Entre résilience et incertitude, une enquête menée auprès de 74 entreprises locales révèle les impacts tangibles des tarifs douaniers américains sur le tissu économique de Prescott et Russell.
Près d’un quart (24 %) des entreprises de Prescott et Russell disent avoir été directement affectées par les tarifs américains, alors que 53 % ont répondu ne pas avoir été directement impactées, et 23 % sont incertaines.
C’est ce que révèle une enquête de la Société de développement Prescott et Russell (SDPR) menée auprès de 74 entreprises de la région.
« L’annonce de nouveaux tarifs et l’incertitude qui les entoure constituent une menace réelle pour les entreprises et les résidents », a affirmé à ONFR Yves Laviolette, président du Conseil des Comtés unis de Prescott et Russell.

Toutefois, selon lui, les résultats préliminaires du sondage mené par la SDCPR indiquent que les petites et moyennes entreprises (PME) de Prescott et Russell sont résilientes.
En effet, la majorité d’entre elles (66 %) affirment ne pas avoir subi de perturbations majeures dans leur chaîne d’approvisionnement en raison des tarifs, tandis que 30 % ont été légèrement perturbées et 4 % fréquemment.
« Cette stabilité pourrait être attribuée au fait que les entreprises ont des fournisseurs fiables, une gestion adéquate des stocks ou des stratégies d’approvisionnement diversifiées », lit-on dans le rapport qui met également en lumière les différentes stratégies adoptées par les entreprises pour atténuer l’impact des tarifs.
Dans ce sens, plus de la moitié (54 %) optent pour une combinaison consistant à absorber les coûts, les répercuter les coûts aux clients et réduire certaines dépenses opérationnelles. 35 % des répondants répercutent les coûts et 12 % préfèrent les absorber.
Les résultats du sondage suggèrent aussi que la recherche de fournisseurs alternatifs est répartie entre le recours à des fournisseurs nationaux (20 %) et la recherche de fournisseurs d’autres pays non affectés par les tarifs (19 %), tandis que 32 % sont catégoriques : ils ne changeront pas de fournisseurs.
Par ailleurs, le rapport dresse un portrait des entreprises de Prescott et Russell. La majorité des entreprises sondées (77 %) comptent moins de 10 employés. Elles opèrent principalement dans les secteurs des services (65 %), du commerce de détail (31 %), de la transformation (22 %) et de la construction (19 %).
On y apprend aussi que le marché intérieur reste la cible principale pour 91 % des répondants, tandis que seuls 7 % commercent avec les États-Unis.
Ce sont justement ces entreprises qui exportent vers les États-Unis qui seront en toute évidence les plus affectées, comme le confirme Normand Riopel, maire de Champlain et ancien président du Conseil des Comtés unis de Prescott-Russell.
« C’est certain que dans Champlain, il y a une industrie majeure : une fonderie d’acier à L’Orignal. Cette industrie aura un impact majeur si les tarifs persistent », affirme-t-il.
Toutefois le maire Riopel relativise : « Il ne faut pas partir en peur. Même si ce sont des tarifs, je ne pense pas que les Américains demain matin vont arrêter d’acheter de l’acier. Ils ne peuvent pas construire une aciérie et produire la qualité d’acier qu’Ivaco produit », souligne-t-il.
Des attentes fortes face aux incertitudes
« Au niveau municipal, nous avons travaillé de manière proactive pour mieux comprendre comment ces pressions économiques peuvent affecter nos opérations et nos projets d’investissement à venir », ajoute M. Riopel, soulignant l’engagement à soutenir les entrepreneurs locaux.
De son côté, Yves Laviolette déclare : « Nous continuerons donc de suivre de près l’impact des tarifs sur notre région et nous demeurons déterminés à appuyer la SDCPR dans l’analyse des effets des modifications tarifaires et dans la proposition de solutions potentielles pour soutenir davantage la croissance et la compétitivité des entreprises de Prescott et Russell. »
Il reconnaît aussi que « la plupart des entrepreneurs craignent pour leur stabilité financière à long terme ».
À ce titre, le rapport précise que 61 % des entreprises affirment ne pas avoir vu leur rentabilité affectée significativement, mais que 45 % des répondants expriment une vision négative quant à leur planification à long terme.

Ainsi, face aux incertitudes, les entreprises réclament des actions concrètes : 50 % demandent l’expansion des accords de libre-échange, 35 % un meilleur accès aux canaux logistiques, et 20 % davantage de programmes d’aide.
« Les municipalités ne travaillent pas directement avec le fédéral. On travaille beaucoup avec le provincial. C’est au provincial, à M. Ford, de mettre de la pression sur le fédéral pour faire avancer les choses », rappelle le maire Riopel qui ne cache tout de même pas son indignation.
« Trump fait n’importe quoi. En imposant des tarifs, c’est certain que ça monte le coût. Un tarif, c’est une taxe cachée », tranche M. Riopel, résumant le sentiment d’incompréhension envers les politiques commerciales américaines et appelant à une réponse politique concertée et forte au profit des entreprises locales.