraire.

Les états financiers de la Fondation dressent un portrait inquiétant pour son avenir, selon l’audit comptable réalisé par la firme nationale Meyers Norris Penny (MNP). La Fondation franco-ontarienne (FFO), créée en 1986, fait face à des déficits récurrents depuis plusieurs années.

L’organisme vient en appui à des initiatives francophones dans la province. La FFO administre avec la Caisse Desjardins près d’une soixantaine de fonds et les dons combinés aux gains en intérêt générés par les fonds d’investissement permettent d’offrir des bourses à des étudiants par exemple.

Durant les trois dernières années, la Fondation a accumulé un déficit après chaque année financière : 507 999 $ (2022), 252 159 $ (2023), et 105 399 $ (2024). 

« Il existe un doute relativement à la capacité de la Fondation de poursuivre ses activités »
— Note tirée de l’audit financier pour l’année 2024

De plus, en 2023, la Fondation a emprunté une somme de près de 400 000 dollars de ses fonds de dotation, « qui sont destinés à être conservés en capital », souligne l’audit-comptable. Cet emprunt est une manœuvre qui n’est pas permise, prévient la firme MNP, car cela « constitue une dérogation aux conditions initiales des ententes » avec ses clients et expose la Fondation à « un risque financier et juridique ».

Comme il s’agit techniquement d’un emprunt entre comptes, cela n’apparaît pas dans le déficit actuel. En entrevue, le président du conseil d’administration, Don Bouchard, explique qu’il s’agit d’argent provenant « d’un fonds dormant ». C’est « une décision purement fiscale » et les gestionnaires de ce fonds ont signalé que « cet argent-là était à 100 % remis à la Fondation et puis que c’est à nous d’en faire la gestion telle quelle », clarifie M. Bouchard.

« C’est ce qu’on a emprunté pour être capable de continuer nos opérations, expose ce dernier. C’est un emprunt et ce fonds-là sera remboursé (…). C’est la première chose qu’on veut rembourser. »

Des organisations de la francophonie ontarienne sont titulaires de fonds à la Fondation comme dans les domaines communautaires, en éducation, en santé, etc. Photo : Ahmed Baidou

Mais l’évaluation financière de MNP énonce plutôt que la FFO se trouve « dans une situation d’incertitude quant à sa capacité à rembourser ces montants » auprès de ses donateurs. Le portrait financier actuel ne prend pas en compte la possibilité d’avoir à rembourser cette somme « puisqu’il est impossible de déterminer l’issue de cette situation », note aussi la firme de comptable.

« Compte tenu du fonds de roulement négatif du fonds d’opération, de l’insuffisance des produits par rapport aux charges d’années en années, de la difficulté d’obtenir du nouveau financement et des sommes que la Fondation a empruntées dans ses fonds de dotation, il existe un doute relativement à la capacité de la Fondation de poursuivre ses activités », soutient l’examen financier de 2024 dans des notes complémentaires.

« Je ne vois pas la voie du rétablissement »

En entrevue, le professeur de l’Université d’Ottawa Gilles LeVasseur mentionne que de tels commentaires et un tel constat dans des états financiers en disent long et sont plutôt rares.

« Quand un vérificateur écrit ces notes complémentaires là, c’est qu’il doit avoir soulevé un problème fondamental. On n’écrit pas ça juste comme ça », affirme ce spécialiste en gestion et gouvernance.

La Fondation franco-ontarienne organise des collectes de fonds chaque année comme la Soirée Saphir qui récompense des acteurs communautaires. Photo : Ahmed Baidou

Nous avons présenté les chiffres de la FFO à Marc Pilon, un comptable agréé et professeur dans le domaine à l’Université Nipissing. « Je ne vois pas la voie du rétablissement, c’est difficile », analyse cet expert.

« Un déficit qui représente, mettons 10 % des revenus annuels, ce sont des peanuts, poursuit-il. Mais pour la Fondation, c’est un nombre très élevé. Il faudrait avoir des revenus pendant presque 10 ans sans dépenses pour pouvoir rembourser le déficit accumulé. »

Baisse marquée des dons

Notamment en raison de la pandémie, le nombre de dons a considérablement baissé entre 2019 et 2021, montrent les états financiers des dernières années. Les dépenses de l’organisme de charité n’ont toutefois pas baissé au même rythme. Cela a donc créé un déséquilibre où les dépenses opérationnelles ont dépassé largement les revenus générés.

« Le défi qu’on a eu dernièrement, c’est qu’au niveau du fonds de roulement qui rentre habituellement, on n’a pas eu autant de donateurs qu’on a (habituellement) et il y a eu des opérations dans le déficit, éclaircit Don Bouchard. Donc à la place de mettre la Fondation davantage en déficit avec une marge de crédit puis des taux d’intérêt élevés, emprunter (le 400 000 $) sur un de nos fonds avait beaucoup plus de sens. »

« À l’époque où j’étais là, les fonds de dotation généraient quand même des revenus. Le déficit était plutôt au niveau des opérations », atteste en entrevue Gilles Marchildon, membre du conseil d’administration entre 2016 et 2022.

« Je pense que, pendant longtemps, la Fondation pouvait absorber ces déficits-là. Au niveau comptable, elle pouvait utiliser le coussin qui provenait de tous les fonds d’investissement. Mais tôt ou tard, ça rattrape », constate-t-il.

« Pour une charité, c’est très alléchant d’utiliser les fonds de dotation comme source de financement, nous explique Marc Pilon. Cela permet de réduire les fonds empruntés à l’externe et minimiser les frais d’intérêts (…) Mais c’est une pratique risquée lorsque les bases financières ne sont pas solides », prévient le comptable.

Ce dernier croit que les difficultés financières de la Fondation franco-ontarienne sont le reflet d’un « problème de société dans la mesure qu’on fait de moins en moins de dons en argent ».

« Ça arrive plus souvent qu’on ne le pense quand les organisations sont au bord du précipice en essayant de trouver une solution et dire : on l’emprunte, mais on va le remettre l’an prochain. Mais souvent, l’an prochain n’existe pas », commente de son côté M. LeVasseur.

Certains détenteurs de fonds nous ont affirmés ne pas être informés des problèmes financiers de la Fondation, tandis que d’autres, comme la Fondation Montfort (l’un des plus importants financièrement), ont assuré être très au fait de la situation et maintenir des « communications régulières » avec la FFO.

Objectif : amasser 2 millions de dollars d’ici trois ans

La Fondation a elle-même sonné l’alarme au cours de ses assemblées annuelles, souligne son président « de façon volontaire et transparente » pour que « nos membres soient au courant que présentement, c’est difficile ».

« On ne s’en cache pas justement, on fait l’inverse. On veut que les gens décident de s’impliquer davantage dans la situation », souhaite Don Bouchard.

« Tu sais, les anglophones à Toronto, ils vont faire un 5 à 7 dans un club de golf puis ils vont aller chercher 2 millions de dollars. Des millionnaires francophones en Ontario, il n’y en a pas 50 000 », lance-t-il.

Le président du conseil d’administration de la Fondation franco-ontarienne Don Bouchard. Photo : Ahmed Baidou

La Fondation a mis en place un plan de redressement financier avec « énormément de coupures », selon Don Bouchard, comme en réduisant les heures de son directeur général à du temps partiel. Mais l’organisme franco-ontarien mise très gros sur une campagne de financement dès l’automne visant à amasser deux millions de dollars au cours des trois prochaines années.

Dons par déduction à la source, campagne spéciale dans le cadre du 50e anniversaire du drapeau franco-ontarien en septembre, 40e anniversaire de la Fondation en 2026, plusieurs volets feront partie de cette stratégie, qui reste à finaliser, précise M. Bouchard. Ce dernier convient que c’est agressif par rapport aux résultats passés, mais que ce n’est pas « une campagne amateure ».

Au cours des sept dernières années (2018 à 2024), l’organisation est parvenue à amasser près de la moitié de ce montant, soit près de 950 000 dollars en dons, selon les bilans financiers.

« On n’ira pas stipuler ce qui va arriver dans un, deux, trois, quatre, cinq ans. C’est bien trop loin, se contente de dire M. Bouchard lorsqu’on le questionne sur l’avenir de la Fondation. L’alarme est sonnée. On a un plan de redressement qui est en place d’un point de vue des opérations de nos finances et on a également en place une campagne de financement qui commence cet automne également. »

Mauvaise gestion?

Par le passé, la Fondation franco-ontarienne faisait affaire avec la firme comptable Marcil Lavallée pour ses états financiers, bien connue dans la région d’Ottawa et dans la francophonie ontarienne. Mais cette dernière aurait coupé les ponts avec la FFO en raison de mauvaise gestion, selon nos informations. L’entreprise de comptabilité n’a pas voulu confirmer ou infirmer ce renseignement lorsque nous l’avons contactée.

« Ce n’est pas du tout ça qui s’est passé », réfute Don Bouchard, qui présente plutôt la séparation comme un problème de communication entre les deux parties, mais confirme que c’est la firme qui s’est retirée par elle-même.

Gilles Marchildon confirme que la firme comptable d’origine franco-ontarienne avait prévenu la Fondation par le passé quant à la nécessité d’une meilleure gestion financière.

« Le message était toujours communiqué au conseil d’administration par notre firme d’audit. Il y avait un défi structurel qui était de mieux structurer le budget du côté des opérations », avance celui qui a été le président du CA de 2019 à 2022.

Le professeur Gilles LeVasseur se demande si les membres du conseil d’administration ont levé des drapeaux « lorsqu’ils ont vu le rouge » apparaître dans le budget. Certains des procès-verbaux de réunions de la fondation démontrent que les membres se sont inquiétés au sujet des finances de l’organisme. Un compte-rendu daté d’une assemblée de novembre 2023 décrit « plusieurs questionnements et inquiétudes au sujet des états financiers et de certains dossiers confidentiels ».

« Il y a peut-être eu une gestion déficiente. Des lunettes roses probablement en disant qu’on va s’en sortir. Un déficit, ça se gruge dans le temps », observe M. Pilon.

Bataille juridique

Par ailleurs, la FFO est aussi impliquée depuis le début de l’année dans une cause juridique, elle qui poursuit les gestionnaires d’un fonds réclamant plus de 550 000 dollars. 

Nous ignorions cet aspect juridique jusqu’à ce que M. Bouchard nous révèle lui-même que la fondation était engagée dans un litige, sans en préciser la nature, lors de notre entrevue. En janvier 2025, la Fondation a intenté une poursuite au civil contre les gestionnaires du Fonds commémoratif des IVes Jeux de la Francophonie devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario à Ottawa, révèle un avis de poursuite que nous avons obtenu auprès du tribunal provincial. 

La FFO accuse les gestionnaires du Fonds commémoratif et l’un des administrateurs de ce dernier, Rhéal Leroux, d’avoir rompu leur contrat en saisissant près de 350 000 $. Le Fonds, qui se serait « constitué en organisme de bienfaisance et s’était emparé des montants retrouvés dans le fonds appartenant à la FFO », allègue cette dernière dans son document de requête.

C’est « une saisie totalement illégitime et illégale » qui constitue « une violation de la déclaration de fiducie », soutient la FFO. L’avis de requête accuse aussi l’organisation responsable des Fonds de frais d’administration impayés. Aucune de ces allégations n’a été présentée ni prouvée devant un juge ou un tribunal.

« Il est important de souligner que la requête, les allégations et les insinuations comprises dans la requête sont vivement contestées par notre cliente (l’organistation du Fonds commémoratif des IVes Jeux de la Francophonie) et que cette requête fera l’objet en cours d’instance d’une défense complète de la part de notre cliente », nous a indiqué l’avocat représentant l’organisation responsable du Fonds commémoratif des IVes Jeux de la Francophonie, Sebastien Lorquet dans une déclaration.

Ce dernier soutient que ce différend « est un litige contractuel visant à déterminer qui est l’administrateur des sommes provenant d’un legs financier suite aux IVe Jeux de la Francophonie tenus dans la région en 2001 ». Selon M. Lorquet, « ce litige ne peut ni expliquer les problèmes actuels, ni justifier les décisions prises » par la Fondation pour remédier à sa situation financière.

Retour en images : une grande célébration haïtienne en clôture du festival FKZO 2025

TORONTO – Un an après une édition déjà remarquée, le Festival Kompa Zouk Ontario (FKZO) a une nouvelle fois rassemblé la foule pour sa 17e édition au Harbourfront Centre de Toronto. Ce dimanche 3 août, la journée de clôture a été marquée par une célébration vibrante de la culture haïtienne, portée par une programmation musicale éclectique et festive.

Le clou du spectacle? Un concert en trois temps qui a attiré un large public, composé autant de membres de la communauté haïtienne que de Torontois de tous horizons. Fidèle à l’image de la ville, la foule était à la fois nombreuse et diversifiée, avec de nombreux curieux attirés par les rythmes ensoleillés en bord de lac.

Une foule déja importante s’était regroupé pour le spectacle de Chris Precius. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

Les spectateurs dans l’ambiance lors du passage de Baz. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

Une foule encore plus importante avec l’arrivée sur scène de Fatima Altieri. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

Dès l’après-midi, sur la scène secondaire, l’artiste Chris Precius, chanteur et cracheur de feu, a mis le feu aux planches – au sens propre comme au figuré – avec une performance familiale mêlant limbo, danse et musique. Juste après son spectacle, il a lancé une invitation à rejoindre la grande scène pour la suite des festivités.

Chris Precius a littéralement mis le feu avant même le début du concert. Photo : Mickael Laviolle/ONFR

Un artiste complet qui a aussi montré ses qualités de chanteur. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

Chris Precius sur la scène secondaire avant d’inviter tout le monde à rejoindre le concert sur la principale. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

À 19h30, c’est le groupe Baz Konpa qui a ouvert la soirée sur la scène principale. Originaire d’Haïti, Baz propose un konpa moderne, énergique et dansant, à la croisée des influences traditionnelles et actuelles. Leur musique festive a rapidement séduit un public de plus en plus dense, porté par les percussions et les lignes de guitare caractéristiques du genre.

Baz et son groupe ont ouvert la soirée avec le classique d’Alan Cavé Se pa pou dat. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

Le public était déjà nombreux pour l’ouverture du spectacle. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

L’artiste Baz et son groupe ont assuré plus d’une heure et demi de spectacle. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

Après le passage de Fatima Altieri, Baz a fait son retour sur scène pour chauffer encore plus l’ambiance avant l’arrivée de DJ Tony. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

La deuxième partie du concert a vu l’entrée en scène de Fatima Altieri, chanteuse originaire d’Haïti elle aussi, connue pour sa voix puissante et ses collaborations avec des artistes du kompa, du zouk et du RnB caribéen. Elle a livré une prestation vibrante, soutenue par les musiciens de Baz, créant un moment de communion musicale avec le public.

Baz et Fatima Altieri ont dans un premier temps partagé la scène. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

Puis, la chanteuse, qui se produira prochainement à l’Olympia de Montréal, a pris le relais en solo. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

Fatima Altieri a repris des classique de la musique Kompa ainsi que certaines chansons de son album Enspirasyon. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

Après des remerciements chaleureux de Marie-Jennyne Mayard, fondatrice et directrice générale du FKZO, la soirée s’est conclue en apothéose avec DJ Tony Mix, véritable star de la scène haïtienne et DJ numéro 1 du pays. Très attendu, notamment par les plus jeunes, il a transformé le Harbourfront Centre en véritable boîte de nuit à ciel ouvert, avec un set explosif jusqu’à 23h.

Discours de remerciements chaleureux de Marie-Jennyne Mayard. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

DJ Tony tout juste entré en scène pour conclure la soirée. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

Les fans de l’artistes ont répondu présent pour mettre une belle ambiance. Photo : Mickael Laviolle/ ONFR

Le reste du week-end n’a pas été en reste : entre le spectacle culinaire de la cheffe Myldred, le village des enfants, les prestations de danseuses guadeloupéennes Gwada’Ka, ou encore les croisières musicales et la soirée Island Vibes, FKZO a mis à l’honneur toute la richesse des cultures créoles et francophones des Caraïbes, avec un accent particulier sur la Guadeloupe et Haïti.

Un 17e anniversaire haut en couleur pour ce rendez-vous devenu incontournable dans le paysage culturel francophone de l’été torontois.

DJ Tony met le feu au centre Harbourfront.

Samuel Zakutney, la mémoire vive d’un été historique pour la gymnastique canadienne

[PARIS 2024, UN AN APRÈS]

Un an après les Jeux olympiques de Paris, ONFR vous propose de revenir sur les souvenirs des athlètes franco‑ontariens et surtout sur leur année après les Jeux. Ce samedi, c’est au tour de Samuel Zakutney, membre de l’équipe canadienne masculine de gymnastique artistique, de revenir sur cette expérience unique et sur l’année qui a suivi sa première participation olympique.

Il n’a pas gagné de médaille, ni monopolisé les écrans de télévision, mais pour Samuel Zakutney, les Jeux de Paris ont été un sommet personnel et collectif. Le gymnaste franco-ontarien, membre de la première équipe canadienne masculine qualifiée en gymnastique artistique depuis 2008, revient sur un été 2024 chargé d’émotions et d’enseignements, entre performances sportives, mariage et nouveaux objectifs.

Une qualification historique et des émotions fortes

« Le sentiment de compétitionner dans la finale d’équipe, c’est ce que je garde le plus fort », confie Zakutney d’entrée de jeu. Car son souvenir des Jeux commence bien avant l’ouverture officielle. Avec ses coéquipiers, il se sont battus pendant trois ans pour qualifier une équipe complète, chose que le Canada n’avait plus réalisée depuis les Jeux de Pékin.

Le suspense a duré jusqu’au bout. Après une première journée correcte, mais imparfaite selon lui, l’équipe canadienne devait attendre la fin des deux autres subdivisions pour connaître son sort. 

« J’étais dans les gradins de Bercy avec mon entraîneur… complètement recroquevillé dans mon siège, les doigts sur les yeux », se remémore-t-il. Une chute sur la barre fixe d’un concurrent et l’annonce du classement final a libéré tout un groupe.

« Canada, 8e place. On l’avait fait. »

Du club d’Ottawa jusqu’aux Jeux de Paris, Samuel Zakutney a franchi chaque étape avec détermination. Photo : Antoine Saito/Gymnastics Canada

Ce soulagement a laissé place à l’extase en finale, et à un moment inoubliable pour l’athlète natif de Saint John au Nouveau-Brunswick, qui a grandi du côté d’Ottawa :

« J’ai ‘stiqué’ ma sortie à la fixe, c’était une routine super propre. Quand j’ai atterri sans bouger les pieds, la foule a explosé. J’ai vu l’équipe, j’ai eu un flashback de toutes les blessures, de tout le chemin parcouru… Le temps s’est arrêté. »

Ces trois années de qualification ont été tout sauf linéaires pour Samuel Zakutney. Entre une fracture du scaphoïde, une déchirure du pectoral droit, et des douleurs persistantes au genou, le gymnaste a souvent été contraint à des pauses forcées. Mais à force de résilience et d’ajustements dans sa préparation, il a réussi à revenir à son meilleur niveau au bon moment.

Le village olympique, un monde à part

En dehors des agrès, Zakutney a goûté à la magie du village olympique. 

« C’est spécial d’être entouré de tellement de gens qui savent ce que ça prend pour arriver ici. Même un simple échange de regards dans la cafétéria, c’était du respect. »

S’il n’a pas trop profité des installations et compétitions en dehors de la gymnastique, concentration oblige, il a tout de même pu assister à une journée d’athlétisme avec ses sœurs. 

« On n’était pas là pour se promener. On avait un job à faire. Mais on a quand même profité un peu de l’ambiance. »

Un boost de confiance, plus qu’une vitrine

Les Jeux n’ont pas changé la vie de Zakutney en matière de notoriété ou de contrats.

« Personnellement, non. J’ai fait quelques entrevues, mais ça n’a pas vraiment augmenté ma visibilité. D’autres coéquipiers comme Félix Dolci ou William Emard, eux, ont eu beaucoup plus d’attention. »

Mais sur le plan mental, l’impact est profond.

« J’avais encore des doutes après mes blessures. Je n’étais pas dans ma meilleure forme, surtout sur les anneaux, à cause d’un déchirement au pectoral. Mais j’ai appris à lâcher prise, à faire confiance au processus. »

Ce changement d’état d’esprit, il l’emporte avec lui : 

« Aujourd’hui, je sais mieux comment me mettre dans le bon état mental pour performer. Même si le stress reste, j’ai plus de confiance en moi. »

Des anneaux à l’alliance

Le lendemain même de la finale par équipe, Samuel Zakutney a demandé en mariage sa compagne de longue date à Paris. Le mariage a eu lieu récemment au Palais de justice de Montréal, lors d’une cérémonie civile en présence de leurs proches. Une seconde cérémonie plus traditionnelle est prévue pour l’année prochaine avec leurs amis et leurs familles.

« On s’est rencontré à Penn State et elle était à mon côté depuis ce temps-là. Elle m’a toujours supporté dans mon rêve d’aller aux Jeux », souligne-t-il.

Samuel Zakutney a entamé une nouvelle page de sa carrière, guidé par la passion et l’espoir d’un nouveau podium mondial. Photo : Antoine Saito/ Gymnastics Canada

Après un mois et demi de repos, il a repris doucement l’entraînement en octobre, et la compétition dès janvier 2025 avec Elite Canada, puis une tentative de retour international en mars lors d’un tournoi en Allemagne, avortée à cause d’une gêne au genou.

Mais la forme est revenue aux Championnats canadiens où il a décroché la deuxième place aux barres parallèles, la quatrième aux arçons et la cinquième au concours général. 

« C’était quand même une bonne compé », résume-t-il.

Cap sur les championnats du monde

L’objectif maintenant est clair : les Championnats du monde de gymnastique artistique en Indonésie à la fin octobre. Une compétition individuelle, sans classement par équipes, mais où Zakutney espère briller sur deux agrès :

« Si je peux entrer dans le top 12 ou le top 16 aux barres parallèles et à la fixe, ce serait l’idéal. »

Pour cela, il a adapté ses routines au nouveau code de pointage post-olympique, qui exige huit éléments au lieu de dix. 

« J’ai passé l’hiver à bosser là-dessus pour augmenter ma note de difficulté. Je pense que je suis en bonne position. »

À 27 ans, Zakutney ne sait pas encore jusqu’où son parcours l’emmènera, mais une chose est certaine, Paris lui a donné un élan nouveau, et le sentiment d’avoir sa place parmi les meilleurs.

« J’ai eu l’une des plus belles journées de compétition de ma carrière aux Jeux. Maintenant, j’avance avec confiance. »

Histoire des Noirs à Ottawa : un voyage en train contre l’oubli

Ottawa — Le « Train clandestin de la liberté » a rassemblé, dans la nuit du 31 juillet au 1er août, une centaine de personnes à bord pour célébrer le Jour de l’émancipation. Cette date marque la fin officielle, en 1834, de l’esclavage dans l’Empire britannique, y compris le Canada.

Tard dans la nuit, se rassemblant à la station Blair d’Ottawa, ils ont choisi de veiller plutôt que de dormir. Aînés, enfants, artistes, militantes, professeurs, sportifs, familles entières, toutes les générations sont venues célébrer le Jour de l’émancipation, le 1er août 1834, date à laquelle l’Empire britannique abolit officiellement l’esclavage dans toutes ses colonies, y compris le Canada.

Pour marquer cette date (reconnue en 2021 par le gouvernement fédéral), une centaine de personnes se sont rassemblées à bord du « Train clandestin de la liberté », un événement inspiré du modèle torontois lancé par l’écrivaine et militante noire Itah Sadu en 2013 et organisé simultanément à Toronto ce même soir.

Une mémoire et un espoir pour le futur

« Je veux me souvenir de celles et ceux qui ont tout risqué pour la liberté », confie Denise Umutoni, migrante rwandaise. « Cette liberté dont nous jouissons actuellement, elle a été arrachée par la lutte des pionniers. Et encore aujourd’hui, on continue à se battre, contre d’autres formes d’esclavage », poursuit-elle.

Denise Umutoni, migrante rwandaise, a rappelé que la quête de liberté continue sous d’autres formes. Photo : Amine Harmach

Poésie, chants, danses et récits ont fait vibrer chaque wagon. Le train, le temps d’un trajet de deux heures, s’est transformé en scène vivante, en mémoire en mouvement.

Au menu des chansons comme Redemption song de Bob Marley qui évoque l’odyssée des esclaves dans les navires les transportant de l’Afrique vers l’exploitation ou A change is gonna come de Sam Cooke qui évoque l’espoir et la fraternité humaine qui triomphera un jour.

« Je garde espoir pour notre futur collectif », témoigne Melissa Redmond, professeure à l’Université Carleton venue avec plusieurs amis « célébrer la résilience des peuples africains, peu importe où ils se trouvent ».

« Nous sommes unis par une histoire commune, par une expérience partagée », ajoute-t-elle.

Pour elle, cet événement offre l’occasion précieuse d’être ensemble. « On manque de moments pour simplement réfléchir à notre histoire, à notre situation actuelle, et à ce que l’on souhaite pour notre avenir. »

Melissa Redmond, professeure à l’Université Carleton, souligne la résilience des peuples africains. Photo : Amine Harmach

Des pionniers de la cause

Pour Jean-Marie Guerrier, vice-président et trésorier de l’organisme Histoire des Noirs d’Ottawa (traduction libre – Black History Ottawa), le « Train clandestin de la liberté » rend hommage au réseau clandestin de routes, d’abris et de personnes qui ont aidé les esclaves à fuir vers le nord.

« Les termes utilisés dans ce contexte étaient très imagés : conducteur, train, gare… D’où l’idée de recréer un train, pour incarner cette marche vers la liberté », explique-t-il.

Adrienne Codette, militante noire qui a animé l’événement en anglais, souligne que « le réseau » fonctionnait sur l’une des relations humaines les plus puissantes : « Quand on est alliés, solidaires, organisés, on peut renverser un système entier conçu pour vous détruire. »

« Tant qu’un seul d’entre nous n’est pas libre, aucun de nous ne l’est vraiment », clame-t-elle.

Au fil des stations, Sarah Onyango, coordonnatrice d’Histoire des Noirs faisait découvrir aux passagers la mémoire d’Ottawa parcourue de lieux symboliques.

Exemple parmi tant d’autres, le quartier Rideau-Rocliffe, représenté par Rawlson King, premier conseiller municipal noir élu en 2019 et réélu en 2022.

Sarah Onyango guide les passagers à travers les grandes étapes de l’histoire noire d’Ottawa. Photo : Amine Harmach

Non loin de quartier Côte-de-Sable, Sarah Onyango rappelle que certaines rues rendent hommage à des figures liées à l’esclavage ou à son abolition. Elle évoque la maison de Wilfrid Laurier, le premier premier ministre francophone du pays (de 1896 à 1911). « En 1911, il a signé un décret interdisant, pour un an, l’immigration de personnes noires, jugées inadaptées au climat et aux exigences du Canada », rappelle-t-elle.

Cette décision, prise dans un contexte de racisme et de discrimination, visait à empêcher l’établissement de Noirs au pays, en se basant sur des préjugés « d’inadaptation climatique ».

D’autres figures historiques sont également évoquées, comme Hugh Burnett qui a milité auprès du gouvernement de l’Ontario jusqu’à la promulgation en 1951 d’une loi interdisant la discrimination dans l’emploi.

Il y a aussi lieu de citer Myrtha Lapierre, doyenne de la communauté haïtienne, première femme noire francophone à avoir suivi le programme de sciences infirmières à l’Université d’Ottawa, avant d’enseigner pendant près de 30 ans.

Une odyssée historique

« Une odyssée bouleversante et féconde », résume Régy Jonathan de la Cruz Abraham, artiste haïtien et poète d’Ottawa-Gatineau.

« En tant que descendant de la première République noire, celle qui a ouvert la voie à tant d’autres, j’ai ressenti une émotion profonde », affirme-t-il

Régy Jonathan De La Cruz Abraham, artiste engagé, a récité un des ses poèmes à bord du « Train clandestin de la liberté ». Photo : Amine Harmach

De son côté, Travis Duggan, membre de la coalition Brotherhood, coorganisatrice de l’événement, appelle à ce que la société canadienne reconnaisse la présence et l’engagement des hommes noirs.

« Depuis que je suis jeune, j’ai vu de grands changements positifs pour les Noirs dans ce pays », estime-t-il, citant notamment le domaine de l’éducation. « Mais il y a encore beaucoup à faire. L’histoire qu’on nous raconte n’est pas celle des Noirs », conclut-il.

Cette mémoire noire est au centre d’un autre événement organisé par l’organisme Histoire des Noirs d’Ottawa. Tous les mercredis et samedis jusqu’au 18 octobre, des parcours en bus en 25 étapes mènent sur les traces des pionniers noirs à travers la visite de lieux marquants de l’histoire des Noirs à Ottawa et au Canada.

Les tours sont généralement en anglais, mais ces visites guidées peuvent être aussi offertes en français ou de manière bilingue.

Cécile Dionne, l’une des célèbres quintuplées, s’éteint à 91 ans

Cécile Dionne, l’une des célèbres quintuplées originaires du Nord de l’Ontario qui avaient fasciné le monde entier dans les années 1930, est décédée dimanche dernier à l’âge de 91 ans à Montréal, à la suite d’une longue maladie.

Née à Corbeil, au sud de North Bay, le 28 mai 1934, Cécile était l’une des cinq sœurs Dionne, les premières quintuplées identiques connues à avoir survécu à la naissance.

Leur arrivée au monde en pleine Grande Dépression avait provoqué une onde médiatique sans précédent, attirant des millions de curieux et de touristes dans la petite localité nord-ontarienne de Corbeil.

Cécile Dionne rejoint ses trois sœurs déjà disparues : Émilie Dionne est décédée en 1954 à l’âge de 20 ans des suites d’une crise d’épilepsie, Marie en 1970 à 35 ans d’un caillot au cerveau, tandis qu’Yvonne s’est éteinte en 2001 à l’âge de 67 ans, victime d’un cancer.

Annette est désormais la seule sœur encore en vie. Une visite de condoléances aura lieu le jeudi 7 août 2025 à Saint-Bruno-de-Montarville au Québec selon un avis de décès disponible en ligne.

« Cécile Dionne était une femme de courage et de convictions, dont l’engagement envers la mémoire de sa famille et l’histoire franco-ontarienne a profondément marqué notre communauté. À travers ses prises de parole et ses combats, elle nous a rappelé l’importance de faire vivre notre patrimoine et de le transmettre avec dignité. Sa voix nous manquera, mais son héritage, lui, vivra longtemps », réagit Jacynthe Dupont, directrice générale, Réseau du patrimoine franco-ontarien (RPFO).

Le maire de North Bay, Peter Chirico, s’est dit attristé d’apprendre le décès de Cécile Dionne. « Elle avait tant de liens avec cette ville et cette région », a-t-il confié à ONFR. Saluant l’héritage des quintuplées, il souligne l’importance du musée qui leur est dédié : « Leur legs continuera de vivre et d’être reconnu comme l’un des miracles du début du siècle. »

Une enfance surexploitée

Peu après leur naissance dans une maison sans électricité ni eau courante à Corbeil, les quintuplées sont retirées à leurs parents par la province, qui en fait des pupilles de la Couronne sous prétexte de préserver leur santé fragile. Un hôpital-pouponnière, le Dafoe Hospital and Nursery, est construit juste en face du domicile familial.

Face à cette situation, l’Association canadienne-française d’éducation de l’Ontario (ACFEO) avait contesté les évaluations éducatives menées en anglais et a milité pour que le français soit reconnu comme langue d’instruction. En 1938, cette mobilisation a permis d’obtenir que le français devienne la langue principale d’éducation pour les Dionne.

C’est là que les sœurs grandiront, séparées de leurs proches, surveillées en permanence et exposées quotidiennement au regard de milliers de touristes venus de partout dans le monde. On estime que plus de trois millions de visiteurs ont défilé devant leur lieu de vie dans les premières années. Ce n’est qu’en 1943, à l’âge de 9 ans, que les quintuplées sont rendues à leurs parents.

Dans les années 1990, les trois seules encore en vie à ce temps-là, Cécile, Annette et Yvonne, intentent une poursuite contre le gouvernement de l’Ontario, réclamant une réparation pour les abus subis durant leur enfance. Elles obtiennent gain de cause en 1998, recevant un règlement de 4 millions de dollars.

Cécile Dionne a vécu à Saint-Bruno-de-Montarville, en banlieue de Montréal, à partir des années 1990, période durant laquelle elle partageait une résidence avec ses sœurs Yvonne et Annette. Elles ont choisi de s’installer ensemble dans ce secteur familial après leur vie très médiatisée, réfugiées dans un environnement plus discret et intime

Combat pour le musée

Un musée consacré aux quintuplées Dionne a été fondé en 1985 à North Bay, dans l’une des maisons d’enfance des sœurs, afin de préserver leur histoire hors du commun.

Initialement situé rue Franklin, le Musée Dionne a été déplacé en 2017 vers une zone patrimoniale au parc du waterfront de North Bay. Il a rouvert au printemps 2019 après plusieurs années d’incertitude liée à un désengagement municipal.

L’exposition, aujourd’hui relocalisée au musée communautaire de North Bay et ouverte au public, tous les vendredis et samedis, de 10 h à 16 h avec entrée gratuite, continue de susciter l’intérêt, bien que son avenir demeure incertain.

Aide de la province acceptée : Fauquier-Strickland évite de justesse l’interruption de ses services municipaux

FAUQUIER-STRICKLAND – À bout de souffle sur le plan financier, la municipalité de Fauquier-Strickland a adopté jeudi soir une résolution entérinant la poursuite de ses services municipaux après le 1er août. Réunis en séance extraordinaire, les élus ont voté à l’unanimité en faveur de l’acceptation d’une aide d’urgence du gouvernement ontarien, qui permet à la localité du Nord-Est de maintenir temporairement ses activités.

La réunion a commencé dans une ambiance tendue, marquée notamment par une légère confusion autour de la langue utilisée pour les échanges.

La mairesse Madeleine Tremblay a tenté de s’exprimer en français et en anglais simultanément, cherchant à accommoder tous les participants, mais cette démarche a été perçue par certains comme confuse. Ce moment reflète les défis linguistiques auxquels fait face cette municipalité francophone minoritaire dans un contexte bilingue, où la question de la langue officielle de travail demeure sensible.

Par ailleurs, le conseiller Pierre Lamontagne a tenté d’ajouter un point à l’ordre du jour pour proposer un plan visant à réduire le déficit. La mairesse s’y est opposée, rappelant que la réunion extraordinaire ne peut traiter que des sujets inscrits à l’ordre du jour.

« Ce soir, c’est une réunion spéciale spécifiquement sur les sujets qu’on va discuter. On ne peut pas discuter d’autres sujets », a-t-elle insisté.

Malgré ce désaccord, le conseil s’est rapidement recentré sur la question centrale : la ratification formelle de l’aide provinciale. Les conseillers ont voté à l’unanimité pour adopter la résolution, permettant de débloquer le premier versement dès le 1er août.

Ceux-ci ont officiellement résolu que les services municipaux se poursuivront au-delà du 1er août 2025 et que les mises à pied prévues à cette date pour les employés restants seront annulées. Deux employés municipaux, affectés à l’entretien des routes et aux services d’hiver, conserveront notamment leurs postes, aux côtés de la directrice des services municipaux/greffière, Shannon Pawlikowski.

Une aide sous conditions

L’approbation sans réserve de l’accord de paiement de transfert conclu avec le ministère des Affaires municipales et du Logement survient deux semaines après la visite d’une délégation de la province.

En vertu de cet accord détaillé dans une lettre du ministre Rob Flack adressée à la mairesse Madeleine Trembay et datant du 25 juillet dernier, la province accorde jusqu’à 300 000 dollars à la municipalité pour lui permettre de couvrir ses coûts de fonctionnement essentiels entre le 1er août et le 31 octobre 2025.

L’aide est versée en trois paiements conditionnels. Le premier versement, d’un montant de 32 200 dollars, couvre les dépenses essentielles du mois d’août, notamment la paie, les assurances, les frais de gestion de l’eau potable, la gestion des déchets, les hypothèques et les dépenses courantes. Le deuxième versement, qui peut atteindre jusqu’à 195 000 dollars, est prévu en septembre mais peut être ajusté selon les revenus additionnels que la municipalité recevra des programmes provinciaux ou fédéraux.

Le dernier versement, d’un maximum de 72 800 dollars, est programmé pour octobre et dépend lui aussi du respect des obligations financières et des revenus déclarés par la municipalité. Chaque tranche est conditionnée à la transmission de rapports financiers détaillés, à l’interdiction de dépenses non essentielles et à la finalisation d’un budget d’ici la fin du mois d’août.

Cet appui vise principalement à permettre à la municipalité de maintenir ses services de base et de conserver son personnel, mais elle ne couvre pas les dettes à long terme ni les investissements majeurs. Elle s’arrêtera à la fin octobre, laissant toujours en suspens la question d’une solution à plus long terme.

« Corruption »

Ce sursis intervient alors que la situation financière de Fauquier-Strickland est pire que ce qui avait été communiqué au public ces derniers mois. Le déficit municipal, initialement estimé à 2,5 millions de dollars, serait en réalité supérieur à 5,5 millions, selon de nouvelles projections internes mettant en lumière une autre dette à long terme de 3,04 millions.

Lors de la séance, la frustration populaire s’est traduite par un appel clair au changement. Un citoyen a dénoncé ce qu’il a qualifié de « corruption » dans la gestion financière, évoquant un « mauvais usage des fonds publics » et demandant un renouveau lors des prochaines élections municipales. Ce cri du cœur reflète un malaise grandissant face à une situation jugée insoutenable par plusieurs habitants.

Parallèlement, des tensions importantes ont émergé entre la mairesse Madeleine Tremblay et le conseiller Lamontagne, notamment au sujet de l’accès aux documents financiers.

Ce dernier a contesté la transparence de l’administration, affirmant ne pas avoir reçu tous les renseignements nécessaires pour évaluer correctement la situation. La mairesse a alors répliqué en assurant que tous les membres du conseil avaient accès aux documents, ce qui a provoqué un vif désaccord.

Une rencontre régulière du conseil municipal est prévue mardi prochain, au cours de laquelle plusieurs membres espèrent proposer des idées pour trouver des solutions à la crise financière.

S’aimer en français en Ontario : un enjeu linguistique et identitaire

TORONTO – Depuis que Statistique Canada a dévoilé à deux reprises des chiffres accablants sur le déclin du français partout en Ontario et au Canada en l’espace de quatre ans, la question de la transmission du français s’est renouvelée dans les régions francophones en situation minoritaire. De plus en plus façonnée par l’exogamie linguistique et exposée à la langue majoritaire, la famille reste un foyer important de cette transmission, avec de nombreux défis à la clé.

Tandis que certains recherchent le conjoint francophone idéal, d’autres composent avec un partenaire de langue maternelle différente. À chacun sa stratégie pour pérenniser sa langue française.

« On s’est tout de suite mis dans une situation d’apprentissage de la langue de l’autre. J’ai eu besoin d’apprendre sa propre manière de parler en anglais, incluant son jargon californien », raconte la chercheuse en histoire.

Marianne et Larkin Miller sont un couple franco-américain qui parle de plus en plus français à la maison. Photo : Gracieuseté de Marianne Miller

Malgré une certaine bienveillance mutuelle vis-à-vis des différences linguistiques, Marianne a tout de même jugé essentiel d’imposer sa langue, particulièrement au sein de sa belle famille. « Je voulais les sensibiliser à ma langue et à terme à la langue que leur petit-fils parlera parce que, pour eux, l’anglais domine. »

Dans l’effort d’apprendre la langue de son mari, Marianne s’est très tôt heurtée au dilemme entre transmission et assimilation linguistique. « On s’est mis à regarder beaucoup de films et de séries en français. Et maintenant, quand on se demande de faire quelque chose, comme faire à manger ou la lessive, tout ça on commence à le dire en français », remarque-t-elle.

Bien au fait des rapports de force entre le français et l’anglais, Serge Dupuis constate qu’« il y a 50 ou 60 ans, le taux d’exogamie dans les régions comme l’Est et le Nord-Est était relativement faible. On parlait de 10 à 15 %. Alors qu’aujourd’hui, c’est devenu un phénomène majoritaire avec l’urbanisation et la raréfaction des rapports en français dans son entourage. »

Serge Dupuis au Salon du livre du Grand Sudbury le 10 mai dernier. Photo : Inès Rebei/ONFR

L’historien et consultant originaire de Sudbury suggère qu’auparavant, l’opinion répandue avançait l’idée que « l’exogamie mène forcément à l’assimilation et l’endogamie (opposée à l’exogamie) mène forcément à la transmission linguistique. » Néanmoins, il affirme que cette idée est plus complexe aujourd’hui.

En effet, M. Miller sent qu’il y a eu un changement de la langue la plus parlée à la maison notamment depuis que son fils est né. « On a plus tendance à parler anglais, mais je ne pense pas que la culture de l’un l’emporte sur l’autre. En plus, on baigne aussi dans une troisième culture canadienne et ça me pousse à être curieux et apprendre le français », soutient celui qui a acquis une maitrise de base du français depuis qu’il vit avec sa femme.

Tout est-il traduisible en amour?

Pour nombre de Franco-Ontariens, privilégier un partenaire s’identifiant à la culture francophone représente une facilité de communication à l’échelle du couple, et à une plus grande échelle, un maintien du poids démographique de la francophonie à l’échelle de la province.

Même si la langue de la mère a tendance à considérablement se transmettre, d’après Serge Dupuis, l’influence de la localité et de l’école a un effet majeur. « Même si les deux parents sont francophones, si c’est dans un endroit où le français n’existe nulle part, ça va être très difficile de transmettre la langue », précise-t-il.

Parlant français et le malgache, Megahn Andrianaina a quitté sa terre de Madagascar pour Toronto il y a trois ans. La jeune diplômée de Collège Humber, qui considère le français comme sa langue maternelle depuis ses études dans un lycée français, compte privilégier cette langue dans le cadre de ses relations.

« Je trouve que les sujets profonds ou un peu difficiles sont compliqués à aborder dans une langue qui n’est pas ta première langue. Et puis j’ai l’impression qu’on est plus émotionnel dans sa première langue », compare la jeune femme.

Après avoir évolué dans un système scolaire francophone à Madagascar, Meghan Andrianaina a tendance à préférer le français dans le cadre de sa vie personnelle. Photo : Gracieuseté de Megahn Andrianaina

Dans les grandes villes, il n’est pas anodin que les jeunes francophones emploient de grands moyens pour croiser le chemin de leurs semblables, notamment à travers les applications de rencontres. « La première année où je suis arrivée, sur une de ces applications, j’avais utilisé le filtre qui permettait de trouver des personnes parlant français », évoque Megahn Andrianaina.

Toutefois, plus tôt ce mois-ci, des licenciements au sein de l’application Bumble, ont certainement contribué à une fatigue croissante de la génération montante vis-à-vis des applications de rencontre.

Dans les anciennes générations, Serge Dupuis explique que « les fréquentations se faisaient à la salle paroissiale ou dans les soirées dansantes où généralement on était majoritaire [les francophones], puis la probabilité faisant en sorte qu’on allait rencontrer un conjoint francophone. »

Le premier speed dating francophone en Ontario

À Ottawa, la semaine prochaine, se tiendra le tout premier speed dating francophone de la province organisé par 15FirstDates. « On attend près de 40 personnes », affirme Khang Pham, qui coordonne l’événement.

Pour la somme de 30 dollars, les participants auront l’occasion de rencontrer une vingtaine de potentiels partenaires avec qui ils partageraient l’usage du français au quotidien. « L’idée m’est venue quand un des participants à nos évènements en anglais avait du mal à s’exprimer pleinement car il ne maitrisait pas beaucoup l’anglais », se rappelle M. Pham qui prévoit d’organiser trois autres événements similaires à Ottawa, espèrant par la suite étendre l’initiative à l’échelle provinciale.

« Je vois définitivement des plus de jeunes gens qui viennent à ces événements », dit Khang Pham.

15FirstDates.ca va désormais organiser des évènements speed dating spécifiquement francophones dès la semaine prochaine. Photo : Gracieuseté de Khang Pham

L’organisateur assure que la porte n’est pas fermée aux non-francophones dans la mesure où l’idée demeure de créer un espace où les personnes peuvent échanger en français et laisser la chance à tout type de liens pour assurer cette transmission linguistique.

Serge Dupuis confirme finalement que lorsque des rapports s’établissent dans une certaine langue, il devient très difficile de les changer par la suite. D’ici un an, le nouveau recensement fera un nouvel état de l’usage des langues officielles dans la sphère personnelle.

L’année prochaine, le nouveau recensement de la population, qui débutera périodiquement dès le mois de mai, amassera de nouvelles données sur l’usage des langues officielles dans la sphère personnelle.

Jonathan David : « Je veux devenir l’un des meilleurs buteurs au monde »

TURIN (Italie) – Présenté officiellement à la presse ce mercredi 30 juillet, Jonathan David a partagé ses premières impressions et ses grandes ambitions avec la Juventus de Turin. Le buteur Franco-Ontarien a affiché sa détermination pour s’imposer sous les couleurs bianconeri (surnom de l’équipe, noir et blanc en italien) et franchir un nouveau cap dans sa carrière.

« C’est une grande émotion pour moi d’être dans un club comme la Juventus », a-t-il déclaré en ouverture, avant d’évoquer une première semaine d’entraînement « très positive », facilitée par « des coéquipiers qui [l’]ont beaucoup aidé ».

Transféré depuis Lille après trois saisons pleines, toutes conclues au-delà des 25 buts, l’attaquant de 24 ans ne cache pas ses objectifs élevés en Serie A.

« Je pense pouvoir encore marquer 25 buts cette saison. Bien sûr, je sais que la Serie A est plus tactique et plus défensive, mais je suis prêt à relever le défi. »

S’il est conscient de la concurrence à son poste, notamment avec Dušan Vlahović ou Kenan Yıldız, le natif de Brooklyn, élevé à Ottawa, ne s’en laisse pas impressionner.

« Il n’y a jamais de garantie. Il faut jouer, prouver. Je ne m’attends pas à être titulaire à chaque match, mais je vais tout donner. »

Interrogé sur le surnom « Iceman  » que lui avait attribué l’ancien sélectionneur du Canada en raison de son sang-froid devant le but, Jonathan David l’assume totalement.

« Oui, je suis très calme dans la surface de réparation. Ce sang-froid m’aide dans les moments de pression. Rester concentré est essentiel. »

Si son arrivée à Turin s’inscrit dans une logique sportive, elle répond aussi à un rêve de jeunesse.

« Chaque championnat a ses défis, mais j’ai toujours voulu jouer à la Juve, donc je suis ici. »

Enfin, s’il refuse pour l’instant de se projeter trop loin, le Franco-Ontarien ne cache pas son ambition de tutoyer l’élite mondiale.

« Je ne parle pas encore de Ballon d’Or, mais j’ai choisi ce club pour ses grandes ambitions. Je veux progresser et devenir l’un des meilleurs buteurs au monde », affirme celui-ci.

Papineau-Cameron accueille sa première grande compétition de camions lourds

PAPINEAU-CAMERON – La municipalité de Papineau-Cameron, dans le Nord de l’Ontario, accueille de vendredi à dimanche, la toute première édition du Thunder Semi Valley Festival. Courses de camions lourds, ambiance festive, spectacles musicaux et espoirs touristiques : pour les organisateurs comme pour la municipalité, ce tout nouvel événement pourrait bien devenir un moteur économique majeur pour la région.

L’idée est née dans l’élan du Rodéo du camion, événement emblématique du Témiscamingue québécois, qui n’a pas survécu à la pandémie.

« Après sa fin, on n’avait plus de montée en côte dans la région. Gary Anderson, notre patron, a voulu combler ce vide », explique Shelbie Wagner, spécialiste en marketing pour le festival.

« On a repris le style, l’atmosphère et le déroulement du Rodéo, mais on a créé quelque chose de nouveau ici à Papineau », poursuit la francophone. Le festival s’est monté en moins de neuf mois sur l’ancien terrain industriel de Tembeck, devenu le Smoke N Spurs.

Le comité organisateur souhaite refléter l’esprit ultra local du festival : « On est tous de Papineau. On vit à deux ou trois minutes du site. Ce festival, c’est un projet local, monté par et pour la communauté ».

Le cœur de l’événement : des courses de camions lourds en montée, réparties sur trois jours. Parmi les nouveautés, le grudge match, où des participants de différentes classes peuvent s’affronter dans des duels improvisés, « juste pour le fun ».

Mais le Thunder Semi Valley Festival, c’est aussi de la musique. « On aura trois artistes le vendredi et trois le samedi », indique-t-elle. Des groupes musicaux comme The Unknown, Toe Jam Tequila, The Wounded Sons ou encore Ryan Jesse se produiront sur scène vendredi et samedi soir : « On voulait que les gens puissent rester sur le site après les courses, danser, se relaxer, partager. »

Jusqu’à 5000 visiteurs attendus

L’organisation espère accueillir entre 4000 et 5000 personnes dans ce petit canton de moins de 1000 habitants, situé tout près de Mattawa. Pour anticiper l’achalandage, le site offre 1000 emplacements pour les roulottes.

Le maire de Papineau-Cameron, Robert Corriveau, croit fermement au potentiel de l’événement.

« On veut être reconnus comme une place spéciale pour les courses de camions, affirme ce Franco-Ontarien bien connu de la région. Ce genre de festival, c’est bon pour le tourisme, pour faire connaître notre coin, pour stimuler l’économie. »

Papineau-Cameron est l’un des principaux commanditaires, aux côtés de l’entreprise GinCor Werx.

« On s’est aperçu qu’avec ce genre d’événements, il y a même des gens qui finissent par s’installer ici, surtout des retraités qui découvrent la région », déclare celui qui est maire de la municipalité depuis 34 ans.

Une forte empreinte francophone

Dans une région avec une certaine présence francophone, le festival attire naturellement une clientèle bilingue. « À Papineau, je dirais que 90 % des résidents sont francophones. Tous des Bélanger, des Lamothe, des Boulanger! À Cameron c’est plus du 50/50 », lance le maire.

Mme Wagner renchérit : « Plus de la moitié de nos 85 coureurs viennent du Québec. On en a de la Beauce, de l’Abitibi, du Témiscamingue… et même quelques-uns des États-Unis et de Suisse. »

Consciente de cette réalité, l’organisation a mis en place un minimum de services bilingues.

« Les brochures sont en anglais, mais avec un code QR pour accéder à la version française. Moi-même et plusieurs personnes sur place parlons français et les annonces seront dans les deux langues », explique Shelby.

Le maire reconnaît que davantage pourrait être fait dans les prochaines éditions : « C’est une première. On apprend. Mais avec autant de francophones présents, c’est certain qu’il faudra mieux intégrer cette dimension à l’avenir. »

Un pari touristique à long terme

Le Thunder Semi Valley Festival s’ajoute aux efforts de la municipalité pour diversifier son offre touristique. Papineau-Cameron compte déjà une pente de ski, un terrain de golf, des sentiers de VTT… et, depuis l’an dernier, le festival Smoking Spurs, qui mêle compétitions de chevaux, de camions et de VTT dans la boue.

« L’an passé, pour Smoking Spurs, les tablettes des magasins étaient vides dès le samedi matin. C’était plein de campeurs et la ville bougeait, se rappelle M. Corriveau. Ce sera pareil, voire plus gros, avec les camions. »

Avec le soutien de la Fédération canadienne des courses de camions lourds du Québec (FCCLQ), l’événement est déjà inscrit dans une perspective de rendez-vous annuel, chaque début août.

« On veut que ce soit un événement récurrent, une tradition », conclut Shelbie Wagner. Cette année, c’est la première. Mais l’an prochain, ce sera encore meilleur. »

La Cour suprême traduira 24 décisions unilingues sur près de 6 000

OTTAWA — La Cour suprême du Canada (CSC) a annoncé ce mardi avoir entamé la traduction de certaines de ses décisions unilingues les plus importantes rendues avant 1970.

Le Bureau du registraire de la Cour suprême du Canada précise que ce sont 24 décisions qui sont concernées. C’est un comité indépendant qui a établi « les décisions les plus importantes d’un point de vue historique ou jurisprudentiel rendues par la Cour avant 1970 ».

Avant l’adoption de la Loi sur les langues officielles en 1970, le plus haut tribunal au pays n’était pas tenu de publier ses jugements dans les deux langues officielles. Certaines décisions sont donc seulement disponibles dans une seule langue, soit près de 6 000 au total. 

« Cette initiative est entreprise à l’occasion du 150e anniversaire de la Cour suprême du Canada en 2025, année durant laquelle la Cour commémore son histoire et son héritage en tant qu’institution qui défend la primauté du droit, inspire la confiance du public et sert notre communauté », a déclaré la branche administrative de la Cour suprême dans un communiqué.

Les membres du comité chargé d’identifier les décisions unilingues les pertinentes de la Cour suprême du Canada avant 1970 :

  • L’honorable Marshall Rothstein, ancien juge à la CSC
  • L’honorable Clément Gascon, ancien juge à la CSC
  • Teresa Donnelly, présidente de la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada et ancienne trésorière du Barreau de l’Ontario
  • Catherine Claveau, bâtonnière du Québec (jusqu’au 1er juin 2025)
  • Marie-Ève Sylvestre, doyenne et professeure titulaire à la Section de droit civil de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa
  • Yan Campagnolo, vice-doyen et professeur titulaire à la Section de common law de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa
  • Francis Barragan, président-directeur général de l’Institut canadien d’information juridique (CanLII).

Le groupe d’experts a recommandé la traduction de cette vingtaine de décisions dans un rapport rendu en juin. Le comité explique avoir identifié des décisions selon certains critères comme celles les plus citées par la Cour suprême et les tribunaux antérieurs, les décisions les plus citées par les avocats et les décideurs administratifs. Les décisions les plus pertinentes pour l’enseignement du droit et aussi les plus consultées par le public ont aussi été prises en compte.

De ce lot de 24 décisions, 71 % ne le sont qu’en anglais alors que 29 % sont en partie en anglais et en partie en français. Dans son rapport, le Comité « reconnaît que plusieurs autres décisions antérieures à 1970 méritent également une attention particulière et une traduction, mais son mandat se limitait à présenter une courte liste d’environ vingt décisions qui feront l’objet d’une traduction à l’occasion du 150e anniversaire de la CSC ».

Dans son communiqué, le Bureau du registraire soutient avoir entrepris au préalable la traduction de l’affaire Roncarelli c. Duplessis, une décision figurant finalement aussi sur la liste du comité.

« Les autres décisions suivront à mesure que leur traduction sera terminée, donnant ainsi aux Canadiens la possibilité de se renseigner sur des moments importants dans l’histoire juridique du Canada. Ces décisions n’auront toutefois pas un caractère officiel, étant donné qu’elles ne peuvent pas être approuvées par les juges qui les ont rendues, ceux-ci étant tous décédés », indique le Bureau du registraire.

Bataille judiciaire

Même si ce n’est nulle part mentionné dans le communiqué, cette décision survient à la suite de la décision de l’organisme Droits collectifs Québec (DCQ) de poursuivre la Cour suprême pour son refus de traduire l’ensemble de ses décisions antérieures à 1970.

DCQ estime que la Cour suprême a enfreint la Loi sur les langues officielles, car certaines décisions rendues ne sont toujours pas bilingues. L’organisation base sa démarche sur une décision du Commissariat aux langues officielles qui avait conclu, dans un rapport d’enquête, que le plus haut tribunal au pays se devait de traduire ses anciennes décisions.

En réponse à la poursuite judiciaire, la plus haute cour au pays avait annoncé retirer de son site web l’ensemble des décisions antérieures à 1970 qui n’étaient pas bilingues. Le commissaire aux langues officielles Raymond Théberge avait réprouvé cette décision.

« Un festival pour faire rayonner les Caraïbes francophones » à Toronto

Marie-Jennyne Mayard est la fondatrice et directrice générale du Festival Kompa Zouk Ontario (FKZO), le festival franco-caribéen de Toronto. Ancienne présidente des Délégations nationales de la diaspora africaine, elle a notamment siégé au comité d’experts du Conseil des arts de l’Ontario, en parallèle de son rôle de directrice des communications de la maison d’Haïti du Grand Toronto.

C’est du 1er au 4 août que se déroulera le 17e Festival Kompa Zouk à Toronto, qui célèbre la culture créole francophone des Caraïbes. Au programme, diverses activités gratuites, danse, musique et défilé de mode au Centre Harbourfront avec, en point de mire, le 3 août et le grand concert final.

Faire découvrir les cultures francophones des Caraïbes, un enjeu primordial pour la reconnaissance et l’inclusion culturelles. Pour la première fois cette année, le FKZO enverra une délégation officielle dans le grand défilé du festival Caribana Toronto, majoritairement anglophone.

« Est-ce votre héritage haïtien qui a inspiré la création du Festival Kompa Zouk?

Mon implication trouve directement racine dans mon identité haïtienne. La création du festival est née d’une expérience très personnelle. En 2006, à mon arrivée au Canada, j’ai rapidement réalisé à quel point la culture haïtienne était méconnue, voire absente de l’espace culturel.

Chaque fois que je mentionnais que j’étais Haïtienne, on confondait mes origines, pensant que j’étais soit Jamaïcaine, Trinidadienne, ou parfois même ‘Asian’ ou ‘de Tahiti’. Ce manque de reconnaissance m’a beaucoup marquée. C’est de ce choc culturel qu’est née l’idée de créer un événement mettant en lumière la richesse de la culture haïtienne, tout en rassemblant les différentes communautés caribéennes francophones.

Par quoi s’est traduite la genèse de l’événement?

Le FKZO a pris naissance en 2008, avec une volonté claire : célébrer notre musique, notre héritage et notre présence ici… Le kompa, genre musical emblématique d’Haïti – mais aussi très populaire en Martinique et en Guadeloupe – s’est naturellement imposé comme un pilier du festival.

C’est une musique rythmée, dansante et sensuelle, mêlant des influences africaines, latines et caribéennes avec des rythmes cadencés, souvent portés par des batteries, percussions, cuivres et guitares électriques.

J’ai aussi voulu inclure le zouk, qui représente les Antilles françaises, pour favoriser un dialogue culturel et une solidarité caribéenne. Le festival a donc été fondé non seulement pour faire rayonner la culture haïtienne, mais aussi la culture créole francophone en général.

En quoi est-ce important d’avoir cette représentation?

C’est une question de visibilité, de reconnaissance, et surtout de dignité culturelle. Dans l’imaginaire collectif, la ‘Caraïbe’, c’était surtout la Jamaïque, Trinidad, les sons du dancehall, de la soca… Et c’est magnifique, mais ce n’est qu’une partie de notre histoire.

J’avais le sentiment qu’on effaçait une partie de mon identité, comme si elle n’existait pas, ou qu’elle n’avait pas sa place ici. Alors j’ai ressenti un besoin viscéral de créer un espace pour Haïti et pour les Antilles francophones, pour tous ceux qui se reconnaissent dans notre musique, notre langue, nos racines.

Le festival franco-caribéen, ce n’est pas juste un événement culturel : c’est un acte d’amour et de résistance. C’est dire : nous sommes là. Nous avons une histoire. Une culture. Une voix.

Notamment par rapport au festival Caribana, majoritairement anglophone?

Pendant longtemps, on ne se voyait pas dedans. On n’entendait pas notre musique, on ne parlait pas notre créole, on ne dansait pas nos danses. Il manquait ce lien émotionnel, cette reconnaissance culturelle. D’ailleurs, cette année, cela va être un premier pas vers l’inclusion, car DJ TONYMIX sera sur le char allégorique de Toronto Revellers de Jamaal Magloire qui a compris l’importance de l’inclusion.

Créer ce festival, c’était aussi pour les enfants de la diaspora, pour qu’ils puissent grandir en voyant leur culture célébrée, fièrement, sans devoir l’expliquer, la défendre ou la cacher. C’est un espace où on peut être soi-même. Et ça, c’est précieux.

Ces cultures sont-elles proches ou au contraire bien différentes?

Elles sont à la fois très proches… et profondément uniques. Et c’est justement ce qui fait la beauté de la Caraïbe francophone. Nous partageons une langue qui est le français, souvent accompagné d’un créole riche et vibrant, ainsi qu’un passé colonial complexe, marqué par l’esclavage, la résistance, et une quête constante de dignité. Sur ces points-là, on se comprend sans même avoir besoin de beaucoup parler.

Il y a une sensibilité, un rapport au monde, une façon de ressentir la musique, la famille, la foi, la mémoire qui nous relie. Mais en même temps, chaque île, chaque pays a son histoire propre, ses héros, ses luttes, sa culture. Haïti, par exemple, porte en elle une force historique unique : c’est la première République noire indépendante, née d’une révolution. Cela a influencé profondément notre identité, notre rapport à la liberté, à la fierté. 

Ces différences ne nous séparent pas, elles nous enrichissent. Le festival a justement été pensé comme un lieu de rencontre, pas d’uniformisation. On y vient avec nos accents, nos rythmes, nos danses, nos blessures et nos fiertés. Et quand les tambours résonnent, quand le Kompa et le Zouk se croisent, il se passe quelque chose de magique. On se reconnaît. On se respecte. Et surtout, on se célèbre.

Combien de participants attendez-vous pour cette édition? 

Nous espérons accueillir entre 20 et 25 000 personnes. Nous avons vu une belle croissance depuis la COVID-19, autant du côté du public que des artistes et partenaires. Et cette année, avec la programmation que nous avons mise en place, les collaborations communautaires et la visibilité accrue, nous sommes très optimistes.

Ce qui nous touche le plus, c’est la diversité des gens qui viennent : des membres de la communauté indienne, haïtienne, guadeloupéenne, martiniquaise bien sûr, mais aussi des personnes curieuses de découvrir la culture franco-caribéenne, des jeunes de la diaspora, et même des visiteurs d’autres provinces. Notre objectif n’est pas uniquement de remplir un site, mais de créer un espace vivant, inclusif et culturellement riche, où chacun repart avec un bout de la Caraïbe dans le cœur. »

Un premier véhicule de la police provinciale de l’Ontario aux couleurs franco-ontariennes

ORILLIA – Un véhicule de la Police provinciale de l’Ontario (PPO) aux couleurs du drapeau franco-ontarien sillonnera les routes de l’Est et du Nord de la province cet été. Une initiative symbolique lancée pour souligner les 50 ans du drapeau et, jusqu’en 2026, les 40 ans de la Loi sur les services en français (LSF).

Le projet, imaginé par le comité francophone de la PPO, s’inscrit dans une volonté de mieux représenter et célébrer les communautés francophones de l’Ontario.

Le véhicule, un modèle administratif distinctement orné de vert et de blanc, sera déployé dans les zones désignées bilingues et lors d’événements communautaires à travers la province.

« C’est une belle représentation visuelle de notre engagement à servir les communautés franco-ontariennes », explique l’inspectrice Anne-Christine Gauthier, commandante du poste de Hawkesbury. On voulait aussi une présence visible lors des défilés ou des célébrations, et un véhicule attire toujours l’attention. »

Un engagement visuel… et bilingue

Si le véhicule ne servira pas aux interventions policières quotidiennes, il pourra exceptionnellement être utilisé en cas d’urgence. Seuls les agents ou membres civils bilingues sont autorisés à le conduire.

« Le véhicule est équipé d’une radio, donc s’il y a une urgence pendant qu’il est sur place, l’agent peut intervenir temporairement, en attendant qu’un autre officier arrive », précise Mme Gauthier.

Le véhicule était présent au Festival du Loup à Lafontaine le 19 juillet dernier. Source : Pierre Riopel

Les membres de la PPO identifiés comme bilingues pourront également porter une épinglette officielle du drapeau franco-ontarien sur leur uniforme.

Selon les données partagées, la PPO compte environ 520 employés désignés bilingues, policiers et membres civils, sur un effectif total d’environ 10 000 personnes.

Une tournée jusqu’en 2026

Actuellement stationné à Orillia, le véhicule devrait arriver à Sudbury le 25 septembre prochain, pour prendre part aux festivités du 50e anniversaire du drapeau franco-ontarien, notamment au tintamarre prévu dans la ville. Il circulera ensuite dans d’autres communautés désignées bilingues, à commencer par Hawkesbury.

« Il faut faire une demande pour avoir le véhicule, car la logistique est complexe. Mais l’intérêt est là, et on aimerait qu’il soit présent dans toutes les zones bilingues de la province », ajoute la Franco-Ontarienne.

La tournée du véhicule se poursuivra jusqu’en 2026, en hommage aux 40 ans de la Loi sur les services en français (LSF) : « C’est encore en discussion, mais on souhaite que le véhicule prenne part à tous les événements possibles liés à la francophonie d’ici là. »

Anne-Christine Gauthier, inspectrice à la Police provinciale de l’Ontario, souligne l’importance de l’offre active de services en français au sein du corps policier. Photo : gracieuseté de Anne-Christine Gauthier

Un symbole salué

L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) a salué l’initiative de la PPO dans une déclaration transmise aux médias : « Ce geste symbolique, à l’occasion du 50ᵉ anniversaire du drapeau, incarne la fierté, la reconnaissance et la visibilité de la communauté francophone dans toute la province. »

L’organisme souligne aussi « l’importance des services en français et la présence grandissante de policiers bilingues identifiables à leur épinglette du drapeau ».

La PPO, de son côté, insiste sur sa volonté de continuer à développer de telles initiatives.

« Je crois que c’est un bon début, et qu’on aimerait garder ce véhicule au-delà de 2026. Il fait désormais partie de l’histoire de la PPO », conclut Anne-Christine Gauthier.

Une saison délicate pour Vanessa Gilles et Cloé Lacasse

[PARIS 2024, UN AN APRÈS]

Un an après les Jeux olympiques de Paris, ONFR vous propose de revenir sur les souvenirs des athlètes franco‑ontariens et surtout sur leur année après les Jeux. Les deux membres de l’équipe féminine de soccer Vanessa Gilles et Cloé Lacasse ont pour leur part connu des difficultés et toutes deux vécu un changement de clubs.

Les Jeux olympiques de Paris 2024 ne représentent pas un bon souvenir pour l’équipe féminine de soccer canadienne, dans la tourmente avant même le début de la compétition. 

Rappel des faits : le 22 juillet 2024, Joseph Lombardi, un analyste canadien avait été arrêté près d’un terrain à Saint-Étienne pour avoir fait voler un drone espionnant l’entraînement de l’équipe de Nouvelle-Zélande. Deux jours plus tard, Bev Priestman, l’entraîneure-cheffe de l’équipe canadienne, son adjointe Jasmine Mander et l’analyste étaient suspendus puis renvoyés.

L’équipe s’est retrouvée privée de sa sélectionneuse pour la compétition mais a surtout reçu une pénalité de 6 points qui condamnait Vanessa Gilles, Cloé Lacasse et leurs coéquipières à l’exploit. 

Les championnes olympiques en titre devaient absolument remporter leur trois matchs pour espérer se qualifier avec 3 petits points. Après une victoire 2-1 contre la Nouvelle-Zélande en ouverture le 25 juillet et un succès renversant contre la France (2-1) le 28, grâce à un but de Vanessa Gilles au bout de temps additionnel, les Canadiennes l’ont fait! Elles ont battu la Colombie sur le score de 1-0, le 31 juillet, sur un nouveau but de la défenseur ottavienne. 

Malgré ces succès, l’aventure s’est arrêtée en quart de finale avec une défaite aux tirs au but face à l’Allemagne. Un an après, il était encore difficile pour Cloé Lacasse de revenir sur cet épisode. L’attaquante n’a pas souhaité s’exprimer sur ce sujet délicat malgré nos sollicitations. 

Elle était tout de même revenue sur l’expérience vécue par les joueuses canadienne, le 24 septembre dernier dans un entretien exclusif accordé à ONFR

« Je suis très fière de notre groupe, des 22 joueuses qui ont été aux Olympiques parce que, honnêtement, il fallait qu’on gravisse une montagne. Mentalement, on a réussi à atteindre un niveau supérieur. Je ne pense pas que nous étions conscientes qu’on pouvait atteindre ce niveau, car c’est une situation qu’on n’aurait jamais imaginée. C’était vraiment difficile : il y a des joueuses qui ne dormaient pas, qui ne mangeaient pas… On a vraiment dû garder notre groupe très proche. Nous avons dû adopter cette mentalité de ‘nous contre le monde’. »

Vanessa Gilles : des sommets nationaux… à la fracture émotionnelle

Après Paris, Vanessa Gilles est restée en France et a enchaîné une nouvelle saison avec l’Olympique lyonnais (OL). 

Sur le plan national, tout s’est déroulé comme d’habitude. Elle a remporté un nouveau titre de D1 Arkema et la Coupe nationale. Mais la saison a basculé lors de la demi-finale retour de la Ligue des champions, le 27 avril contre Arsenal. Une lourde défaite (4-1, 5-3 cumulés) qui a mis fin aux espoirs de titre européen de la franco-ontarienne venue à l’OL dans ce but.

Cette désillusion a aussi et surtout marqué un tournant personnel pour la joueuse en fin de prêt à Lyon. Désireuse de rester, elle sentait que le club rhodanien n’était pas sur la même longueur d’ondes.

« Pour moi, tout le mois menant au match contre Arsenal, c’était compliqué. Les négociations s’étaient vraiment pas bien passées. Je n’ai pas su voir les signes de stress et d’anxiété, avait-t-elle confié à Radio Canada. Après ce match, j’ai pris conscience à quel point cette année avait été dure émotionnellement, même si ça ne paraissait pas au niveau des performances. Je pouvais quand même performer tous les jours et on gagnait. Je pouvais jouer, je ne me blessais pas, je marquais des buts. Mais au niveau émotif, l’année a été incroyablement stressante.  »

Elle poursuit : « Je pense qu’en tant que joueuse, on doit prendre nos responsabilités et je suis la première à le faire. Surtout contre Arsenal, j’ai été catastrophique. Mais je pense que ça, c’est aussi l’aboutissement de toute une saison. Et quand ça craque, ça craque  », a-t-elle reconnu.

Vanessa Gilles a signé pour trois ans, elle est liée avec le club allemand jusqu’en 2028. Photo : gracieuseté de Vanessa Gilles

Cet épisode signe la triste fin de son aventure à Lyon. Les discussions avec le club pour une prolongation se sont éternisées et n’ont pas abouti. Le 20 mai 2025, elle a finalement rejoint le Bayern Munich, « un club qui vise des titres avec des joueuses parmi les meilleures au monde », mais surtout un club où elle s’est sentie désirée et « valorisée, pas seulement comme joueuse, mais aussi comme personne ». 

Cloé Lacasse : un nouveau départ puis un gros coup d’arrêt 

De son côté, Cloé Lacasse a quitté l’Angleterre et Arsenal dans la foulée des Jeux, après une saison marquée par une forte concurrence. 

« À Arsenal, la situation était particulière parce que toutes les joueuses de l’effectif étaient exceptionnelles, a-t-elle confié à ONFR. J’avais surtout besoin d’un nouveau challenge après dix ans passés en Europe. Je voulais aussi être plus proche de la maison. »

Elle a donc rejoint les Royals de l’Utah en NWSL, une équipe en construction qui occupait la dernière place au classement, mais qui comptait sur son apport sur et en dehors des terrains pour progresser.

Arrivée en août 2024, Cloé Lacasse a réalisé des débuts prometteurs avec les Royals de l’Utah, signant quatre buts en neuf matchs avant sa blessure. Photo : Utah Royals FC

Ses débuts ont été prometteurs : 4 buts en 9 matchs, dont le premier triplé de la saison 2024 de la ligue et de l’histoire du club, ainsi qu’une remontée à la onzième place au classement.

« Je sens qu’on est une équipe qui est en train de grandir. Avant de venir ici, je ne pense pas qu’elles avaient gagné plus de deux matchs, avait confié l’attaquante à ONFR. On en a déjà gagné deux sur les matchs auxquels j’ai participé. Je pense qu’on va dans la bonne direction. On doit encore beaucoup grandir, mais je ne suis pas venue en NWSL juste pour participer, je suis venue pour gagner des trophées. »

Malheureusement, un mois plus tard, tout s’est effondré. Lors d’un match contre Angel City FC, elle s’est blessée gravement au genou : rupture du ligament croisé antérieur (LCA) et entorse du ligament collatéral médial (LCM). Elle est écartée des terrains jusqu’à ce jour. 

L’équipe de l’Utah et la joueuse ont été coupées dans leur élan. Les Royals occupent aujourd’hui la dernière place de la NWSL dans cette saison 2025, avec une seule victoire au compteur en 13 matchs.

Sélection canadienne : une nouvelle ère et des espoirs 

Malgré les difficultés personnelles, l’horizon semble plus dégagé du côté de la sélection nationale. L’arrivée de Casey Stoney à la tête de l’équipe a relancé une dynamique plus exigeante et cohérente.

« Pendant ces dernières années, on a peut-être toléré un niveau d’exigence insuffisant. Il y avait une certaine aisance, une routine, a confié Vanessa Gilles. Casey nous a fait comprendre que c’est tous les jours qu’on construit une Coupe du monde. Aux entraînements, aux réunions, dans nos routines personnelles… La préparation pour 2027 (Coupe du monde) commence maintenant. »

Sauf blessure, la défenseure franco-ontarienne est assurée de faire partie de l’équipe nationale. En tant que pilier de l’arrière-garde canadienne, elle semble indéboulonnable à son poste par son niveau de jeu, son expérience du haut niveau et son leadership dans le vestiaire. 

Pour Cloé Lacasse, le chemin est plus incertain. Sa blessure retarde son retour en sélection, mais la porte reste ouverte. Casey Stoney est encore à la recherche de la bonne formule dans sa ligne d’attaque. Aux côtés d’Adriana Leon, deux places de titulaires sont encore à prendre. Cloé Lacasse a sa chance mais la concurrence est féroce : Jordyn Huitema, Évelyne Viens, Marie-Yasmine Alidou, Nichelle Prince, Jeanine Sonins … ou encore la jeune sensation Olivia Smith, désormais à Arsenal, postulent toutes pour une place.

Un an après Paris, Vanessa Gilles et Cloé Lacasse incarnent chacune à leur manière la complexité de l’après-Jeux. L’une a dû gérer une surcharge émotionnelle malgré des résultats, l’autre a vu son élan stoppé net par une blessure. Mais toutes deux regardent vers l’avenir avec ambition, bien déterminées à retrouver le très haut niveau… en club comme en sélection.

Amazon à Ottawa : espoir ou menace pour les commerces locaux?

OTTAWA – Alors qu’un troisième centre de distribution d’Amazon devrait voir le jour à Ottawa d’ici 2026, les réactions sont partagées. La Ville salue un investissement porteur pour l’emploi et l’économie, alors que des commerçants et experts redoutent ses effets sur les PME locales, la vitalité francophone et le tissu commercial de la région.

« Amazon, ils sont juste là pour vendre. Nous, on est là pour servir nos clients ». Nathalie Savard, propriétaire du Coin du livre, la dernière librairie franco-ontarienne d’Ottawa, ne cache pas son inquiétude.

L’arrivée prochaine d’un nouveau centre de distribution Amazon dans la capitale, approuvée récemment par le conseil municipal, suscite un débat de fond. 

Prévu pour 2026, ce troisième entrepôt d’Amazon dans la région, situé à l’angle des promenades Leikin et Bill Leathem, relance les questions sur l’avenir du commerce de proximité. Bien que les petites entreprises spécialisées — sport, loisir, quincaillerie, etc. — puissent être touchées, elles pourront bien garder leur clientèle, si elles continuent à offrir un service à la clientèle irréprochable, estime Nathalie Savard. 

Pour Nathalie Savard, la relation humaine avec les clients demeure la véritable force des commerces de proximité. Photo : Gracieuseté

« C’est parce que les PME sont les expertes dans leur domaine. Amazon, ce n’est pas leur cas », tranche-t-elle.

« Nos clients ne sont pas des numéros. Je les accompagne personnellement, je m’assure de comprendre leurs besoins. Et ils nous le rendent bien grâce à leur soutien », poursuit Nathalie Savard.

Elle admet toutefois que sa plus grande crainte n’est pas Amazon, mais la flambée des loyers commerciaux. Sa librairie a d’ailleurs dû déménager récemment, son loyer passant de 5100 $ à 9083 $ par mois.

Essoufflement de l’élan citoyen

Carl Poirier, président du Regroupement des gens d’affaires de la capitale nationale (RGA), relaie les préoccupations des PME d’Ottawa-Gatineau.

« Les petites quincailleries, librairies, commerces spécialisés ne peuvent soutenir la concurrence. Malgré les nombreuses campagnes d’achat local, surtout pendant la pandémie, le modèle Amazon continue de croître. Ça traduit un essoufflement de l’élan citoyen en faveur des entreprises d’ici », constate-t-il.

Il déplore également le manque de retombées pour l’économie locale. Selon lui, la vaste majorité des produits vendus par Amazon proviennent des États-Unis, d’Asie ou d’Inde : « Les entreprises canadiennes, et encore moins celles franco-ontariennes, n’en tirent aucun bénéfice ». 

La Ville reste optimiste

Du côté de la mairie, le ton est plus optimiste. Le maire Mark Sutcliffe y voit un signal positif pour l’économie d’Ottawa.

« C’est une marque de confiance envers notre ville et notre main-d’œuvre. Ce nouveau centre ultramoderne d’Amazon représente le plus récent investissement de l’entreprise à Ottawa en tant que pôle régional pour ses activités. Sa construction créera des centaines d’emplois et générera une importante activité économique », assure le maire dans une déclaration à ONFR.

En cours de construction, l’entrepôt, le plus grand d’Amazon au Canada selon un rapport de l’Ottawa Commercial Real Estate, devrait générer des retombées immédiates dans le secteur de la construction. L’annonce de 2000 à 2500 postes suscite un certain espoir chez les chercheurs d’emploi.

Le maire Mark Sutcliffe voit dans l’arrivée d’Amazon un signe de confiance envers l’économie d’Ottawa. Photo : Gracieuseté

« Une fois en service, le centre emploiera des centaines de résidents d’Ottawa dans les domaines de la logistique, des opérations et de la gestion du site », ajoute le maire, en rappelant la volonté de la Ville de « collaborer avec des acteurs majeurs comme Amazon pour créer des emplois et positionner Ottawa comme un chef de file en matière de technologie et de logistique ».

Des retombées limitées

Pour Frédéric Laurin, professeur d’économie à l’Université du Québec à Trois-Rivières, cet enthousiasme est à relativiser.

« Que l’entrepôt soit à Ottawa ou ailleurs, ça ne change rien pour les commerces locaux. Ce qui fait la force d’Amazon, c’est sa notoriété mondiale, ses économies d’échelle, ses prix très bas et un marketing ultra efficace. »

Le véritable enjeu pour les commerçants indépendants, selon lui, est la découvrabilité : « Une boutique locale peut offrir mieux, mais si personne ne la connaît, elle ne fait pas le poids devant la force de frappe d’Amazon. »

Le défi est donc de savoir comment faire en sorte que les consommateurs aient le réflexe d’y aller, plutôt que de cliquer sur Amazon.

Frédéric Laurin, économiste, remet en question les retombées réelles d’Amazon pour l’économie locale et l’innovation. Photo : Gracieuseté

Ce professeur d’économie à l’École de gestion de l’Université du Québec à Trois-Rivières invite ainsi les boutiques à mutualiser leurs efforts pour être plus visibles en ligne : « L’heure est aux algorithmes! Une boutique qui veut survivre doit maîtriser le référencement Internet et les réseaux sociaux. »

Des taxes d’abord

Frédéric Laurin souligne aussi les limites structurelles du modèle Amazon. 

« Ce sont des emplois à faible valeur ajoutée, sans formation avancée. Il n’y a ni innovation, ni recherche, ni réseau de sous-traitants développés. C’est un modèle fermé, très automatisé. »

Le RGA rejoint ce constat. Carl Poirier s’interroge sur la pérennité des emplois annoncés.

« Amazon mise fortement sur l’automatisation. Il est légitime de se demander si ces emplois existeront encore dans 5 ou 10 ans. »

L’avantage immédiat de cette infrastructure de construction qui servira les clients de tout le pays reste fiscal.

« Ce sont les revenus fiscaux pour la municipalité qui en sont la principale retombée locale. Mais si ces fonds ne sont pas réinvestis dans le tissu entrepreneurial local, peut-on vraiment parler de développement durable? », s’interroge-t-il.

Une menace pour la francophonie

Autre sujet d’inquiétude souligné par le RGA : la place du français dans les activités d’Amazon.

« Amazon a récemment fermé ses opérations au Québec, ce qui alimente les doutes sur sa volonté d’offrir des services bilingues ou un environnement de travail francophone à Ottawa », alerte Carl Poirier.

Pour le RGA, l’annonce d’un nouveau centre Amazon à Ottawa peut sembler prometteuse à court terme. Mais à long terme, elle soulève de nombreuses questions : sur la vitalité des PME locales, l’autonomie commerciale, la place du français et le développement durable de la région.

Le mandat de Raymond Théberge à nouveau prolongé

OTTAWA – Le mandat de l’actuel commissaire aux langues officielles Raymond Théberge a été prolongé pour une seconde fois de manière temporaire, en attendant la nomination de son éventuel successeur.

Nommé pour une durée de sept ans en 2018, son mandat officiel avait pris fin en janvier 2025, mais sans remplaçant en place, il avait accepté une prolongation intérimaire de six mois qui prenait fin le 28 juillet. 

Lundi, il a été prolongé à une deuxième reprise dans son rôle de façon temporaire, encore une fois pour six mois, tel qu’il est permis par la Loi sur les langues officielles, a indiqué le Bureau du Conseil privé (BCP), 

« M. Raymond Théberge a été nommé, en date du 29 juillet 2025, commissaire aux langues officielles par intérim pour un mandat de six mois, ou jusqu’à ce qu’un nouveau commissaire soit nommé, selon la première de ces éventualités », a indiqué Daniel Savoie, porte-parole du BCP dans une déclaration.

Sans cette prolongation, le Commissariat aux langues officielles se serait retrouvé sans personne au haut de la pyramide de l’agence chargée de faire respecter les droits linguistiques au fédéral. Raymond Théberge avait déjà indiqué qu’il resterait en poste jusqu’à ce qu’un successeur lui soit trouvé. Cette prolongation l’amènerait à poursuivre ses fonctions jusqu’au maximum, c’est à dire à la fin du mois de janvier 2026.

Le Bureau du Conseil privé est chargé de conseiller le premier ministre et c’est ce dernier qui doit nommer un nouveau commissaire aux langues officielles.

« Le processus de sélection du prochain commissaire aux langues officielles demeure en cours. La gouverneure en conseil (GEC) nomme le commissaire aux langues officielles après approbation par résolution du Sénat et de la Chambre des communes, conformément à la Loi sur les langues officielles. Un nouveau commissaire sera nommé en temps opportun », précise le Bureau du Conseil privé.

Ottawa : le milieu des affaires s’inquiète, le gouvernement défend les compressions

OTTAWA – Près de 25 000 emplois pourraient disparaître d’ici 2028 dans la région d’Ottawa-Gatineau en raison des compressions prévues dans la fonction publique fédérale. Des coupes qui inquiètent le milieu des affaires de la capitale, tandis que le gouvernement affirme vouloir recentrer les dépenses sur les services essentiels et assurer une croissance durable.

Le Regroupement des gens d’affaires de la capitale nationale (RGA) tire la sonnette d’alarme face aux compressions budgétaires annoncées dans la fonction publique fédérale.
Selon une récente étude du Centre canadien de politiques alternatives (CCPA), la région d’Ottawa-Gatineau pourrait être la plus durement touchée au pays, avec près de 25 000 pertes d’emplois d’ici 2028.

Le président du RGA, Carl Poirier, déplore un virage inquiétant du gouvernement Carney : « Le premier ministre parlait de plafonnement et de transferts en campagne électorale. Maintenant élu, son discours change et laisse pressentir une hécatombe aux impacts très sérieux sur la région ».

Le RGA, qui regroupe des entreprises francophones et francophiles de la capitale nationale, craint un gel généralisé des projets économiques.
« Qui va vouloir risquer des capitaux quand la menace bien réelle d’un ralentissement économique est imminente? » questionne M. Poirier.

« Non seulement la région perdra ces emplois, mais les gestionnaires et gens d’affaires vont sûrement mettre tout projet d’embauche, d’ouverture ou d’expansion sur la glace pour les trois prochaines années », affirme-t-il.

Carl Poirier, président du RGA, redoute les impacts économiques des compressions fédérales sur la région d’Ottawa. Photo : gracieuseté

L’étude du CCPA citée par le RGA souligne le fait que les coupes toucheront notamment des ministères névralgiques comme l’Agence du revenu du Canada (ARC), Emploi et Développement social Canada (EDSC) et Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC).
Pour Carl Poirier, ces choix sont révélateurs : « Le gouvernement Carney aurait voulu s’en prendre directement aux entreprises qu’il n’aurait pas agi différemment », déplore-t-il.

Le gouvernement défend un exercice de rigueur

Interrogé par ONFR, le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada affirme que cet exercice vise à recentrer les dépenses publiques sur « les responsabilités essentielles ».

« Chaque ministre doit examiner les programmes de son portefeuille pour évaluer leur efficacité, leur caractère essentiel et éviter les chevauchements », indique-t-on.
Sur une période de trois ans, les ministères devront identifier des économies pouvant aller jusqu’à 15 % de leurs dépenses de fonctionnement, à l’exception de certains organismes jugés stratégiques.
« Cet examen reflète un retour aux responsabilités essentielles, en mettant clairement l’accent sur la discipline financière, la prestation de services de qualité et la croissance économique à long terme », explique la même source.

Ainsi, la Défense nationale, l’Agence des services frontaliers du Canada et la Gendarmerie royale du Canada ne seront soumises qu’à une réduction de 2 %, en reconnaissance de leur rôle critique.

Les compressions s’appliqueront à l’ensemble des organisations financées par le gouvernement fédéral, y compris les sociétés d’État.

Dans ce sens, les questions concernant les activités prévues par ces dernières « peuvent leur être adressées directement », prévient le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada .

En revanche, les agents du Parlement, les tribunaux judiciaires, le Bureau du registraire de la Cour suprême du Canada, de même que les entités indépendantes comme la Chambre des communes ou le Sénat, ne sont pas concernés.
Quant aux organisations à recouvrement de coûts, elles sont exclues de l’exercice, « car le fait de les inclure ne générerait pas d’économies ».
Le gouvernement précise également que les paiements de transfert législatifs aux provinces, territoires et particuliers seront maintenus.

Appel à la mobilisation régionale

Malgré cette volonté affirmée de discipline budgétaire, le RGA presse les élus de la région de se mobiliser.
« Le RGA reconnaît qu’il importe d’assainir la gestion de l’administration publique, mais il demande aux députés de la région de faire pression afin de préserver les services aux entreprises, de manière à mitiger l’impact des coupures annoncées », conclut Carl Poirier.

Le Commissariat aux langues officielles se retrouve sans commissaire

OTTAWA — Il n’y a plus personne à la tête de l’agence chargée de faire respecter les droits linguistiques au fédéral, du moins administrativement parlant, le mandat du commissaire aux langues officielles Raymond Théberge prenant fin.

Le mandat du commissaire actuel Raymond Théberge a officiellement pris fin ce 28 juillet. C’était en fait une nomination intérimaire, car celui-ci, nommé en 2018 pour un mandat de sept ans, devait officiellement quitter en janvier 2025. Mais, au début de l’année, il a été prolongé pour six mois de façon intérimaire, mandat qui a pris fin aujourd’hui. 

Raymond Théberge risque d’être prolongé à nouveau dans les prochains jours pour un autre mandat par intérim, lui qui avait indiqué en janvier qu’il était prêt à rester jusqu’à la nomination de son successeur.

Il ne s’agit pas d’une situation unique qu’il n’y ait personne pour occuper les fonctions pendant quelques jours avant un prolongement d’intérim. En 2017, le poste de commissaire était resté vacant durant quelques jours avant qu’Ottawa ne prolonge à nouveau Ghislaine Saikaley dans le rôle de commissaire aux langues officielles par intérim.

Le gouvernement de Justin Trudeau avait à l’époque jeté son dévolu sur la politicienne franco-ontarienne, Madeleine Meilleur, pour occuper le poste de chien de garde des langues officielles au fédéral. Mais sa nomination avait suscité la controverse, les partis de l’opposition accusant le gouvernement d’une nomination partisane en nommant une ancienne ministre du Parti libéral de l’Ontario. Cette dernière avait alors décidé de retirer sa candidature, forçant le recommencement d’un processus d’embauche, et ainsi le prolongement de Ghislaine Saikaley.

« Le processus de sélection du prochain commissaire aux langues officielles demeure en cours », nous a indiqué un porte-parole du Bureau du Conseil privé (BCP) dans une déclaration.

Le secrétariat du Conseil privé est chargé de conseiller le premier ministre et c’est ce dernier qui doit nommer un nouveau commissaire aux langues officielles.

« La Gouverneure générale en conseil peut nommer un commissaire aux langues officielles par intérim pour un mandat de six mois, ou jusqu’à ce qu’un nouveau commissaire soit nommé, selon la première de ces éventualités. Un nouveau commissaire sera nommé en temps opportun », a soutenu le BCP.

Le bureau de Raymond Théberge nous a simplement indiqué qu’il était en vacances, nous redirigeant vers le BCP pour des questions concernant le processus de sélection de son successeur.

Près d’un an de processus

Cela fait depuis l’automne dernier que le processus pour trouver un remplaçant à Raymond Théberge est en place. La prorogation du Parlement au début de 2025 et la tenue d’élections générales au printemps n’ont laissé qu’un mois au Parlement pour approuver une nouvelle nomination. Le choix de Mark Carney doit être approuvé via une résolution par le Sénat et la Chambre des communes conformément à la Loi sur les langues officielles, ce qui nécessite donc que les deux chambres du Parlement canadien siègent.

Le prochain commissaire pourra bénéficier de nouveaux pouvoirs en vertu de la modernisation de la Loi sur les langues officielles en 2023.

Le Tour de France, une passion discrète mais bien présente chez les francophones d’Ottawa

OTTAWA – Chaque été depuis 1903, le Tour de France fait vibrer des millions de passionnés à travers le monde. Véritable monument du sport international, cette course cycliste de trois semaines s’apprête à connaître son dénouement ce dimanche 27 juillet, après plus de 3000 kilomètres à travers les routes, les cols mythiques et les villages de France. Mais loin de l’Europe, jusqu’à Ottawa, la grande boucle suscite aussi l’attention, parfois silencieuse mais bien réelle, de fervents amateurs francophones.

À 71 ans, Michel Ferland est une figure du cyclisme amateur dans la région. Pratiquant assidu, « je fais encore entre 3000 et 4000 kilomètres par an », dit-il, il suit le Tour de France depuis plus de quarante ans. Ce qu’il apprécie? « La continuité, la stratégie, le courage des coureurs… et le fait que ce soit accessible aujourd’hui avec les services comme FloBikes. » Ce passionné, impliqué dans des clubs locaux et des programmes de formation pour jeunes cyclistes, voit dans le Tour une vitrine essentielle, même au Canada.

Philippe, étudiant à l’Université d’Ottawa, a lui aussi été happé par le Tour, mais d’une manière plus contemporaine : « J’ai découvert le Tour un peu par hasard, dans un magasin de vélo. Il y avait l’écran allumé, j’ai commencé à regarder, et je ne me suis plus arrêté. » Depuis, il suit aussi d’autres grandes courses comme le Giro ou la Vuelta, mais reste fidèle au Tour de France, « la plus grande compétition ».

Un engouement discret, freiné par le décalage horaire

Mais suivre le Tour de France depuis Ottawa n’est pas simple. Entre les horaires matinaux des étapes, souvent entre 8 h et 11 h, heure locale, et la rareté des lieux de diffusion, les fans sont souvent contraints de regarder seuls, à la maison.

« Ce n’est pas comme le soccer ou le hockey. Il n’y a pas de bars sportifs qui diffusent les étapes du matin », observe Philippe. Michel confirme : « Il y a quelques regroupements dans des clubs cyclistes, après des sorties, mais ça reste ponctuel. »

La popularité du Tour reste ainsi circonscrite à un cercle d’initiés, même si l’intérêt semble croître.

« Il y a une évolution, notamment parce qu’on peut plus facilement suivre les courses en direct maintenant », souligne Michel. Philippe, lui, sent un frémissement autour de lui : « Mes proches s’y intéressent davantage, parfois parce que je les ai un peu contaminés! »

Les pros vus comme des modèles… mais lointains

Quand on évoque les cyclistes professionnels, le mot « inspirations » revient souvent. Mais aussi celui de « inaccessibles ». « Les watts qu’ils développent… c’est une autre planète », s’amuse Philippe. Il n’empêche que voir ces athlètes à l’œuvre donne envie de progresser, « d’améliorer ses propres performances, même modestes ». Michel, de son côté, insiste sur l’importance des courses professionnelles comme celles de Montréal et Québec en septembre : « Ce sont de mini-Tour de France chez nous, ça inspire nos jeunes. »

Michael Woods, une fierté locale

Originaire d’Ottawa, Michael Woods est devenu une figure emblématique pour les amateurs de la région. Présent régulièrement sur le Tour, vainqueur d’étape en 2023, il symbolise l’accession du cyclisme canadien à un niveau plus compétitif.

« C’est une très grande fierté de voir le nom de Michael Woods chaque année au Tour de France », souligne Normand Radford, passionné de cyclisme depuis plus de 30 ans. Il nuance toutefois : « Dans mon entourage, c’est partagé. Il y a ceux qui comprennent la passion du vélo et ceux qui ne la comprennent pas du tout. »

Et demain? Le rêve d’un Canadien dans le top 10

Mais que faudrait-il pour qu’un coureur canadien rivalise un jour avec les Pogacar et Vingegaard? Pour Philippe, le frein est structurel : « Il manque des infrastructures, des compétitions amicales, un encadrement. À Ottawa, il y a peu de compétitions de route. Les clubs existent, mais ce n’est pas suffisant pour repérer ou former l’élite. »

Il évoque aussi un manque de reconnaissance culturelle : « En Europe, le vélo est un sport roi. Ici, c’est encore trop perçu comme un loisir. Il faudrait des ponts entre le loisir et le compétitif. »

Michel, de son côté, reste optimiste : « Il y a eu des Canadiens dans plusieurs équipes professionnelles. En voir quatre dans Israel Premier Tech, c’est déjà un accomplissement. Mais pour viser un top 10, il faut un coureur exceptionnel, dans une équipe bâtie autour de lui. Ce n’est pas impossible… mais ce sera long. »

Des bénévoles bâtissent le nouveau visage de Vanier

OTTAWA – Le projet du nouveau Hub Vanier, lancé grâce à une subvention de 188 770 $ de la Fondation Trillium, mobilise étudiants, organismes et citoyens autour d’un même rêve : créer un espace de vie à l’image de la communauté.

À Vanier, quartier historiquement francophone d’Ottawa, un édifice prend forme. Des étudiants en architecture de l’Université Carleton, épaulés par près de 80 bénévoles locaux, travaillent depuis mai à donner vie au nouveau Hub Vanier.

Aménagé sur un ancien terrain de stationnement, il se veut un espace de rassemblement conçu par et pour la communauté.

Cette structure inspirée d’une maison ouverte, sans murs, mais pleine d’âme, devrait être achevée d’ici l’automne, espèrent ses initiateurs.

« Tout est pensé pour donner aux gens l’impression d’être chez eux, dans un lieu chaleureux, où ils peuvent se rassembler », affirme Sonia Xu, étudiante en architecture.

« L’idée centrale, c’est de créer une maison ouverte avec une grande structure ombragée. Le site comprend une cuisine, une salle à manger avec une table de neuf mètres, des barbecues, des sofas, des jeux, un tapis peint au sol », détaille-t-elle. 

Lancé grâce à une subvention de 188 770 $ de la Fondation Trillium, le projet repose sur une approche de co-conception avec les résidents de Vanier.

La maquette du Hub Vanier a été conçue par des étudiants en architecture de l’Université Carleton. Photo : gracieuseté CSC Vanier

Photo : gracieuseté CSC Vanier

Photo : gracieuseté CSC Vanier

Photo : gracieuseté CSC Vanier

Co-création communautaire

« Ce qui rend ce projet unique, c’est l’ampleur de la consultation communautaire. On a ajusté nos plans à partir des suggestions des résidents. C’est rare, en architecture, d’avoir un tel dialogue », observe Sonia Xu. Elle précise que la conception du projet par les étudiants germe depuis deux années et a évolué pour répondre aux besoins de la communauté.

Olive Lazarus, également étudiant en architecture, souligne une « opportunité exceptionnelle » de sortir du cadre théorique des études.

« On construit ce qu’on a imaginé. D’habitude, les architectes ne posent pas les mains sur les matériaux. Ici, on collabore avec les membres de la communauté. C’est une vraie leçon de terrain », témoigne-t-il en pointant du doigt Nel Gatsing, bénévole et résident du quartier.

Les étudiants et bénévoles contribuent à toutes les étapes du projet Hub Vanier, de la conception à la construction. Photo : gracieuseté de L’Action Lab.

« En tant que nouvel arrivant, participer à ce projet m’aide à comprendre comment les choses fonctionnent ici. C’est un geste d’intégration, mais aussi une manière de contribuer », indique de son côté Nel. Arrivé du Cameroun en février, il entamera des études en charpenterie à la rentrée prochaine.

Pour Élise Robertson, directrice des Soutiens et initiatives communautaires au Centre des services communautaires Vanier, le projet va bien au-delà d’un simple chantier.

« Des bénévoles de tous âges participent activement à la construction. Cela renforce leur sentiment d’appartenance », assure-t-elle.

Elle rappelle aussi que les étudiants de l’École d’architecture et d’urbanisme Azrieli de l’Université Carleton, regroupés au sein de l’Action Lab, ont pris en charge une grande partie du projet : recherche de financement, conception des plans, consultations.

Élise Robertson, directrice des Soutiens et initiatives communautaires au Centre Vanier. Photo : gracieuseté

« Ils travaillent bénévolement, soutenus par des professeurs et des fournisseurs locaux, qui ont offert de précieux rabais, notamment sur le bois, sur les structures. Ces jeunes présentent aujourd’hui le projet à des entreprises et acteurs économiques qui souhaitent à leur tour s’y investir », se réjouit-elle.

Créer un axe dynamique

Situé entre le futur centre de recyclage Vélo Vanier, également en développement, et le Centre francophone de Vanier, le Hub s’inscrit dans une vision à long terme de revitalisation.

« On veut créer un axe dynamique qui reflète les cultures du quartier », soutient Élise Robertson.

Dans ce sens, Nathalie Carrier, directrice de la Zone d’amélioration commerciale (ZAC) Vanier note la forte identité du quartier.

« Nous avons la plus grande population autochtone d’Ottawa, la plus importante concentration d’Inuits hors Nunavut, un tissu francophone dense et un fort pourcentage de nouveaux arrivants », explique-t-elle, ajoutant que Vanier est aussi porté par une communauté économique active et diversifiée. 

Nathalie Carrier, directrice de la ZAC Vanier, voit dans le Hub Vanier un moteur de revitalisation pour ce quartier à forte identité francophone et multiculturelle. Photo : gracieuseté

Ainsi, pour la directrice de la ZAC Vanier, ce projet est l’aboutissement d’un travail de longue haleine : « On a commencé il y a sept ans avec des rampes de skate et des activités récréatives ouvertes à tous. Puis on a obtenu du financement, il y a trois ans, de l’Institut urbain du Canada et du gouvernement fédéral. Cela nous a permis d’acheter du matériel, des tentes, du mobilier. Aujourd’hui, le Hub devient un moteur de revitalisation », raconte-t-elle.

Elle insiste sur l’impact culturel et économique du lieu : « On y a présenté des spectacles francophones, des veillées autour du feu, des événements inclusifs. Quand les gens viennent, ils consomment localement, ils redécouvrent le quartier. »

Un chantier ouvert à tous

« Notre fierté, c’est d’avoir aménagé un espace sécuritaire, bilingue et accessible à toutes les cultures. Vanier devient un pôle où les différences se rencontrent, se mélangent et vibrent ensemble », déclare Nathalie Carrier.

Le projet est toujours en construction, et les organisateurs sont à la recherche de bénévoles.

« Toute personne intéressée peut s’inscrire via l’Instagram d’Action Lab. Participer, c’est poser un geste concret pour sa communauté », appelle Élise Robertson.

Les travaux devraient se conclure d’ici l’automne, mais l’esprit du projet, lui, est déjà bien ancré dans le quartier.

Fermeture du magasin Scott’s à Mattawa : « un coup dur pour toute la communauté »

MATTAWA – La fermeture prochaine du magasin Scott’s No Frills, franchisé sous la bannière Giant Tiger, suscite l’inquiétude dans cette petite municipalité du nord de l’Ontario dont les alternatives sont limitées. Le maire Raymond Bélanger et des citoyens mobilisés déplorent une décision corporative qui prive la ville d’un service essentiel.

C’est à travers un communiqué diffusé le 12  juillet dernier, que l’équipe de ce magasin qui offre vêtements à bas prix pour enfants, produits ménagers, articles saisonniers et produits d’épicerie a annoncé la nouvelle.

Les tentatives de la Ville pour obtenir des explications quant à cette décision ont été vaines, les responsables locaux ayant été redirigés vers le siège social de l’entreprise, sans réponse.

Dans une brève communication transmise à ONFR, la direction de Giant Tiger a confirmé que le magasin Scott’s Discount de Mattawa, situé au 328 rue Main, fermera définitivement ses portes le samedi 30 août 2025.

« La décision de fermer l’un de nos magasins n’est jamais prise à la légère. Elle résulte d’une analyse approfondie », précise l’entreprise, ajoutant que la priorité demeure d’« assurer un soutien aux employés et aux clients touchés ».

Les employés du magasin n’ont pas voulu nous donner d’entrevue mais n’ont pas caché leur désarroi devant la situation. Photo : Inès Rebei/ONFR

Les réactions politiques n’ont pas tardé. Le député provincial de Nipissing, Vic Fedeli, ainsi que la députée fédérale Pauline Rochefort se sont dits préoccupés par les répercussions de cette fermeture sur les familles locales, dans une lettre au public diffusée par la municipalité.

« C’est une décision corporative, ils ne nous donnent aucune justification », déplore le maire de cette petite municipalité dont 24 % de la population a le français comme première langue officielle parlée.

« Ils nous disent simplement qu’on peut continuer à acheter leurs produits en ligne ou aller à Deep River ou North Bay. C’est ce que moi j’appelle un dead end. C’est vraiment un coup dur pour toute la communauté », continue M. Bélanger.

Peu d’options à Mattawa

Le magasin Scott’s, présent à Mattawa depuis 20 ans, joue un rôle important dans l’économie locale et dans l’accessibilité à des produits alimentaires à prix réduit.

Dans cette municipalité de moins de 2 000 habitants, l’offre en matière d’épicerie et de produits de base est déjà restreinte.

« La ville risque de devenir un fantôme de ce qu’elle a été. »
— Jean-Jacque DeGatineau

« Il n’y a pas d’autre endroit à Mattawa pour acheter des vêtements. Si ça ferme, c’est fini », affirme Louise Guérin, soulignant l’absence d’alternatives accessibles, en particulier pour les enfants.

« Oui, il y a une belle boutique pour les femmes, mais ce n’est pas des vêtements de tous les jours », ajoute celle qui vit dans la ville depuis toujours.

Rencontrée au détour d’un rayon du magasin, Hélène Moyneur ne cache pas son inquiétude : « On vient toujours ici, au moins quatre fois par semaine, parce que c’est ici qu’on peut avoir les aliments, surtout les fruits et légumes », explique cette résidente retraitée de Mattawa.

Photo : Inès Rebei/ONFR

Elle donne l’exemple des champignons, qu’elle achète pour 1,25 $ au magasin : « Si tu traverses de l’autre bord, ça va être minimum 4 $ pour le même genre. » Les deux seules épiceries de la ville, Foodland et Freshmart, ne suffisent pas à répondre aux besoins, selon celle qui raconte vivre sur une petite pension. « Tout est dispendieux ici. »

Avec la disparition d’un des rares magasins à prix abordable en ville, les habitants risquent d’avoir à parcourir jusqu’à 60 km pour accéder à des épiceries équivalentes, une contrainte difficilement soutenable pour une part significative de la population.

« Les gens qui n’ont pas de voiture, comme les aînés, vont être lourdement pénalisés », craint Mme Guérin.

La fin pour les petites ruralités ?

Pour certains résidents, la fermeture de commerces locaux comme Scott’s est le symptôme d’un mal plus profond.

« Je crois tout simplement que les petites villes rurales vivent leurs derniers jours. La plupart sont endettées, paient des taux d’intérêt élevés », écrit un citoyen préoccupé.

Au-delà de l’alimentation, le magasin était l’un des rares endroits où trouver des vêtements abordables dans la région. Photo : Inès Rebei/ONFR

Selon Jean-Jacque DeGatineau, Mattawa, jadis prospère grâce à ses industries, souffre aujourd’hui des conséquences de mauvaises décisions politiques prises par les conseils municipaux successifs.

« Il n’y a plus rien qui retient les gens d’ici : pas d’emplois, pas d’industrie, pas de production. La ville risque de devenir un fantôme de ce qu’elle a été. L’économie locale dépend désormais presque entièrement de l’écotourisme, note-t-il. Juste assez pour rester à flot. »

Louise Guérin s’inquiète aussi pour les quelque 10 employés, majoritairement des femmes, qui travaillaient à salaire minimum et pour qui peu d’autres options d’emploi existent à Mattawa.

« C’est important d’avoir des magasins où les gens se rencontrent. J’ai peur qu’on perde ce sens de communauté là. »
— Louise Guérin

« Ce n’est pas une petite ville où il y a beaucoup d’emplois. Je ne peux pas m’imaginer ce que ces gens-là vivent. »

Pour les résidents, cette fermeture illustre une réalité plus large : celle d’un effritement du tissu social dans les petites communautés du Nord, confrontées à l’abandon progressif des services de proximité.

« C’est important d’avoir des magasins où les gens se rencontrent. Scott’s, c’était un peu comme un magasin général. J’ai peur qu’on perde ce sens de communauté là », confie encore Mme Guérin en référence à la tendance de l’achat en ligne qui séduit de plus en plus.

Louise Guérin se dit chanceuse d’avoir une voiture et de pouvoir se déplacer pour faire ses provisions dans la région. Photo : gracieuseté de Louise Guérin

Une pétition lancée

Dans les jours qui ont suivi l’annonce, Mike Guay, citoyen et créateur d’une pétition en ligne, a rassemblé 1355 signatures – au moment d’écrire ces lignes – pour tenter de sauver le magasin, révélant l’ampleur du mécontentement local.

L’administration municipale espère maintenant qu’un repreneur potentiel se manifestera pour maintenir un commerce de détail dans les lieux. « On espère qu’une compagnie quelconque va voir qu’il y a une nouvelle opportunité à Mattawa », dit M. Bélanger. « Et puis, on espère que ça se passe plus vite que plus tard. »

Puisque le bâtiment qui abrite le commerce n’appartient pas à Giant Tiger, le maire n’écarte pas que le propriétaire des lieux puisse aussi tenter d’attirer un nouveau locataire pour éviter que l’espace ne reste vacant trop longtemps.

Le conseil municipal encourage les résidents qui ne l’auraient pas encore fait à exprimer leur désaccord directement auprès de Giant Tiger via son site web.

« Il y a de la force dans le nombre », conclut le trésorier municipal, Paul Laperrière.

Le spectacle musical Femme-euses prépare un arrêt à Ottawa

OTTAWA – Le 31 juillet, le Rainbow Bistro d’Ottawa accueillera le spectacle Femme-euses, qui rend hommage aux femmes de l’industrie musicale. ONFR s’est entretenu avec deux membres du collectif, la trompettiste Ianne Allard et la chanteuse Juliette Lefebvre-Tardif, pour expliquer le concept du spectacle et sa genèse.

Percussions, voix, guitares, claviers, cuivres, costumes roses et paillettes… avec une dizaine de musiciens sur scène, tout est en place pour une soirée festive. Les spectateurs peuvent s’attendre à danser et chanter sur des rythmes qu’ils connaissent déjà dans un répertoire large : ABBA, Heart, mais aussi des succès plus contemporains comme ceux de Klô Pelgag ou de Comment Debord. La particularité de Femme-euses, c’est que toutes les chansons ont à la base été écrites, composées ou interprétées par des femmes, ou des groupes qui incluent des femmes.

Au passage, le collectif éduque le public sur des anecdotes souvent méconnues de l’histoire de la musique, comme l’explique Ianne Allard : « Par exemple, c’est une femme qui l’a composée, mais elle s’est battue pour ses droits d’autrice. On aime raconter ces histoires sur scène. »

Femme-euses est un groupe mixte qui met en vedette des chansons populaires de femmes de l’industrie de la musique. Photo : Justine Boucher/@juste_.ju

Juliette Lefebvre-Tardif donne en exemple la bassiste Carol Kaye, qui a joué sur nombre d’albums marquants de l’histoire américaine. La chanteuse de Femme-euses trouve important de faire reconnaître les musiciennes à leur juste valeur.

La trompettiste Ianne Allard abonde dans le même sens : « Les femmes dans les cuivres, c’est assez rare. J’ai tendance à me cacher derrière mes collègues masculins, à moins prendre les devants. »

La musicienne tente de s’en permettre davantage, en se proposant pour faire les arrangements pour le groupe ou en s’octroyant des solos pendant les concerts.

Elle renvoie la balle à sa collègue : « Au Cégep et même maintenant, Juliette était notre chanteuse, mais aussi notre leadeuse. Elle était notre productrice déléguée, notre directrice musicale. Elle connaît tous nos arrangements par cœur. C’est vraiment un atout. »

La place des femmes en musique

Les deux musiciennes croient que l’industrie de la musique a évolué en matière d’égalité des genres. En constatant le reste du chemin à faire, elles préfèrent embarquer dans le train, voire la locomotive.

Selon Ianne Allard, la lutte féministe en musique sera terminée lorsqu’on ne sera plus étonnée de voir une femme à la batterie, ou qu’on ne soulignera plus qu’un prix est gagné par une femme pour la première fois en plusieurs années, par exemple. « Quand on va arrêter de souligner que je suis une femme, je vais être contente. Mais on est encore là, et c’est important. »

Ianne Allard se réapproprie les paillettes grâce à Femme-euses. Photo : Timothé Hétu/@timothe_visuals

L’idée de porter du rose sur scène vient également d’une envie de revaloriser ce qui est considéré comme féminin. Ianne Allard avoue avoir rejeté cette couleur par le passé, et que le fait de mettre une robe à paillettes pour Femme-euses a eu un effet presque cathartique.

Le groupe invite les spectateurs à assister au spectacle habillés en rose, peu importe leur genre.

La genèse

Le projet a démarré autour d’étudiants en musique au Cégep Marie-Victorin, à Montréal. La cohorte de finissants en interprétation devait monter un spectacle de fin de session et l’idée de rendre hommage aux femmes en musique a plu à tous, incluant les étudiants masculins. Les cinq musiciens se sont entourés de connaissances d’autres cohortes pour créer la toute première version de Femme-euses.

« Je me rappelle de ce spectacle. C’était dans une salle assise et tout le monde a fini par se lever, se remémore Ianne Allard. L’ambiance, la scène, la boule disco, les éclairages roses, tout le monde habillé en paillettes… ça a été un de mes spectacles préférés. »

Le spectacle à l’Escogriffe de Montréal a connu un franc succès. Photo : Timothé Hétu/@timothe_visuals

Elle explique qu’à la session suivante, la cohorte a produit un autre concept, mais les gens continuaient de lui parler de Femme-euses. Les jeunes musiciens ont profité de la vague pour présenter leur spectacle au bar l’Escogriffe de Montréal, comme activité de financement pour leur spectacle suivant. Le succès de cette deuxième représentation confirmait qu’il y avait là un filon qui méritait d’être exploité davantage.

La composition du groupe a évolué avec le temps. Le projet scolaire est devenu un projet entre amis musiciens.

Et maintenant…

Lors des spectacles à Montréal, le public était composé en partie d’autres artistes et connaissances des musiciens. Les passages à Ottawa le 31 juillet et à la Foire gourmande de l’Abitibi-Témiscamingue et du Nord-Est ontarien à Ville-Marie (Québec) le 2 août seront nécessairement différents, et de bons tests pour comprendre la viabilité du projet.

Juliette Lefebvre-Tardif travaille à assumer pleinement le titre de « chanteuse », parfois vu comme « juste chanteuse » dans l’imaginaire collectif. Photo : Timothé Hétu/@timothe_visuals

Juliette Lefebvre-Tardif considère que son groupe offre une représentation intéressante : « C’est un beau message d’être un groupe mixte, et que tout le monde soutienne la cause des femmes. »

Niveau logistique, il peut être compliqué de faire de la tournée avec autant de personnes, et encore plus d’en tirer profit. Le groupe s’attend au moins à égaliser les dépenses et les revenus pour cette mini-tournée.

L’envie de poursuivre Femme-euses est tout de même présent. Que ce soit en élaborant des spectacles dans des thèmes ou des styles spécifiques, avec plus ou moins d’animation et de faits historiques dans les chansons, en formule corporative, bar ou festival, « il y a beaucoup de choses qu’on peut faire avec ça », imagine Juliette Lefebvre-Tardif.

Peu importe leur genre, les musiciens de Femme-euses sont heureux de porter le rose et de soutenir la cause des femmes en musique. Photo : Timothé Hétu/@timothe_visuals

Les deux amies croient que la musique et l’esthétique leur permettront d’établir un lien avec le public et ne voient pas d’enjeu avec la barrière de la langue. Elles s’attendent à avoir un public bilingue et à s’exprimer majoritairement en français pendant le spectacle au Rainbow bistro.

« C’est excitant et on part entre amis. Ça reste un petit road trip », exprime Ianne Allard.

L’anxiété financière des jeunes s’intensifie malgré une nouvelle loi ontarienne sur le travail à la demande

TORONTO – Depuis le 1er juillet, la loi de 2022 sur les droits des travailleurs de plateformes numériques, par exemple les chauffeurs ou les coursiers, est en vigueur dans toute la province. Même si elle étoffe certaines protections sur un travail souvent jugé précaire, certains de ces travailleurs multiplient les critiques. En outre, les 18-34 ans demeurent la part prépondérante de cette économie des petits boulots.

Avant de reprendre ses études car il ne gagnait pas assez, Brice Sopher, un Franco-Ontarien ayant grandi à Toronto, a travaillé pour des plateformes de livraison pendant 4 ans.

Par ailleurs, son engagement en tant que vice-président du syndicat Gig Workers United représentant ces travailleurs, n’en était pas moins laborieux.

« Se mobiliser syndicalement était difficile, car les gens étaient fatigués, démoralisés et ne pouvaient pas prendre du temps pour arrêter de travailler », raconte l’ancien coursier.

Déposée il y a quelques années, la loi de 2022 qui œuvre pour les travailleurs de services de covoiturage, de livraison et de messagerie, leur assure aujourd’hui de nouveaux droits, tels qu’un revenu minimum garanti, plus de transparence salariale ou encore un renforcement des mesures de santé et de sécurité.

Néanmoins, la communauté des syndicats s’accorde à dire que ces nouvelles directives négligent une part importante d’un cadre équitable, comparativement à celui d’un employé dit « traditionnel ».

« Cela ne couvre pas le temps d’attente, par exemple le temps qu’ils rentrent d’une course, mais seulement le temps actif. Et il y a des études qui ont montré qu’il s’agit presque de la moitié du temps de quelqu’un qui travaille », affirme Brice Sopher.

Brice Sopher représentait le syndicat Gig Workers United quand il travaillait également pour une plateforme de livraison à Toronto. Photo : Gracieuseté de Brice Sopher

Aissa Nauthoo, la vice-présidente des services juridiques, emploi et établissement du Centre francophone du Grand Toronto (CFGT), affirme que les mêmes droits doivent s’appliquer aux employés couverts par la loi sur les normes d’emploi (LNE) : « La loi doit être universellement appliquée aux acteurs du marché du travail, peu importe le statut, employé, travailleur ou entrepreneur indépendant », appuie-t-elle.

Alors que la seule et unique accréditation syndicale de chauffeurs Uber au pays ait été récemment instaurée en Colombie-Britannique, Brice espère qu’un cadre similaire verra le jour en Ontario.

« Il faut que nos organisations soient reconnues par la Commission des relations de travail de l’Ontario, pour que ça soit légalement officiel et pour pouvoir entretenir des négociations », alerte l’ancien représentant.

Peut-on parler d’une « youth-cession »?

L’année dernière, un rapport a révélé que l’économie des petits boulots reste largement alimentée par les jeunes travailleurs, ce secteur ayant explosé depuis la pandémie. À l’échelle de la province, c’était plus de 80 000 chauffeurs qui étaient actifs sur les plateformes comme Uber et Lyft, selon le site d’informations financières Money.ca.

« Ils ont la vingtaine la plupart du temps. Ce sont des étudiants internationaux » , ajoute M. Sopher.

La semaine dernière, le dernier rapport trimestriel de MNP sur l’endettement des consommateurs a montré que près de la moitié des 18 à 34 ans sont plus susceptibles de subir du stress financier. À l’heure actuelle, « le taux de chômage des Canadiens de 15 à 24 ans s’élève à 14 %, soit le double de la moyenne de la population totale », selon une étude de Indeed Canada.

Les chercheurs et économistes constatent que les jeunes traversent leur propre crise économique en partie due à la querelle commerciale avec les États-Unis qui affaiblit le marché du travail des jeunes, sur lequel les employeurs sont plus réticents à embaucher.

« Le taux de chômage des Canadiens de 15 à 24 ans s’élève à 14 %, soit le double de la moyenne de la population totale. »
— Alexandra Tillo, consultante marketing en ressources humaines chez Indeed Canada

« Si l’on regarde l’historique du taux de chômage des jeunes, ça a toujours été des chiffres plus hauts, et ça empire surtout lorsqu’on se trouve dans une période de taux d’intérêt forts à la suite de l’inflation », explique Rafael Gomez, qui dirige le Centre des relations industrielles et des ressources humaines de l’Université de Toronto.

La loi de 2022 sur les droits des travailleurs de plateformes numériques montre que les droits ne sont pas tout à fait homogènes parmi les travailleurs ontariens. Même si elle marque une étape importante pour les dizaines de milliers de personnes qui gagnent leur pain quotidien grâce à ces applications, ses limites font lumière sur la précarité qui mine la jeune génération.

Avec de plus en plus de travailleurs de plateformes actifs à la fois, le nombre de courses que chaque coursier reçoit continuera de diminuer en même temps que leur revenu. « Sur la fin, je ne gagnais peut-être plus que 6 dollars par heure », déplore Brice Sopher, une des raisons qui l’a découragé.

Les provinces et territoires du Canada « plus unis que jamais », affirme Doug Ford

HUNTSVILLE – Réunis dans la région de Muskoka pour leur rencontre estivale annuelle, les premiers ministres des provinces et territoires ont misé sur le renforcement de l’économie canadienne par la réduction des obstacles au commerce intérieur et à la mobilité de main-d’œuvre. Également au cœur des échanges : immigration, santé, sécurité, feux de forêt, développement de projets d’infrastructures d’intérêt national ou encore commerce international.

En tant que président du Conseil de la fédération, le premier ministre ontarien Doug Ford a reçu les premiers ministres des provinces et territoires du 21 au 23 juillet au Deerhurst Resort, à Huntsville, le cottage country de l’Ontario.

Il s’agissait d’une « occasion de travailler ensemble à des moyens de répondre à la dernière menace du président Trump et de réaliser le plein potentiel de l’économie canadienne », avait déclaré le premier ministre ontarien en amont.

Au terme de la conférence de clôture, en ce mercredi, des thèmes forts se sont imposés, tels que la collaboration interprovinciale.

« Les provinces et territoires du Canada sont plus unis que jamais », s’est d’ailleurs réjoui M. Ford.

Les premiers ministres se sont notamment engagés à ce que leurs gouvernements respectifs réalisent au moins une mission commerciale dans une autre province ou un autre territoire au cours de la prochaine année. Ces missions renforceront les chaînes d’approvisionnement pancanadiennes.

Parmi les mesures qui se profilent :

  • Dépôt de lois visant le commerce intérieur
  • Examen et élimination des exceptions propres à certaines parties dans le cadre de l’Accord de libre-échange canadien (ALEC)
  • Conclusion des négociations visant à ajouter un chapitre sur les services financiers à l’ALEC
  • Élargissement des possibilités de vente de boissons alcoolisées directement aux consommateurs
  • Avancement de la reconnaissance mutuelle
  • Amélioration de la mobilité de la main-d’œuvre.

La conclusion d’un accord de reconnaissance mutuelle complet couvrant les biens de consommation, conformément aux discussions du Comité du commerce intérieur, devrait prendre effet d’ici décembre 2025.

Les premiers ministres des provinces et territoires ont rencontré des dirigeants autochtones à Huntsvile, parmi lesquels l’Assemblée des Premières Nations, le Conseil national des Métis, le Congrès des peuples autochtones, l’Association des femmes autochtones du Canada, la Nation Anishinabek, l’Association des femmes autochtones de l’Ontario, et les Chefs de l’Ontario (OOO). Photo : Conseil de la fédération

De gauche à droite : les premiers ministres R.J. Simpson (Territoires du
Nord-Ouest), P.J. Akeeagok (Nunavut), Wab Kinew (Manitoba), Susan Holt (Nouveau-Brunswick), François Legault (Québec), Doug Ford (Ontario), Rob Lantz (Île-du-Prince-Édouard), Danielle Smith (Alberta), Tim Houston (Nouvelle-Écosse), Scott Moe (Saskatchewan), Mike Pemberton (Yukon) et David Eby (Colombie-Britannique). Photo : Conseil de la fédération

Les premiers ministres en salle de réunion. Photo : Conseil de la fédération

Le premier ministre du Québec François Legault et le premier ministre de l’Ontario Doug Ford en conférence de presse. Photo : Conseil de la fédération

De gauche à droite : le premier ministre de l’Ontario Doug Ford, le premier ministre du Manitoba Wab Kinew, et le premier ministre de la Saskatchewan Scott Moe. Photo : Conseil de la fédération

Plusieurs annonces ont émané de rencontres individuelles, comme la signature d’accords de libre-échange entre l’Ontario, la Colombie-Britannique et les Territoires du Nord-Ouest, le Nunavut et le Yukon.

La Saskatchewan a également rejoint à l’accord pour un corridor est-ouest entre l’Ontario et l’Alberta sur la construction de grands projets d’infrastructures comme les pipelines ou les voies ferrées pour transporter les minéraux critiques de l’Ontario et le pétrole et le gaz de l’Ouest canadien.

« Le protocole d’entente d’aujourd’hui prévoit que les nouveaux pipelines seront construits avec de l’acier de l’Ontario le long d’un tracé qui amènera le pétrole et le gaz de l’Ouest canadien à des raffineries nouvelles et existantes dans le sud de l’Ontario, ainsi qu’à un nouveau port en eau profonde dans la Baie James », expliquait un communiqué de presse.

Immigration et sécurité publique : les premiers ministres réclament des actions concrètes d’Ottawa

Les premiers ministres provinciaux et territoriaux demandent au gouvernement fédéral de rétablir les quotas du Programme des candidats des provinces et des territoires (PCPT), réduits de 50 %, et d’augmenter leur part dans l’immigration économique. Ils souhaitent également une collaboration accrue sur la question des étudiants internationaux, en veillant à ce que l’accès au permis de travail postdiplôme reflète les besoins des marchés locaux.

Concernant les demandes d’asile, ils appellent Ottawa à accélérer les traitements et à permettre aux demandeurs acceptés de s’intégrer pleinement à la société. S’ils saluent l’intention du projet de loi C-2 visant une meilleure gestion du système, ils exigent d’être pleinement impliqués dans toute réforme.

Sur le plan de la sécurité publique, les premiers ministres insistent pour que le gouvernement fédéral réforme en profondeur le système de mise en liberté sous caution en modifiant le Code criminel. Ils appellent à des efforts conjoints pour réduire les récidives et la violence, en s’attaquant aussi aux causes systémiques comme la pauvreté, les dépendances ou les troubles de santé mentale. Ils demandent enfin une révision de l’évaluation du risque dans les cas de délinquants sexuels récidivistes, de violence conjugale et de crimes fondés sur le genre.

Le premier ministre de l’Île-du-Prince-Édouard, Rob Lantz, prendra le relai du mandat de président du Conseil de la fédération dès le 1er août 2025. C’est donc à l’Île-du-Prince-Édouard que se déroulera la prochaine rencontre estivale des premiers ministres des provinces et territoires, du 21 au 23 juillet 2026.

Une Sudburoise devient la première femme responsable du sauvetage minier de l’Ontario

KIRKLAND LAKE – Originaire de Chelmsford, dans le Grand Sudbury, April Belecque devient la première femme responsable du sauvetage minier de la province. Une nomination historique dans un milieu où les femmes sont encore rares, surtout à des postes de direction.

Lorsqu’elle a appris sa nomination, April Belecque avoue avoir été surprise : « C’était un poste très recherché, et je savais qu’il y avait d’autres candidats avec plus d’expérience. »

Celle-ci a été promue dans le district de Kirkland Lake, mais devient la seule femme à occuper ce poste au sein de l’organisme qui supervise les opérations de sauvetage minier à l’échelle de la province depuis 1929. Il compte également une quinzaine d’autres agents et quelques 900 bénévoles.

Aux yeux de celle qui a fait des études en géologie avant de se tourner vers le secteur minier, ce choix envoie un signal important.

« Ce n’est pas parce que je suis une femme que j’ai été choisie. Mais c’est une bonne représentation de nos volontaires, car il y a déjà des femmes parmi eux. C’est logique d’avoir aussi une femme dans un poste de direction. »

April Belecque donnant des instructions aux bénévoles d’Agnico Eagle Mine Rescue. Photo : gracieuseté d’Ontario Mine Rescue

Celles qui travaillent sous terre ou qui participent aux équipes de sauvetage minier demeurent encore très peu nombreuses, une réalité qu’April Belecque observe elle-même sur le terrain : « J’espère que ça encouragera d’autres femmes. Je ne suis pas une fille ultra sportive ou très girly, je suis entre les deux. Et ça montre que ce métier est accessible à toutes. »

Les femmes représentent actuellement environ 15 % de la main-d’œuvre dans le secteur minier au Canada. Parmi elles, la majorité occupent encore des postes en ressources humaines, en administration ou en finance.

De plus en plus de femmes commencent dans le secteur mais quittent tôt, dit constater la jeune maman, notamment à cause des contraintes du travail en région éloignée et de la conciliation famille-travail.

Mme Belecque est mère de deux enfants en bas âge. Gracieuseté d’Ontario Mine Rescue

Culture de solidarité

Le poste de responsable du sauvetage minier est crucial dans le fonctionnement du Sauvetage minier ontarien, un réseau coordonné par Workplace Safety North et chargé d’intervenir lors de situations d’urgence dans les mines : incendies, effondrements, sauvetages en espaces clos, incidents chimiques, ou encore sinistres souterrains.

En tant qu’agente responsable du district de Kirkland Lake, April Belecque supervise l’entraînement de dizaines de secouristes, veille à leur préparation en tout temps, et joue un rôle clé lors d’interventions d’envergure.

Et si elle devait résumer les qualités nécessaires dans son métier? « Le travail d’équipe. Savoir collaborer, écouter, apprendre. Et vouloir aider, même quand on ne sait pas encore comment. »

Ce désir d’aider remonte à ses débuts dans l’industrie : « J’ai tout de suite aimé l’ambiance familiale. On se connaît tous. C’est un milieu tissé serré, où on veut prendre soin les uns des autres. »

Une culture qu’elle relie directement à ses racines nord-ontariennes : « J’ai grandi à Chelmsford, étudié à Sudbury, puis j’ai travaillé à Red Lake, à Kirkland Lake… toujours dans des petites villes. Ça m’a appris à compter sur les gens autour de moi. Et le sauvetage minier, c’est exactement ça. »

April Belecque a été bénévole pendant dix ans avant d’obtenir ce poste. Photo : gracieuseté d’Ontario Mine Rescue

Un secteur en évolution

Au fil des années, celle qui compte 15 années d’expérience dans le secteur minier a vu l’industrie évoluer. « Il y a une volonté d’éloigner les gens des dangers. On utilise de plus en plus d’équipements contrôlés à distance, pour limiter les contacts directs avec les machines lourdes. C’est une grande avancée pour la sécurité. »

Selon April Belecque, le district de sauvetage minier du Nord-Est est en pleine expansion, avec des mines existantes qui prennent de l’ampleur et de nouveaux projets en développement.

Cette croissance entraîne un besoin accru de volontaires, et par conséquent, une hausse de la demande en formation spécialisée.

En outre, le rôle d’agent de sauvetage s’est élargi tout comme les possibilités de recrutement des bénévoles : « On développe maintenant des formations pour les urgences en surface, les incendies, les matières dangereuses… Ça nous permet d’atteindre des profils différents, qu’on ne ciblait pas avant. »

Surf Bay, côte Ouest : une première série de fiction francophone en Colombie-Britannique

Le tournage de la série Surf Bay, côte Ouest s’est terminé dans les dernières semaines en Colombie-Britannique. Cette première collaboration entre UNIS TV et Bell Média se présente aussi comme la première série de fiction francophone à être tournée dans la province la plus à l’ouest du Canada. ONFR a discuté avec le réalisateur franco-ontarien Dominic Desjardins et deux des comédiennes, Camille Felton et Mia Wistaff.

Dans la ville côtière fictive de Surf Bay, la surfeuse Margot Swann (Camille Felton) pourrait devoir choisir entre ses ambitions olympiques et ses convictions écologiques, alors que l’industrie touristique menace une forêt centenaire de sa communauté.

« Elle va se mettre à faire des actions écolos sans nécessairement penser aux impacts que ça peut avoir sur sa carrière. Ça va aussi jouer dans ses liens d’amitié ou avec son entraîneuse », explique la comédienne principale.

Le groupe de jeunes de Surf Bay, incarné par Karl Walcott, Mia Wistaff, Henri Picard, Camille Felton et Tony Hiu Joong Giroux. Photo : UNIS TV

Dominic Desjardins exprime le fait que l’océan et la forêt ont été traités comme « deux planètes ». L’eau est l’élément naturel de Margot, mais elle découvrira aussi l’importance de la terre.

Pour stimuler ce lien avec la nature, le réalisateur a voulu placer les acteurs en immersion dans ces deux mondes, ce qui a mené l’équipe à tourner dans des conditions ambitieuses, incluant des cascades, des scènes de nuit ou des dialogues en plein dans les vagues.

« Une des choses qui était très ambitieuses, c’était d’amener nos actrices dans l’océan. »
— Dominic Desjardins

Surf Bay proposera en effet des scènes où Margot et sa meilleure amie Zoélie (Mia Wistaff) s’entraînent et discutent assises sur des planches de surf professionnelles, qui sont minces et difficiles à maîtriser. Les prouesses sportives ont été tournées avec des doublures, mais les actrices ont passé deux journées de tournage directement dans l’océan.

« On s’amusait comme des petits poissons dans l’eau », lance Camille Felton en se remémorant des moments intenses, après une semaine d’entraînement alors qu’elle n’avait jamais surfé de sa vie. La comédienne a dû composer avec le mal de mer, mais finalement, « il a fait tellement beau, la mer était belle et on a tout donné. (…) Ça change tout, que les acteurs soient dans l’eau. On y croit encore plus. »

Mia Wistaff explique qu’elle avait une certaine expérience en surf, mais seulement sur des planches longues. « Je surfe comme une touriste, je suis loin de pouvoir me faire passer pour une surfeuse professionnelle, mais je suis hyper à l’aise dans l’eau », raconte celle qui espérait décrocher le rôle de Zoélie pour cette raison.  

« C’était vraiment un défi, mais tellement satisfaisant d’arriver au bout de ça et de dire : ‘yes, on a vraiment un show de surf’ », se réjouit Dominic Desjardins.

Amies et rivales

Camille Felton décrit Margot comme intense, impulsive, sensible et passionnée. « Il y a une énorme courbe narrative à ce personnage. »

Dans les 10 épisodes de 23 minutes, Margot et Zoélie partagent une profonde amitié, mais aussi une quête de soi propre au passage à l’âge adulte qui crée une rivalité certaine.

Mia Wistaff (à gauche) et Camille Felton (à droite) ont eu un coup de coeur mutuel lors des tournages de Surf Bay, côte Ouest. Photo : UNIS TV

Au début de la série, Zoélie revient à Surf Bay après des études à Vancouver. Celle qui s’est souvent définie par les autres (l’amie de Margot, la blonde de Noah…) devra trouver sa propre personnalité. Mia Wistaff apprécie ce « quelque chose de Zoélie qui est très commun. »

Dominic Desjardins croit que le type de relation entre les deux surfeuses n’est pas souvent exploité à la télévision. Pour trouver le bon ton, l’équipe derrière Surf Bay a interviewé les sœurs Sanoa et Mathea Olin, deux championnes de surf originaires de Tofino. Dominic cite une phrase de Mathea qui représente aussi la relation entre Margot et Zoélie : « La personne que je veux battre le plus en compétition, c’est (elle). Je sais par contre que si elle n’avait pas été là, je ne serais pas rendue où je suis. »

Une fiction en milieu minoritaire

Si les paysages de l’île de Vancouver sont particulièrement mis de l’avant, la réalité sociale de ce coin de pays n’est pas écartée. Les personnages principaux sont francophones, mais ils vivent dans la ville anglophone de Surf Bay, située dans la région de Tofino.

Dominic Desjardins spécifie : « Ça représente bien la réalité d’ici. Tout à coup, il y a une scène en anglais, après il y en a une en français. Les personnages s’expriment parfois en anglais quand ils parlent à la foule. »

Une partie de la distribution de Surf Bay, côte Ouest. De gauche à droite et de haut en bas : Mia Wistaff, Henri Picard, Camille Felton, Karl Walcott, Jessica Heafey, France Perras, Tony Hiu Joong Giroux et Émilie Leclerc. Photo : UNIS TV

Mia Wistaff aime ce bilinguisme qui transparaît dans la série. « Des fois, on parle beaucoup de ce face-à-face entre la francophonie et les anglophones. Ce que j’aime de Surf Bay, c’est que c’est vraiment juste un village, une réalité où il y a les deux et c’est correct. Ce n’est pas obligé d’être un gros enjeu. »

Originaire de Montréal, l’interprète de Zoélie a déménagé à Vancouver il y a un an, après un passage à Victoria pour ses études en Théâtre musical. « Je suis encore en train de réaliser ce que ça veut dire d’être dans cette industrie et de partager mon temps entre Montréal et Vancouver. »

« Quand tu annonces que tu vas faire un projet en français, tout à coup se révèlent des francophones invisibles. »
— Dominic Desjardins

Dominic Desjardins estime à 50 % le nombre de francophones dans le total de la production, incluant plusieurs chefs de départements. « Quand tu annonces que tu vas faire un projet en français, tout à coup se révèlent des francophones invisibles. Ce sont des gens qui sont ici depuis longtemps, qui travaillent juste en anglais, mais qui sont francophones. »

Selon Camille Felton, l’expérience de travailler dans l’Ouest a permis aux acteurs québécois de s’ouvrir à la francophonie canadienne. Elle parle déjà de collaborer à nouveau avec certaines personnes.  « Ça nous a tellement nourris de rencontrer de nouveaux acteurs, de découvrir une nouvelle industrie et de nouvelles personnes, autant devant que derrière la caméra. »

Aller plus loin

Dominic Desjardins croit s’être dépassé comme réalisateur. « Dans tout ce que j’ai fait, c’est la série où on est allés le plus loin au niveau du jeu avec les acteurs. »

Pour lui, il était important que la série en soit une d’action, que ce soit au niveau du surf ou de l’écologie. « On ne voulait pas que les actions écolos soient un concept intellectuel. »

Le réalisateur franco-torontois Dominic Desjardins. Photo : UNIS TV

Habituée des caméras depuis l’enfance, Camille Felton parle de Surf Bay comme de son « plus gros projet en 20 ans de carrière. »

L’interprète de Margot croit que la série s’écoutera bien en rafale. Le titre Surf Bay, Côte Ouest laisse d’ailleurs présager une certaine ambiance « très cool, très hip » à l’américaine, que Mia Wistaff a hâte de partager avec le public.

Dominic Desjardins croit « que ce sera quelque chose d’unique. On a monté la barre à tous les niveaux, mais il y a quelque chose, culturellement et au niveau du cœur qui va se distinguer de tout ce qui se fait aux États-Unis et au Québec. C’est une première en francophonie ».

Surf Bay, Côte Ouest sera diffusée sur TV5UNIS au printemps 2026, puis sur Crave en 2027. La série est coproduite par Reign Films et Locomotive Média.

Deux nouveaux baccalauréats en éducation à l’UOF, dont une formation accélérée d’ici 2026

TORONTO – Double nouvelle pour l’Université de l’Ontario français (UOF) qui lancera deux nouveaux programmes en éducation : un premier baccalauréat pour l’enseignement au secondaire dès 2025, ainsi qu’une formation accélérée combinant baccalauréat général et baccalauréat en éducation en quatre ans au lieu de six, dès 2026 – une première en français en Ontario.

Quelques semaines après sa première cérémonie de remise de diplômes, l’UOF annonce l’ajout progressif de deux nouveaux programmes de formation en enseignement.

En plus de l’actuel baccalauréat en Éducation pour l’élémentaire s’ajoutera pour la première fois un autre pour l’enseignement du français au secondaire, de la 7e à la 12e année, disponible dès septembre 2025.

L’UOF, qui avait reçu le consentement ministériel en mai dernier, vient finalement de recevoir l’agrément la veille pour l’ajout de 80 places en plus pour former des enseignants de français pour le secondaire.

Autre nouvelle d’envergure pour l’établissement postsecondaire, la création d’un baccalauréat en Éducation en formation accélérée de quatre ans au lieu de six, destiné aux finissants du secondaire qui entreront ainsi deux années plus tôt sur le marché du travail.

Il s’agira d’un baccalauréat général combiné au baccalauréat en Éducation. 40 places ouvriront ainsi à la rentrée 2026.

« Ce parcours accéléré implique un rythme plus soutenu avec une plus grande densité de cours, des temps de vacances plus resserrés et des cours d’été, ce qui permet de gagner deux ans », explique au micro d’ONFR le recteur et vice-chancelier de l’UOF Normand Labrie.

Depuis la demande de l’UOF en ce sens, le gouvernement a déjà donné son intention d’y consentir.

« Il reste des conditions à remplir d’ici le mois d’août prochain, et, sous couvert de l’autorisation ministérielle à venir, les cours pourront démarrer en 2026. En français, ça n’existe nulle part ailleurs en Ontario, ce sera la première université à faire ça », a-t-il ajouté.

« Les récents appuis de l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario (OEEO) et du ministère des Collèges et Universités, de l’Excellence en Recherche et de la Sécurité (MCUERS) constituent un signal fort, qui nous encourage dans nos démarches. Ils s’alignent parfaitement avec notre mission d’offrir une éducation universitaire francophone à l’intention des futurs professionnels dans des secteurs d’emploi faisant face à des pénuries », a déclaré Normand Labrie dans un communiqué annonçant les deux nouveautés.

Santé : Ottawa allonge 78 millions $ pour des soins en français en milieu minoritaire

MONCTON – Le gouvernement fédéral a annoncé mardi un financement de 78 millions de dollars sur cinq ans pour améliorer l’accès et la formation à des soins de santé en français dans les communautés francophones minoritaires au pays.

La ministre de la Santé Marjorie Michel en a fait l’annonce à l’Université de Moncton au Nouveau-Brunswick, ce mardi matin. Le financement sera divisé en trois volets. 

37 millions de dollars iront à la Société Santé en français dans le cadre d’un projet qui permettra de déployer des activités de réseautage en santé en partenariat avec ses 16 réseaux, pour accentuer l’accès aux services de santé pour les communautés francophones en situation minoritaire à l’échelle nationale.

Il soutiendra également l’innovation en favorisant l’intégration des professionnels de la santé bilingues et l’adaptation des services de santé existants pour mieux desservir les francophones hors du Québec.

9 millions de dollars seront alloués à l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC) pour améliorer l’accès aux programmes de santé dans les établissements postsecondaires francophones, ainsi que le recrutement et la formation dans ces programmes, notamment via des stages dans les communautés francophones.

Finalement, 32 millions de dollars seront partagés entre cinq établissements francophones en Atlantique, dont 14 millions, à l’Université de Moncton pour accroître la formation de professionnels de la santé comme en médecine et en sciences infirmières dans la région.

« Ces investissements vont soutenir des projets novateurs et permettront vraiment de former des professionnels de la santé bilingue dont on a besoin », a affirmé la ministre de la Santé Marjorie Michel en conférence de presse.

Pour le recteur de l’Université de Moncton, Denis Prud’homme, ce financement permettra notamment de faire face aux défis d’attirer et de retenir des infirmières francophones en milieu minoritaire.

« On connait les défis de recruter dans le domaine, affirme celui qui est aussi l’ancien directeur scientifique de l’Institut du Savoir Montfort. On a également besoin de ce financement là comme je l’ai mentionné pour être en mesure d’augmenter les effectifs dans nos différents programmes, pour aller chercher davantage de professeurs, davantage de chargés d’enseignement », énumère-t-il

Cette annonce fédérale a été effectuée dans le cadre du Programme pour les langues officielles en santé. En 2023, Ottawa avait réservé un total de 206,7 millions de dollars sur cinq ans en financement pour les programmes de santé en français.

L’Ontario signe le libre-échange avec la Colombie-Britannique et les trois territoires canadiens

HUNTSVILLE – La Colombie-Britannique, le Yukon, le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest s’ajoutent à la liste des provinces et territoires partenaires commerciaux de l’Ontario, au nombre de dix. Des signatures en marge de la rencontre estivale 2025 des premiers ministres des provinces et territoires, du 21 au 23 juillet au Deerhurst Resort à Huntsville en Ontario.

Dans la lignée des derniers protocoles visant à éliminer les barrières commerciales signés en juin avec l’Alberta, la Saskatchewan et l’Île-du-Prince-Édouard, et en avril avec le Manitoba, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick, c’est maintenant au tour de la Colombie-Britannique et des trois territoires canadiens de s’entendre avec l’Ontario.

Doug Ford s’est aujourd’hui entretenu avec le premier ministre de la Colombie-Britannique David Eby, le premier ministre du Yukon Mike Pemberton, le premier ministre des Territoires du Nord-Ouest R.J. Simpson et le premier ministre du Nunavut P.J. Akeeagok pour signer de nouveaux accords pour dynamiser le commerce intérieur, améliorer la mobilité de la main-d’œuvre et abattre les barrières interprovinciales.

« Étant donné les menaces continues du président Trump à l’encontre de notre économie, c’est le moment ou jamais (…) nous aidons le Canada à débloquer jusqu’à 200 milliards de dollars en potentiel économique et faisons bloc pour protéger les travailleurs canadiens partout au pays », a de nouveau martelé le premier ministre ontarien.

Entre autres mesures communes : l’élimination des formalités administratives, la réduction des coûts des entreprises et l’ouverture de nouveaux débouchés pour la libre circulation des travailleurs qualifiés.

Doug Ford, le premier ministre ontarien, et David Eby, le premier ministre de la Colombie-Britannique. Photo : compte X officiel de Doug Ford

« Plus de la moitié de la population du pays est concentrée dans nos deux provinces. Cet accord est la pierre angulaire d’une économie canadienne unique », a noté David Eby, le premier ministre de la Colombie-Britannique.

Mike Pemberton, le premier ministre du Yukon, a déclaré qu’en mettant les efforts en commun « nous aidons à faire en sorte que les territoires, dont le Yukon, puissent participer et contribuer pleinement à l’économie du Canada ». 

« Pour que le Nord atteigne tout son potentiel économique, nous devons réduire les obstacles qui nuisent à la communication de nos gens et de nos entreprises avec le reste du pays », a relevé le premier ministre des Territoires du Nord-Ouest R.J. Simpson, tandis que le premier ministre du Nunavut P.J. Akeeagok a affirmé sa volonté de faire du Nunavut « un acteur plus connecté et plus concurrentiel dans l’économie du Canada. »

En juin dernier, le gouvernement ontarien avait adopté la Loi de 2025 pour protéger l’Ontario en favorisant le libre-échange au Canada, visant à supprimer les barrières interprovinciales en libérant le libre-échange et la mobilité de la main-d’œuvre au sein du Canada.

Cette nouvelle législation inclut la suppression de toutes les exceptions spécifiques aux parties à l’Accord de libre-échange canadien (ALEC).

Hausse de 288 % des surdoses dans les centres d’accueil, selon une étude

TORONTO – Les députées de l’opposition officielle France Gélinas et Dre Robin Lennox tirent la sonnette d’alarme suite à la publication d’un rapport du Toronto Drop-In Network (TDIN) qui met en lumière une hausse de 288 % des surdoses ce mois de juin, par rapport à la même période l’année dernière. Cette hausse survient après la fermeture de neuf sites de consommation supervisée (SCS), à l’instigation du gouvernement ontarien.

La porte-parole du NPD pour la santé mentale et les dépendances, Dre Robin Lennox (Hamilton-Centre), et la porte-parole de l’opposition pour la santé, France Gélinas (Nickel Belt) ont réagi aux chiffres alarmants de 288 % de hausse des surdoses à Toronto depuis la fermeture de quatre centres torontois.

Documentée par le Toronto Drop-In Network (TDIN), réseau de centres d’accueil torontois, l’analyse est fondée sur les rapports mensuels envoyés par les centres membres du TDIN, qui gèrent 56 structures.

« Au cours des trois mois qui ont suivi ces fermetures, nous avons observé une hausse dévastatrice des surdoses dans notre réseau. En avril, les centres d’accueil ont enregistré une augmentation de 75 % des surdoses. En mai, cette hausse a atteint 175 %, et en juin, elle s’est élevée à 288 %. Cette montée en flèche est extrêmement préoccupante et ne peut être ignorée », a alarmé l’organisation dans un communiqué.

Ces chiffres torontois ne permettent toutefois pas de prendre la mesure du phénomène à l’échelle de l’Ontario, puisqu’en tout, ce sont neuf SCS qui ont déjà fermé.

« Les surdoses augmentent rapidement en l’absence de services de consommation supervisée qui sauvent des vies, a déclaré Dre Lennox. Les centres d’accueil font tout ce qu’ils peuvent, mais ils n’ont jamais été conçus pour remplacer les services de prévention des surdoses. Et pendant que le gouvernement Ford les démantelait, les « HART hubs » qui étaient censés les remplacer restaient incomplets et incapables d’offrir les services dont les gens ont besoin. »

« Dans ma communauté (Nord de l’Ontario), nous perdons deux à trois personnes chaque semaine à cause des surdoses. Ce sont nos mères, nos frères, nos filles, nos voisins et nos amis, s’est désolée France Gélinas. Ce n’est pas seulement un enjeu social, c’est une urgence de santé publique. Ces sites offrent des services et traitements qui sauvent des vies. La consommation de substances doit être reconnue et traitée comme une crise sanitaire, nécessitant une réponse en santé fondée sur des preuves médicales, des soins coordonnés et de l’empathie. »

La députée de Hamilton-Centre observe les conséquences des surdoses, même non mortelles, qui entrainent « de graves complications neurologiques quand l’aide arrive trop tard », et augmentent le risque de décès par la suite.

« Ce gouvernement échoue sur toute la ligne, tranche la députée de Nickel Belt. Que ce soit en matière de prévention, de traitement ou d’intervention d’urgence rapide, il laisse tomber la population de cette province. »

Selon le TDIN, sans l’inclusion de services de réduction des méfaits et de soutien aux infrastructures, « nous continuerons de voir une augmentation tragique des surdoses et des décès liés aux surdoses dans les centres d’accueil et dans l’ensemble de la communauté ».

Le Bluesfest et la place des femmes francophones dans l’industrie musicale

OTTAWA – Le Bluesfest 2025 se termine ce dimanche dans la capitale fédérale. Cette année, en plus des grandes têtes d’affiche, les organisateurs ont misé sur une panoplie d’artistes locaux, dont plusieurs femmes franco-canadiennes. ONFR en a rencontré quelques-unes pour discuter de l’intersection entre féminité et francophonie dans l’industrie musicale.

Être francophone et être femme, voilà deux aspects identitaires bien différents, mais qui peuvent parfois se rejoindre. C’est ce qui s’est passé cette année au Bluesfest, selon la responsable des relations avec les médias francophones, Annie Boucher.

« Dans les dix dernières années, il y a eu une volonté d’avoir plus de diversité en général au festival. Donc, plus de femmes, plus de différentes cultures. Le fait qu’il y ait plus de femmes francophones, franco-ontariennes ou de la région, ça, c’est un adon (…) mais quand ils regardent les différentes scènes, c’est certain qu’ils essaient de balancer pour que ce ne soit pas juste des hommes. »

Sophie d’Orléans était en spectacle au Bluesfest le 11 juillet. Elle estime que pour faire une plus grande place aux francophones et aux femmes, il faut travailler en équipe avec les anglophones et les hommes. Photo : Sean Sisk

L’autrice-compositrice-interprète Sophie d’Orléans estime que la francophonie et la féminité apportent des enjeux semblables, que des événements comme le Bluesfest peuvent contribuer à surmonter.

« En tant que femmes, on a besoin d’hommes qui se disent féministes, comme en tant que francophones, on a besoin d’anglophones qui vont dire que le français est important. Ce n’est pas juste entre francophones ou entre femmes qu’on va régler tout ça. Il faut inclure tout le monde. »

Kristine St-Pierre en spectacle au Bluesfest le 11 juillet. Elle croit que son identité francophone et féminine lui ouvre des portes. Photo : Landon Entwistle

L’artiste Kristine St-Pierre croit aussi que ces aspects de son identité artistique peuvent être bénéfiques dans l’industrie. « Je crois qu’il y a plusieurs opportunités qui sont venues vers moi grâce à cette intersection. »

Elle affirme avoir vu un certain changement dans les dernières années. « Le 11 juillet, sur la scène sur laquelle je jouais, les artistes de la soirée étaient trois femmes. La personne à la console était une femme. Et il y avait plein de francophones qui travaillaient sur la scène. Le technicien de son était francophone, on me parlait en français. C’était le fun de se sentir dans un environnement bilingue, pas seulement anglophone. »

Kristine St-Pierre trouve aussi que le Bluesfest fait la promotion de tous ses artistes de façon équitable, encore plus en 2025. « C’est super, en tant qu’artiste locale, de se sentir sur un certain pied d’égalité. »

Plus de francophones

Le Bluesfest d’Ottawa prend plusieurs moyens pour s’ouvrir à la francophonie, selon Annie Boucher, à commencer par sa propre embauche comme contact pour les médias francophones. Cette année, le Festival offre aussi une version en français de son site web pour la première fois.

« C’est vraiment un effort qu’ils sont en train de faire, pour cultiver le côté Gatineau certainement, puis Montréal, et pour faire plus de place aux artistes francophones de la région. »

La proximité avec Gatineau incite le Bluesfest à faire également une place aux artistes québécoises, comme Alicia Moffet, qui était sur la scène River le 17 juillet. Photo : Greg Kolz

Il faut dire que les Plaines LeBreton se situent à un jet de pierre du Québec. Les festivaliers qui doivent se déplacer en voiture sont même encouragés à se stationner du côté gatinois et à traverser la rivière à pied.

Annie Boucher souligne que le bilinguisme fait partie de l’ADN de la région d’Ottawa-Gatineau, que ce soit chez les artistes Franco-Ontariens ou le public qui afflue des deux côtés de la rivière. Les artistes francophones attirent autant de spectateurs que les artistes anglophones programmés dans des créneaux horaires et des scènes comparables.

« Il y a vraiment un intérêt dans les artistes francophones. Il y a un momentum, en ce moment. Ça va se poursuivre, ils (les organisateurs) voient la valeur là-dedans. »

Une visibilité accrue

Selon le site web de l’événement, environ 250 000 festivaliers se présentent chaque année au Bluesfest. Nombreux sont ceux qui arrivent tôt et circulent entre les cinq scènes chaque soir. Le simple fait de jouer sur l’une de ces scènes est donc non négligeable au niveau de la découvrabilité.

« C’était sur ma liste de souhaits depuis longtemps, le Bluesfest. D’être là en tant que francophone, sur la scène extérieure, c’était vraiment le fun », raconte l’artiste Mélissa Ouimet, qui s’est produite sur la scène River. Elle ajoute qu’elle a vu que plusieurs spectateurs anglophones ont partagé des extraits de son spectacle sur les réseaux sociaux.

La moitié fransaskoise du duo féminin Beau nectar, éemi, croit aussi que la barrière de la langue n’est pas aussi étanche qu’autrefois au Canada. « Dans l’Ouest, on a remarqué qu’il y a beaucoup d’intérêt pour la langue française, même pour ceux qui ne parlent pas français. En Colombie-Britannique, on a beaucoup de gens qui viennent nous dire : je n’ai rien compris, mais c’était awesome. »

Beau nectar, composé de la Franco-Ontarienne Marie-Clo (à gauche) et de la Fransaskoise éemi (à droite) est un duo écoféministe, bilingue et pancanadien. Beau nectar était en spectacle au Bluesfest le 16 juillet. Photo : Landon Entwistle

Au Bluesfest, « on est capables d’aller chercher un public plus large. Anglo, franco ou d’ailleurs, car c’est tellement diversifié », constate Mélissa Ouimet, qui jouait quelques heures avant le groupe punk Turnstile.

« Il y a des adeptes du Bluesfest qui vont venir chaque année, qui sont des curieux et qui vont aller voir le plus d’artistes possible, même s’ils ne te connaissent pas », se réjouit Sophie d’Orléans.

Les spectacles qui se déroulent au Théâtre Barney Danson, comme le sien, sont aussi projetés dans l’aire commune du Musée canadien de la guerre. « Donc, de l’extérieur aussi, il y a beaucoup de gens qui passent. La visibilité était définitivement là, en plus de la salle qui était assez remplie. »

Et selon Annie Boucher, les médias jouent un rôle primordial dans la visibilité des artistes. Elle constate que les médias francophones ont plus tendance à parler des artistes franco-canadiens et de la programmation locale. « En anglais, ils vont parler de Green Day, de Shania Twain, mais moins des artistes sur les plus petites scènes », ajoute-t-elle en se gardant tout de même de généraliser.

Être femme dans l’industrie musicale

Les artistes rencontrées croient que la situation des femmes dans le milieu de la musique s’est améliorée, mais qu’il faut savoir s’entourer des bonnes personnes.

« Sur les choses qui sont dans mon contrôle, donc pour mon équipe, je m’arrange pour avoir des gens qui ont les mêmes valeurs que moi, explique Sophie d’Orléans. Que ce soit des hommes ou des femmes, ce sont des personnes qui veulent élever tout le monde et qu’on soit tous sur la même longueur d’onde. »

Mais la vie de tournée inclut évidemment de travailler aussi avec des gens extérieurs à notre garde rapprochée.

« Il y a encore du chemin à faire, je vais être honnête. Il faut bûcher en tant que femme pour faire sa place parmi les programmations, confirme Mélissa Ouimet. Je pense qu’on est de plus en plus conscients de ce chemin à faire. Ça, ça aide. »

Mélissa Ouimet lors de son spectacle sur la scène River du Bluesfest 2025. Photo : Greg Kolz

Selon éemi, la discrimination est plus subtile qu’avant. « On rencontre moins de gens ouvertement sexistes ou misogynes. Les gens ne disent pas certaines choses car ils savent qu’elles ne sont pas correctes, mais on le voit dans certaines subtilités. Ça devient des micro-agressions. »

Par exemple, lorsqu’une femme règle un enjeu technique sur scène, il arrive encore souvent qu’elle se fasse dire de demander à ses musiciens, alors qu’elle a la situation en main.

Le fait que Beau nectar se décrive comme un duo écoféministe peut confronter certaines personnes. « Les gens qui ont une méconnaissance de ce qu’est le féminisme vont tout de suite nous mettre dans une boîte, penser qu’on est agressives, etc », même si la musique de Beau nectar est très accessible.

Sophie d’Orléans s’est dite « remplie de fierté » de voir les femmes occuper une place non négligeable dans la programmation émergente du Bluesfest. Elle résume le sentiment général en soulignant simplement que « la place des hommes sur une scène est plus acquise » que celle des femmes, qui néanmoins se taillent une place de plus en plus grande dans l’industrie musicale.

Au niveau des grandes têtes d’affiche sur la scène RBC, seulement deux femmes se sont frayé un chemin, soit Lainey Wilson et Shania Twain.

Ontario : les conseils scolaires francophones redoutent une perte d’autonomie

Au-delà des difficultés financières qui frappent certains conseils anglophones, les conseils francophones, mieux positionnés, s’inquiètent des effets d’une mainmise croissante du ministère de l’Éducation, au détriment des communautés minoritaires.

Prudence, mais sans sonner l’alarme. C’est la posture adoptée par les conseils scolaires de langue française de l’Ontario après la décision du ministère de l’Éducation, fin juin, de placer quatre conseils anglophones sous tutelle en raison de difficultés financières. Le ministère de l’Éducation de l’Ontario avait nommé des superviseurs pour les administrer.

« Nous sommes conscients qu’aucun conseil scolaire n’est à l’abri », a affirmé l’Association des conseils scolaires des écoles publiques de l’Ontario (ACÉPO), se disant « fière de constater que les conseils scolaires publics de langue française comptent sur de bons gestionnaires ».

Dans ce contexte, l’ACÉPO souligne « l’importance de collaborer avec nos membres et pour ainsi assurer une gouvernance responsable et efficace ».

La gestion budgétaire, une priorité

Le Conseil scolaire catholique MonAvenir, qui accueille plus de 15 000 élèves répartis dans 61 écoles (47 écoles élémentaires, 12 écoles secondaires et deux écoles élémentaires et secondaires), considère la gestion budgétaire comme une priorité.

Nicole Mollot, directrice de l’Éducation et Geneviève Grenier, présidente du Conseil scolaire catholique MonAvenir. Gracieuseté du Conseil.

« Notre rigueur budgétaire et notre conformité aux attentes ministérielles témoignent de notre capacité à gérer efficacement les fonds publics », déclare Geneviève Grenier, présidente du Conseil. 

Le conseil respecte le plafond de déficit de 1 % et a adopté un budget de 320 millions $ pour 2025‑2026, conformément aux attentes du ministère de l’Éducation, le tout soumis avant la date limite du 30 juin, précise l’administration de ce conseil qui siège à Toronto. 

« Malgré une légère baisse prévue de 0,1 % des effectifs, et un sous‑financement chronique du transport scolaire, nous maintenons l’accès à une éducation de qualité sans compromettre les services aux élèves », soutient Nicole Mollot, directrice de l’Éducation du Conseil MonAvenir.

Le Conseil scolaire Viamonde met quant à lui en avant les résultats académiques. « Nous avons obtenu les meilleures performances aux tests de l’OQRE (l’Office de la qualité et de la responsabilisation en éducation) parmi les 72 conseils de la province depuis plusieurs années », se félicite Steve Lapierre, directeur exécutif aux communications.

Pour lui, cela témoigne de la qualité des programmes et de l’encadrement offerts dans les 57 écoles élémentaires, secondaires et virtuelles du conseil.

Conseil scolaire Viamonde
Le Conseil scolaire Viamonde compte 59 écoles élémentaires, secondaires et virtuelles. Archives ONFR

Le droit des minorités 

Selon Sachin Maharaj, professeur en administration de l’éducation à l’Université d’Ottawa, divers facteurs jouent en faveur des conseils francophones.

« Les conseils francophones sont relativement récents (créés il y a environ 30 ans) et leurs infrastructures sont plus modernes, ce qui les place dans une meilleure situation financière que certains conseils anglophones dont les bâtiments tombent en ruine, soutient-il. Leur croissance démographique et leur statut de minorité jouent aussi en leur faveur ».

Il fait remarquer qu’une mise sous tutelle d’un conseil scolaire de langue française serait politiquement et juridiquement délicate, notamment en raison de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

D’ailleurs, il existe divers précédents dans d’autres provinces, rappelle Sachin Maharaj, qui font écho aux revendications des minorités linguistiques ailleurs au pays, mais qui révèlent tout autant une tendance des provinces à vouloir prendre la main sur l’éducation.

Deux visions de l’éducation s’affrontent 

Aujourd’hui en Ontario, ce qui est présenté comme un problème de gestion budgétaire relève en réalité d’un conflit de valeurs : entre une éducation strictement académique et une vision ancrée dans les réalités sociales des élèves, estime Sachin Maharaj.

« Le gouvernement provincial actuel défend une approche éducative dite de ‘retour aux bases’, centrée sur la lecture, l’écriture, les mathématiques, les sciences et la préparation à l’emploi, tandis que de nombreux conseils scolaires souhaitent offrir une expérience éducative plus large et diversifiée », explique-t-il.

Les conseils scolaires cherchent à répondre aux besoins de leurs communautés en maintenant des programmes sociaux et du personnel de soutien, comme des travailleuses sociales, des intervenants jeunesse ou des psychologues, qui sortent du cadre strictement académique. 

Le gouvernement, de son côté, considère souvent ces services comme non essentiels et appelle à leur réduction, provoquant un désaccord fondamental sur le rôle et la portée de l’éducation publique.

Une loi pour renforcer le contrôle gouvernemental 

La menace de mise sous tutelle ne serait donc, selon Sachin Maharaj, qu’une nouvelle étape dans le plan de contrôle de la province. En ce sens, une autre source d’inquiétude pointe : le projet de loi 33. 

En plus de faciliter les mises sous tutelle, ce texte encore à l’étude conférerait au ministre de l’Éducation de nouveaux pouvoirs, y compris sur des enjeux non financiers. Il pourrait approuver ou bloquer le changement de nom d’une école, imposer des programmes de présence policière ou lancer des enquêtes sans justification budgétaire, observe Sachin Maharaj.

Sachin Maharaj, professeur en administration de l’éducation à l’Université d’Ottawa. Gracieuseté de Sachin Maharaj

Face à cette volonté accrue de centralisation, Phyllis Dalley, chercheuse spécialisée en éducation et en droits linguistiques des minorités, rappelle que des recours juridiques sont possibles.

« Les conseils scolaires de langue française peuvent saisir les tribunaux et faire valoir qu’en vertu de l’article 23 de la Charte, le gouvernement ne peut prendre le contrôle de la gestion financière ou de l’administration des conseils scolaires, car cette gestion relève non pas de l’État, mais des communautés francophones », soutient Phyllis Dalley.

Elle ajoute : « C’est pour cela que les élections scolaires sont si importantes, car elles représentent, en quelque sorte, la forme de gouvernance qui appartient en propre aux francophones. »

Des précédents révélateurs

L’enseignement des francophones en situation minoritaire est un droit garanti par l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés incluse dans la Constitution canadienne adoptée en 1982.

Plusieurs décisions judiciaires au pays confirment que les droits des communautés linguistiques minoritaires à gérer leurs écoles sont solidement ancrés dans la jurisprudence canadienne.

En 1990, l’arrêt Mahé c. Alberta a confirmé le droit des francophones de gérer et de contrôler leurs propres institutions scolaires.

En 2018, la Nouvelle-Écosse, en raison d’une volonté de réorganisation du système éducatif, a aboli tous les conseils scolaires sauf le Conseil scolaire acadien provincial (CSAP), maintenu pour préserver les droits linguistiques et culturels de la communauté francophone. 

Le 3 avril 2025, la Cour d’appel du Québec a donné raison aux commissions scolaires anglophones en confirmant, à l’instar de la Cour supérieure en août 2023, que la loi provinciale abolissant les commissions scolaires viole les droits à l’éducation des minorités linguistiques.

Ainsi, alors que le gouvernement provincial souhaite uniformiser davantage le système éducatif, les conseils scolaires francophones rappellent que leur autonomie n’est pas qu’une question de gestion : c’est une condition essentielle à la vitalité des communautés qu’ils servent.

Un nouvel outil pour mesurer les retombées économiques du secteur culturel ontarien, région par région

TORONTO – Le conseil des arts de l’Ontario (CAO) lance un nouvel outil pour mesurer les retombées économiques du milieu culturel d’une façon plus précise, générant des données par communautés. L’organisme gouvernemental a commandé une étude de Nordicity, qui vient de publier son rapport intitulé Les arts allument l’Ontario.

« Les arts allument l’Ontario est la toute première évaluation économique complète des arts en Ontario », peut-on lire dans un communiqué envoyé mercredi.

Il contient des données détaillées sur les contributions du secteur culturel au produit intérieur brut (PIB) de la province, en retombées directes, indirectes et induites. Il mentionne aussi le nombre d’emplois créés, le travail bénévole, les taxes provinciales payées par les organismes ou des facteurs plus sociaux comme l’impact sur les communautés au niveau de la santé mentale ou de l’éducation. Il souhaite mettre en relation les arts et la culture avec les autres secteurs économiques.

En outre, on apprend que l’économie culturelle de l’Ontario contribue à la hauteur de 45 % au PIB du secteur culturel canadien, ce qui en fait l’économie culturelle la plus importante du pays. En Ontario, le secteur culturel « a fourni plus d’emplois que les secteurs de l’immobilier, de la construction automobile, de la foresterie et de l’industrie minière réunis ».

Le rapport distingue également les statistiques globales de chaque région de celles qui touchent spécifiquement les 563 organismes bénéficiaires de subventions de fonctionnement du CAO. Ces dernières ont généré un PIB de plus de 1,1 milliard de dollars et créé 16 164 emplois en 2022-2023, toujours selon le rapport.

La cheffe secteur de l’audiovisuel chez Nordicity, Nicole Matiation, commente le rapport en entrevue avec ONFR. « On a pu démontrer que les investissements du CAO ont un impact réel et mesurable. »

Nicole Matiation est cheffe secteur de l’audiovisuel chez Nordicity. Elle a participé à l’élaboration du rapport pour le CAO. Photo : Gracieuseté de Nicole Matiation

Pour le CAO, un dollar investi équivaut à 25 $ générés par d’autres sources de revenus, puisque les organismes culturels peuvent utiliser les fonds comme un levier. Par exemple, une association culturelle pourrait utiliser ces fonds pour embaucher du personnel et donc s’offrir une meilleure équipe organisationnelle ou de promotion, conduisant à la vente de plus de billets.  

Le rapport détaille aussi les chiffres par domaines d’activités, ce qui contribue à dresser un portrait plus personnalisé de chaque région, en mentionnant les domaines les plus actifs selon le territoire : Patrimoine et bibliothèques, Spectacles vivants, Arts visuels et appliqués, Œuvres écrites et publiées, Audiovisuel et médias interactifs, Enregistrement sonore ou Domaines transversaux.

Une réalité différente d’une région à l’autre

Des données préliminaires, concernant la province de façon plus générale, avaient été partagées en octobre. Statistique Canada fournit également des données à l’échelle nationale et provinciale. Mais le but du CAO est de partager des résultats plus précis, par régions.

La carte de l’Ontario est donc divisée en huit : le Centre-Sud, le Sud-Ouest, Toronto, l’Est, le Centre, le Nord-Est, le Nord-Ouest et le Grand Nord.

Même si, en nombres absolus, moins de gens participent aux événements en région que dans les grands centres, l’impact sur la communauté est tout aussi grand, selon Nordicity. Photo : Franco-Festival de Thunder Bay en 2023. Rachel Crustin/ONFR

« Ce qui est clair, c’est à quel point les arts sont importants pour la communauté en question, raconte Nicole Matiation. Ce n’est peut-être pas autant d’emplois dans certaines régions où ce sont de plus petites agglomérations municipales, mais l’investissement de la communauté est aussi fort, que ça passe par les bénévoles ou par le public qui participe. Ce qui est très clair, c’est qu’il y a un gros impact au niveau du bien-être de la communauté, de la qualité de vie quotidienne et du sentiment d’appartenance. »

Dans le rapport, on peut lire par exemple que dans le Sud-Ouest de l’Ontario, « la région du Niagara est reconnue comme un haut lieu du tourisme culinaire, artistique et culturel ». De son côté, la région du Nord-Ouest de l’Ontario « est définie par son patrimoine autochtone qui se reflète dans les contes et les arts visuels ».

Le CAO prévoit mettre en lumière les résultats spécifiques de chaque région sur ses réseaux sociaux au cours des prochaines semaines. Les plus studieux peuvent déjà aller consulter les conclusions dans le rapport de près de 100 pages, disponible en ligne.

Pour les francophones

Le rapport de Nordicity mentionne que « les investissements du CAO dans les organismes et les projets artistiques autochtones et francophones ont eu des répercussions économiques et culturelles importantes dans tout l’Ontario. »

Pour un investissement de 2,3 millions de dollars du CAO dans les organismes artistiques francophones, Nordicity estime une production économique de 19,2 millions de dollars en PIB.

Selon Nicole Matiation, il est tout de même difficile de mesurer l’impact direct de la communauté francophone. Le rapport ne détaille pas de données selon la démographie et des francophones se trouvent dans toutes les régions et dans tous les domaines. Le rapport reconnaît tout de même qu’on trouve des communauté franco-ontariennes plus concentrées dans l’Est et dans le Nord-Est. Il souligne entre autres que « les institutions culturelles francophones sont prospères à des endroits comme Sudbury. »

Makhena Rankin-Guérin et DJ MKWA, frères et soeurs, donnent un atelier sur les danses autochtones à la Franco-Fête de Toronto, en juin 2025. Photo : Rachel Crustin/ONFR

La représentante de Nordicity ajoute que « la présence des francophones et des organismes francophones contribue à la diversité d’activités et (que) les choix d’expressions culturelles sont assez variés à travers toutes les régions. »

Sans donner de chiffres exacts par organismes, le CAO met en lumière certains de ses bénéficiaires de subventions de fonctionnement. Parmi les associations nommées dans le rapport, on retrouve Théâtre Action (Est) et le Théâtre du Nouvel-Ontario (Nord-Est).

Recommandations

Nordicity donne quelques pistes au CAO pour augmenter l’apport de la culture à la société ontarienne et à son économie.

L’organisme propose d’abord d’élargir la collecte de données en créant un indice provincial permanent des retombées culturelles et de fournir ces données aux municipalités.

Ensuite, le rapport parle d’intégrer davantage d’arts et de culture dans les campagnes publicitaires destinées aux touristes, argumentant que les touristes qui se déplacent pour des événements culturels sont plus susceptibles de dépenser davantage, de rester plus longtemps et d’arriver de l’international.

Troisièmement, Nordicity suggère de « développer de nouveaux outils de mesure pour quantifier le rôle des arts dans la santé mentale, l’inclusion et la résilience des collectivités ».

La dernière recommandation incite à la collaboration intersectorielle grâce au développement de partenariats entre les différents organismes, qu’ils soient publics ou privés.

Le rapport est associé à un modèle économique développé par Nordicity pour le compte du CAO. C’est l’organisme gouvernemental qui se servira de cet outil pour faire une mise à jour annuelle des données présentées.

Aurélie Lacassagne quitte la direction de l’Université de Hearst

HEARST – Un peu plus d’un an après son entrée en poste, la rectrice de l’Université de Hearst, Aurélie Lacassagne, a remis sa démission pour des raisons personnelles et familiales. Sa décision, transmise au Conseil d’administration le 2 juillet dernier, marque la fin d’un court mandat placé sous le signe du redressement et de la restructuration.

« Cette décision a été très difficile à prendre, mais elle s’est avérée nécessaire dans un contexte familial et personnel particulier », a indiqué Mme Lacassagne dans une déclaration transmise par l’université mercredi en toute fin d’après-midi. « J’ai toujours eu et je continuerai à avoir l’Université de Hearst à cœur et demeurerai une alliée fidèle. »

Dans sa lettre de départ, Mme Lacassagne s’est dite disposée à accompagner l’établissement au cours des prochains mois pour faciliter la transition. Un plan à cet effet sera annoncé prochainement, a confirmé la présidente du Conseil d’administration, Julie Béchard.

« Je tiens à remercier Aurélie pour tout le travail acharné qu’elle a accompli durant cette dernière année. Elle a su insuffler un nouvel élan et elle a effectué des changements importants et nécessaires dès son arrivée », a déclaré Mme Béchard, en soulignant que des chantiers amorcés sous sa direction devront se poursuivre pour assurer la croissance de l’institution.

Le Conseil d’administration et son exécutif ont tenu une réunion avec les parties concernées, notamment l’Association des professeures et professeurs, le secrétariat général et le vice-rectorat à l’administration, afin d’assurer une continuité dans la gouvernance de l’université. Le Conseil dit rester confiant quant au bon déroulement de cette période de transition.

ONFR a tenté de joindre Aurélie Lacassagne et l’institution afin de savoir si la démission de la rectrice était effective immédiatement et obtenir plus de détails mais n’a pas reçu de réponse mercredi soir. Jeudi matin la rectrice a confirmé qu’elle resterait disponible jusqu’à ce que la personne reprenant les rênes ne soit désignée.

Nommée en mars 2024, mais entrée en fonction quelques mois plus tard en juillet, Aurélie Lacassagne avait pris les rênes de l’Université de Hearst dans un contexte exigeant. Son mandat aura notamment été marqué par un assainissement des finances, la renégociation d’une entente de mandat stratégique et des réformes internes jugées « impérieuses » pour la pérennité de l’établissement.

« Je pars en sachant que grâce à une belle équipe, nous avons su surmonter de nombreux obstacles; assainir les finances; négocier une nouvelle entente de mandat stratégique; et entamer des restructurations impérieuses pour l’avenir de  l’institution », termine la rectrice.

Une situation difficile

L’institution, devenue entièrement autonome en 2021 à la suite de la rupture de son affiliation avec l’Université Laurentienne, doit composer avec un bassin d’étudiants limité, une baisse du nombre de diplômés du secondaire dans le Nord ontarien et le plafonnement fédéral des permis d’études pour les étudiants étrangers.

Pour remédier à la situation, des stratégies de partenariat, notamment avec le Collège nordique francophone des Territoires du Nord-Ouest, avaient été mises de l’avant sous la direction de Mme Lacassagne.

Avant son arrivée à la tête de l’Université de Hearst, Aurélie Lacassagne a occupé des postes de direction académique à l’Université Laurentienne, où elle a été vice-doyenne et directrice de département pendant 15 ans jusqu’à son congédiement en 2021, dans la foulée de la crise financière qui a entraîné la suppression massive de programmes et le licenciement de plus d’une centaine de membres du personnel.

Elle a ensuite été nommée doyenne des Facultés des sciences humaines et de philosophie à l’Université Saint-Paul, à Ottawa, poste qu’elle a occupé de 2022 à 2024. Avant elle, Luc Bussières était recteur de l’Université de Hearst depuis 2017. 

Article mis à jour jeudi à 11h.

Canicule : « 26 °C, pas plus » dans les logements selon un expert

Le Dr Glen P. Kenny est professeur titulaire en physiologie à l’Université d’Ottawa. Expert des impacts de la chaleur sur le corps humain, il dirige l’Unité de recherche en physiologie environnementale.

Les vagues de chaleur extrême sont de plus en plus fréquentes et dangereuses pour les personnes âgées ou vulnérables. Face à cette réalité, des municipalités de l’est ontarien, Russel, Casselman, Ottawa, entre autres, ont annoncé des mesures.

De nombreuses personnes vulnérables restent exposées à des logements surchauffés, sans accès à un refroidissement adéquat. L’absence de normes contraignantes et le manque d’accès à la climatisation posent un risque pour la santé publique en contexte de réchauffement climatique.

« Des municipalités de l’est ontarien (Russel, Casselman, Ottawa, entre autres) ouvrent des centres de refroidissement ou recommandent d’utiliser des lieux publics climatisés. Quelles sont vos recommandations?

L’accès à ces espaces est utile, mais nos recherches montrent que ce n’est pas suffisant. Une personne vulnérable exposée toute une journée à une chaleur extrême peut voir sa température corporelle baisser temporairement en passant une ou deux heures dans un centre climatisé. Mais en retournant ensuite dans un environnement chaud, cette température remonte rapidement, parfois plus vite qu’avant.

Cela donne une fausse impression de sécurité. La personne se sent mieux, devient plus active, mais reste en danger. Il faut donc aussi informer les usagers : se sentir mieux ne signifie pas que le corps est protégé.

La ville de Toronto a récemment supporté l’achat de climatiseurs au profit de quelque 500 familles vulnérables, notamment des séniors. Que pensez-vous de cette mesure?

C’est une mesure louable et à élargir, surtout pour les personnes les plus à risque. Quand on vit dans un logement avec de grandes fenêtres exposées au soleil, la température intérieure peut grimper rapidement, comme dans une voiture.

Le danger, c’est l’exposition prolongée à la chaleur. Chez les personnes vulnérables sans climatisation, la température corporelle augmente au fil de la journée. Après quatre ou cinq heures, elle atteint un niveau élevé et relativement stable, ce qui impose un stress thermique important, avec des conséquences graves sur la santé.

Selon Glen P. Kenny, la climatisation n’est pas un luxe, mais une nécessité pour sauver des vies.

Qu’en est-il des ventilateurs? Peuvent-ils aider à lutter contre les effets de la chaleur?

La température corporelle reste aussi élevée avec ou sans ventilateur. Nous l’avons démontré dans une publication du Journal of the American Medical Association (JAMA). Il peut y avoir un léger bénéfice si la température ambiante est inférieure à 33 °C. Mais à 31 °C, les ventilateurs de plafond ne sont pas efficaces, notamment pour les personnes alitées. À 28 °C, une combinaison ventilation et refroidissement pourrait être utile, mais cela reste à prouver.

Même chose pour l’immersion des jambes dans l’eau glacée : les données disponibles proviennent d’études sur des athlètes, ce qui ne reflète pas la réalité des personnes âgées. Qui va changer l’eau toutes les heures pour qu’elle reste froide? Nos résultats montrent que ce n’est pas une solution efficace.

Beaucoup de recommandations manquent de fondement scientifique. C’est pourquoi nous avons mené ces études. Pour prévenir les effets graves, il faut maintenir la température intérieure à un maximum de 26 °C. C’est la recommandation de Santé Canada. Et aujourd’hui, seul l’air climatisé permet d’y parvenir efficacement.

Que pensez-vous des propositions de certains élus, notamment de Catherine McKenney, « député·e » à l’Assemblée législative de l’Ontario, visant à imposer une température maximale dans les logements locatifs?

C’est une initiative justifiée exprimée par plusieurs élus, elle est basée sur nos recommandations scientifiques. En hiver, les propriétaires doivent garantir un minimum de chauffage. En été, il devrait y avoir des règles similaires pour éviter que les logements ne deviennent dangereux.

Ces mesures visent à protéger les personnes âgées, les enfants, les familles et tous ceux qui n’ont pas les moyens de se défendre contre la chaleur extrême. Elles assurent un minimum de confort thermique et réduisent les risques graves pour la santé.

Et que dites-vous de l’impact environnemental de la climatisation?

C’est un enjeu réel. Mais en 2003, 50 000 personnes sont mortes en Europe à cause d’une vague de chaleur. En 2021, il y a eu 619 décès attribuables à la chaleur en Colombie-Britannique. La majorité n’avait pas accès à l’air climatisé.

La climatisation protège et réduit les risques. Il n’est pas nécessaire de la régler à 21 ou 22 °C. À 26 °C, nos études montrent déjà des effets sur la qualité du sommeil et la tolérance à la chaleur. Ce seuil est suffisant.

En cas de canicule, il faut l’utiliser. Une température de 33 °C provoque un stress physiologique comparable à une activité physique soutenue. Imaginez cela pour une personne âgée exposée pendant plusieurs jours. Le corps se détériore. Et c’est là que réside le vrai danger.

Quels sont les signes d’un stress thermique, chez une personne active ou au repos?

Chez une personne active, on observe une fatigue rapide, une sudation importante et des étourdissements. Mais ces signes sont souvent mal perçus. C’est pourquoi on recommande, pour les gens qui travaillent dans des conditions d’extrême chaleur (la construction, l’agriculture, etc.) de travailler en binôme : un collègue peut détecter les changements de comportement.

À mesure que la transpiration augmente, le corps perd de l’eau. Le volume sanguin diminue, ce qui oblige le cœur à travailler davantage. Cette compétition entre refroidissement et activité physique épuise l’organisme.

Chez une personne au repos, exposée à une maison chaude, la réaction est plus lente. Il faut 4 à 5 heures pour atteindre un équilibre thermique. Mais si la personne ne peut pas dissiper la chaleur, sa température continue de grimper, ce qui peut mener à un épuisement, un évanouissement ou des chutes graves. »

Les signes à surveiller sont :

  • Fatigue soudaine
  • Étourdissements
  • Sudation abondante
  • Réactions ralenties
  • Fréquence cardiaque élevée
  • Risque de chute ou perte de conscience

Lois sur les grands projets : des Premières Nations en justice contre l’Ontario et le Canada

TORONTO – Les consultations promises ayant pour l’heure été infructueuses, des Premières Nations lancent une contestation constitutionnelle d’envergure contre deux lois initiées pour pallier la menace tarifaire américaine. La première, issue du  controversé projet de loi 5, permet au gouvernement Ford la désignation de « zones économiques spéciales » pour accélérer des projets d’infrastructure. L’autre, tirée du projet de loi C-5 du gouvernement fédéral, permet de contourner la législation si l’intérêt économique canadien prévaut.

« Ils veulent s’octroyer des pouvoirs extraordinaires », a commenté ce mercredi en conférence de presse à Queen’s Park Kate Kempton, l’avocate principale (cabinet Woodward & Co LLP) spécialisée dans les litiges autochtones.

« Les Premières Nations ont des droits de consultation que la Couronne doit respecter sans les bafouer, c’est son devoir envers la Constitution », continue-t-elle.

Kate Kempton demande la modification ou l’abrogation des deux lois en cause, surtout la loi provinciale, « probablement l’un des pires projets jamais avancés ».

C’est l’article 6 du projet de loi C5 qui pose problème, selon l’avocate de l’affaire, qui a exhorté Mark Carney à annuler l’article 6 de la loi. Ce dernier confère au gouvernement fédéral le pouvoir de désigner des projets « d’intérêt national » et de les accélérer via un guichet unique, tout en permettant de passer outre certaines lois existantes.

Surnommés « les deux 5 », les lois issues des projets de loi 5 (provincial) et C-5 (fédéral) autoriseraient la réalisation de projets économiques majeurs en s’affranchissant de permis et d’approbations, notamment concernant des évaluations environnementales ou la protection d’espèces menacées.

Plusieurs Premières Nations de l’Ontario ont ainsi déposé une procédure accélérée devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario pour les faire annuler, estimant qu’ils portent atteinte « à leurs droits à l’autodétermination sur leurs territoires ancestraux, l’environnement et les libertés fondamentales. »

« Ces lois autorisent les gouvernements de la Couronne à approuver, de manière accélérée, des projets majeurs comme les mines du Cercle de feu et des pipelines, sans recueillir les informations essentielles sur la sécurité humaine, l’environnement et sans consulter les peuples autochtones dont les terres seraient utilisées », a déclaré le chef Taynar Simpson de la Première Nation Alderville.

Le 19 juin dernier, Doug Ford avait rencontré des chefs des Premières Nations et des négociations devaient s’en suivre. Selon les chefs présents en conférence ce mercredi 16 juillet, les discussions, infructueuses, ne seraient pas allées assez vite non plus.

Selon le député néo-démocrate de Sudbury Jamie West, en conférence de presse également, la menace économique que représentent les tarifs américains ne serait qu’une excuse pour justifier de créer ces « zones économiques spéciales » et s’octroyer des passe-droits : « Le président américain ne sera au pouvoir que pour trois ans et demi encore. »

« Nous, Premières Nations, ne sommes pas opposées au développement en tant que tel. Ce n’est pas une opposition binaire au progrès, a affirmé le chef Todd Cornelius, de la Nation Oneida de la Thames. Il s’agit plutôt de dénoncer les façons irresponsables de procéder, et de revendiquer le droit de faire les choses correctement. »

La cheffe Sylvia Koostachin-Metatawabin, de la Première Nation Attawapiskat, a dénoncé la précipitation de l’adoption de ces lois sans connaissance des conséquences, un pari dangereux selon elle : « La région du Cercle de feu est composée de tourbières, un puits de carbone crucial à l’échelle mondiale. Sa destruction pourrait aggraver la crise climatique de façon dramatique. Notre mode de vie, l’avenir de nos enfants et notre environnement commun ne sont pas des pions dans un jeu politique. »

En conférence de presse aujourd’hui à Hamilton au sujet de mesures d’aide pour l’industrie de l’acier, le premier ministre canadien Mark Carney a réagi : « La première chose à faire est de consulter ce dont il est question lorsque l’on parle de projets de construction nationale. Avant toute consultation sur un projet spécifique, et avant, si un projet est identifié, les conditions doivent être réunies. La première chose que nous ferons est une série de réunions avec les peuples autochtones, qui commencera cet après-midi et demain à Ottawa. »

Le premier ministre ontarien Doug Ford ne s’est quant à lui pas encore exprimé au moment de l’écriture de ces lignes.

Pénurie d’emplois d’été : des jeunes découragés par un marché saturé

TORONTO – Depuis peu, il arrive d’observer en Ontario plusieurs dizaines de demandeurs d’emploi faire la queue aux portes de commerces qui affichent des postes vacants. Le croisement du nombre déclinant d’annonces d’emploi avec celui ascendant de candidats sur le marché crée une concurrence féroce, qui ne faiblit pas entre les jeunes en recherche d’emplois d’été.

« Parfois, je me sens pleine d’espoir au niveau des candidatures, mais aussi parfois, c’est frustrant de ne pas recevoir de réponses », soupire Maeva Revolus, une étudiante de 16 ans qui vient de quitter Brampton pour vivre à Hawkesbury.

Non seulement elle a envoyé une vingtaine de candidatures, elle publie régulièrement des messages d’appels sur les médias sociaux pour se rendre visible auprès de la communauté. Récemment, son expérience en bénévolat lui a permis de réaliser qu’un emploi d’été pourrait d’autant plus l’aider à vaincre sa timidité.

« C’est pour avoir de l’expérience et devenir un peu plus indépendante. Je voudrais économiser pour l’avenir aussi », explique l’adolescente.

À Toronto, Xavier Box, 16 ans également, recherche aussi un emploi saisonnier depuis plus d’un mois.

Pour pallier les rares opportunités d’emploi saisonnier, Xavier Box a pris l’initiative de proposer ses propres services de bénévolat à ses voisins. Photo : Gracieuseté : Hajar Erraji

Il a distribué près d’une vingtaine de candidatures dans différents secteurs, « J’ai envoyé à plein de fast food, et aussi des SportChek ou des Canadian Tire », précise le jeune homme.

Mi-juillet, il n’a malheureusement pas reçu de retours. Toutefois le jeune homme s’attèle à des services de bénévolat dans des centres communautaires francophones dans la ville, mais aussi après de son quartier, où il tond la pelouse du voisinage.

« Je sais qu’il y a des gens qui cherchent depuis au moins deux ans. J’étais déjà au courant que ça allait être très compliqué. Je n’avais pas de grandes attentes », poursuit-il.

Alexandra Tillo est consultante en marketing ressources humaines senior chez Indeed Canada. Elle explique que par rapport à l’année dernière, on observe un recul de 22 % d’offres d’emploi saisonnier sur le marché.

« Ça a forcément un gros impact sur les jeunes qui cherchent du travail. Ça peut financer des voyages, des loyers. Il y a aussi le coût de la vie qui a énormément augmenté depuis 20 ans. Donc, c’est sûr que ça se ressent d’autant plus à ce niveau-là », détaille la consultante.

Au printemps, le taux de chômage des Canadiens de 15 à 24 ans s’élevait à 14.2 %. « C’est le double de la moyenne » de la population totale, déplore Alexandra Tillo.

Entre eux, les jeunes perdent une certaine confiance envers le marché du travail, ce qui peut créer une scission entre les jeunes générations et leur rapport au travail. Xavier l’a senti notamment au sein de son groupe d’amis. « Honnêtement, quand on en parle, on dirait qu’on n’y croit plus », raconte-t-il.

Une concurrence féroce

À Hawkesbury, Maeva remarque que les postes sont pourvus très rapidement. « Quand je vois un travail, je postule, mais après on me dit que c’est déjà pris. Même le bénévolat », défend-elle.

D’après madame Tillo, c’est ce qui résume principalement l’état du marché. « Je dirais que le principal défi que rencontrent les jeunes ou les travailleurs saisonniers, surtout cette année, c’est au niveau de la concurrence qui a énormément augmenté », souligne-t-elle.

Alexandra Tillo est consultante chez Indeed Canada à Toronto. Photo : Gracieuseté : Alexandra Tillo

En conséquence, c’est un marché plutôt favorable aux employeurs, où les critères d’embauche sont bien plus élevés qu’auparavant. La consultante note aussi que les employeurs sont plus prudents et se soumettent à des remises en question budgétaires plus fréquemment.

« Ça coûte très cher d’embaucher des employés saisonniers, ajoute-elle. Il y a le coût du recrutement, le coût de la formation. Il y a certains bénéfices auxquels ils ont accès. Et puis après, c’est une personne qu’ils savent qu’ils vont perdre. »

Entre emplois classiques et évolution du marché

Malgré tout, Alexandra Tillo observe que les entreprises demeurent engagées à s’ouvrir aux jeunes générations. Elle note par ailleurs des changements au niveau des types de postes traditionnels. En effet, les emplois d’été se sont transformés avec des secteurs d’activité qui seraient plus opportuns pour les jeunes, tels que la logistique, le commerce de détail spécialisé ou encore le service à distance de soutien technique.

Chaque année, les camps d’été redeviennent un secteur clé du marché de l’emploi saisonnier, où le besoin de main-d’œuvre se maintient. L’Association des Francophones de la Région de York (AFRY) recrute de manière active auprès de la communauté étudiante francophone torontoise.

Yasmine Malek Menasria en est la directrice générale. Elle offre chaque été 20 postes de supervision des camps. Elle confie avoir reçu 57 candidatures cette année.

« Il peut s’agir de postes administratifs, comme des agents de planification, des agents de projet, ou des postes directs avec les enfants. Ce n’est pas de jobs répétitifs. Souvent, ils adorent ça et ils veulent revenir », déclare madame Malek Menasria.

Ces recrues sont âgées de 15 à 26 ans et doivent commencer à postuler dès le mois de janvier. « On a des nouveaux arrivants, des gens qui sont établis ici depuis des années, on a des personnes qui sont là seulement pour l’été. Et ce sont tous des francophones, parce que c’est le critère premier », précise-t-elle.

L’AFRY fournit des formations de base aux recrues qui assumeront leur rôle d’animateurs de camp d’été durant toute la saison. Photo : Gracieuseté : Yasmine Malek Menasria

Toutefois, Yasmine évoque des obstacles au recrutement auxquels les employeurs peuvent être confrontés aujourd’hui.

En tant qu’organisme sans but lucratif, l’AFRY est en mesure de recruter la majorité de ses animateurs grâce à des programmes nationaux et provinciaux, ainsi qu’en partenariat avec les conseils scolaires. Par exemple, Emplois d’été Canada (EEC), Jeunesse Canada au travail (JCT) ou encore le programme Perspectives d’emplois d’été permettent aux employeurs de couvrir les salaires des jeunes grâce à des subventions.

« Sans ces financements, on ne pas offrir ces opportunités d’emploi aux jeunes »
— Yasmine Malek Menasria

Toujours selon la directrice, certains critères mettent les employeurs en difficulté pour recruter, tels que celui du statut d’immigration dans un contexte où de nombreux étudiants détiennent un permis d’étude et sont donc inéligibles. Ainsi, les programmes tenus par les conseils scolaires eux-mêmes, où « c’est l’école qui commandite l’emploi » seraient l’orientation idéale, selon elle.

« Ces programmes-là passent à travers le filtre de restrictions du statut d’immigration. Ça pourrait vraiment aider quelques jeunes à trouver des emplois », constate-t-elle.

Pour Yasmine Malek Menasria, ces programmes motivent les employeurs à recruter. « Je trouve que ça, c’est quelque chose de très rassurant pour les employeurs. Le fait de savoir qu’un jeune a assisté à ce genre de programme, que ce soit sur la sécurité au travail, le sérieux, l’assiduité. Ce sont des choses que les étudiants ont besoin de savoir, surtout s’il s’agit de leur premier job  », avoue-t-elle.

Les emplois d’été sont-ils en voie de disparition?

« On me demande tout le temps de l’expérience, mais si je ne travaille jamais pas, comment je vais avoir de l’expérience? », demande Maeva.

Rafael Gomez, qui dirige le Centre des relations industrielles et des ressources humaines de l’Université de Toronto, révèle que manquer d’opportunités pour des emplois d’été pourrait avoir un effet à long terme sur la carrière des jeunes.

« Les employeurs ont un rôle à jouer sur le marché du travail, pour leur donner leur première expérience professionnelle. Parce qu’une fois qu’ils ont de l’expérience, ils trouvent des emplois facilement », explique le professeur.

« Je suis vraiment prête à apprendre et à travailler fort. Je pense qu’ils devraient donner une chance aux jeunes pour leur permettre de grandir et d’acquérir de l’expérience pour l’avenir » martèle de nouveau Maeva. Pour le moment, elle a réussi à décrocher un entretien dans une épicerie et espère que sa candidature ait retenu l’attention.

De son côté, Xavier continue de prouver sa motivation auprès des employeurs « Je leur dis que je suis de bonne humeur et que je suis assidu », assure le jeune homme.

Retour des Jeux de la francophonie canadienne : fébrilité et fierté pour les jeunes de l’Ontario

OTTAWA – Une cinquantaine de jeunes franco-ontariens, de partout en province, sont réunis cette semaine à Laval, au Québec. Ils participent aux Jeux de la francophonie canadienne, un événement d’envergure souhaitant stimuler la fierté francophone au moyen de compétitions sportives, artistiques et de leadership. ONFR a rencontré la délégation ontarienne juste avant son départ.

La fébrilité était palpable à l’École secondaire publique Omer-Deslauriers et dans les bureaux de la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO), partenaire de recrutement des JFC, dimanche dernier, alors que se tenait le camp d’entraînement de l’équipe Ontario.

« C’est une bonne façon de démontrer ma langue, de m’amuser, rencontrer du nouveau monde et jouer mon sport », croit déjà Francis Morneau, 14 ans, membre de l’équipe de badminton et élève à l’École secondaire publique Odyssée de North Bay.

Pourtant, l’expérience « ne se décrit pas tant que tu ne l’as pas vécu, explique le chef de mission Éric Marcotte. C’est un événement que tu vis une fois dans ta vie qui peut être vraiment formateur, qui peut t’ouvrir les yeux sur ta francophonie, mais aussi sur la francophonie canadienne, la pluralité de notre pays, de notre langue ».

Les jeunes de 14 à 18 ans peuvent participer à cette compétition amicale qui a normalement lieu tous les trois ans. Les JFC ayant été annulés en 2020 en raison de la pandémie, la plus récente édition remonte à 2017.  

Construction identitaire

« J’imagine les JFC comme les Olympiques », visualise Thomas Clay, 18 ans, fraîchement gradué de l’École secondaire catholique Franco-Cité, à Ottawa. Le trompettiste, guitariste et chanteur a gagné sa place dans l’équipe Musique grâce à sa participation au festival en milieu scolaire Quand ça nous chante. Une suite logique, même s’il ne connaissait pas les JFC.

« J’ai réalisé cette année que j’étais beaucoup plus impliqué que ce que je pensais. J’ai fait de l’impro, de la comédie musicale, plein de festivals de musique, de théâtre, de culture. »

L’équipe de musique a choisi de présenter trois compositions originales. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Ce genre d’activités contribue directement à la construction identitaire des jeunes franco-ontariens, selon Rose-Ann Nadeau, 17 ans, présidente du gouvernement des élèves à l’École secondaire publique De la Salle (Ottawa) et membre de l’équipe Théâtre.

« Participer à des événements comme ça me permet d’avoir un sentiment d’appartenance envers la francophonie. Et j’aime juste l’idée de rencontrer de nouvelles personnes et de me faire de nouveaux amis. »

Si certains jeunes montrent un esprit compétitif, surtout s’ils sont inscrits dans une discipline qu’ils pratiquent déjà, ils ont tous hâte de rencontrer leurs camarades franco-canadiens.

« J’ai hâte de voir de quoi ça va avoir l’air, car c’est probablement le plus gros événement jeunesse auquel j’aurai la chance de participer », dit Marie-Claude Bisson, 16 ans, élève au Collège catholique Mer Bleue d’Ottawa et membre de l’équipe Médias.

Un retour modeste

Puisque l’événement a fait une pause de huit ans, il est un peu plus difficile pour ceux qui y ont participé de convaincre les jeunes de s’inscrire. La délégation de l’Ontario n’est pas complète cette année.

« La force du réseau francophone, surtout avec nos jeunes, c’est le bouche-à-oreille, explique la directrice générale de la FESFO, Mélina Leroux. Je suis convaincue qu’aux prochains jeux (…) en 2028, la barre va déjà être haute, parce qu’on va avoir reparti la machine. »

Les jumelles Ireland (à gauche) et Adrienne (à droite) Thompson devront rapidement créer une chimie avec leurs coéquipières du Nouveau-Brunswick. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Les jumelles Ireland et Adrienne Thompson, 16 ans, de l’Académie de la Seigneurie de Casselman, voient l’impact direct de cette délégation incomplète. Les deux seules participantes en basketball féminin seront jumelées à des filles du Nouveau-Brunswick, qu’elles n’ont rencontrées que de façon virtuelle avant les jeux.

« Au Québec, comme ils sont majoritairement francophones et que c’est une des plus grandes provinces, je pense qu’ils ont plus de participantes et ont donc de bonnes chances » d’avoir de bonnes joueuses, selon Ireland, qui avoue être compétitive.

« Ça va être difficile, mais ça va être amusant. On est là pour faire un sport qu’on aime », tempère Adrienne, qui a aussi hâte d’échanger avec les Néo-Brunswickoises sur leur réalité.

Des entraîneurs qui se souviennent

Une vingtaine d’adultes accompagnent les jeunes, comme entraîneurs ou comme membres de « l’équipe mission. » Certains d’entre eux ont eu la chance de vivre les JFC alors qu’ils étaient adolescents.

L’animateur de l’équipe Médias et journaliste à Radio-Canada, Philippe De Montigny, affirme avoir eu la piqûre de son métier et de la francophonie grâce à l’édition 2008, à Edmonton. « Ça a vraiment été un tremplin pour ma fierté francophone », affirme le Franco-Albertain d’origine, qui prouve que de recevoir les JFC dans sa province est aussi marquant que de voyager pour s’y rendre.

L’équipe Médias et leur animateur, le journaliste Philippe de Montigny. De gauche à droite : Gabriel Gauthier, Marie-Claude Bisson, Cameron Levasseur, Philippe de Montigny et Eva Blais. Photo : Rachel Crustin/ONFR

Zachary Gosselin et Jessy Lindsay, qui entraînent respectivement les équipes d’improvisation et de musique, ont aussi suivi leur passion suite aux JFC de 2017 à Moncton/Dieppe. Il travaille aujourd’hui dans le domaine du théâtre et elle, de la musique. L’autrice-compositrice-interprète n’hésite pas à affirmer que les JFC l’ont aidée à trouver son identité musicale.

De plus, tous ceux qui ont vécu l’expérience racontent qu’ils ont tissé des liens qui persistent encore aujourd’hui. « On a vraiment développé une synergie et une amitié qui va durer une vie », précise Jessy Lindsay.  

Un effet WOW

Comme les jeux se déroulent à Laval cette année, les francophones d’Ottawa ou de l’Est ontarien ne se retrouveront pas très loin de chez eux. C’est une autre paire de manches pour Gabriel Gauthier, 17 ans, de l’École secondaire Château-Jeunesse à Longlac.

« Pour moi, les jeux sont immenses. Un événement de 1200 personnes, c’est presque la grosseur de mon village. Voir autant de personnes au même endroit, ce sera une expérience incroyable. Je suis le seul représentant de ma région. Je suis l’élève qui arrive du plus loin », raconte celui qui a fait trois heures de route pour se rendre à l’aéroport de Thunder Bay, d’où il a pris l’avion pour rejoindre ses camarades à Ottawa.

L’équipe d’Ultimate freesbee au camp d’entraînement. Photo : Gracieuseté Équipe Ontario

Selon Mélina Leroux, la cérémonie d’ouverture est un moment important qui peut submerger les jeunes d’une émotion nouvelle.

« Dépendant où tu es rendu dans ton développement identitaire et dans ta francophonie, il y en a pour qui ça va peut-être moins frapper au niveau émotionnel, mais il y en a d’autres pour qui ça va être comme : OK, on n’est vraiment pas tout seuls. »

C’est pour cela que la FESFO choisit de recruter à la fois des athlètes qui ont déjà atteint un certain niveau et des jeunes qui ont envie d’essayer quelque chose de nouveau. Dans le processus de recrutement, Éric Marcotte cherche une représentation juste des régions, ainsi qu’un équilibre entre les garçons et les filles.

Impliqué depuis 2011, il témoigne de l’impact de l’événement. « Quand ils vont retourner à la maison, ils vont peut-être avoir un plus grand sentiment d’appartenance, vouloir s’engager davantage. »

Rose-Ann Nadeau est déjà convaincue. « La meilleure façon de donner un sentiment d’appartenance à la francophonie aux jeunes, c’est avec des événements comme ça. Parce que c’est en le vivant que l’on comprend. »

Il est possible de suivre Équipe Ontario et la FESFO sur les réseaux sociaux pour avoir des nouvelles de la délégation tout au long de la semaine. Les JFC se termineront le 19 juillet.

L’Université Laurentienne et le Collège Boréal officialisent un nouveau partenariat pour l’éducation postsecondaire en français

SUDBURY – L’Université Laurentienne et le Collège Boréal ont signé, ce lundi, un nouveau protocole d’entente qui vise à bonifier les parcours éducatifs offerts en français dans le Nord de l’Ontario et à accentuer leur collaboration dans plusieurs domaines clés, dont la recherche et les services aux communautés.

L’accord, rendu public le 15 juillet, prévoit notamment la création de nouveaux programmes conjoints, une meilleure passerelle entre les deux établissements pour faciliter le transfert de crédits ainsi que des initiatives ciblées pour répondre aux besoins du marché du travail francophone dans le Nord.

« La signature de cette nouvelle entente entre l’Université Laurentienne et le Collège Boréal permet de formaliser une collaboration de longue date au service des francophones de l’Ontario, a commenté Daniel Giroux, président du Collège Boréal. Notre objectif : former une main-d’œuvre véritablement bilingue capable de répondre aux enjeux actuels et futurs du monde de l’emploi. »

Le protocole prévoit aussi une complémentarité accrue entre les programmes offerts, l’amélioration de l’accès aux cycles supérieurs pour les diplômés du Collège Boréal ainsi que le développement de projets de recherche communs.

Plusieurs objectifs ont été définis :

  • améliorer l’accès aux études en français et augmenter le nombre de parcours disponibles dans la région de Sudbury et en Ontario;
  • optimiser et encourager la complémentarité de la programmation offerte en français;
  • réduire la pénurie de main-d’œuvre francophone dans le Nord de l’Ontario;
  • faciliter le transfert de crédits entre le Collège Boréal et l’Université Laurentienne;
  • offrir des parcours et des combinaisons de programmes intégrant des approches théoriques et pratiques afin de mieux préparer les étudiantes, les étudiants au marché du travail;
  • améliorer les services aux communautés autochtones de la région;
  • accroître l’accès des étudiantes et étudiants collégiaux aux études supérieures en français (maîtrise et doctorat);
  • collaborer à des projets de recherche dans des domaines d’intérêt mutuel.

Du côté de l’Université Laurentienne, on insiste sur la continuité d’un engagement historique envers l’éducation en français. « Depuis plus de 60 ans, la Laurentienne fait partie intégrante de la francophonie du Nord de l’Ontario », a déclaré la rectrice et vice-chancelière Lynn Wells, soulignant que l’université compte 2500 étudiantes et étudiants francophones et plus de 85 % de personnel francophone.

« Ce protocole est une étape importante vers des partenariats fructueux qui renforcent notre identité et ouvrent de nouvelles avenues pour les étudiantes et étudiants francophones », a-t-elle ajouté.

Réponse à la pénurie de main-d’œuvre

Le ministre des Collèges, des Universités, de l’Excellence en recherche et de la Sécurité, Nolan Quinn, qui a fait le déplacement à Sudbury, s’est aussi réjoui de l’annonce. Il y voit une façon de stimuler l’autonomie et la compétitivité du Nord.

« Cet accord entre l’Université Laurentienne et le Collège Boréal renforcera non seulement l’accès à une éducation postsecondaire en français de calibre mondial, mais il dotera également les étudiantes et étudiants des connaissances et des compétences dont ils ont besoin pour protéger et faire croître l’économie de l’Ontario », a-t-il déclaré.

Dans un contexte où la pénurie de personnel bilingue se fait sentir dans de nombreux secteurs, l’entente s’inscrit comme un levier pour le développement économique et social des communautés francophones de la région.

Les deux établissements affirment que cette signature marque le début de discussions élargies sur d’autres formes de collaborations. L’objectif : répondre plus efficacement aux besoins de la population étudiante et des communautés, notamment autochtones, dans le Nord de la province.